Rapport général n° 111 (2010-2011) de Mme Marie-France BEAUFILS , fait au nom de la commission des finances, déposé le 18 novembre 2010
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LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEURE
SPÉCIALE
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I. LES REMBOURSEMENTS ET DÉGRÈVEMENTS
EN 2011
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II. ANALYSE PAR PROGRAMME
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A. LE PROGRAMME 200 « REMBOURSEMENTS ET
DÉGRÈVEMENTS D'IMPÔTS D'ETAT »
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B. LE PROGRAMME 201 « REMBOURSEMENTS ET
DÉGRÈVEMENTS D'IMPÔTS LOCAUX »
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A. LE PROGRAMME 200 « REMBOURSEMENTS ET
DÉGRÈVEMENTS D'IMPÔTS D'ETAT »
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I. LES REMBOURSEMENTS ET DÉGRÈVEMENTS
EN 2011
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EXAMEN EN COMMISSION
N° 111
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2010-2011
Enregistré à la Présidence du Sénat le 18 novembre 2010 |
RAPPORT GÉNÉRAL
FAIT
au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances pour 2011 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,
Par M. Philippe MARINI,
Sénateur,
Rapporteur général.
TOME III
MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES
(Seconde partie de la loi de finances)
ANNEXE N° 25
REMBOURSEMENTS ET DÉGRÈVEMENTS
Rapporteure spéciale : Mme Marie-France BEAUFILS
(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis , président ; M. Yann Gaillard, Mme Nicole Bricq, MM. Jean-Jacques Jégou, Thierry Foucaud, Aymeri de Montesquiou, Joël Bourdin, François Marc , Serge Dassault, vice-présidents ; MM. Philippe Adnot, Jean-Claude Frécon, Mme Fabienne Keller, MM. Michel Sergent, François Trucy , secrétaires ; M. Philippe Marini, rapporteur général ; M. Jean-Paul Alduy, Mme Michèle André, MM. Bernard Angels, Bertrand Auban, Denis Badré, Mme Marie-France Beaufils, MM. Claude Belot, Pierre Bernard-Reymond, Auguste Cazalet, Yvon Collin, Philippe Dallier, Jean-Pierre Demerliat, Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. Éric Doligé, Philippe Dominati, André Ferrand, François Fortassin, Jean-Pierre Fourcade, Adrien Gouteyron, Charles Guené, Claude Haut, Edmond Hervé, Pierre Jarlier, Yves Krattinger, MM. Gérard Longuet, Roland du Luart, Jean-Pierre Masseret, Marc Massion, Gérard Miquel, Albéric de Montgolfier, François Rebsamen, Jean-Marc Todeschini, Bernard Vera. |
Voir les numéros :
Assemblée nationale ( 13 ème législ.) : 2824, 2857, 2859 à 2865 et T.A. 555
Sénat : 110 (2010-2011)
LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEURE SPÉCIALE
1. 82,15 milliards d'euros de crédits (AE=CP) sont demandés, pour 2011, au titre de la mission « Remboursements et dégrèvements ». Cette budgétisation s'inscrit en recul de près de 13 % par rapport à 2010. Elle traduit la dissipation des effets du Plan de relance, qui avait fortement accru les remboursements et dégrèvements d'impôts d'Etat, alors que la réforme de la taxe professionnelle cause un effondrement des remboursements et dégrèvements d'impôts locaux. 2. Première mission du budget général, la mission « Remboursements et dégrèvements » est composée de crédits évaluatifs et soustraite à la norme de dépense . La consommation des crédits inscrits sur cette mission est intimement liée à la dynamique des recettes fiscales, ainsi qu'au recours des contribuables à un certain nombre de dispositifs leur permettant de bénéficier de restitutions au titre d'avantages fiscaux, de remboursements de trop-perçu ou de remises gracieuses. 3. Une analyse sur longue période enseigne que les remboursements et dégrèvements ont représenté une part croissante des recettes fiscales brutes, témoignant de la place grandissante qu'occupent les mécanismes de restitution d'impôt, et notamment du développement des dépenses fiscales . 4. Les remboursements et dégrèvements en matière d'impôt sur le revenu sont estimés à 7,4 milliards d'euros pour 2011, dont 2,6 milliards d'euros pour la partie restituée de la prime pour l'emploi, soit une diminution de 0,2 milliard d'euros par rapport au montant révisé pour 2010. Cette baisse s'explique essentiellement par l'impact de l'imputation du revenu de solidarité active « complément d'activité » sur la PPE et par l'aménagement du crédit d'impôt en faveur du développement durable. 5. Les remboursements et dégrèvements associés à l'impôt sur les sociétés baissent de 4,8 milliards d'euros par rapport au montant révisé pour 2010 (-27,9%), traduisant la fin de la mesure de restitution anticipée des créances non imputées de crédit d'impôt recherche (CIR) et l'amélioration du bénéfice fiscal des entreprises en 2010. 6. Les remboursements et dégrèvements de TVA s'élèvent à 44,4 milliards d'euros, en progression de 0,8 milliard d'euros par rapport au montant révisé pour 2010, compte tenu d'une reprise lente du flux de crédit généré par l'activité économique et de la moindre propension des entreprises à demander des remboursements dans un contexte de détente sur leur trésorerie. 7. La prévision associée au coût du bouclier fiscal diminue de 5 % , pour s'établir à 665 millions d'euros. Cette révision de -35 millions d'euros par rapport à 2010 tient à l'impact des mesures visant à inclure dans le calcul du bouclier les revenus distribués, dont les dividendes, pour leur montant brut avant abattements. A la veille d'une refonte globale de la fiscalité patrimoniale, une meilleure connaissance des bénéficiaires du bouclier fiscal demeure nécessaire, afin d'évaluer l'atteinte des objectifs assignés au dispositif. 8. Le crédit d'impôt « Développement durable » voit son taux passer de 50 % à 25 % pour les équipements de production d'électricité photovoltaïque, soit une économie globale de 157 millions d'euros en 2011, dont 87 millions au titre des seuls remboursements et dégrèvements d'impôts d'Etat. L'évaluation de l'efficacité de ce dispositif coûteux et aux estimations très erratiques devrait intervenir avant la fin du premier semestre 2011. 9. 11,1 milliards d'euros sont demandés pour 2011 au titre des remboursements et dégrèvements d'impôts locaux, soit 4,8 milliards d'euros de moins qu'en 2010 (-30,2 %). Cette baisse est essentiellement imputable aux effets de la réforme de la taxe professionnelle , qui se traduit par une diminution très forte du dégrèvement « plafonnement en fonction de la valeur ajoutée », ainsi que par la création du dégrèvement barémique de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. 10. L'Etat demeure, par sa politique fiscale en direction des entreprises et des ménages, le premier contribuable local et acquittera encore, par ses dégrèvements et compensations d'exonérations, un cinquième du produit des principaux impôts locaux en 2011. Au 10 octobre 2010, date limite fixée par la LOLF, 68 % des réponses au questionnaire budgétaire étaient parvenues à votre rapporteure spéciale. |
I. LES REMBOURSEMENTS ET DÉGRÈVEMENTS EN 2011
82,15 milliards d'euros de crédits (AE=CP) sont demandés, pour 2011, au titre de la mission « Remboursements et dégrèvements ». Cette budgétisation s'inscrit en recul de près de 13 % par rapport à 2010, sous l'effet combiné des suites de la réforme de la taxe professionnelle et de l'extinction des mesures exceptionnelles décidées dans le cadre du Plan de relance .
