Rapport n° 153 (2010-2011) de M. André DULAIT , fait au nom de la commission des affaires étrangères, déposé le 7 décembre 2010

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N° 153

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2010-2011

Enregistré à la Présidence du Sénat le 7 décembre 2010

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, relatif à la reconversion des militaires ,

Par M. André DULAIT,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Josselin de Rohan , président ; MM. Jacques Blanc, Didier Boulaud, Jean-Louis Carrère, Jean-Pierre Chevènement, Robert del Picchia, Jean François-Poncet, Robert Hue, Joseph Kergueris , vice-présidents ; Mmes Monique Cerisier-ben Guiga, Joëlle Garriaud-Maylam, MM. André Trillard, André Vantomme, Mme Dominique Voynet , secrétaires ; MM. Jean-Etienne Antoinette, Robert Badinter, Jean-Michel Baylet, René Beaumont, Jean-Pierre Bel, Jacques Berthou, Jean Besson, Michel Billout, Didier Borotra, Michel Boutant, Christian Cambon, Marcel-Pierre Cléach, Raymond Couderc, Mme Michelle Demessine, M. André Dulait, Mmes Bernadette Dupont, Josette Durrieu, MM. Jean Faure, Jean-Paul Fournier, Mme Gisèle Gautier, M. Jacques Gautier, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Noël Guérini, Michel Guerry, Robert Laufoaulu, Simon Loueckhote, Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Rachel Mazuir, Louis Mermaz, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Jean Milhau, Charles Pasqua, Philippe Paul, Xavier Pintat, Bernard Piras, Christian Poncelet, Yves Pozzo di  Borgo, Jean-Pierre Raffarin, Daniel Reiner, Roger Romani, Mme Catherine Tasca.

Voir le(s) numéro(s) :

Assemblée nationale ( 13 ème législ.) :

2212 , 2436 et T.A. 509

Sénat :

611 (2009-2010) et 154 (2010-2011)

EXPOSÉ GÉNÉRAL - LA RECONVERSION DES MILITAIRES : UNE NÉCESSITÉ LIÉE À LA SPÉCIFITÉ DE LA CONDITION MILITAIRE

Par son impact sur la qualité du recrutement et la fidélisation des militaires engagés dans nos armées dans des carrières de courte durée, la performance de ces dernières en matière de reconversion joue un rôle important dans le bon fonctionnement de notre outil de défense.

C'est pourquoi les armées ont institué un dispositif de reconversion étendu qui enregistre, dans l'ensemble, des résultats positifs. Ce dispositif en cours de rationalisation est aujourd'hui très sollicité par les conséquences de la réduction du format des armées

I. UN DÉFI POUR LA BONNE RÉUSSITE DE LA GRANDE MANoeUVRE DES RESSOURCES HUMAINES.

A. LA RECONVERSION : UNE NÉCESSITÉ STRUCTURELLE POUR DES CARRIÈRES MILITAIRES COURTES

La carrière militaire se caractérise à la fois par des contraintes propres, notamment en termes de risques et de disponibilité, et par sa relative brièveté par rapport à celles de la fonction publique puisque des militaires qui quittent les armées ont moins de 15 ans de service.

Ces carrières sont particulièrement courtes chez les militaires du rang et les jeunes sous-officiers. L'ancienneté moyenne des militaires du rang quittant le service est en moyenne de 4 ans.

Cette caractéristique n'est pas nouvelle. Elle correspond aux besoins des armées en personnel jeune, au meilleur de leur aptitude physique, et à un déroulement de carrière sélectif. Elle explique que près de 35 000 militaires quittent chaque année les armées.

Ces carrières courtes ont conduit à mettre en place un dispositif spécifique de reconversion, qui s'est enrichi au fil du temps.

B. UN ENJEU ACCRU PAR LA RÉDUCTION DU FORMAT DES ARMÉES

L'importance de la reconversion s'est accrue avec l'adoption par la loi relative à la programmation militaire pour les années 2009 à 2014, d'un nouveau format des armées.

Ce nouveau format découle des réflexions du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale qui prévoyait que : « la prise en compte des nouveaux contrats opérationnels assignés aux armées d'une part, de l'effort de réduction des soutiens et de l'administration d'autre part, conduit à ramener l'effectif global des armées de 271 000 civils et militaires en 2008 à 225 000 en 2014-2015. L'ensemble de cette déflation sera réalisé sur une période de six à sept années».

L'adoption de ce nouveau format conduit mécaniquement à un accroissement sensible des départs.

Pour mener à bien la diminution du plafond d'emplois de la mission Défense, le ministère de la défense utilise en effet 3 leviers principaux :

- la régulation des recrutements et des renouvellements de contrats (4 000 militaires et 1 250 civils par an) ;

- la mobilité au sein de la fonction publique (1 100 militaires et 350 civils par an) ;

- les incitations financières au départ (1 200 militaires et 500 civils, dont 350 ouvriers d'État, par an).

Le flux de départs des armées s'est élevé, en moyenne, chaque année depuis cinq ans, à plus de 30 000 personnes.

Comme on le voit, ce nombre tend à augmenter, puisqu'il est passé de 28 728 en 2005 à 34 696 en 2009.

Évolution du flux global des départs (toutes catégories confondues)

Années

Nombre de départs

Année A/A-1

2005

28 728

+ 2,0 %

2006

30 712

+ 6,9 %

2007

30 944

+ 0,8 %

2008

33 604

+ 8,6  %

2009

34 696

+ 3,2 %

Source : ministère de la défense

Et ce, d'autant que ces flux sont appelés à s'accroître avec la révision du format des armées et la suppression de 54 000 postes prévues d'ici à 2014 par la loi de programmation militaire.

Source : ministère de la défense

C. UN PROCESSUS QUI DOIT S'ADAPTER À DES PROFILS VARIÉS

Les difficultés auxquelles peuvent être confrontées les armées en matière de reconversion sont, en outre, accrues par l'extrême diversité des profils.

En 2009, les militaires quittant le service comportaient 19 332 militaires du rang, 12 784 sous-officiers et 2 580 officiers.

Évolution des départs et des ayants droit par catégorie de personnel
(défense + gendarmerie)

Officiers

Sous-officiers

Militaires du rang

Années

Nombre départs

Nombre départs

Nombre départs

2005

1 589

8 962

18 177

2006

1 778

8 337

20 597

2007

2 115

9 474

19 355

2008

2 318

9 941

21 345

2009

2 580

12 784

19 332

Évolution

+ 11,3 %

+ 28,5 %

- 9,4 %

Si les départs concernent principalement les militaires de l'armée de terre (19 261 en 2009), ils touchent également un nombre important de gendarmes (6 908), de personnels de l'armée de l'air (4 330) et de marins (3 309).

On observe, en outre, de fortes disparités selon les âges. Ainsi, les militaires du rang quittent en moyenne les armées vers 25 ans, les sous-officiers vers 40 ans et les officiers vers 41 ans dans la marine, ou 45 ans dans les armées de l'air ou de terre.

Ces différences d'âge recouvrent des formations et expériences fort diverses selon les catégories, dont la chaîne de reconversion doit tenir compte.

Répartition des départs en 2009 par armée et par catégorie

Officiers

Sous-officiers

Militaires du rang

Total

Rappel 2008

Année A/A-1

Terre

1 421

5 541

12 299

19 261

16 886

+ 14,0 %

Marine

290

1 694

1 325

3 309

3 803

- 12,9 %

Air

341

2 190

1 799

4 330

4 891

- 11,5 %

Gendarmerie

166

3 037

3 705

6 908

7 000

- 1,3 %

SSA

245

304

100

649

676

- 3,9 %

SEA

8

18

104

130

174

- 25,2 %

DGA

109

0

0

109

174

- 37,3 %

TOTAL

2 580

12 784

19 332

34 696

33 604

+ 3,2 %

Rappel 2008

2 318

9 941

21 345

33 604

Source : ministère de la défense.

Ces disparités se retrouvent dans les statistiques de chômage qui sont sensiblement différentes selon les catégories, aussi bien au niveau du taux que de la durée.

Taux de chômage des militaires de l'armée de terre après leur départ

a / RDC 1 an

OFF

SOF

MDR

Départ en 2009 *

819

3148

13081

Chômeurs RDC en 2009 **

65

287

2467

Taux de chômage

7,94%

9,12%

18,86%

b / RDC 5 ans

OFF

SOF

MDR

Départ en 2005 *

720

2674

10257

Chômeurs RDC en 2005 **

3

5

36

Taux de chômage

0,42%

0,19%

0,35%

* Source bilan social

** Source fichier chômeurs indemnisés au 31/07/2010

Durée moyenne d'indemnisation en jours

OFF

SOF

MDR

Armée de terre

347 j

308 j

321 j

Armée de l'air

290 j

288 j

318 j

Marine

245 j

287 j

314 j

D. UN ENJEU POUR LE RECRUTEMENT ET LA FIDÉLISATION DES MILITAIRES

Les armées jouent depuis l'origine des temps un rôle social dans l'insertion des jeunes dans la société. Le passage par les armées est réputé donner une discipline et une rigueur propres à favoriser la reconversion de ses membres. Grâce à cette image collective largement fondée, les armées ont été longtemps considérées non seulement comme une carrière possible, voire une vocation, mais également comme un sas ou un tremplin vers l'entrée dans la vie active, en particulier pour des jeunes qui n'auraient pas encore trouvé un métier correspondant à leurs aspirations et aptitudes.

Cette image d'un tremplin vers la vie active constitue un des attraits des armées qui favorise leur recrutement.

Même pour ceux qui souhaiteraient s'engager dans l'armée en désirant y rester le plus longtemps possible, les carrières étant de plus en plus courtes et sélectives, les performances des armées en matière de reconversion sont devenues, de fait, un critère important dans le choix d'embrasser ou non la carrière militaire.

