5. Depuis le début, une réaction insuffisante et trop tardive des Etats de la zone euro

La contagion s'explique par le fait que, depuis le début, les Etats de la zone euro ont réagi plutôt qu'agi , à chaque fois avec des mesures a minima , et en rendant publiques leurs divisions .

Chronologie de la crise de la dette dans la zone euro

Date

Marchés

Réaction de la zone euro

Année 2009

Début de l'ouverture des spreads entre Etats de la zone euro (encore faible à la fin de l'année)

11-févr-10

Déclaration des chefs d'Etat et de Gouvernement de l'UE soulignant que le Gouvernement grec n'a demandé aucun soutien financier

25-mars-10

Déclaration des chefs d'Etat et de Gouvernement de la zone euro dans laquelle ils se déclarent, « si nécessaire », « prêts à contribuer à des prêts bilatéraux coordonnés »

11-avr-10

Déclaration des chefs d'Etat et de Gouvernement de la zone euro fixant les grandes lignes de l'aide à la Grèce

02-mai-10

Déclaration des ministres de l'Eurogroupe précisant les modalités de l'aide à la Grèce

07-mai-10

Loi n° 2010-463 du 7 mai 2010 de finances rectificative pour 2010 : ouverture de 16,8 Mds € d'AE et de 3,9 Mds € de CP pour l'aide à la Grèce

10-mai-10

Annonce par le Conseil extraordinaire Affaires économiques et financières de la future mise en place du Mécanisme européen de stabilité financière (60 milliards d'euros) et du Fonds européen de stabilité financière (440 milliards d'euros) ; adoption par le Conseil du règlement instaurant le MESF

07-juin-10

Loi n° 2010-606 du 7 juin 2010 de finances rectificative pour 2010 : autorisation d'accorder la garantie de la France au FESF jusqu'à 111 Mds €

23-juil-10

Publication d'une première série de tests de résistance : 7 banques sur 91 échouent (5 caisses d'épargne espagnoles, 1 landesbank allemande et 1 banque grecque)

Fin 2010-début 2011

Les TI à 10 ans du Portugal sur le marché secondaire sont de l'ordre de 7 %, ceux de l'Irlande de 9 %, ceux de la Grèce de 13 %. Ceux de l'Espagne et de l'Italie passent brusquement d'environ 4 % à 5 %

01-févr-11

Premier prêt du FESF à l'Irlande. Le programme total (y compris les autres contributions) prévoit 35 Mds € pour recapitaliser le système bancaire, qui a pourtant passé avec succès les tests de résistance quelques mois plus tôt

11-mars-11

Conclusions des chefs d'Etat et de gouvernement de la zone euro : décision de porter la capacité effective de prêt du FESF à 440 Mds €, d'autoriser les interventions du FESF sur le marché primaire, et de réduire les taux du FESF (en principe égaux au coût de financement du FESF majoré de 200 points de base)

03-juin-11

Annonce par le président de l'Eurogroupe d' « un financement supplémentaire de la Grèce, en échange de conditions strictes »

22-juin-11

Premier prêt du FESF au Portugal

28-juin-11

Signature par la France de l'amendement apportant à l'accord-cadre relatif au FESF les trois modifications décidées le 11 mars

29-juin-11

Deuxième prêt du FESF au Portugal

01-juil-11

Les TI de l'Espagne et de l'Italie sur le marché secondaire sont de l'ordre de 6 %

11-juil-11

Signature par les ministres des finances de l'Eurogroupe du traité créant le futur Mécanisme européen de stabilité

13-juil-11

Dernière signature de l'amendement apportant à l'accord-cadre relatif au FESF les trois modifications décidées le 11 mars

15-juil-11

Publication d'une deuxième série de tests de résistance : 8 banques européennes sur 91 échouent (dont 5 espagnoles, 2 grecques et 1 autrichienne)

21-juil-11

Déclaration des chefs d'Etat et de gouvernement de la zone euro et des institutions de l'UE décidant de la deuxième réforme du FESF : prêts à titre de précaution, recapitalisation des établissements financiers par des prêts aux gouvernements, intervention sur le marché secondaire, garantie des titres des Etats sous programme en défaut sélectif pour maintenir leur éligibilité à la BCE, allongement de la maturité et nouvelle réduction des taux

