4. La règle de gage des niches fiscales n'est pas respectée en 2010
a) 2010 constitue la dernière année d'application de la règle
L'article 11 de la loi n° 2009-135 du 9 février 2009 de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 prévoit une règle de « gage » des dépenses fiscales. Cette disposition n'est plus en vigueur à compter de 2011. Il est cependant intéressant de voir dans quelle mesure elle a été respectée en 2010. Cela permet en effet de se faire une idée des perspectives de respect d'une règle qui ne serait pas soumise au contrôle du Conseil constitutionnel.
Selon le I de l'article 11 précité, « Au titre de chaque année de la période [de programmation] , les créations ou extensions :
« 1° De dépenses fiscales ;
« 2° Ainsi que de réductions, exonérations ou abattements d'assiette s'appliquant aux cotisations et contributions de sécurité sociale affectées aux régimes obligatoires de base ou aux organismes concourant à leur financement, sont compensées par des suppressions ou diminutions de mesures relevant respectivement des 1° et 2°, pour un montant équivalent, selon les modalités précisées dans le rapport annexé à la présente loi . »
Comme votre rapporteur général a plusieurs fois eu l'occasion de le déplorer, le Gouvernement, confronté à la nécessité de rendre la règle conforme avec l'extension du taux réduit de TVA au secteur de la restauration, a choisi de considérer que la règle devait être respectée non année par année, mais en « fin de période », ce qui la vide de son sens.
Ainsi, lors du dépôt du projet de loi de finances pour 2010 , le Gouvernement soulignait que si les mesures adoptées du projet de loi de finances pour 2009 au projet de loi de finances pour 2010 avaient pour effet d'augmenter les dépenses fiscales de 2,2 milliards d'euros en 2010, en 2013 l'augmentation des dépenses fiscales ne serait plus que de 0,2 milliard d'euros. Cela venait en particulier de l'article 92 de la loi de finances pour 2009 (« demi-part veuves ») 20 ( * ) , qui ne devait rapporter que 0,1 milliard d'euros en 2010, mais 0,9 milliard d'euros en 2013.
b) Les mesures discrétionnaires augmentent les dépenses fiscales de 1,9 milliard d'euros en 2010
Après la prise en compte des dispositions postérieures au texte initial du projet de loi de finances pour 2010, la situation s'améliore légèrement en 2010 - l'augmentation des dépenses fiscales n'étant plus que de 1,9 milliard d'euros (contre 2,2 milliards) -, et nettement les années suivantes - les dépenses fiscales étant réduites de 3,6 milliards d'euros en 2013 (et n'augmentant donc plus de 0,2 milliard).
L'amélioration constatée en 2010 et les années suivantes provient notamment, de manière paradoxale, de la censure de la taxe carbone par le Conseil constitutionnel. En effet, le régime de la taxe carbone comprenait une dépense fiscale de 0,6 milliard d'euros , correspondant au coût des niches fiscales nouvelles créées en accompagnement de la création de cette taxe, au bénéfice des ménages ou des professions agricoles notamment.
L'amélioration prévue à partir de l'année 2011 résulte quant à elle de véritables mesures de réduction des dépenses fiscales 21 ( * ) .
Au total, en 2010, les mesures discrétionnaires augmenteraient les dépenses fiscales de 1,9 milliard d'euros ; cette augmentation aurait même été de 2,5 milliards d'euros si la taxe carbone n'avait pas été censurée par le Conseil constitutionnel.