Enfin, dans cette période de restructuration de notre outil de défense qui sollicite très fortement les hommes, savoir qu'à l'issue de leur contrat, les militaires, et en particulier les contractuels, trouveront un métier et pourront sans difficulté entamer une nouvelle carrière est un élément important de la fidélisation des hommes et de la durée de leur engagement.

Or, aussi bien en matière de recrutement qu'en matière de fidélisation, la situation des armées n'est plus aussi satisfaisante qu'elle a pu l'être.

Les récentes analyses démontrent une baisse sensible du nombre de candidats, qui s'est accélérée depuis 2008 (- 13,5% entre 2007 et 2008).

Cette diminution concerne principalement les sous-officiers et les militaires du rang. Cette situation est préoccupante pour l'armée de terre puisque le nombre de candidats par poste n'excède pas 1,6.

Enfin, en dépit de la diminution du format global des forces, le nombre de postes à pourvoir est, quant à lui, en hausse chez les militaires du rang (+ 6,8 %) et les sous-officiers (+ 4,1 %), ce qui témoigne bien d'une forte tension sur le renouvellement des contrats.

Il faut souligner que, depuis la professionnalisation, la fidélisation des emplois d'exécution revêt ainsi un caractère important au regard des savoir-faire nécessaires à la mise en oeuvre des nouveaux matériels.

Ce turn-over accru nuit à la qualité de notre outil de défense. Il est synonyme d'un coût plus élevé pour le recrutement et la formation. Les solutions à cette situation concernent tous les aspects de la gestion des ressources humaines, du recrutement à la reconversion, en passant par la gestion des hommes.

La montée en puissance d'un dispositif de reconversion performant doit pouvoir apporter sa contribution. Il sera aidé en cela par la qualité de la formation prodiguée par les armées.

E. UN ENJEU FINANCIER CONSIDÉRABLE

Les armées ont en outre un intérêt financier direct à l'efficacité des dispositifs de reconversion. Le ministère de la défense assume, en effet, directement le coût du chômage des militaires non reconvertis.

Or, ce coût, qui s'est élevé à 110 millions d'euros en 2009 -contre 85,8 millions en 2008 et 75,5 millions en 2004-, ne cesse de s'accroître.

Au cours des deux dernières années, du fait essentiellement de la crise économique, le nombre de chômeurs pris en charge par les armées a, en effet, fortement augmenté, passant de 8 214 en 2008 à 9 689 en 2009.

On note que la majorité d'entre eux ont quitté les armées entre 4 et 7 ans de service et que 25 % des militaires du rang connaissent une situation de chômage dans l'année suivant leur départ des armées.

Évolution du coût du chômage (gendarmerie comprise, sauf en 2009)

Année

2004

2005

2006

2007

2008

2009

Nombre

8 970

9 061

8 825

8 170

8 214

9 689

Coût en euros

75 517 705

84 669 329

81 416 528

82 069 816

85 760 795

110 244 411

Source : ministère de la défense.

F. UNE EXIGENCE DE COHÉRENCE DANS UNE PÉRIODE DE CHÔMAGE ÉLEVÉE

Dans un contexte de chômage structurel élevé, le dispositif de reconversion doit permettre une réinsertion rapide, durable et de qualité des militaires dans la vie civile.

La réduction du format des armées était nécessaire. La modernisation de nos armées passe par des effectifs resserrés, mieux équipés, plus entraînés. L'adaptation des ressources humaines constitue de ce fait le pivot de la loi de programmation : il s'agit, en outre, de tirer les conséquences de la réorganisation des soutiens, afin, d'une part, d'améliorer la condition militaire et, d'autre part, de dégager des marges de manoeuvre indispensables au profit des équipements.

Mais cet objectif ne doit pas nous faire perdre de vue l'objectif de réduction du chômage qui constitue une priorité des pouvoirs publics. C'est pourquoi la qualité de l'outil de reconversion des armées est un élément de cohérence de la politique du gouvernement.

Cette exigence ne cessera probablement de s'accroître à l'avenir, compte tenu de l'accélération des mutations enregistrées au cours des dernières années sur le marché du travail et de la montée du chômage.

C'est précisément pour répondre à cette situation que le présent projet de loi tend à assouplir et à élargir les possibilités actuelles du congé de reconversion.

Évolution du taux de chômage français

Source : INSEE

G. UNE POLITIQUE QUI DOIT CONCILIER LES ASPIRATIONS DES INDIVIDUS ET LES BESOINS DES ARMÉES

Les armées ni ne recrutent, ni ne forment pour reconvertir.

Les armées recrutent et forment les soldats pour accomplir les missions qui leur sont confiées.

Il faut donc trouver un juste équilibre entre la nécessité de rentabiliser les efforts consentis en matière de recrutement et en matière de formation des soldats et celle de les préparer à leur reconversion et à une seconde carrière.

Il faut, en d'autres termes, veiller à ce que les efforts faits pour ceux qui partent ne soient pas supérieurs à ceux qui sont faits pour ceux qui restent.

C'est particulièrement vrai dans un contexte de turn over accru.

II. UN DISPOSITIF DE RECONVERSION EN COURS DE RATIONALISATION

Le système de reconversion des militaires est caractérisé par un régime spécifique, des outils nombreux et des structures diverses, en cours de rationalisation.

A. UN RÉGIME SPÉCIFIQUE, ADAPTÉ À LA PARTICULARITÉ DES CARRIÈRES DES MILITAIRES

Depuis 1962, la reconversion des militaires a fait l'objet de diverses aides, coordonnées, au niveau ministériel, par la mission pour la mobilité professionnelle et, au niveau des associations, par l'association pour la reconversion civile des officiers et des sous-officiers (ARCO).

En 1970, a été créé le dispositif dit « 70-2 », tendant à faciliter parallèlement l'accès à la fonction publique. La suppression de la conscription, à partir de 1996, et la professionnalisation des armées ont conduit à faire de la reconversion du personnel militaire une priorité.

Chaque arme et service a développé une structure de reconversion avec un échelon central et des échelons locaux. Le ministère a également conclu des conventions avec des grandes entreprises pour favoriser la reconversion.

Actuellement, tout militaire ayant au moins quatre années de service effectif peut demander à bénéficier d'une formation professionnelle ou d'un accompagnement vers un emploi ainsi que d'un congé de reconversion.

Les frais de formation sont pris en charge en partie ou en totalité par le ministère de la défense, après validation et agrément d'un projet professionnel.

Ainsi, sur près de 35 000 militaires quittant les armées chaque année, 22 379, soit 65 % des départs, peuvent demander à bénéficier de l'ensemble du dispositif de reconversion.

Ces « ayants-droit » ont connu une croissance très soutenue ces dernières années.

Évolution du flux global des départs et des ayants droit (toutes catégories confondues)

Années

Nombre de départs

Année A/A-1

Ayants droit

Ayants droit/
nombre de départ

2005

28 728

+ 2,0 %

16 651

58,0 %

2006

30 712

+ 6,9 %

17 980

58,5 %

2007

30 944

+ 0,8 %

19 069

61,6 %

2008

33 604

+ 8,6  %

20 547

61,1 %

2009

34 696

+ 3,2 %

22 379

64,5 %

Source : ministère de la défense

Parmi les 22 379 « ayants-droit », 15 348 y ont eu effectivement recours en 2009. Plus de 21 300 prestations d'orientation et d'accompagnement ont été accordées l'an dernier, recouvrant une vingtaine de catégories différentes.

Près de 858 professionnels du ministère sont employés à cet effet pour un budget « reconversion », en 2009, de 50 millions d'euros.

Évolution des dépenses de reconversion depuis 2004.

Années

Masse salariale des personnels de la chaîne de reconversion

Soutien du dispositif

Prestations de reconversion

Investissements du CMFP *

Total

2004

33,35

1,52

9,98

0,45

45,3

2005

32

1,65

7,93

0,2

41,78

2006

30,9

1,56

12,57

0,21

45,24

2007

32,16

1,72

15,5

0,36

49,74

2008

32,51

1,32

17,93

0,5

52,26

2009

33,9

1,87

13,9

0,42

50,09

2010 **

32,8

2,1

17,5

0,48

52,88

2011 ***

32,8

3,5

19,85

0,33

57,78

Les données antérieures à 2009 proviennent de la concaténation des données d'armées.

* Centre militaire de formation professionnelle

** Dépenses prévisionnelles au 31/12/2010

*** Dotation PLF

B. DES OUTILS NOMBREUX

Sur les 21 357 prestations accordées en 2009, près de 11 700 concernent l'orientation, environ 4 500 une formation professionnelle et 5 200 un accompagnement direct vers l'emploi.

Les prestations d'orientation peuvent être individuelles ou collectives et porter sur un entretien bilan orientation (EBO), un bilan individuel de compétences (BIC) ou bien une session bilan projet (SBP).

La formation professionnelle, qui peut faire l'objet d'un congé de reconversion, consiste en un stage de formation, une période de formation gratuite en entreprise (PFGE), une validation des acquis de l'expérience (VAE) ou des cycles d'enseignement.

En termes d'accompagnement vers l'emploi, sept prestations principales sont proposées -pouvant également donner lieu à un congé de reconversion- allant de sessions de techniques de recherche d'emploi (STRE) à l'accompagnement vers l'emploi des cadres (AEC), en passant par des périodes d'adaptation en entreprise (PAE) ou un parcours individualisé du créateur ou repreneur d'entreprise (PIC).

L'ensemble du parcours de reconversion prend généralement de un à deux ans.

En 2009, 4 677 congés de reconversion ont été accordés, pour une durée moyenne de 4 mois et 16 jours. La plupart des demandes de congé sont généralement satisfaites.