A. UNE MISSION ATYPIQUE
Première mission du budget général, la mission « Remboursements et dégrèvements » est également la plus atypique, en ce que les crédits qui y sont inscrits obéissent à une logique de recettes .
1. Des crédits évaluatifs obéissant à une logique de recettes
Les remboursements et dégrèvements d'impôts d'Etat et d'impôts locaux constituent la clé de passage entre les recettes fiscales brutes et les recettes fiscales nettes d'une part, et les dépenses brutes et les dépenses nettes du budget général d'autre part. La consommation des crédits inscrits sur cette mission est, en effet, intimement liée à la dynamique des recettes fiscales, ainsi qu'au recours des contribuables à un certain nombre de dispositifs leur permettant de bénéficier de restitutions au titre d'avantages fiscaux, de remboursements de trop-perçu ou de remises gracieuses. Pour ces mêmes raisons, qui rendent la dépense aléatoire et moins aisément pilotable , les crédits de la mission sont des crédits évaluatifs au sens de l'article 10 de la LOLF et sont soustraits à l'application de la norme de dépense élargie 1 ( * ) .
Plus de 98 % des crédits de la mission sont des crédits d'intervention (titre 6), les seuls crédits de fonctionnement (titre 3) correspondant aux admissions en non-valeur, aux intérêts moratoires et rectifications de produits d'Etat (1,92 milliard d'euros en 2011). A cet égard, votre rapporteure spéciale observe que la Cour des comptes avait, dans sa note d'exécution budgétaire relative à l'exercice 2009, recommandé de reclasser en dépenses de fonctionnement les remboursements et dégrèvements liés à la mécanique de l'impôt , composés pour l'essentiel des excédents de versements d'impôt sur les sociétés (IS) ou de remboursements de crédits de TVA.
Interrogé sur ce point, le responsable de programme fait valoir que « la proposition de la Cour équivaut à une remise en cause rétroactive de la répartition par nature des dépenses, dans la mesure où elle vise non seulement la présentation des dépenses dans la nouvelle architecture, mais a fortiori la répartition qui prévalait les années antérieures. Présenter en fonctionnement la totalité des dépenses des actions 11 et 13 revient à bouleverser le mode de classification des dépenses adopté jusqu'à présent, sans remise en cause explicite par les autorités de contrôle. Les dépenses de fonctionnement représenteraient alors la plus large part des dépenses totales du programme 200. (...) L'évolution suggérée ne pourra être opérée que si elle est parfaitement argumentée . Elle nécessite en particulier de répertorier les dépenses en fonction de critères communs permettant de les recenser, soit en dépenses de fonctionnement, soit en dépenses d'intervention. Cette recommandation sera donc examinée dans la limite des réserves exposées » .
La proposition de la Cour des comptes ne semble donc pas susciter d'enthousiasme particulier, semble-t-il pour des motifs essentiellement techniques. Elle peut néanmoins faire sens , dans la mesure où les remboursements et dégrèvements résultant de la mécanique de l'impôt correspondent surtout à la mise en oeuvre de modalités de calcul particulières. Elles ne sont donc pas réellement assimilables à des dispositifs incitatifs ou poursuivant des objectifs précis de politique publique , et pour lesquels le classement en « interventions » apparaît réellement justifié.
2. Un marqueur privilégié de l'érosion des recettes de l'Etat
Une analyse sur longue période enseigne que les remboursements et dégrèvements ont représenté une part croissante des recettes fiscales brutes, témoignant de la place grandissante qu'occupent les mécanismes de restitution d'impôt et notamment du développement des dépenses fiscales .
Le pic constaté en 2009, où les remboursements et dégrèvements ont représenté 34,3 % des recettes fiscales brutes, résulte principalement des effets concomitants de la forte diminution des recettes liée à la crise économique et des dispositifs fiscaux exceptionnels mis en oeuvre dans le cadre du Plan de relance ( cf. infra ). La dissipation de ces effets permet de retrouver un « étiage » plus proche de celui des années précédentes. Les remboursements et dégrèvements représenteront ainsi 24,4 % des recettes fiscales brutes en 2011, contre 25,8 % en 2008.
Au-delà de ces facteurs conjoncturels, la progression des remboursements et dégrèvements, et en particulier des remboursements et dégrèvements d'impôts d'Etat, est un indice privilégié de l'érosion des recettes de l'Etat, sous l'effet de la multiplication des dispositifs dérogatoires .
