Article 20 (art. L. 731-2 et L. 731-3 du code rural et de la pêche maritime, art. 4 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale) - Financement de la branche vieillesse du régime des exploitants agricoles
Objet : Cet article a pour objet, d'une part, d'organiser la reprise d'une partie de la dette du régime des exploitants agricoles par la Cades, d'autre part, d'affecter de nouvelles ressources à la branche vieillesse de ce régime.
I - Le dispositif proposé
Le régime des exploitants agricoles connait des problèmes structurels de financement depuis de nombreuses années, notamment liés au déséquilibre démographique particulièrement fort de ce régime, le rapport entre cotisants et bénéficiaires étant d'environ un à trois.
Début 2005, le Ffipsa (fonds de financement des prestations sociales agricoles) a remplacé le Bapsa (budget annexe des prestations sociales agricoles) et la subvention d'équilibre automatique du budget de l'Etat qui permettait de compenser les déficits du régime agricole a disparu.
Les déficits se sont donc rapidement accumulés. Aussi fin 2008, plusieurs décisions ont été prises pour régler, partiellement du moins, les difficultés récurrentes de ce régime :
- l'Etat a repris 8 milliards de dette accumulée dans les comptes du Ffipsa et celui-ci a été supprimé ;
- la branche maladie du régime a été financièrement intégrée au régime général et on lui a affecté la totalité du produit de la taxe sur les véhicules de société, soit environ un milliard d'euros ;
- la caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA) a conservé la gestion de la branche vieillesse du régime.
Or, la branche vieillesse du régime affiche un résultat déficitaire qui va en se creusant : 1,1 milliard en 2008, 1,2 milliard en 2009, 1,3 milliard en 2010, 1,35 milliard en 2011 et, en prévision, 1,4 milliard en 2012.
De ce fait, le déficit cumulé de la branche devrait atteindre 3,8 milliards à la fin 2011 et, en l'absence de mesures nouvelles, 5,2 milliards à la fin 2012 .
Afin de financer ce déficit cumulé, la CCMSA a recours à un pool bancaire mené par le Crédit agricole qui lui permet d'emprunter les fonds nécessaires dans la limite fixée par la dernière loi de financement, à savoir 4,5 milliards d'euros.
Le présent article prévoit, dans son paragraphe I , une reprise partielle de cette dette accumulée. L'article 4 de l'ordonnance du 24 janvier 1996 relative à la dette sociale serait donc complété pour ajouter à la liste des dettes déjà reprises par la Cades la couverture des déficits 2009 et 2010 de la branche vieillesse du régime des exploitants agricoles, soit 2,5 milliards d'euros.
L'exposé des motifs du projet de loi indique que ce transfert se fait dans le respect des règles organiques relatives au remboursement de la dette sociale, dans la mesure où la Cades disposera d'un surcroît de recettes lui permettant de refinancer cette dette et donc de respecter son échéance de fin de vie prévisionnelle, soit 2025.
Ce surcroît de recettes est lié à deux mesures qui apporteraient 220 millions d'euros supplémentaires à la Cades :
- l'aménagement du régime d'imposition des plus-values immobilières voté dans la loi de finances rectificative du 19 septembre 2011, qui permet d'augmenter ses ressources de 147 millions ;
- la diminution de l'abattement pour frais professionnels des revenus salariaux soumis à la CSG et à la CRDS, prévue à l'article 12 ci-dessus, qui majore ses ressources de 73 millions.
Parallèlement, le paragraphe II du présent article accorde de nouvelles recettes à la branche vieillesse du régime des exploitants agricoles. Il prélève une fraction de 60,4 % du produit du droit sur les bières et les boissons non alcoolisées auparavant affectée à la Cnam au titre du financement de la branche maladie du régime des exploitants agricoles désormais financièrement intégrée au régime général.
Selon l'étude d'impact annexée au projet de loi, ce prélèvement peut être absorbé par la Cnam car celle-ci bénéficie par ailleurs d'un surcroît de recettes au titre de l'ensemble des mesures du projet de loi.
Pour la branche vieillesse du régime agricole, cela représentera un transfert de 230 millions d'euros .
S'y ajoutera une partie du produit de l'augmentation des droits sur les alcools prévue à l'article 16 ci-dessus. Pour le régime agricole, compte tenu des règles d'affectation actuelles non modifiées par le présent projet de loi, il s'agira de 170 millions de recettes supplémentaires .
Au total, ce sont donc 400 millions d'euros qui seront affectés en 2012 au régime vieillesse des exploitants agricoles, ce qui correspond à environ un tiers du besoin de financement de cette branche.
II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a modifié les articles L. 731-2 et L. 731-3 du code rural afin de simplifier les règles d'affectation du produit des droits sur les alcools aux branches maladie et vieillesse du régime des exploitants agricoles.
III - La position de la commission
Comme chaque année, votre commission déplore l'absence d'attribution de moyens suffisants pour équilibrer le régime des exploitants agricoles, alors qu'un consensus a toujours été acquis sur le recours à la solidarité nationale au profit de la population agricole.
Certes, un début de solution est proposé par cet article. Mais il n'est que partiel :
- la dette transférée à la Cades ne dépassera pas 2,5 milliards, ce qui laissera dans les comptes de la CCMSA 1,3 milliard de dette non financée à la fin de 2011 ;
- les nouvelles ressources affectées au régime vieillesse des exploitants agricoles s'élèveront à 400 millions, soit seulement un tiers du montant nécessaire à la résorption du déficit .
Le Gouvernement semble donc avoir simplement profité d'un accroissement mécanique des recettes de la Cades pour organiser un transfert partiel, à hauteur des possibilités ouvertes par la loi organique, de la dette de la CCMSA.
Votre commission ne peut se satisfaire d'une gestion aussi aléatoire du problème structurel du déficit du régime des exploitants agricoles.
Prenant néanmoins acte des mesures proposées par cet article, elle vous demande d'adopter cet article sans modification.