La mise en oeuvre de la règle de « gage » des dépenses fiscales
(impact sur le solde par rapport à l'absence de la mesure, en milliards d'euros)
2010 |
2011 |
2012 |
2013 |
2014 |
|
Mesures proposées par le Gouvernement en PLF 2009 |
0,6 |
0,8 |
0,8 |
0,8 |
|
dont mesures agrocarburants |
0,6 |
0,8 |
1,1 |
1,1 |
|
dont autres mesures proposées en PLF 2009 |
0 |
0 |
-0,3 |
-0,3 |
|
Coût des amendements au PLF 2009 |
-0,3 |
-0,1 |
0,2 |
0,9 |
|
dont amendement mesure agricarburant |
-0,1 |
-0,1 |
-0,1 |
-0,1 |
|
dont amendement demi-part supplémentaire |
0,1 |
0,3 |
0,6 |
0,9 |
|
dont autres amendements |
-0,4 |
-0,3 |
-0,2 |
0,1 |
|
Coût des mesures nouvelles mises en place par d'autres lois |
-2,8 |
-2,5 |
-2,5 |
-2,4 |
|
dont loi outre-mer |
-0,3 |
-0,3 |
-0,4 |
-0,3 |
|
dont loi pour le logement |
-0,1 |
0 |
0 |
0,1 |
|
dont LFR 2008 et 2009 |
0 |
-0,1 |
-0,1 |
0 |
|
dont Loi de développement et de modernisation des services touristiques |
-3 |
-3 |
-3 |
-3 |
|
dont Loi généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion |
0,6 |
1 |
1 |
1 |
|
Mesures proposées par le Gouvernement en PLF 2010 |
0,3 |
0,5 |
0,5 |
0,5 |
|
dont impact de la suppression de la TP |
0,8 |
0,8 |
0,8 |
0,8 |
|
dont impact taxe carbone |
-0,6 |
-0,6 |
-0,6 |
-0,6 |
|
dont impact RSTA |
0,1 |
0,1 |
0,1 |
0 |
|
dont modification des modalités de taux réduit de TVA sur travaux de rénovation |
0,1 |
0,1 |
0,1 |
0,1 |
|
dont verdissement du CI TEPA |
0 |
0 |
0,1 |
0,2 |
|
dont Autres variations |
-0,1 |
0 |
0,1 |
0,1 |
|
Solde avec texte initial du PLF 2010 |
-2,2 |
-1,3 |
-1 |
-0,2 |
|
Amendements du PLF 2010 |
0,5 |
0,6 |
0,4 |
0,5 |
0,7 |
dont mesure de relance CIR 2010 et contrecoup 2011-2014 |
0 |
0 |
0 |
0 |
0 |
dont mesure relance PTZ |
0 |
0 |
0 |
0 |
0 |
dont fiscalisation des indemnités AT/MP |
0 |
0,2 |
0,2 |
0,2 |
0,2 |
dont mesure PPE |
-0,1 |
-0,1 |
-0,1 |
0 |
0 |
dont impact de la suppression de la contribution carbone |
0,6 |
0,6 |
0,6 |
0,6 |
0,6 |
dont réduction d'impôt numéraire |
0 |
0 |
-0,2 |
-0,2 |
0 |
LFR 2009 |
0 |
0,4 |
0,4 |
0,5 |
0 |
dont réduction CIDD |
0 |
0,5 |
0,5 |
0,5 |
0 |
Autres lois |
-0,2 |
0 |
0 |
0 |
0 |
Dont loi de modernisation agricole |
-0,2 |
0 |
0 |
0 |
0 |
PLF 2011 |
0 |
0,5 |
2,1 |
2,9 |
2,7 |
dont suppression du crédit d'impôt sur les dividendes distribués |
0 |
0,6 |
0,6 |
0,6 |
0,6 |
dont rencentrage du crédit d'impôt développement durable |
0 |
0,2 |
0,6 |
0,8 |
0 |
dont mesure transversale de réduction de dépense fiscale("rabot") |
0 |
0 |
0,4 |
0,4 |
0,4 |
dont remboursement immédiat des créances CIR aux PME |
0 |
-0,3 |
-0,3 |
-0,2 |
0 |
dont réforme de l'accession à la propriété |
0 |
0 |
0,6 |
1,1 |
1,6 |
dont réforme du dispositif d'investissement dans les DOM |
0 |
0 |
0,3 |
0,2 |
0,2 |
dont réduction d'impôt au titre des investissements dans les PME |
0 |
0 |
0,1 |
0,1 |
0,1 |
dont réduction d'impôt au titre de la souscription de parts de FCPI et FIP |
0 |
0 |
-0,2 |
-0,2 |
-0,2 |
Solde global* |
-1,9 |
0,2 |
2 |
3,6 |
3,4 |
Solde global hors impact de la suppression de la contribution carbone* |
-2,5 |
-0,4 |
1,4 |
3 |
2,8 |
Lecture : un signe négatif (respectivement positif) représente un coût (respectivement une économie) pour le budget de l'Etat.
Source : Ministère de l'économie, des finances et de l'emploi, sauf (*) calculs de la commission des finances
* 20 Cette disposition, insérée à l'initiative de nos collègues députés Gilles Carrez et Charles de Courson, a recentré la majoration de quotient familial sur les contribuables qui ont supporté, à titre exclusif ou principal, la charge d'un enfant pendant au moins cinq années au cours desquelles ils vivaient seuls.
* 21 Correspondant essentiellement :
- à partir de 2011, à la réduction du crédit d'impôt développement durable par la loi de finances rectificative de décembre 2009 et la suppression, par la loi de finances initiale pour 2011, du crédit d'impôt sur les dividendes distribués ;
- à partir de 2012, au recentrage du crédit d'impôt développement durable, au « rabot » et à la réforme de l'accession à la propriété, résultant de la loi de finances initiale pour 2011.