L'évolution des recettes fiscales brutes et
des remboursements et dégrèvements depuis 2001
(en milliards d'euros courants)
Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire
B. LA TENDANCE RÉCENTE ET LA PRÉVISION POUR 2011
L'analyse de la budgétisation prévue en 2011 implique de revenir préalablement sur l'évolution observée au cours des deux dernières années. Ces années, atypiques à bien des égards, illustrent l'extrême sensibilité de la dépense de remboursements et dégrèvements à la conjoncture et aux choix de politique économique et fiscale du Gouvernement.
1. 2009 et 2010 : effets et contrecoup du plan de relance
Les remboursements et dégrèvements d'impôts d'Etat se seront élevés à 93,9 milliards d'euros en 2009, soit un niveau sans précédent. Le Plan de relance aura abouti :
1) à majorer les remboursements et dégrèvements d'impôt sur le revenu de 0,5 milliard d'euros au titre de la mesure d'allègement des deux tiers de l'IR des contribuables modestes ;
2) à majorer de 8,8 milliards d'euros les remboursements et dégrèvements d'IS, dont 3,8 milliards d'euros au titre du remboursement anticipé des créances de crédit d'impôt recherche (CIR) et 5 milliards d'euros au titre du remboursement anticipé des créances liées au report en arrière de déficits ;
3) à majorer les remboursements et dégrèvements de TVA de 6,5 milliards d'euros au titre du remboursement anticipé des crédits de TVA .
Outre les mesures de relance, l'instauration du taux réduit de TVA dans la restauration aura accru les remboursements et dégrèvements de TVA de 1,25 milliard d'euros. Les autres remboursements et dégrèvements d'impôts d'Etat auront augmenté de 0,3 milliard d'euros, s'établissant à 7,2 milliards d'euros en 2009.
2010 voit logiquement le contrecoup des principales mesures du Plan de relance et la diminution concomitante des remboursements et dégrèvements d'impôts d'Etat. Ceux-ci s'inscrivaient en recul de 17,5 milliards d'euros par rapport à 2009, en LFI pour 2010 (-15,6 %), et de 18,7 milliards d'euros en première loi de finances rectificative pour 2010 (-16,7 %), le contrecoup du seul Plan de relance étant chiffré à 15,3 milliards d'euros. L'estimation révisée des remboursements et dégrèvements d'impôts d'Etat s'établit donc à 74,5 milliards d'euros.
Bilan de l'impact du Plan de relance en 2009 et
2010
(en millions d'euros)
Mesures du plan de relance |
Impact 2009 |
Impact 2010 |
200-12-02 (ancien 200-02) « IR - restitutions liées à des politiques publiques » : Crédit d'impôt exceptionnel (réduction des 2/3 de l'IR pour les revenus inférieurs à 12 475 € par part - partie restituée) |
446 |
-464 |
200-11-02 (ancien 200-04-01) « TVA - restitutions liées à la mécanique de l'impôt) : Mensualisation des remboursements de crédits de TVA |
6 500 |
-6 500 |
200-12-03 (ex 200-03-01) IS - restitutions liées à des politiques publiques, dont : |
8 800 |
-8 300 |
- Restitution anticipée des créances de Crédit impôt recherche (CIR) non imputées |
3 800 |
-2 100 |
- Restitution anticipée des créances de Report en arrière de déficit (RAD) non imputées |
5 000 |
-6 200 |
TOTAL |
15 746 |
-15 264 |
Source : réponses au questionnaire
Les remboursements et dégrèvements d'impôts locaux se seront, quant à eux, élevés à 17,8 milliards d'euros en 2009 , soit une progression de +9,8 % par rapport à 2008 (+1,6 milliard d'euros) imputable au dynamisme du plafonnement de la cotisation de taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée. Ils étaient estimés à 15,94 milliards d'euros en LFI pour 2010. L'exécution pourrait faire apparaître une légère progression (+0,2 milliard d'euros) par rapport à l'estimation de la loi de finances initiale.
2. 2011 : la réforme de la taxe professionnelle « prend le relais »
Entre 2010 et 2011, les crédits de la mission s'inscrivent en recul de 12,8 %, soit -12,1 milliards d'euros. Ce recul affecte tant les remboursements et dégrèvements d'impôts d'Etat que d'impôts locaux.
L'évolution de la budgétisation de la
mission entre la LFI 2010 et le PLF 2011
(en euros)
Source : commission des finances, d'après le projet annuel de performances
Les remboursements et dégrèvements d'impôts d'Etat refluent de 3,5 milliards d'euros pour s'établir à 71 milliards d'euros (-9,3 % par rapport à la LFI 2010). Une approche consolidée par impôt 2 ( * ) met en évidence les évolutions suivantes :
1) les remboursements et dégrèvements en matière d'impôt sur le revenu sont estimés à 7,4 milliards d'euros pour 2011, dont 2,6 milliards d'euros pour la partie restituée de la PPE, soit une diminution de 0,2 milliard d'euros par rapport au montant révisé pour 2010. Cette baisse s'explique essentiellement par l'impact de l'imputation du RSA « complément d'activité » sur la PPE et par l'aménagement du crédit d'impôt en faveur du développement durable ( cf. infra ) ;
2) les remboursements et dégrèvements associés à l'impôt sur les sociétés baissent de 4,8 milliards d'euros par rapport au montant révisé pour 2010 (-27,9%), en raison de la fin de la mesure de restitution anticipée des créances non imputées de crédit d'impôt recherche 3 ( * ) (CIR) et de l'amélioration du bénéfice fiscal 2010 4 ( * ) (+16%) ;
3) les remboursements et dégrèvements de TVA s'élèvent à 44,4 milliards d'euros, en progression de 0,8 milliard d'euros par rapport au montant révisé pour 2010, compte tenu d'une reprise lente du flux de crédit généré par l'activité économique, de la moindre propension des entreprises à demander des remboursements dans un contexte de détente sur leur trésorerie et de la stabilisation du rythme de traitement des demandes de remboursement des crédits de TVA par les services de la DGFiP.