Années

Nombre de congés de reconversion

Nombre de départs

Congés de reconversion/Nombre de départs

Ayants-droit

Congés de reconversion/Ayants-droit

2004

3 426

28 108

12,2 %

17 333

19,8 %

2005

3 359

28 728

11,7 %

16 651

20,2 %

2006

4 333

30 712

14,1 %

17 980

24,1 %

2007

4 086

30 944

13,2 %

19 069

21,4 %

2008

5 105

33 604

15,2 %

20 547

24,8 %

2009

4 677

34 696

13,5 %

22 379

18,8 %

À ces prestations s'ajoutent, par ailleurs, diverses indemnités, telles que l'indemnité d'accompagnement de la reconversion, l'indemnité spéciale de préparation de la reconversion, qui compense, pour la période des restructurations (2009-2014), la perte des primes de qualification pour les militaires placés en congé de reconversion -ou le pécule d'incitation à une seconde carrière, spécifique à la période des restructurations.

C. DES STRUCTURES DIVERSES, EN COURS DE RATIONALISATION

La création de l'entité « Défense Mobilité », par arrêté du 10 juin 2009, a permis de rationaliser et de regrouper les structures locales de reconversion, éclatées jusqu'ici dans les différentes armées.

La chaîne de reconversion constituée par Défense Mobilité est composée de trois échelons principaux. L'échelon supérieur est l'agence de reconversion de la défense (ARD), qui est un service à compétence nationale, qualifiée pour l'ensemble des armées et dotée d'un budget opérationnel de programme (BOP).

Mise en place le 6 mars 2009, l'ARD a une fonction de conception, de pilotage et d'évaluation des dix pôles intermédiaires Défense Mobilité (PDM), situés à Bordeaux, Brest, Lille, Lyon, Marseille, Metz, Paris, Rennes, Toulon et Toulouse, offrant un « plateau de compétences » polyvalent. L'échelon inférieur est constitué d'une antenne par future base de défense, soit, à terme, environ 78 entités, les structures de reconversion antérieures perdurant jusqu'à la mise en place effective des bases.

Les antennes, qui comportent des conseillers en emploi et des chargés de relations entreprises, sont les interlocuteurs privilégiés des militaires souhaitant se reconvertir. Cette réforme permettra de passer de près de 200 structures à environ 80.

Elle s'accompagne corollairement d'une réduction des effectifs, qui sont actuellement de 680, contre 861 à l'origine et 515 prévus avec l'achèvement de la mise en place des nouvelles bases.

D. DES RÉSULTATS ENCOURAGEANTS

Le taux de reconversion des militaires, c'est-à-dire la part de ceux qui ont trouvé un emploi après leur départ des armées, s'est élevé à 83 % en 2009 et a concerné 17 618 personnes.

Ce taux correspond au nombre de militaires non indemnisés chômage (17 618) rapporté au vivier des partants utiles de l'année, qu'ils aient ou non bénéficié d'une aide.

Le calcul du volume de départs utiles est effectué sur la base de l'ensemble des partants de l'année diminué des départs du personnel en période probatoire, des changements d'armée, des déserteurs, des décès et des limites d'âge. Cette notion, nouvelle en 2009, permet de cerner le volume des candidats potentiels à l'emploi.

Le taux de reconversion des militaires

Armée de Terre

Marine

Armée de l'Air

Total

Vivier des candidats à la reconversion (A) (départs utiles)

14 183

3 150

4 008

21 341

Chômeurs ayant quitté en 2009 (B)

2 627

555*

541*

3 723

Retour à l'emploi (C = A - B)

11 556

2 595

3 467

17 618

Taux de reconversion (C/A)

81%

82%

87%

83%

* répartitions annuelles de l'armée de terre appliquées aux chiffres des autres armées.

Le taux de reclassement , qui mesure le nombre de militaires suivis par Défense mobilité, « reclassés » dans le secteur privé dans l'année, par rapport au nombre de ceux ayant quitté le ministère de la défense, a été de 63 % .

Nombre de militaires reclassés dans le secteur privé

2004

2005

2006

2007

2008

2009

Armée de Terre

OFF

190

151

167

132

120

334

SOF

911

698

678

642

856

1155

MDR

1073

914

1306

1608

3152

3198

Marine

OFF

71

88

94

114

115

144

SOF

700

487

529

565

622

759

MDR

51

56

55

80

141

208

Armée de l'Air

OFF

56

91

142

151

161

145

SOF

469

565

739

885

1152

1131

MDR

119

161

411

616

686

613

Formations rattachées

(hors gendarmerie)

-

-

-

-

72

50

Totaux

4324

3973

5217

5915

7077

7737

Le nombre de reclassés en 2009 (7 737) augmente par rapport à 2008 (7 077) de 10 %. Cette progression concerne essentiellement les officiers et les sous-officiers, davantage qualifiés et donc recherchés par les employeurs potentiels.

Taux de reclassement

2004

2005

2006

2007

2008

2009*

Taux de reclassement privé

56 %

56 %

60 %

61 %

63 %

63 %

* hors gendarmerie

Le taux de reclassement, en secteur privé, des militaires toutes catégories de plus de 4ans de service est de 63 %. Ce taux est stable par rapport à 2008 et en augmentation de 2 points par rapport à 2007, malgré la crise économique et l'augmentation du nombre de chômeurs.

Ce ratio de reclassement est inférieur au ratio de reconversion, dans la mesure où il ne comptabilise pas les militaires ayant trouvé un emploi par eux-mêmes, sans recourir au dispositif de reconversion. Il est globalement satisfaisant.

D'une part, car il montre que le ministère a été en mesure de « reclasser », pour une année donnée, près des deux tiers des personnes ayant eu recours à ses services. D'autre part, dans la mesure où il enregistre une progression constante au cours des six dernières années, passant de 55 % en 2004 à 60 % en 2006 et à 63 % en 2008 et 2009, il témoigne des progrès effectués dans le domaine.

Si l'on intègre le reclassement dans le secteur public, ce taux atteint 69 % en 2009. S'il est élevé pour les officiers (de 70 % dans l'armée de terre à 75 % dans la marine), il est moyen pour les militaires du rang ayant plus de 4 ans de services (55 %) et limité pour ceux de moins de 4 ans (35 % en moyenne et 27 % pour l'armée de terre).

On observe que l'accès aux fonctions publiques a connu une forte augmentation en 2009, passant de 1 043 en 2007 et 1 251 en 2008 à 1 935 militaires en 2009.

Cette évolution est due notamment à l'ouverture par le ministère de la défense d'un volume de postes important (500) dans le cadre de l'article L 4139-2. On peut noter que 2 sessions pour la fonction publique d'Etat ont eu lieu en 2009 mais une seule en 2010.

Concernant les emplois réservés, une nouvelle procédure a été mise en oeuvre à partir du deuxième semestre 2009 au titre de la loi n° 2008-492 du 26 mai 2008 et du décret n° 2009-629 du 5 juin 2009.

Les autres procédures, les détachements-intégrations au titre de l'article L 4138-8 (220 en 2009) et les recrutements sous statut contractuel (199) sont comptabilisés seulement depuis 2009.

On constate cependant un ralentissement en 2010 des détachements-intégrations, les décrets d'application relatifs à la loi mobilité et parcours professionnels n'étant pas encore parus. En revanche, l'accès aux fonctions publiques par le biais de contrats de droit public est en très forte augmentation.

Malgré les progrès, la mobilité vers la fonction publique n'est pas satisfaisante; seul un peu plus de la moitié des objectifs a été atteint. Les transferts vers la fonction publique d'Etat sont inférieurs aux objectifs tant au sein du ministère de la défense que vers les autres ministères (426 pour un objectif de 900), car la mise en oeuvre des RGPP conduit les autres administrations à réduire leur recrutement et la population est parfois en inadéquation avec leurs besoins.

Les transferts vers les fonctions hospitalières et territoriales sont également décevants (1/3 des objectifs réalisés).

Enfin, pour ce qui concerne les emplois réservés, seul ¼ de l'objectif est atteint.

Malgré cela, la situation, au total, en 2009, peut être considérée comme satisfaisante ; 9 672 militaires ont accédé à l'emploi , dont 1 935 dans les fonctions publiques et 7 737 dans le secteur privé. Parmi ceux-ci, 1 411 ont bénéficié d'un partenariat entre le ministère de la défense et les entreprises.

Les candidats souhaitant une aide à la reconversion s'inscrivent en moyenne entre 12 et 18 mois avant leur départ. D'autres peuvent avoir quitté le service depuis 2009, voire 2008, et ne s'inscrire que deux ou trois années après leur radiation des cadres ou des contrôles. Il en est de même pour les militaires reclassés.

Au cours du 1 er semestre 2010, les inscriptions dans un parcours de reconversion ont progressé de 15 % par rapport à la même période de 2009. Le nombre des reclassements dans le secteur privé est en augmentation de 10 %. Par ailleurs, 1 114 candidats ont accédé à un emploi dans une des fonctions publiques.

Cette hausse des demandes de reconversion, liée aux premiers effets des restructurations engagées au sein du ministère sur la période 2010-2015, avait été anticipée par « Défense mobilité » et les moyens qui lui ont été alloués devraient permettre de répondre aux flux de départs des armées ainsi qu'aux attentes des candidats.

III. UN PROJET TECHNIQUE TENDANT À AMÉLIORER L'EFFICACITÉ DU RECLASSEMENT DES MILITAIRES

Dans ce contexte, le projet de loi de portée limitée tend à améliorer à la marge les outils juridiques et statutaires destinés à faciliter la poursuite de l'activité professionnelle des militaires qui quittent l'institution. Il comporte des dispositions sur deux mesures statutaires, auxquelles s'ajoutera une troisième mesure, à savoir le bilan professionnel de carrière, qui ne revêt pas un caractère législatif.

