b) Un besoin de recapitalisation de plusieurs dizaines de milliards d'euros ?
Pour se faire une idée du besoin de recapitalisation des banques européennes, il paraît donc nécessaire de prendre en compte le risque souverain, c'est-à-dire en particulier de comptabiliser les créances souveraines selon leur valeur de marché, et de compléter les simulations par un objectif de ratio « core Tier 1 » plus élevé.
• L'agence d'information économique Thomson Reuters a appliqué aux données publiées le 15 juillet 2011 les décotes appliquées à la même date par le marché (sur la base du prix de marché des obligations à 5 ans) aux titres de dette souveraine des Etats du sud de la zone euro. Selon ses calculs 54 ( * ) , 27 banques sur 90 (six grecques, deux chypriotes, treize espagnoles, quatre portugaises, une autrichienne et une italienne) ne parviendraient pas alors à satisfaire le critère d'un ratio de capital « core Tier 1 » de 5 % . Il en découlerait un besoin de recapitalisation total de l'ordre de 25 milliards d'euros (soit environ 0,25 % du PIB de la zone euro).
Les banques françaises auraient, selon ces hypothèses, un ratio « core Tier 1 » supérieur à 5 %, de 6,3 % pour la Société générale, 6,6 % pour BPCE, 7,2 % pour BNP Paribas et 8,3 % pour le Crédit agricole (ce qui, sur les 90 banques testées, les placerait respectivement en 48 e , 44 e , 39 e et 26 e positions).
• Toutefois, toujours selon Thomson Reuters, si l'on fixe l'objectif de ratio « core Tier 1 » à 7 % (tout en maintenant les mêmes décotes sur les titres souverains), 49 banques sur 90 échouent au test, pour un besoin de recapitalisation total de 88 milliards d'euros (soit environ 1 % du PIB de la zone euro).
Dans le cas des banques françaises, il résulte des chiffres précédemment indiqués que, si BNP Paribas et le Crédit agricole auraient un ratio « core Tier 1 » supérieur à 7 % (avec respectivement 7,2 % et 8 %), tel ne serait pas le cas de la Société générale et de BPCE (avec respectivement 6,3 % et 6,6 %). Le besoin de recapitalisation des banques françaises serait alors de 5 milliards d'euros.
c) Une recapitalisation obligatoire à titre préventif ne semble pas politiquement possible
Mme Christine Lagarde, directrice générale du FMI, a recommandé le 27 août 2011 à Jackson Hole d'obliger certaines banques à se recapitaliser, au besoin en recourant au FESF 55 ( * ) .
Cette préconisation a été jugée inopportune par la France, l'Allemagne, la Commission européenne, la BCE et l'Autorité bancaire européenne.
De fait, si la zone euro disposait d'une gouvernance idéale, une telle recapitalisation préventive serait le moyen le plus sûr de rassurer les marchés, d'autant plus que les sommes en jeu semblent, comme on l'a indiqué, au maximum de l'ordre de 1 % du PIB de la zone euro. Toutefois il paraît difficile d'obtenir un consensus à ce sujet des 17 Etats membres de la zone.
* 54 Thomson Reuters a mis en ligne un « simulateur » permettant à chacun de faire ses propres simulations en fonction d'un jeu d'hypothèses ( http://graphics.thomsonreuters.com/11/07/BV_STRSTST0711_VF.html ). Les hypothèses retenues par défaut par cette agence sont une cible de ratio « core Tier 1 » de 5 %, et un « haircut » de 52,8 % pour la Grèce, 38,5 % pour l'Irlande, 33,3 % pour le Portugal, 8,6 % pour l'Espagne et 5,7 % pour l'Italie.
* 55 « Il est urgent de recapitaliser les banques. (...) La solution la plus efficiente serait une recapitalisation substantielle obligatoire, avec des fonds privés dans un premier temps, mais aussi des fonds publics si nécessaire. On pourrait faire appel au Fonds européen de stabilité financière ou à d'autres financements à l'échelle européenne pour recapitaliser directement les banques, ce qui permettrait d'éviter de mettre encore plus lourdement à contribution des Etats vulnérables » (texte figurant sur le site Internet du FMI).