Les remboursements et dégrèvements d'impôts locaux sont enfin estimés à 11,1 milliards d'euros, soit une diminution très importante de -30,2 %. La baisse de 4,8 milliards d'euros constatée est principalement imputable à la réforme de la taxe professionnelle et à ses conséquences sur les dégrèvements anciens et nouveaux qui l'accompagnent . La taxe professionnelle prend en quelque sorte le « relais » du plan de relance au titre des facteurs de perturbation importants de l'évolution des remboursements et dégrèvements ( cf. infra ).
II. ANALYSE PAR PROGRAMME
L'analyse par programme ne procède pas à un recensement exhaustif des crédits demandés pour 2011, dont la justification au premier euro figure au projet annuel de performances. Seules sont retracées les évolutions les plus significatives, permettant de mettre en évidence les principales priorités financées par la mission en 2011.
A. LE PROGRAMME 200 « REMBOURSEMENTS ET DÉGRÈVEMENTS D'IMPÔTS D'ETAT »
Après l'importante refonte de la nomenclature du programme 200 mise en place en 2010, et dont l'objectif était de présenter les remboursements et dégrèvements d'impôts d'Etat selon leur nature plutôt que de les classer par impôt 5 ( * ) , la maquette ne connaît pas d'évolution majeure en 2011 6 ( * ) .
Cette stabilité prévaut également pour le dispositif d'évaluation de la performance , à l'exception de l'indicateur « Taux de réclamations contentieuses », désormais enrichi des réclamations contentieuses en matière de contribution à l'audiovisuel public des particuliers.
La dotation du programme s'établit à 71 milliards d'euros, en diminution de 9,3 % par rapport à la LFI 2010 et de 4,7 % par rapport à l'évaluation révisée pour 2010. L'ajustement pèse essentiellement sur les remboursements et dégrèvements liés à la mécanique de l'impôt , qui diminuent de 4,1 milliards d'euros (-6,9 %), alors que les remboursements et dégrèvements liés à des politiques publiques baissent de 1,5 milliard d'euros (-14,2 %) et les remboursements et dégrèvements liés à la gestion des produits de l'Etat de 1,7 milliard d'euros (-19,2 %).
L'évolution de la budgétisation de programme 200 entre la LFI 2010 et le PLF 2011
(en euros)
Source : commission des finances, d'après le projet annuel de performances
1. Les remboursements et dégrèvements liés à la mécanique de l'impôt témoignent de la dissipation de la crise
a) La hausse du bénéfice fiscal atténue les remboursements et dégrèvements d'IS
Au titre des remboursements et dégrèvements liés à la mécanique de l'impôt, l'évolution la plus spectaculaire intéresse l'IS , qui voit ses crédits diminuer de près de 23 % (-3,1 milliards d'euros). Selon le projet annuel de performances, cette diminution est liée à une prévision d'évolution dynamique du bénéfice fiscal des exercices clos en 2010, attendue à +15 %.
b) Une normalisation des remboursements et dégrèvements de TVA
Les crédits de la sous-action TVA, qui concerne les restitutions de crédits de TVA aux entreprises, s'affichent en recul de 1 milliard d'euros par rapport à 2010 (-2,2 %). Cette évolution fait suite à un fort accroissement de la dépense en 2009, sous l'effet de la mesure de mensualisation des remboursements de crédits de TVA décidée dans le cadre du Plan de relance. Selon le responsable de programme, cette mesure « a joué le rôle de catalyseur et a conduit à une explosion du nombre de demandes de remboursement déposées en 2009, dans un contexte de tension sur la trésorerie des entreprises » . Ce phénomène serait concentré sur 2009, l'exécution 2010 laissant apparaître une contraction de la dépense de 12 % (soit 43,3 milliards d'euros), due à l'érosion du stock de créances reportées début 2010 et à la stabilisation de la masse des crédits dégagés au cours de l'exercice. Au total, la prévision pour 2011 repose donc sur l'hypothèse d'une « stabilisation des comportements dans le cadre de ce nouveau dispositif déclaratif, couplée à une reprise lente mais progressive de la création de crédit en 2011 ». Comme expliqué au I du présent rapport, les entreprises seront en effet moins désireuses de bénéficier de crédits de TVA si la situation de leur trésorerie se détend.
c) Un coût en légère baisse pour le bouclier fiscal
Votre rapporteure spéciale observe enfin que la prévision associée au coût du bouclier fiscal diminue de 5 % , pour s'établir à 665 millions d'euros. Cette révision de -35 millions d'euros par rapport à 2010 tient à l'impact des mesures votées en 2009 et 2010 et visant à inclure dans le calcul du bouclier les revenus distribués, dont les dividendes, pour leur montant brut avant abattements, et non plus seulement pour leur montant net catégoriel ( cf . tableau).
La révision du coût du boulier fiscal
en 2011
Mesures |
Coût (+) / Economie (-) en milliers d'euros |
Mesures de la loi de finances pour 2010 |
|
Prise en compte des revenus distribués, notamment les dividendes, non pas pour leur montant net catégoriel mais pour leur montant brut, c'est-à-dire avant application des abattements (proportionnel de 40 % et forfaitaire annuel de 1 525 € ou 3 050 € selon la composition du foyer). Modification de l'article 1649-0 A du CGI. |
-74 039 |
Non-prise en compte dans le revenu retenu pour le calcul du droit à restitution des déficits globaux, déficits catégoriels et des moins-values de cession de valeurs mobilières des années antérieures qui viennent s'imputer sur le revenu global ou les revenus catégoriels de l'année de référence. |
-7 000 |
Mesures de la troisième loi de finances rectificative pour 2009 |
|
Prise en compte des revenus distribués, notamment les dividendes, non pas pour leur montant net catégoriel mais pour leur montant brut, c'est-à-dire avant application des abattements (proportionnel de 40 % et forfaitaire annuel de 1 525 € ou 3 050 € selon la composition du foyer). Modification de l'article 1649-0 A du CGI. |
+46 000 |
Total |
-35 039 |
Source : commission des finances, d'après la documentation budgétaire
On relève que, dans son rapport consacré à la mission « Remboursements et dégrèvements », Jean-Yves Cousin, rapporteur spécial au nom de la commission des finances de l'Assemblée nationale, suggère que le projet annuel de performances soit complété par « des informations plus précises relatives au bouclier fiscal. Compte tenu du caractère novateur de ce dispositif et de l'intérêt qu'y portent les parlementaires, il pourrait ne pas être inutile de donner des informations détaillées sur les bénéficiaires du dispositif et le montant des restitutions, en décomposant par tranche de revenu et valeur du patrimoine » .