L'article 1 er a pour objet d'assouplir les règles du congé de reconversion. Afin d'autoriser les militaires à suivre une formation segmentée dans le temps, le projet de loi prévoit que le congé de reconversion est fractionnable par journée, dans la limite de cent vingt jours ouvrés cumulés, contre six mois consécutifs actuellement. Les volontaires de moins de quatre ans de service actif bénéficient du même dispositif, limité à vingt jours.

Afin de conserver une certaine visibilité au gestionnaire, le militaire qui bénéficie de ce dispositif sera radié des cadres ou des contrôles, soit à l'issue d'un congé de reconversion d'une durée cumulée de cent vingt jours ouvrés, soit au plus tard deux ans après l'utilisation du quarantième jour du congé de reconversion, soit à l'expiration du congé complémentaire de reconversion.

L'article 2 crée une nouvelle position statutaire d'activité : le congé pour création d'entreprise.

Cette mesure a pour objet d'encourager la reprise ou la création d'entreprise par des militaires.

Le dispositif s'inspire de celui institué par la loi n° 2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique, qui vise à inciter à la création ou à la reprise d'une entreprise par des fonctionnaires et des agents non titulaires de droit public, en ouvrant la faculté d'exercer à titre professionnel une activité privée et celle de bénéficier d'un temps partiel.

Cette disposition ne pouvant s'appliquer aux militaires de par la spécificité de leur statut, il est nécessaire d'adopter une mesure ad hoc qui réponde à l'impératif du maintien de la disponibilité des militaires, tout en constituant un réel outil incitatif à la création ou à la reprise d'entreprise (nouvelle position statutaire).

Le projet de loi prévoit que le congé est ouvert aux militaires ayant effectué au moins huit ans de services militaires, et qu'il est d'une durée maximale d'une année, renouvelable une fois, sur demande agréée. En cas de renouvellement, le militaire perçoit la rémunération de son grade réduite de moitié. Le militaire ayant bénéficié de ce congé est radié des cadres ou des contrôles, sauf s'il y est mis fin dans des conditions définies par décret en Conseil d'État.

En cas de retour en position d'activité, le militaire ayant bénéficié d'un congé pour création ou reprise d'entreprise ne peut plus bénéficier d'un congé de reconversion.

Ces dispositions ont, en outre, été complétées à l'Assemblée nationale par plusieurs dispositions de nature technique, qui seront détaillées dans l'examen des articles.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1 - Un congé de reconversion plus souple pour les militaires enregistrant plus de quatre années de service

Au titre de l'article L 4139-5 du code de la défense, les militaires peuvent bénéficier, sur demande agréée, d'une part, de dispositifs d'évaluation et d'orientation professionnelle destinés à préparer leur retour à la vie civile et, d'autre part, d'une formation professionnelle ou d'un accompagnement vers l'emploi visant à les préparer à l'exercice d'un métier civil.

Cependant, la formation ou l'accompagnement vers l'emploi ne sont accessibles qu'aux militaires ayant accompli quatre ans de services militaires effectifs. Ceux-ci peuvent, sur demande agréée, bénéficier d'un congé de reconversion et d'un congé complémentaire de reconversion, d'une durée maximale de six mois chacun.

Durant ces congés, le militaire perçoit la rémunération de son grade, qui est suspendue ou réduite lorsque le bénéficiaire perçoit une rémunération publique ou privée. La durée de ces congés compte pour les droits à avancement et pour les droits à pension. À leur expiration, le militaire est radié des cadres ou rayé des contrôles à titre définitif.

Ainsi, le congé de reconversion doit aujourd'hui être exécuté immédiatement avant la radiation des cadres ou des contrôles et ne permet pas aux militaires d'avoir accès à des formations fractionnées et plus étalées dans le temps.

Alors que la durée maximale d'un congé de reconversion inscrit dans le Code de la défense est de 6 mois en continu, les durées moyennes des stages sont variables, comme l'illustrent les exemples suivants :

- moniteur auto-école : 6 mois

- Diplôme d'état d'ambulancier : 5,5 mois

- CAP petite enfance : 8 mois

- électricien d'équipement : 7 mois

- installateur sanitaire et thermique : 9 mois

- permis de conduire C + FIMO : 3 mois

La rigidité du système actuel explique en partie que le nombre de militaires ayant bénéficié d'un congé de reconversion reste faible au regard du nombre total de militaires ayant quitté les armées. En outre, dans la pratique, le 3 ème rapport du HCECM (juin 2009) relève que «la durée moyenne des congés autorisés [...] s'établit à 3 mois dans toutes les armées », ce qui témoigne de la relative inadaptation du dispositif aux besoins réels en formation des militaires.

Afin d'assouplir le dispositif, l'article 1 er du projet de loi prévoit que le congé de reconversion est d'une durée maximale de 120 jours ouvrés et peut désormais être fractionné pour répondre aux contraintes de la formation suivie ou de l'accompagnement vers l'emploi .

Le congé complémentaire de reconversion reste, quant à lui, d'une durée maximale de six mois consécutifs. Cette disposition ne change pas le nombre de jours du congé de reconversion, la durée actuelle de six mois correspondant environ à 120 jours ouvrés.

Elle permet, en revanche, d'étaler ceux-ci sur une période plus longue. Il s'agit donc d'offrir plus de souplesse dans l'organisation de la formation ou de la recherche d'emploi, que ce soit pour les candidats à la reconversion, les armées ou services du ministère, qui ont leurs contraintes propres, ou les entreprises ou institutions partenaires.

Cette disposition donne davantage de temps aux candidats pour préparer leur reconversion. Alors que le cumul du congé actuel de reconversion et du congé complémentaire ne peut excéder un an -ces congés étant en pratique pris d'affilée-, les candidats pourront étaler le futur congé de reconversion sur plusieurs années.

Une date butoir est cependant fixée par le 11 è alinéa, qui prévoit que l'intéressé est radié des cadres à titre définitif, s'il n'a pas bénéficié de la totalité du congé de reconversion au plus tard deux ans après l'utilisation du quarantième jour de celui-ci.

Ainsi les bénéficiaires de ce dispositif pourront répartir les quarante premiers jours sur la période qu'ils souhaitent, puis devront utiliser le solde, soit quatre-vingts jours, dans les deux ans qui suivent.

Il est, en outre, prévu que les congés mentionnées au a à d et au f du 1° de l'article L 4138-2 du code de la défense (congés de maladie, congés pour maternité, paternité ou adoption, permissions ou congés de fin de campagne, congés d'accompagnement d'une personne en fin de vie, congés de présence parentale) et les missions opérationnelles accomplies sur ou hors du territoire national ne sont que pour partie comptabilisées dans le calcul de la période de deux ans, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État.

Ces dispositions ont pour objet de ne pas pénaliser le militaire qui, ayant déjà accompli plus de 40 jours de congé de reconversion, serait déployé sur un théâtre d'opération ou ferait l'objet d'un placement dans différentes positions de congé. Ces périodes suspendraient à hauteur de moitié (mention qui devrait figurer dans le projet de décret d'application) le délai restant à courir jusqu'à l'atteinte des deux années au terme desquelles le militaire est radié des cadres ou rayé des contrôles.

Ce dispositif permettra ainsi de réaliser plus facilement des formations longues et de s'adapter à la diversité des parcours de formation proposés dans le secteur civil.

Les autres dispositions régissant le congé de reconversion (objet, conditions d'accès, conditions de rémunération, conséquences statutaires) restent inchangées.

Le texte du projet de loi institue, par ailleurs, un congé de reconversion court pour les volontaires ayant accompli moins de quatre années de services effectifs

Jusqu'ici, le congé de reconversion était réservé aux militaires ayant accompli au moins quatre ans de services effectifs. L'exclusion du bénéfice du congé de reconversion pour les miliaires ayant effectué moins de quatre années de service privait ainsi statutairement 38 % des militaires quittant les armées du congé de reconversion 1 ( * ) .

Le 6 e alinéa de l'article 1 er du projet prévoit que les volontaires ayant accompli moins de quatre années de services effectifs pourront bénéficier d'un congé de reconversion d'une durée maximale de vingt jours ouvrés, selon les mêmes modalités et dans les mêmes conditions de fractionnement que le congé de reconversion classique.

Les volontaires sont, aux termes de l'article L 4132-11 du code de la défense, des militaires servant les armées en vertu d'un contrat de volontariat d'une durée maximale non reconductible dans les grades de militaire du rang, au premier grade de sous-officier ou d'officier marinier et au grade d'aspirant.

Le nombre total de volontaires dans les armées et formations rattachées s'élève à 17 052, pour un total de 339 524 militaires, soit 5 % de l'effectif total des militaires. Toutefois, il est important de relever que plus de 80 % des volontaires exercent leurs fonctions dans la gendarmerie nationale (13 670 sur 98 528 militaires de la gendarmerie, soit 13,9 % de l'effectif), alors qu'ils ne sont que 3 400 dans les trois armées sur un total de 241 000 militaires (soit 1,4 %). Environ 2 500 volontaires quittent chaque année les armées et la gendarmerie avant quatre années de services, dont 2 200 pour la gendarmerie.

Cette disposition tend à faciliter la reconversion des volontaires, catégorie qui rencontre des difficultés d'insertion sur le marché du travail. Réservée aux volontaires, elle exclut les militaires engagés dont les armées souhaitent de façon générale ne pas se séparer avant le premier renouvellement de leur contrat, c'est-à-dire 5 ans.

Les armées conduisent, en effet, à l'égard des engagés, qui constituent une autre catégorie de militaires servant en vertu d'un contrat, une politique de fidélisation, qui exclut de mettre en oeuvre à leur profit un outil d'incitation ou d'accompagnement des départs.

L'étude d'impact jointe au projet de loi précise que l'ouverture du congé aux volontaires ayant effectué moins de quatre années de services devrait entraîner une augmentation considérable, de l'ordre de 13 000 personnes, du nombre de militaires éligibles au congé de reconversion.