25-juil-11

CAC 40 à 3800 points

29-juil-11

Loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011 de finances rectificative pour 2011 : augmentation de la garantie maximale de la France au FESF, portée de 111 à 159 Mds €

Début août

CAC 40 à 3600 points. Accélération de la baisse

05-août-11

Dégradation de la note des Etats-Unis par Standard & Poor's

07-août-11

Le président de la BCE annonce son intention d'acheter des titres de dette italienne et espagnole sur le marché secondaire

11-août-11

CAC 40 sous les 3000 points

7-sept-11

Arrêt de la Cour constitutionnelle allemande renforçant le pouvoir du Parlement sur la mise en oeuvre des plans de sauvetage

Échéances à venir

Échéances prévues

sept-11

Premiers échanges de dette grecque

?

Modification du traité relatif au MES pour transposer la réforme du FESF décidée le 21 juillet 2011

01-juil-13

Remplacement du FESF et du MESF par le MES

Échéances prévues mais retardées

?

Entrée en vigueur de la deuxième réforme du FESF (celle décidée le 21 juillet 2011)

?

Accord entre le Conseil et le Parlement européen sur la réforme du programme de stabilité (initialement prévu pour juin 2011)

Échéance probable

Prêts du FESF à Chypre

Réformes indispensables bien qu'actuellement non explicitement prévues  (pour rendre de « vrais » défauts possibles)

Recapitalisation des banques qui le nécessitent

Eventuelles réformes complémentaires du système bancaire

Possible scénario défavorable

Poursuite de l'extension de la crise de la dette au sein de la zone euro ; dégradation de la France par les agences de notation, réduisant les capacités de prêt du FESF

Grave récession de l'Europe du sud, obligeant les Etats de la zone euro à choisir entre la mutualisation ou la monétisation de l'émission des dettes d'une part, et l'éclatement de la zone euro d'autre part

Source : commission des finances

a) Des réponses a minima et toujours a posteriori

En 2010, et même au début de l'année 2011, la crise aurait peut-être pu être stoppée et la contagion évitée par l'adoption rapide des dispositifs actuels (FESF, MESF et engagement de la BCE d'acquérir des titres sur le marché secondaire). Cela aurait permis de montrer aux marchés que les Etats et la BCE ne se contentent pas de réagir passivement.

Au lieu de cela, les Etats et la BCE ont toujours eu « un coup de retard » sur les marchés :

- après l'opposition initiale de l'Allemagne et des adversaires d'une intervention du FMI, mise en place en mai 2010 d'un dispositif concernant la seule Grèce ;

- huit jours plus tard, alors que la crise s'était étendue au Portugal et à l'Irlande, annonce de la mise en place du dispositif « de droit commun » (FESF et MESF) - dans des circonstances qui n'ont pas donné l'impression d'une grande unité de la zone euro 2 ( * ) -, avec des taux prohibitifs qui auraient condamné les Etats bénéficiaires au défaut ;

- en mars 2011, puis en juillet 2011, annonce de réductions des taux des prêts du FESF ;

- en juillet et en août 2011, après que la crise s'était étendue à l'Espagne et à l'Italie, décision d'autoriser le FESF à intervenir sur le marché secondaire et à recapitaliser des banques - sans que cela soit accompagné d'une augmentation de ses moyens, à laquelle s'oppose publiquement l'Allemagne -, et annonce par la BCE de son intention d'acheter des titres de dette espagnole et italienne.


* 2 Selon l'économiste Elie Cohen, « La chronique qui a été faite des journées du 8 et 9 mai restera dans les annales comme un moment où l'Europe aura été sauvée grâce à l'action combinée du président Obama, du directeur du FMI, du président de la BCE et d'un président français menaçant de reconsidérer la participation de la France à la zone euro si rien n'était fait » (« Mais qu'arrive-t-il aux Allemands ? », Telos, 21 décembre 2010).

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