Votre rapporteure spéciale partage cette analyse et déplore que les questions parlementaires intéressant ce dispositif reçoivent, la plupart du temps, des réponses laconiques. Ses travaux de contrôle relatifs au bouclier fiscal seront donc poursuivis en 2011, dans le but de mieux identifier les principales caractéristiques des bénéficiaires du bouclier et d'évaluer l'atteinte des objectifs qui lui étaient assignés. Un tel bilan ne pourra que contribuer aux réflexions préparatoires à la réforme globale de la fiscalité du patrimoine récemment annoncée par le Président de la République.
2. Les remboursements et dégrèvements liés aux politiques publiques
Les remboursements et dégrèvements liés à des politiques publiques, soit pour l'essentiel des dépenses résultant d'obligations fiscales restituées sous la forme de crédits d'impôts , diminuent de 14,2 % en 2011 (-1,5 milliard d'euros).
a) Analyse globale
Cette diminution est avant tout imputable à la budgétisation des remboursements et dégrèvements liés à l'IS , qui avaient fortement augmenté en 2009 sous l'effet des mesures du plan de relance consistant à rembourser par anticipation les créances de crédit d'impôt recherche et de report en arrière des déficits. En 2010, seule la mesure intéressant le CIR avait été prolongée, pour un coût estimé à 2,7 milliards d'euros. La prévision pour 2011 tient compte de l'arrêt de ce dispositif , sauf pour les petites et moyennes entreprises (pour un coût estimé à 311 millions d'euros en 2011). Les crédits diminuent par conséquent de 48,3 % , passant de 3,9 milliards à 2 milliards d'euros.
Les deux autres facteurs de baisse des remboursements et dégrèvements liés à des politiques publiques résident dans la légère diminution des restitutions de TIPP aux artisans taxis, commerçants, transporteurs et exploitants agricoles (-198 millions d'euros) et dans la révision à la baisse de la dépense liée au remboursement de la taxe intérieure sur la consommation de gaz naturel (TICGN) aux exploitants agricoles (-222 millions d'euros).
Si les crédits dédiés à la prime pour l'emploi augmentent de 178 millions d'euros (+7,3 %) par rapport à la dotation de LFI 2010, le coût de ce dispositif n'en est pas moins en baisse entre 2010 et 2011, si l'on se réfère à la prévision actualisée. En effet, la PPE devrait susciter des remboursements et dégrèvements de 3,1 milliards d'euros en 2010 contre 2,4 milliards d'euros prévus en LFI, et ce notamment en raison de la montée en charge plus lente que prévu du revenu de solidarité active. Dans la mesure où les publics à la fois bénéficiaires de la PPE et du RSA perçoivent prioritairement ce dernier et l'imputent sur leur prime, la diffusion inférieure aux attentes du RSA majore à due concurrence la PPE à verser ( cf . encadré).
Prime pour l'emploi et RSA La prime pour l'emploi est un crédit d'impôt sur le revenu dont le montant maximum est de 961 euros pour 2009. Le bénéfice de ce crédit d'impôt est accordé aux foyers fiscaux domiciliés en France qui perçoivent des revenus provenant de l'exercice d'une activité professionnelle salariée ou non salariée et qui remplissent un certain nombre de conditions relatives au montant du revenu fiscal de référence du foyer fiscal, ainsi qu'au montant du revenu d'activité de chaque personne susceptible de bénéficier de la PPE. L'article 12 de la loi n° 2008-1249 du 1 er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active (RSA) et réformant les politiques d'insertion a prévu que les montants perçus au titre de la fraction du RSA complémentaire des ressources d'activité au cours d'une année donnée s'imputent sur le montant de la PPE due au titre de cette même année. Ainsi, le RSA « complément d'activité » est considéré comme un acompte non remboursable à valoir sur la PPE. Les allocataires du RSA, éligibles à la PPE, bénéficient du montant le plus élevé entre les deux dispositifs. Lorsque le montant du RSA « complément d'activité » est supérieur au montant de PPE avant imputation du RSA « complément d'activité » précité, la PPE est ramenée à zéro. En revanche, lorsque le montant de RSA « complément d'activité » est inférieur au montant de PPE avant imputation, l'attributaire bénéficie d'une PPE réduite de ce RSA « complément d'activité ». Ce dispositif est applicable à compter de l'imposition des revenus de 2009 en métropole et au plus tard le 1 er janvier 2011 dans les départements d'outre-mer (articles 28 et 29 de la loi précitée). Source : réponses au questionnaire budgétaire |
Au total, la seule augmentation de crédits significative intéresse les remboursements et dégrèvements d'impôt sur le revenu . Cette évolution représente une augmentation de 638 millions d'euros (+ 30,9 %) par rapport à la LFI 2010, mais de 450 millions d'euros « seulement » par rapport aux évaluations révisées pour 2010 (les remboursements et dégrèvements atteignant 2,45 milliards d'euros au lieu des 2 milliards d'euros initialement prévus). La justification au premier euro est, pour 2011, assez fruste et se borne à préciser que « l'impact des mesures nouvelles affectant les crédits d'impôt à hauteur de 0,22 milliard d'euros (dont notamment le crédit d'impôt intérêts d'emprunt ) devrait conduire à une cible d'environ 2,7 milliards d'euros » .
b) Retour sur le crédit d'impôt « Développement durable »
Au titre des mesures nouvelles affectant les remboursements et dégrèvements en 2011, votre rapporteure spéciale relève l'aménagement du crédit d'impôt sur le revenu en faveur du développement durable prévu à l'article 200 quater du code général des impôts. L'article 13 7 ( * ) du projet de loi de finances pour 2011 prévoit en effet de réduire de 50 % à 25 % le taux de crédit d'impôt relatif aux équipements de production d'électricité photovoltaïque, pour une économie globale de 157 millions d'euros en 2011, dont 87 millions d'euros au titre des seuls remboursements et dégrèvements d'impôts d'Etat .