L'assouplissement de ses modalités d'exécution et son ouverture partielle aux militaires ayant effectué moins de quatre années de services militaires devraient, en renforçant l'efficacité du congé de reconversion et en étendant la palette des formations possibles, à la fois rendre cette position statutaire plus attractive et permettre aux militaires d'envisager leur retour à la vie civile de manière plus sereine. Le but de cette mesure n'est toutefois pas d'augmenter le nombre de congés de reconversion accordés mais de le rendre plus efficace.

Son impact budgétaire sera directement lié aux performances du dispositif.

D'un côté, l'assouplissement des modalités d'exécution du congé de conversion et son ouverture partielle engendreront un coût supplémentaire de gestion, de l'autre, une meilleure efficacité de l'ensemble pourrait permettre de diminuer le nombre de militaires qui n'ont pas été reclassés et ainsi diminuer le coût de l'indemnisation du chômage par le ministère de la défense.

Votre commission a adopté cet article sans modification

Article 2 - L'instauration d'un congé pour création ou reprise d'entreprise

En matière de création d'entreprise, le principal dispositif de reconversion existant est le parcours individualisé du créateur ou repreneur d'entreprise (PIC).

Le nombre de bénéficiaires du PIC est passé de 143 en 2005 à 221 en 2009. Il reste limité au regard du volume de militaires bénéficiant d'actions de reconversion (1,4 % de l'ensemble).

L'article 2 du projet de loi tend à compléter ce dispositif en instaurant un congé pour création ou reprise d'entreprise.

À cette fin, le projet de loi ajoute une nouvelle position d'activité, le congé pour création d'entreprise, à celles énumérées au 1° de l'article L 4138-2 du code de la défense, telles que les congés de maladie, le congé de reconversion ou les congés de présence parentale.

Il définit le régime juridique de ce nouveau congé directement inspiré du dispositif applicable aux fonctionnaires depuis la loi du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique.

L'accès à ce congé est ouvert, sur demande agréée, au militaire ayant accompli au moins huit ans de services militaires effectifs.

Les agréments seraient délivrés essentiellement autour de deux critères : les besoins du service (appartenance du demandeur à une spécialité ou un corps déficitaire ou excédentaire...) et la viabilité du projet professionnel ; sur ce dernier point, les modalités d'évaluation ne sont pas encore définies.

Enfin, l'agrément serait délivré après avis de la commission de déontologie des militaires (commission mentionnée à l'article R.4122-19 du code de la défense).

Il est précisé que l'interdiction d'exercer à titre professionnel une activité lucrative et le 1° de l'article L 4122-2 du code de la défense ne sont pas applicables au militaire créant ou reprenant une entreprise dans le cadre de ce congé.

L'article L 4122-2 du code de la défense dispose en effet que :

« Les militaires en activité ne peuvent exercer à titre professionnel une activité lucrative de quelque nature que ce soit ».

« Sont interdites, y compris si elles sont à but non lucratif, les activités privées suivantes :

« 1° La participation aux organes de direction de sociétés ou d'associations ne satisfaisant pas aux conditions fixées au b du 1° du 7 de l'article 261 du code général des impôts (oeuvres sans but lucratif réalisées par des organismes d'utilité générale présentant un caractère social ou philanthropique) ;

« 2° Le fait de donner des consultations, de procéder à des expertises et de plaider en justice dans les litiges intéressant toute personne publique, le cas échéant devant une juridiction étrangère ou internationale, sauf si cette prestation s'exerce au profit d'une personne publique.» .

Le projet de loi prévoit, en conséquence, une dérogation à ces dispositions.

La durée de ce congé est au maximum d'un an, renouvelable une fois.

La rémunération du militaire durant ce congé est celle correspondant à son grade, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat, comme c'est le cas pour le congé de reconversion. Lorsque ce congé est renouvelé, le militaire perçoit la rémunération de son grade réduite de moitié.

La durée de ce congé compte pour les droits à avancement et les droits à pension, comme c'est le cas pour le congé de reconversion.

Le bénéficiaire est radié des cadres ou rayé des contrôles à titre définitif à l'expiration du congé, sauf s'il est mis fin à celui-ci dans des conditions définies par décret en Conseil d'État.

Selon les informations communiquées par le Gouvernement, le décret prévoirait que le militaire ne souhaitant pas être radié ou rayé des contrôles à l'issue du congé doit en faire la demande au moins deux mois avant son expiration.

Par ailleurs, le projet de loi précise que le bénéfice d'un congé pour création ou reprise d'entreprise est exclusif de tout congé de reconversion.

Le régime du PIC sera adapté, à la suite de l'adoption du projet de loi, pour tenir compte de ce nouveau congé. Le PIC devrait a priori pouvoir être suivi, soit dans le cadre du congé de reconversion, comme aujourd'hui, soit dans celui du congé de création ou de reprise d'entreprise, en fonction de la situation de l'intéressé.

Ce nouveau dispositif permettra donc à un militaire de continuer son activité tout en exerçant celle de chef d'entreprise, alors que le statut des militaires ne le permet pas aujourd'hui.

Bien qu'ayant la même dénomination, ses dispositions sont assez différentes de celles concernant le congé pour création d'entreprise dans le code du travail.

Les articles L.3142-78 à 90 du code du travail prévoient en effet que les salariés de toutes les entreprises peuvent, sous certaines conditions, bénéficier d'un congé pour création d'entreprise et interrompre pendant plusieurs mois leur activité professionnelle afin de créer ou reprendre une entreprise. Pendant cette période, le salarié n'est plus payé par son entreprise ; il s'agit, en conséquence, d'un droit d'absence non rémunérée. L'employeur peut accepter, différer la date de départ du salarié, ou, dans les entreprises de moins de deux cents salariés, refuser le congé.

Le projet de loi s'inspire plus directement du dispositif institué par l'article 20 de la loi n° 2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique, qui ouvre aux fonctionnaires et aux agents non titulaires de droit public la possibilité d'exercer à titre professionnel une activité privée lucrative sous la forme de création ou de reprise d'entreprise.

Création ou reprise d'entreprise par des agents publics -

Comparaison agents civils / militaires

Agents civils

Textes en vigueur

Militaires

Projet de loi sur la reconversion des militaires

Principe / position statutaire

Activité (cumul d'activité)

- Activité (cumul d'activité)

- Congé (congé pour création ou reprise d'entreprise - CCRE)

Fondement juridique

L. 83-634 du 13 juillet. 1984, art. 25

PJL Reconversion, art. 2

PJL Reconversion, art. 3

Créneau

- A tout moment de la carrière

- 2 ans avant la LA ou la LDS, ou en congé de reconversion, ou à partir de 8 ans de service (CCRE)

Durée maxi

- 3 années

- 6 mois à 2 ans

Autorisation préalable

- Non

- Oui

Contrôle déontologie

- Oui

- Oui

Rémunération

- Intégrale

- Intégrale pour le cumul, sans les primes de qualification pour le CCRE 1ère année, diminuée par 2 la 2e année

Temps partiel

- Oui (rémunération du temps partiel)

- Non

Type d'entreprise

- Toutes formes

- Entreprise individuelle en régime de déclaration simplifiée (auto entreprise) pour le cumul, toutes formes en CCRE

Type d'activités

- Activités du cumul

- Tous types en CCRE

- activités du cumul en régime d'auto-entrepreneur

Issues possibles

- Fin de l'activité privée (RDC au choix de l'agent)

- RDC (réintégration à la demande du   militaire dans le cas du congé)

Le régime de la création ou de la reprise d'entreprise par des militaires comporte donc deux dispositifs alternatifs : un congé, pouvant intervenir dès 8 ans de service, d'une année renouvelable une fois, et une dérogation, prévue aux articles suivants, à l'interdiction de cumul, intervenant en toute fin de carrière et limitée au régime dit de l'auto-entreprise. Dans les deux cas, la création doit faire l'objet d'une autorisation préalable.

Le régime applicable aux fonctionnaires ne comporte qu'un seul dispositif, mais ouvert tout au long de la carrière, d'une durée substantiellement plus longue, et soumis à simple déclaration préalable. Le fonctionnaire peut, dans ce cadre, créer tout type d'entreprise, quels qu'en soient le statut et la taille, alors que cette possibilité n'est offerte aux militaires que dans le cadre du congé pour création ou reprise.

Le projet de loi donne à ses bénéficiaires une durée environ deux fois plus longue qu'à ceux du congé de reconversion, soit un an renouvelable une fois, au lieu des six mois ou les 120 jours fractionnables prévus, auquel peut s'ajouter le congé complémentaire de six mois.

Il évite d'éventuels abus en n'étant pas cumulable avec le congé de reconversion et incite, ce faisant, les candidats à la reconversion à faire un choix professionnel clair.

Selon l'étude d'impact, ce congé concernerait « au maximum une population d'une vingtaine de militaires par an ».

Ce chiffre peut sembler particulièrement faible, au premier abord, notamment au regard du nombre de fonctionnaires bénéficiant du cumul d'activité pour création ou reprise d'entreprise (environ 3 000 en 2009) ou au regard du nombre de militaires quittant l'institution en vue de la création ou de la reprise d'une entreprise (environ 200 par an).

Néanmoins, à la différence du dispositif en vigueur dans la fonction publique (le fonctionnaire étant dans une situation de cumul d'activités, il bénéficie de son traitement d'activité mais continue à exercer ses fonctions), la mesure proposée pour les militaires est onéreuse puisqu'elle aboutit à verser une solde à des militaires qui n'exercent pas de fonctions au profit du ministère de la défense.

Par ailleurs, il s'agit d'un dispositif tout à fait novateur, de nature expérimentale. Il n'est donc pas de ce fait envisageable d'augmenter, de manière significative, dans l'immédiat, le nombre de militaires susceptibles de bénéficier de ce congé. Une augmentation pourra éventuellement être envisagée dès qu'un retour d'expérience sera connu.