Le « CIDD » est par ailleurs soumis à la mesure de réduction homothétique de l'avantage en impôt plus communément appelé « rabot » . Ces mesures font suite à des ajustements nombreux du crédit d'impôt au cours des dernières lois de finances et lois de finances rectificatives, complétés par des actualisations régulières des arrêtés fixant la liste des équipements éligibles. Nonobstant ces révisions, votre commission des finances n'a pu que constater le très fort dynamisme de cette dépense fiscale et le caractère très erratique de son évaluation .
Le graphique qui suit montre que le coût du CIDD est passé de moins d'un milliard d'euros en 2006 à près de 2,6 milliards d'euros en 2009. Cette progression atteste, s'il en était encore besoin, de la nécessité d'apprécier plus finement la portée de cet avantage fiscal, pour mieux en concentrer les effets sur les équipements les plus performants et pour éviter la captation de la rente par les professionnels, via l'ajustement à la hausse de leurs prix .
Une dépense fiscale très
dynamique
(en millions d'euros)
Source : commission des finances, d'après les projets annuels de performances annexés aux projets de lois de finances pour 2008, 2009, 2010 et 2011
Au-delà, le pilotage de ce dispositif n'a guère de portée si les prévisions de dépense fiscale qui y sont associées sont dépourvues de fiabilité. A cet égard, le tableau qui suit montre que les estimations de coût ont pu varier dans des proportions étonnantes au titre d'une même année . Ce fut notamment le cas en 2009, où ces estimations ont quasiment doublé, passant de 1,5 à 2,8 milliards d'euros.
Réévaluations successives du
coût du
crédit d'impôt « Développement
durable »
(en millions d'euros)
Source : commission des finances, d'après les projets annuels de performances annexés aux projets de lois de finances pour 2008, 2009, 2010 et 2011
Selon les réponses au questionnaire, « le coût du crédit d'impôt est difficile à anticiper principalement compte tenu des évolutions législatives et des modifications qu'elles peuvent induire sur les décisions d'investissement des contribuables » . Le paradoxe veut donc que l'inflation imprévisible des dépenses liées à un dispositif entraîne des adaptations législatives qui, à leur tour, renforcent le caractère aléatoire de la prévision...
Le Gouvernement rappelle néanmoins que « l'article 12 de la loi n° 2009-135 du 9 février 2009 de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 prévoit que le Gouvernement doit présenter au Parlement, au plus tard le 30 juin 2011, une évaluation de l'efficacité et du coût de l'ensemble des dépenses fiscales et des niches sociales en vigueur à la date de publication de cette loi. (...) Dès lors, le crédit d'impôt en faveur du développement durable prévu à l'article 200 quater du CGI fera l'objet d'une évaluation approfondie. Ainsi, afin de mieux connaître le coût budgétaire de ce crédit d'impôt, un groupe de travail interministériel se réunit actuellement , en vue d'améliorer la connaissance statistique du crédit d'impôt, d'en évaluer l'efficacité économique et environnementale, d'analyser les interactions de ce dispositif avec d'autres instruments économiques (notamment l'éco-prêt à taux zéro) et d'analyser les enjeux de compétitivité de l'emploi dans les filières soutenues par le crédit d'impôt ». Votre rapporteure spéciale prendra connaissance avec intérêt des conclusions de ces travaux qui pourraient, en outre, analyser la ventilation de l'avantage fiscal en fonction des revenus des ménages et examiner l'opportunité d'en concentrer le bénéfice sur les foyers les plus modestes.
3. Les remboursements et dégrèvements liés à la gestion des produits de l'Etat
Les remboursements et dégrèvements liés à la gestion des produits de l'Etat diminuent de 19,2 % par rapport à la LFI 2010 (-1,7 milliard d'euros). Ces évolutions résultent soit des enseignements tirés des révisions de coût pour 2010 (ainsi des dégrèvements prononcés pour rectifier des erreurs constatées sur l'imposition initiale au titre de l'IR), soit de la prise en compte d'impacts spécifiques (les dégrèvements à destination des particuliers et des entreprises au titre des autres impôts directs et taxes assimilées augmente de 0,8 milliard d'euros pour inclure les restitutions au titre du précompte).
B. LE PROGRAMME 201 « REMBOURSEMENTS ET DÉGRÈVEMENTS D'IMPÔTS LOCAUX »
La maquette du programme 201 « Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux » est également stable en 2011. La Cour des comptes avait recommandé de procéder à la réorganisation des crédits liés aux impôts locaux du programme 201 selon les mêmes principes que ceux retenus pour les impôts d'Etat. Les réponses au questionnaire budgétaire indiquent, à cet égard, qu' « une réflexion est engagée sur les possibilités d'aménager l'architecture du programme 201, qui se heurte aujourd'hui à des difficultés techniques liées au mode de restitution des données par les applications de gestion » .
11,1 milliards d'euros sont demandés pour 2011 au titre des remboursements et dégrèvements d'impôts locaux, soit 4,8 milliards d'euros de moins qu'en 2010 (-30,2 %). Cette baisse est exclusivement imputable aux effets de la réforme de la taxe professionnelle.
L'évolution de la budgétisation du
programme 201 entre la LFI 2010 et le PLF 2011
(en euros)
Source : commission des finances, d'après le projet annuel de performances
1. Des remboursements et dégrèvements d'impôts locaux en forte baisse
a) L'impact de la réforme de la taxe professionnelle
La dotation de l'action 1 « Taxe professionnelle et contribution économique territoriale » passe de 11,5 à 6,5 milliards d'euros entre 2010 et 2011, soit une diminution de 44,1 %. Cette évolution est liée à la réforme de la taxe professionnelle, et plus précisément à la disparition des dégrèvements liés à la TP et à l'apparition des nouveaux dégrèvements de contribution économique territoriale.
Les effets de la réforme de la
taxe
professionnelle sur la dotation de l'action 1
(en millions d'euros)
Source : réponses au questionnaire
Les deux principaux facteurs de cette évolution tiennent donc :
1) à la diminution très forte du dégrèvement correspondant au dispositif de plafonnement en fonction de la valeur ajoutée (PVA), qui passe de 10,3 milliards d'euros en 2010 à 1,3 milliard d'euros en 2011. Ce plafonnement revêtait une portée considérable sous l'empire de la taxe professionnelle, dans la mesure où l'assiette « immobilisations incorporelles » de la TP assujettissait les établissements industriels à une cotisation bien supérieure aux 3,5 % de la valeur ajoutée. Dans la nouvelle configuration, la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) étant par construction inférieure au PVA 8 ( * ) , ce dernier ne porte réellement que sur la cotisation foncière des entreprises (CFE), d'où la diminution de son coût ;
2) à la création du dégrèvement lié au barème de la CVAE (+4,2 milliards d'euros en 2011). En effet, la CVAE des entreprises dont le chiffre d'affaires est situé entre 152 500 euros et 50 millions d'euros fait l'objet d'un dégrèvement pris en charge par l'Etat . Entre 152 500 et 500 000 euros de chiffre d'affaires, ce dégrèvement est total. Au-delà de 500 000 euros de chiffre d'affaires et jusqu'à 50 millions d'euros, le dégrèvement est partiel et calculé en application d'un barème progressif 9 ( * ) .
b) Les dégrèvements de taxes foncières et de taxe d'habitation
Les crédits de l'action 2 « Taxes foncières » sont évalués à 750 millions d'euros en 2011, contre 710 millions d'euros en 2010 (évaluation révisée). Ils concernent essentiellement des rectifications d'impositions (670 millions d'euros) et correspondent, de façon plus résiduelle, aux dégrèvements accordés aux personnes âgées ou de condition modeste (48 millions d'euros) et à certains agriculteurs 10 ( * ) (32 millions d'euros).
3,4 milliards d'euros sont demandés au titre de l'action 3 « Taxe d'habitation » (contre 3,26 milliards d'euros en LFI 2010), à raison de 2,9 milliards d'euros liés au plafonnement de la taxe d'habitation par rapport au revenu, et 23 millions d'euros au titre des RMI reliquataires dans les DOM, le solde correspondant à des rectifications d'impositions effectuées postérieurement à l'émission initiale.
c) Les admissions en non-valeur
Les admissions en non-valeur (action 4) mobilisent enfin 520 millions d'euros de crédits en 2011. Elles sont constituées des créances irrécouvrables, soit celles dont le paiement effectif n'a pu être obtenu en raison notamment de l'insolvabilité ou de la disparition du redevable. Elles ont pour but de relever le comptable de sa responsabilité mais n'éteignent pas pour autant la créance du redevable qui pourra à tout moment être recouvrée si sa situation venait à s'améliorer. La budgétisation retrouve un étiage « normal », après une augmentation transitoire en 2010 (550 millions d'euros) liée au repli constaté en 2009 du taux de recouvrement à deux ans de la taxe professionnelle, qui a généré un excédent de restes à recouvrer dont une partie se traduit par une admission en non-valeur.
2. L'Etat demeure, par sa politique fiscale en direction des entreprises et des ménages, le premier contribuable local
Le poids des compensations et dégrèvements d'impôts locaux inspire traditionnellement le commentaire selon lequel l'Etat serait le « premier contribuable local » . Les conséquences de la réforme de la taxe professionnelle atténuent cette appréciation sans toutefois la remettre en cause.
Produit des impôts locaux et part
assumée par l'Etat
(en millions d'euros)
Source : réponses au questionnaire budgétaire
L'Etat, par ses dégrèvements et compensations d'exonérations, acquittera encore un cinquième du produit des principaux impôts locaux en 2011, cette part ayant culminé à 28,7 % en 2008. Comme le montre le graphique qui suit, les dégrèvements et compensations de taxes foncières et de taxe d'habitation connaissent une tendance régulière mais peu prononcée au repli. Dans ces conditions, ce sont bel et bien les dégrèvements et compensations en matière de taxe professionnelle qui déterminent l'évolution d'ensemble . La forte diminution des dégrèvements intervenant dans le prolongement de la réforme de la TP contribue donc pour l'essentiel à la baisse relative de la part des impôts locaux pris en charge par l'Etat.
Part des impôts locaux assumée par
l'Etat
Source : commission des finances
EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mardi 16 novembre 2010, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a procédé à l'examen du rapport spécial de Mme Marie-France Beaufils , rapporteure spéciale, sur la mission « Remboursements et dégrèvements ».
Mme Marie-France Beaufils , rapporteure spéciale. - Nous abordons un sujet d'une toute autre dimension financière, puisque 82 milliards d'euros sont demandés au titre de cette mission, la première du budget général. Elle échappe à la norme « zéro volume», car ces crédits répondent essentiellement à une logique de recettes.
Sur une longue période, les dégrèvements et remboursements représentent une part croissante des recettes fiscales brutes, attestant la place grandissante des dépenses fiscales. Pour 2011 toutefois, on observe un recul de 13 %, expliqué par la dissipation des effets du plan de relance, mais aussi par l'impact de la réforme de la taxe professionnelle.
Je commencerai mon analyse par les remboursements et dégrèvements d'impôts d'État.