Plus précisément, le projet de loi prévoit qu'à l'issue du congé, le militaire est radié des cadres, sauf s'il demande à être réintégré dans un emploi de son grade. La mesure a été clairement conçue comme incitative au départ : la possibilité d'un retour au terme du congé constitue une garantie de nature à inciter les militaires à solliciter le placement en congé pour création ou reprise d'entreprise.

Si, à l'issue des premiers congés, c'est-à-dire dans deux ans, l'essentiel des bénéficiaires optent pour la radiation des cadres, la mesure aura montré sa pertinence. Il pourra alors être envisagé d'augmenter le volume de bénéficiaires. Si, en revanche, les bénéficiaires optent pour une réintégration au sein du ministère de la défense, il pourra difficilement être envisagé d'augmenter le volume.

Votre commission a adopté cet article sans modification

Article 3 - Cumul d'activité d'auto-entrepreneur avec l'activité principale des militaires

Cet article adopté, introduit par l'Assemblée nationale dans le projet de loi par un amendement du Gouvernement, insère un article L. 4139-6-1 dans le code de la défense, ainsi rédigé :

« Art. L. 4139-6-1. - Le militaire de carrière se trouvant à moins de deux ans de la limite d'âge de son grade, l'officier sous contrat et le militaire engagé se trouvant à moins de deux ans de la limite de durée des services ainsi que le militaire en congé de reconversion peuvent, sur demande agréée, créer une entreprise régie par les articles L. 123-1-1 du code de commerce, L. 133-6-8-1 et L. 133-6-8-2 du code de la sécurité sociale et 50-0 et 102 ter du code général des impôts.

« Le cumul de cette activité avec l'activité principale des militaires est autorisé dans les conditions prévues aux cinquième et sixième alinéas de l'article L. 4122-2 et par le décret en Conseil d'État pris pour leur application. »

La loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie a instauré un dispositif simplifié de création et de gestion d'entreprise applicable aux entrepreneurs individuels, dit statut de l'auto-entrepreneur.

Il présente la caractéristique de ne pas constituer une forme juridique mais une simplification des formalités de déclaration d'activité. Ce régime n'est accessible qu'en deçà d'un montant maximal de chiffre d'affaires en fonction de la nature de l'activité (vente de marchandises ou prestations de service) et prévoit des formalités administratives et fiscales simplifiées prévues aux articles : L. 123-1-1 du code de commerce L. 133-6-8-1 et L. 133-6-8-2 du code de la sécurité sociale et 50-0 et 102 ter du code général des impôts.

Le code de la défense ne permet pas aujourd'hui aux militaires en activité d'adopter ce régime. En effet, celui-ci n'est pas compatible avec l'article L. 4122-2 du code de la défense qui interdit aux militaires d'exercer une activité privée lucrative sauf dans le cadre du régime prévu à l'article 2.

Néanmoins, le ministère de la défense estime que ce régime peut être élargi aux militaires selon certaines modalités, notamment dans le cadre de la reconversion.

Il complète ainsi les autres dispositifs mis en place pour accompagner la déflation des effectifs militaires (pécule, dispositifs d'accès à la fonction publique, etc.).

Ainsi, au sein de la section 2 du code de la défense concernant les dispositifs d'aide au départ, cet article insère un article L. 4139-6-1 prévoyant la possibilité pour un militaire se trouvant à moins de deux ans de la limite d'âge ou de durée des services, ou dans le cadre d'un congé de reconversion, de créer et gérer son entreprise par ce dispositif.

Votre rapporteur s'est interrogé sur les principales différences avec les conditions prévues à l'article 2. Car le militaire « créateur d'entreprise » bénéficiant du congé prévu à l'article 2 du projet de loi peut opter pour le statut d'auto-entrepreneur, même s'il peut également opter pour des régimes juridiques lui permettant de développer un chiffre d'affaires beaucoup moins limité.

Il lui est apparu que les conditions statutaires pour bénéficier de cet article 3 étaient, pour le militaire, d'être à moins de deux ans de la limite d'âge de son grade (militaire de carrière) ou de la limite de durée des services (militaires servant en vertu d'un contrat), ou d'être en congé de reconversion, alors que le congé pour création ou reprise d'entreprise sera accessible dès 8 ans de service.

À la différence du dispositif de l'article 2, ce dispositif est un dispositif de fin de carrière autorisant un cumul d'activités.

Les agréments, nécessaires dans les deux cas, seront délivrés par le commandement militaire, de la même manière que pour toute activité exercée au titre du cumul d'activités (activités d'enseignement, oeuvres de l'esprit, activités de consultant,...).

Dans la mesure où il s'agit d'une activité professionnelle exercée en plus de l'activité militaire habituelle (à la différence de l'article 2, qui constitue une position de congé) et limitée au régime de l'auto-entreprise, qui ne devrait pas empiéter, ni sur le temps, ni sur la qualité du travail du militaire, la viabilité économique du projet ne devrait, a priori, pas être examinée.

Votre commission a adopté cet article sans modification

Article 4 - Conditions de rémunération des candidats aux emplois réservés pendant leur stage

Le dispositif des emplois réservés, qui consiste dans un accès dérogatoire à la fonction publique pour différentes catégories de bénéficiaires, a été instauré au début du vingtième siècle, avec l'objectif de récompenser certains soldats en leur garantissant une forme de « reconversion » par l'accès à l'emploi public.

Ce dispositif, qui constitue à l'origine un droit accessoire du droit à pension, est inséré dans le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre.

Il a été récemment réformé par la loi n° 2008-492 du 26 mai 2008 relative aux emplois réservés et portant dispositions diverses relatives à la défense.

Le dispositif distingue deux catégories de bénéficiaires, par ordre de priorité :

- les personnes prioritaires : invalides de guerre et militaires blessés en opération, veuves et orphelins, et les enfants de harkis ;

- les militaires en activité ou libérés depuis moins de trois ans.

Ce dispositif permet l'accès à tous les corps ou cadres d'emplois des catégories B et C des trois fonctions publiques. Il n'y a pas de limite d'âge pour postuler mais certains emplois restent soumis aux conditions de leurs statuts particuliers.

L'aptitude est fondée sur la reconnaissance et la valorisation des acquis de l'expérience professionnelle. Un « passeport professionnel » récapitulant les diplômes et le parcours professionnel du candidat lui est délivré. Compte tenu des compétences reconnues et des souhaits qu'il aura exprimés, il sera inscrit sur une ou plusieurs listes alphabétiques d'aptitude, établies par domaine de compétences et/ou métiers.

Le candidat peut demander son inscription sur une ou deux listes régionales et/ou une liste nationale pour au maximum trois ans.

Lors d'un recrutement, l'administration qui embauche consulte librement ces listes et a accès au « passeport professionnel » des candidats. Pour arrêter son choix, elle convoque à un entretien ceux ayant le profil du poste recherché.

L'article L. 405 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre dispose que le candidat aux emplois réservés effectue son stage en position de détachement et renvoie aux dispositions relatives au détachement de droit commun prévues à l'article L. 4138-8 du code de la défense.

Nombre de militaires qui ont bénéficié d'emplois réservés
visés à l'article L. 405 depuis 2004

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010 2 ( * )

720

628

381

503

483

318

177

A l'initiative du gouvernement, l'Assemblée nationale a souhaité permettre aux candidats d'effectuer leur stage dans des conditions plus favorables que celles du détachement de droit commun.

En effet, ces dispositions, qui ne permettent pas de garantir la rémunération durant le détachement, constituent un obstacle au recrutement de certains militaires en raison du classement de l'intéressé à un indice très supérieur à celui du corps d'accueil.

Cet article remplace dans l'article L. 405 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, la référence « L. 4138-8 » par la référence à l'article « L. 4139-4 » qui prévoit que, pendant son détachement, « le militaire perçoit une rémunération au moins égale à celle qu'il aurait perçue s'il était resté en position d'activité au sein des armées, dans des conditions fixées par décret . »

Cet article permet d'adapter une prime permettant aux militaires qui intègrent la fonction publique de pouvoir compenser le différentiel de rémunération entre la solde et le traitement.

Votre commission a adopté cet article sans modification.

Article 5 - Prorogation des contrats des candidats aux emplois réservés aux seules fins de suivre le stage ou la scolarité préalable à la titularisation dans le corps d'accueil

L'article L. 405 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre dispose que le candidat aux emplois réservés effectue son stage en position de détachement et que « le militaire sous contrat bénéficie d'une prorogation de droit de son contrat jusqu'à la fin du stage ou de la scolarité obligatoire et de leur renouvellement éventuel. ».

Cette disposition n'est, dans les faits, pas applicable aux volontaires approchant la limite de durée des services fixée à cinq ans puisque cette dernière peut intervenir avant la fin du détachement.

Cette situation constitue un obstacle au bénéfice de la procédure des emplois réservés par certains militaires.

C'est pourquoi le Gouvernement a proposé à l'Assemblée nationale, qui l'a adopté, un amendement qui permet de proroger les contrats des militaires au-delà des limites légales fixées par l'article L. 4139-16 du code de la défense, aux seules fins de suivre le stage ou la scolarité préalable à la titularisation dans le corps.

L'article 5 issu de cet amendement complète la dernière phrase de l'article L. 405 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre par les mots : « y compris au-delà de la limite de durée des services fixée au II de l'article L. 4139-16 du code de la défense ».

Votre commission a adopté cet article sans modification.

Article 6 - Modalité de fixation de la liste des établissements restructurés permettant d'ouvrir un mode d'accès supplémentaire aux emplois réservés

Le 2° de l'article L. 406 du Code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ou Code des pensions civiles et militaires de retraite (CPCMR) permet d'attribuer les postes non pourvus au titre des emplois réservés à des fonctionnaires et ouvriers de l'État appartenant à des établissements restructurés, ainsi qu'à des militaires qui ne remplissent pas les conditions pour bénéficier normalement des emplois réservés (condition de 4 ans de service).