Les montants liés à l'impôt sur le revenu avoisinent 7,4 milliards d'euros en 2011, dont 2,6 milliards concernent la partie restituée de la prime pour l'emploi (PPE). La baisse de 200 millions constatée à ce titre s'explique essentiellement par la montée en puissance plus lente que prévu du revenu de solidarité active - complément d'activité, qui s'impute sur la PPE, mais aussi par l'aménagement du crédit d'impôt « Développement durable ». Le taux de ce crédit d'impôt passera de 50 % à 25 % pour les équipements d'électricité photovoltaïque. Mon rapport relève que cette dépense fiscale a présenté un coût croissant très mal anticipé. Une première analyse du dispositif devrait être disponible avant la fin du premier semestre 2011. Je souhaite que l'on examine à cette occasion l'opportunité de concentrer l'avantage fiscal sur les foyers les plus modestes.
Les remboursements et dégrèvements associés à l'impôt sur les sociétés diminueront de 4,8 milliards d'euros, soit 27,9 % du montant révisé pour 2010. Cette réduction résulte de deux causes : la fin de la restitution anticipée des créances non imputées du crédit d'impôt recherche et l'amélioration attendue du bénéfice des entreprises en 2010, selon les estimations gouvernementales.
En très légère progression de 800 millions d'euros, les remboursements et dégrèvements de TVA s'élèvent à 44,4 milliards, en raison d'une reprise lente du crédit et de la moindre propension des entreprises à demander des remboursements, vu l'amélioration de leur trésorerie.
Enfin, le coût du bouclier fiscal devrait baisser de 5 %, pour s'établir à 665 millions d'euros, car les revenus distribués, notamment les dividendes, seront désormais intégrés pour leur montant brut avant abattement. A la veille d'une refonte globale de la fiscalité patrimoniale, une meilleure connaissance des bénéficiaires demeurant nécessaire. Je poursuivrai donc les travaux de contrôle initiés, en 2010, sur ce thème, afin de rapporter devant la commission au premier semestre de l'année prochaine.
J'en viens aux remboursements et dégrèvements d'impôts locaux.
La réduction de 4,8 milliards par rapport à 2010, soit 30,2 %, est principalement imputable à la réforme de la taxe professionnelle, qui se traduit par une diminution notable du dégrèvement lié au plafonnement en fonction de la valeur ajoutée, non totalement compensée par la création du dégrèvement en fonction du barème de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises.
En raison de sa politique fiscale, l'État demeure le premier contribuable local, en acquittant un cinquième du produit des principaux impôts locaux - ce que les collectivités territoriales n'ont jamais demandé.
Sous le bénéfice de ces observations, j'invite à adopter sans modification les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements », qui retranscrit pour une large part les conséquences des décisions prises dans le cadre d'autres missions. À titre personnel, je m'abstiendrai, car je désapprouve la politique suivie.
M. Jean Arthuis, Président. - Je rends hommage à votre engagement. Nous examinons ici la traduction budgétaire de la mécanique fiscale ou de la dépense fiscale.
Mme Marie-France Beaufils , rapporteure spéciale . - Il m'a parfois été difficile d'obtenir les informations nécessaires, car il faut souvent croiser plusieurs documents budgétaires. Cela ne favorise pas la bonne information des parlementaires.
Mme Nicole Bricq . - Je ne reviens pas sur l'analyse technique exposée page 17 du projet de rapport, mais je note ce que vous écrivez à propos des justifications fournies pour 2011 : vous estimez qu'elles ne permettent pas d'y voir très clair. Dans ces conditions, comment fonder son opinion ?
Mme Marie-France Beaufils , rapporteure spéciale . - L'information dont dispose l'administration ne permet pas de rattacher un remboursement et dégrèvement à une dépense fiscale. Nous sommes frustrés, c'est le terme !
Mme Nicole Bricq . - Comment s'opère l'arbitrage entre RSA et PPE ?
Mme Marie-France Beaufils , rapporteure spéciale. - Le RSA « Complément d'activité » est considéré comme un acompte non remboursable à valoir sur la PPE.
M. Jean Arthuis, président . - La PPE est un crédit d'impôt. Le RSA est versé par les caisses d'allocations familiales, qui transmettent une partie de la facture aux conseils généraux et l'autre à l'État.
A l'invitation de la rapporteure spéciale, la commission a alors décidé de proposer au Sénat l'adoption sans modification des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements ».
* *
*
Réunie à nouveau le jeudi 18 novembre 2010, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a confirmé sa décision de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission.
* 1 A compter de 2011, cette norme prévoit que les dépenses nettes du budget général et les prélèvements sur recettes seront stabilisés en volume, et que ce même agrégat sera stabilisé en valeur, hors charge de la dette et dépenses de pensions.
* 2 Et non par type de remboursements et dégrèvements, comme il sera proposé dans le cadre de l'analyse par programme.
* 3 Sauf pour les PME, cf. infra.
* 4 Qui devrait générer de moindres restitutions d'excédents de versement d'acomptes en 2011.
* 5 Cette refonte a notamment résulté des recommandations de votre rapporteure spéciale (voir le rapport d'information n° 8, 2077-2008 : Remboursements et dégrèvements : le pilotage déficient de 83,1 milliards d'euros).
* 6 Seule la ligne budgétaire qui avait été prévue pour la taxe carbone a été supprimée, en conséquence de la censure du Conseil constitutionnel.
* 7 L'article prévoit également d'exclure du crédit d'impôt en faveur du développement durable les dépenses de parement des matériaux d'isolation thermique des parois opaques, afin de ne plus subventionner des éléments d'habillage dont la finalité n'est pas environnementale.
* 8 Car elle-même plafonnée à 1,5 % alors que le PVA n'intervient qu'à compter de 3 % de la valeur ajoutée.
* 9 Par ailleurs, les entreprises dont le chiffre d'affaires est inférieur à 2 millions d'euros bénéficient d'une majoration du dégrèvement de CVAE de 1 000 euros.
* 10 Pour pertes de récolte et en faveur des jeunes agriculteurs.