Cette disposition prévoit que la liste des établissements restructurés permettant d'ouvrir un mode d'accès supplémentaire aux emplois réservés doit être fixée par décret.

La liste de l'ensemble des établissements restructurés du ministère de la défense est annexée à un arrêté du 9 avril 2010. Cette liste comporte plusieurs centaines d'établissements ou d'unités des armées qui seront soit fermés ou transférés, ou dont le fonctionnement sera pour partie rationalisé.

Il est à noter que les restructurations ont concerné 27 établissements de la défense en 2009, et toucheront plus de 100 unités en 2010. Ainsi ont été rationalisés ou mutualisés le maintien en condition opérationnelle des équipements et les soutiens, notamment avec la mise en place progressive, à partir de 2009, de la chaîne interarmées du soutien et la fusion, début 2010, des directions des trois commissariats.

Le militaire affecté dans un de ces établissements, sur un emploi restructuré ou rationalisé peut, dans les conditions fixées par l'article L. 406 du CPCMR, bénéficier de la procédure des emplois réservés.

Le ministère de la défense, qui procède depuis de nombreuses années à des restructurations, fixe par arrêté ministériel la liste des établissements concernés par des mesures de restructuration.

L'appartenance d'un établissement à une telle liste permet de faire bénéficier ses agents des mesures d'accompagnement social des restructurations telles que la prime de restructuration de service, le complément spécifique de restructuration, l'allocation d'aide à la mobilité du conjoint, le complément et le supplément forfaitaire de l'indemnité pour charges militaires,...

Cet article, introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, prévoit que la liste des établissements restructurés permettant d'ouvrir un mode d'accès supplémentaire aux emplois réservés soit fixée non plus par décret mais par arrêté du ministre compétent, ce qui permettra plus de souplesse que la procédure contraignante du décret.

Votre commission a adopté cet article sans modification.

Article 7 - Conditions du recours à la mise à la disposition du personnel du ministère des établissements publics du ministère de la défense

Cet article a pour objet de préciser les conditions du recours à la mise à la disposition du personnel du ministère de la défense prévu par l'article 43 de la loi n° 2009-972 du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique.

Cet article prévoit que « Lorsqu'une activité du ministère de la défense est confiée par contrat à un organisme de droit privé, les fonctionnaires, les ouvriers de l'Etat, les agents non titulaires de droit public ou les militaires exerçant cette activité peuvent être mis à la disposition de l'organisme. Ils peuvent également être mis à la disposition d'une société nationale aux fins d'être mis par elle à la disposition de sa filiale chargée de l'exécution du contrat précité »

Dans la pratique, les personnels du ministère de la défense susceptibles d'être mis à la disposition d'un organisme titulaire d'un marché d'externalisation aux termes de cet article sont ceux exerçant des fonctions dans des secteurs externalisés, c'est-à-dire des activités de soutien, indépendamment de leur statut et de leur catégorie ou corps d'appartenance (militaires de carrière ou servant en vertu d'un contrat, officiers, sous-officiers, militaires du rang). Il s'agit de personnels affectés sur des emplois administratifs ou techniques dans des activités touchant à la restauration, à l'hôtellerie, aux loisirs, au transport, au courrier, à la conciergerie et à la maintenance technique élémentaire.

La rédaction actuelle de la loi n° 2009-972 du 3 août 2009 ne vise que les activités du ministère de la défense mais pas celles des établissements publics du ministère de la défense.

Or à l'occasion d'un projet d'externalisation de la restauration de l'Ecole Polytechnique, établissement public du ministère, cette lacune s'est avérée problématique.

Le personnel des établissements publics du ministère de la défense devrait, en effet, pouvoir bénéficier des mêmes possibilités de mise à la disposition que le personnel directement employé par le ministère.

Pour réparer cet oubli, cet article, introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, complète l'article 43 de la loi n° 2009-972 du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique et insère, après le mot « défense », les mots : « ou d'un de ses établissements publics ».

Votre commission a adopté cet article sans modification.

Article 8 - Conditions du recours à la mise à la disposition du personnel du ministère de la défense à un organisme de droit privé dans le cadre d'une externalisation d'une activité par contrat de partenariat

Cet article a également pour objet de préciser les conditions du recours à la mise à la disposition du personnel du ministère de la défense prévu par l'article 43 de la loi n° 2009-972 du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique.

La rédaction actuelle de la loi n° 2009-972 du 3 août 2009 ne vise pas les contrats de partenariat.

Or le projet de regroupement des services du ministère sur le site de Balard devrait faire l'objet d'un contrat de partenariat dans lequel la reprise de certains personnels, notamment dans le domaine de la restauration, a été sollicitée de la part des candidats.

De ce point de vue, le personnel du ministère de la défense dont l'activité est confiée à un prestataire privé au titre d'un contrat de partenariat doit pouvoir bénéficier des mêmes possibilités de mise à la disposition que le personnel dont l'activité est externalisée au titre d'un autre mode contractuel.

Pour réparer cet oubli, cet article, introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, complète le premier alinéa de l'article 43 de la loi n° 2009-972 du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique qui prévoit que « lorsqu'une activité du ministère de la défense est confiée par contrat à un organisme de droit privé, les fonctionnaires, les ouvriers de l'Etat, les agents non titulaires de droit public ou les militaires exerçant cette activité peuvent être mis à la disposition de l'organisme » par les mots : « titulaire du contrat ou de tout organisme chargé de l'exécution de prestations au titre du contrat précité lorsque ce contrat est passé en application des dispositions de l'ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat ».

Votre commission a adopté cet article sans modification.

CONCLUSION

Ce projet de loi comporte des dispositions très techniques et de portée limitée.

Certaines mesures prévues par le projet de loi, comme les dispositions de l'article premier relatives à la prise en compte des congés maladie, dans la durée maximale du congé de reconversion à partir du quarantième jour de celui-ci, semblent très éloignées de l'esprit et de la lettre de l'article 34 de la Constitution qui prévoit que la loi fixe les principes fondamentaux.

Ce texte comporte, il est vrai, avant tout les modalités pratiques de la politique de reconversion des militaires. Il illustre d'une certaine façon l'inflation législative qui chaque année étoffe notre arsenal juridique et engorge l'ordre du jour des assemblées parlementaires. De ce point de vue, il est à l'image d'un goût très français pour la norme et les statuts, pour la réglementation et le recours à la loi.

Portalis disait que les lois inutiles affaiblissaient les lois nécessaires. Votre rapporteur ne croit cependant pas que ce projet de loi soit inutile. Ses dispositions, telles qu'adoptées par l'Assemblée nationale, répondent chacune très concrètement à différents besoins des armées. Dans la mesure où des dispositions figuraient déjà dans la loi, il fallait une autre loi pour les modifier. De ce point de vue, il complète utilement le dispositif français de reconversion des militaires.

La commission a expertisé chacun des dispositifs et a procédé à plusieurs auditions pour comprendre les enjeux de ce texte. Les dispositions, telles qu'elles sont écrites, semblent bien atteindre les objectifs fixés. C'est pourquoi, elle vous propose donc d'adopter ce texte, sans modification.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission a examiné le présent rapport lors de sa réunion du 7 décembre 2010.

M. André Dulait, rapporteur . - Avec la reconversion des militaires, nous abordons un grand sujet et un petit texte. N'y voyez pas là une critique. On se plaint trop de l'inflation législative pour ne pas se féliciter que l'on n'apporte au code de la défense que les petites touches de modification nécessaires.

Les armées prennent à la société une partie de notre jeunesse pour la lui rendre quelques années plus tard. Depuis le brassage de Français de toutes origines qu'assurait l'armée de conscription, il existe un lien historique entre les armées et leur mission sociale de reconversion de leurs soldats.

Il y a ensuite un lien structurel entre les armées et cette mission de reconversion. Les carrières militaires sont en effet courtes. Quatre militaires sur cinq n'effectuent pas l'intégralité de leur carrière dans les armées. Celles-ci ont donc besoin de jeunes soldats en nombre et de peu de généraux. La question de la reconversion se pose ainsi dès le recrutement. Les armées le savent bien : elles pourront d'autant mieux recruter qu'elles sauront reconvertir.

Il y a évidemment une importance toute conjoncturelle à cette préoccupation. Avec le nouveau format des armées, avec ce que l'on appelle la grande manoeuvre des ressources humaines, nos armées se seront, en 2014, séparées de 54 000 hommes : c'est considérable. Nous l'avons jugé nécessaire. La modernisation passe par des effectifs resserrés, mieux équipés, plus entraînés. Mais nous devons veiller à la cohérence globale de l'action des pouvoirs publics. Les réformes actuelles préoccupent les familles de militaires et les bassins d'emplois concernés. S'il nous faut moderniser notre outil de défense, il nous faut aussi lutter contre le chômage dans un contexte économique défavorable, d'où l'impérieuse nécessité de reconvertir au mieux les anciens militaires.

La reconversion est un sujet d'importance, mais aussi un sujet délicat, où il faut concilier aspirations individuelles et besoins de l'institution militaire. Les armées ne recrutent pas, ne forment pas pour reconvertir ; les armées recrutent et forment les soldats pour accomplir les missions qui leur sont confiées. Il faut donc trouver un juste équilibre entre la nécessité de rentabiliser les efforts consentis en matière de recrutement et en matière de formation des soldats et celle de les préparer à leur reconversion et à une seconde carrière. Comme l'a dit le chef d'état-major de l'armée de terre lors de l'université d'été de la défense, il faut veiller à ce que les efforts faits pour ceux qui partent ne soient pas supérieurs à ceux qui sont faits pour ceux qui restent.

Le chômage des militaires a un coût croissant puisqu'il revient à l'Etat de financer les allocations chômage des anciens militaires. Cette charge est passée en six ans de 75 millions à 110 millions : c'est très important eu égard au bouclage financier de la réforme et aux gains attendus de la diminution du format des armées.

Pour toutes ces raisons, les pouvoirs publics ont, depuis plusieurs années déjà, renforcé le dispositif d'aide à la reconversion des militaires qui s'articule traditionnellement autour de deux dispositifs : le premier est l'accès à la fonction publique et le second regroupe toutes les aides au départ vers le secteur privé, qui vont de l'évaluation à l'orientation, jusqu'à la formation professionnelle.

En 2009, le Gouvernement a mis en place une agence unique : l'agence de reconversion de la défense. Son action se décline à trois niveaux : national, régional - avec dix pôles de reconversion - et local, avec une cellule de reconversion dans chacune des cinquante et une bases de défense. Elle s'appuie également sur un recours plus important à des intervenants extérieurs.

D'ores et déjà, et en dépit d'un contexte économique difficile, les résultats sont globalement satisfaisants. Le taux global de reclassement des militaires est aujourd'hui de 69 % : 71 % pour les officiers, 73 % pour les sous-officiers et 50 % pour les militaires du rang, et 35 % pour les militaires du rang ayant quatre ans d'ancienneté. Ces chiffres permettent de comprendre clairement ce que doit être la priorité : les militaires du rang et plus particulièrement ceux qui ont le moins d'ancienneté.

Les reclassements dans la fonction publique sont, eux, de moitié inférieurs aux objectifs initiaux. Les administrations réduisant leurs effectifs, elles n'accueillent pas nos militaires à bras ouvert. Leur nombre a pourtant augmenté de 54 % entre 2008 et 2009, pour atteindre deux mille militaires reclassés dans la fonction publique.

Des dispositifs complémentaires sont nécessaires, c'est l'objet du projet de loi.

Le premier article assouplit les règles du congé de reconversion pour permettre aux militaires de suivre une formation segmentée dans le temps. Le congé est fractionnable par journées, dans la limite de 120 jours ouvrés cumulés, contre six mois consécutifs au maximum actuellement. Dans le cas d'un congé fractionné, la durée totale est de deux ans.

Le projet de loi ouvre aussi le congé de reconversion, dans la limite de vingt jours, aux volontaires ayant moins de quatre ans de services. Pour cette population dont on a vu qu'elle était fortement exposée au chômage, il s'agit d'une avancée importante.

Le deuxième article créé une nouvelle position statutaire d'activité : le congé pour création ou reprise d'entreprise, directement inspiré du dispositif existant pour la fonction publique. Ce congé est destiné aux militaires ayant huit ans d'ancienneté ; il sera d'une durée maximale d'un an, renouvelable une fois, sur demande agréée.

L'Assemblée nationale a autorisé, en fin de carrière, un cumul d'activité entre l'activité de militaire et celle d'auto-entrepreneur. Ce dispositif prévu à l'article 3 est très encadré : il est réservé aux militaires à moins de deux ans de la limite d'âge ou de durée des services, ou dans le cadre d'un congé de reconversion ; les activités doivent être agréées par le commandement militaire pour vérifier la compatibilité de celle-ci avec le bon fonctionnement des services. Ces deux dispositifs complémentaires doivent permettre à des militaires de tenter l'aventure de la création d'entreprises et leur mettre le pied à l'étrier. Ils sont conçus comme des dispositifs expérimentaux : on prévoit une vingtaine de militaires par an pour le congé pour création d'entreprise. Nous verrons à l'expérience ce que cela donne.

A l'initiative du Gouvernement, l'Assemblée nationale a également adopté deux articles additionnels relatifs aux emplois réservés de la fonction publique ouverts aux invalides de guerre et militaires blessés en opération, aux veuves et orphelins, aux enfants de harkis, ainsi qu'aux militaires en activité ou libérés depuis moins de trois ans.

L'accès devient possible à tous les corps ou cadres d'emplois des catégories B et C des trois fonctions publiques. L'aptitude est fondée sur la reconnaissance et la valorisation des acquis de l'expérience professionnelle et sur des entretiens de sélection. L'article 4 permet aux candidats d'effectuer leur année de stage dans leur emploi réservé en conservant la rémunération qu'ils auraient perçue s'ils étaient restés en position d'activité au sein des armées - au lieu de se trouver en détachement et perdre en rémunération.

L'article 5 autorise la prorogation des contrats des candidats aux emplois réservés aux seules fins de suivre le stage ou la scolarité préalable à la titularisation dans le corps d'accueil. Le dispositif des emplois réservés est accessible, à partir de 4 ans d'ancienneté, aux volontaires sous contrat de cinq ans non renouvelable. L'Assemblée nationale a adopté un article 6 nouveau touchant les modalités de fixation de la liste des établissements concernés par le mode d'accès supplémentaire aux emplois réservés. Le Code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ouvre l'attribution des emplois réservés non pourvus à des fonctionnaires et ouvriers de l'État appartenant à des établissements restructurés. L'article 6, introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, prévoit que la liste des établissements restructurés sera fixée non plus par décret, mais par arrêté du ministre compétent, procédure plus souple.

Voilà vraiment un texte qui fixe les grands principes...

L'Assemblée nationale a enfin adopté à l'initiative du Gouvernement deux articles additionnels, 7 et 8. La loi du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique autorise le ministère de la défense à mettre des agents à la disposition d'un organisme titulaire d'un marché d'externalisation - il s'agit surtout d'activités de soutien. Ces dispositions valent quels que soient le statut, la catégorie, le corps d'appartenance, militaires de carrière, servant en vertu d'un contrat, officiers, sous-officiers, militaires du rang. Les emplois visés sont pour l'essentiel administratifs ou techniques, dans la restauration ou la maintenance informatique.

En 2009, deux situations ont été oubliées. Celle, rare, des établissements publics qui dépendent du ministère de la défense : ainsi l'école Polytechnique souhaite externaliser sa restauration et pourrait mettre à la disposition du prestataire ses agents contractuels, prolongeant ainsi leurs contrats. Celle, aussi, des partenariats comportant des sous-traitants. Une interprétation littérale de la loi de 2009 interdit la mise à disposition d'un sous-traitant dans le cadre d'un marché de partenariat comportant un titulaire et des sous-traitants - le projet Balard par exemple, qui comporte des lots de restauration. Ces deux derniers articles constituent une réponse très concrète aux besoins du ministère de la défense.

Comme vous le constatez, ce projet de loi comporte des dispositions très techniques et de portée limitée. Certaines, je pense à la prise en compte des congés maladie dans la durée maximale du congé de reconversion, s'éloignent beaucoup de l'esprit et de la lettre de l'article 34 de la Constitution. La loi fixe les principes fondamentaux, or ici il s'agit de modalités pratiques ! C'est l'illustration de l'inflation législative : toujours plus de lois, votées lors de sessions toujours plus longues, conformément au goût très français pour la norme et les statuts ; nous avons sinon une passion pour la réglementation, en tout cas un appétit certain pour la loi.

Montesquieu disait que les lois inutiles affaiblissent les lois nécessaires. Ce projet n'est pas inutile. Ses dispositions telles qu'adoptées par l'Assemblée nationale répondent chacune très concrètement à des besoins des armées. Et si des dispositions figurent dans une loi, il faut bien une autre loi pour les modifier.

Nous avons expertisé les mesures et procédé à plusieurs auditions : l'actuelle rédaction semble bien atteindre les objectifs fixés. Il n'y a donc pas lieu de vous proposer des amendements. Cela serait certes la vocation du rapporteur ; mais il se refuse à contribuer à l'inflation législative par des amendements superflus !

Je vous propose donc d'adopter ce texte sans modification.

M. Jean-Louis Carrère . - Ce n'est pas un grief à votre égard mais je trouve particulièrement regrettable que ce texte vienne en séance publique le 22 décembre - pourquoi pas le 24 à minuit ?

Le texte est très technique. Il est lié à la formidable déflation des emplois dans les armées françaises et si nous pouvons être d'accord avec son contenu, sa pertinence sera-t-elle durable ? L'aboutissement de la RGPP conduira à des modifications dans des délais plus brefs que nous ne l'imaginons... Le texte semble nous convenir mais il n'aborde pas la vraie question, celle des moyens. Je reconnais que ce n'est pas son objet. Mais un ministre va défendre ces mesures, qui ne pourra les mettre en oeuvre ! Il faut concilier la réalité de la configuration de l'armée, son renouvellement, la reconversion des partants, de plus en plus nombreux. Mais si nous n'avons pas les moyens de cette reconversion, c'est tout l'édifice qui s'effondre. Je lance donc un appel vibrant au rapporteur, au président de notre commission et à la majorité sénatoriale : serons-nous le moment venu capables de délibérer sur la mise en oeuvre de la politique, c'est-à-dire les moyens ?

M. André Dulait, rapporteur . - Depuis 2005, on est passé de 28 000 départs à 34 000 aujourd'hui, officiers, sous-officiers, hommes de troupe : l'inflation, effectivement, est notable. Lors du projet de loi de finances, nous avions souligné l'insuffisance des crédits du titre II ; après un « resoclage » de 113 millions d'euros, le déficit actuel est de 200 millions d'euros. L'impasse budgétaire est là et je conclus mon rapport sur une interrogation relative à l'évolution financière.

M. Jean-Louis Carrère . - Pourquoi s'affronter politiquement, stérilement, sur un tel sujet ? Voyons plutôt comment interpeller le Gouvernement de façon constructive sur les suites à donner à ce projet de loi.

M. Josselin de Rohan, président . - La question sera posée.

L'ensemble du projet de loi est adopté sans modification.


* 1 3 ème rapport du HCECM, juin 2009, p. 48.

* 2 Au 24 septembre.

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