Rapport général n° 111 (2010-2011) de M. Jean-Pierre FOURCADE , fait au nom de la commission des finances, déposé le 18 novembre 2010


N° 111

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2010-2011

Enregistré à la Présidence du Sénat le 18 novembre 2010

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances pour 2011 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

Par M. Philippe MARINI,

Sénateur,

Rapporteur général.

TOME III

MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(Seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 12

ENGAGEMENTS FINANCIERS DE L'ÉTAT

COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE :
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L'ÉTAT

Rapporteur spécial : M. Jean-Pierre FOURCADE

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis , président ; M. Yann Gaillard, Mme Nicole Bricq, MM. Jean-Jacques Jégou, Thierry Foucaud, Aymeri de Montesquiou, Joël Bourdin, François Marc , Serge Dassault, vice-présidents ; MM. Philippe Adnot, Jean-Claude Frécon, Mme Fabienne Keller, MM. Michel Sergent, François Trucy , secrétaires ; M. Philippe Marini, rapporteur général ; M. Jean-Paul Alduy, Mme Michèle André, MM. Bernard Angels, Bertrand Auban, Denis Badré, Mme Marie-France Beaufils, MM. Claude Belot, Pierre Bernard-Reymond, Auguste Cazalet, Yvon Collin, Philippe Dallier, Jean-Pierre Demerliat, Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. Éric Doligé, Philippe Dominati, André Ferrand, François Fortassin, Jean-Pierre Fourcade, Adrien Gouteyron, Charles Guené, Claude Haut, Edmond Hervé, Pierre Jarlier, Yves Krattinger, MM. Gérard Longuet, Roland du Luart, Jean-Pierre Masseret, Marc Massion, Gérard Miquel, Albéric de Montgolfier, François Rebsamen, Jean-Marc Todeschini, Bernard Vera.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 13 ème législ.) : 2824, 2857, 2859 à 2865 et T.A. 555

Sénat : 110 (2010-2011)

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. - La mission « Engagements financiers de l'Etat »

1. Les crédits de la mission « Engagements financiers de l'Etat » progressent, en valeur, de 6 % entre 2010 et 2011. Cette évolution traduit la progression de la charge d'intérêts que doit supporter l'Etat sous l'effet de l'accroissement de l'encours de sa dette.

2. Le besoin de financement de l'Etat atteint 189,4 milliards d'euros en 2011 . Il s'inscrit en diminution de 50 milliards d'euros par rapport à 2010, la réduction du déficit (-60 milliards d'euros) étant partiellement compensée par l'augmentation des amortissements (+10 milliards d'euros).

3. L'encours de la dette nominale passerait de 1 224,8 milliards d'euros à fin 2010 à 1 315,1 milliards d'euros fin 2011, soit une augmentation de 7,4 % (et de 51 % depuis 2005). La structure de l'encours témoigne, néanmoins, d'un reflux salutaire de l'endettement à court terme , qui passerait de 18,6 % fin 2009 à moins de 15 % fin 2011.

4. 70,6 % de la dette négociable étaient détenus par les non-résidents fin juin 2010. Un tiers de cette dette serait toutefois détenue par des non-résidents ressortissants de la zone euro.

5. La charge de la dette devrait s'établir à 45,4 milliards d'euros en 2011, soit une augmentation de 4,5 milliards d'euros par rapport aux dernières estimations pour 2010. Cette augmentation résulterait principalement d'un effet volume sur la dette à plus d'un an et de l'augmentation des taux courts . Le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 prévoit une progression annuelle de la charge de la dette de plus de 4 milliards d'euros par an , imputable aux deux tiers à la hausse de l'encours.

6. La majoration des crédits de l'action 3 « Trésorerie de l'Etat » est imputable à la rémunération des dotations non consomptibles placées auprès du Trésor par les opérateurs chargés de la mise en oeuvre des investissements d'avenir . Cette rémunération mobilisera 569 millions d'euros en 2011 .

7. Une redéfinition de l'architecture du programme 114 « Appels en garantie de l'Etat » demeure nécessaire, afin de mieux faire apparaître les enjeux financiers et les risques associés à ces garanties.

II. - Le compte d'affectation spéciale
« Participations financières de l'Etat »

1. Dans le prolongement des Etats généraux de l'industrie, la gestion des participations de l'Etat est désormais axée sur la conduite d'une politique industrielle active . Cette évolution s'est notamment matérialisée par la nomination d'un commissaire aux participations de l'Etat.

2. Le cadre d'intervention renouvelé de l'Etat actionnaire pose avec une acuité grandissante la question de l'articulation des missions de l'Agence des participations de l'Etat et du Fonds stratégique d'investissement .

3. Le projet annuel de performances demeure construit sur une approche purement patrimoniale de la gestion des participations de l'Etat. La réorientation majeure de la stratégie de l'Etat actionnaire ne transparaît donc ni dans la présentation stratégique des programmes, ni dans les objectifs et indicateurs de performance, ce qui contribue à vider un peu plus de sa substance un PAP déjà fort peu consistant .

3. La qualité des réponses au questionnaire budgétaire est globalement très insuffisante .

III. - Le financement des primes d'épargne-logement

1. Le programme 145 « Epargne » porte, en 2011, plus de 1,1 milliard d'euros au titre du financement des primes d'épargne-logement , versées lors de la clôture d'un plan d'épargne-logement ou d'un compte d'épargne-logement.

2. Par convention en date du 17 décembre 1992, l'Etat a confié la gestion de ces primes au Crédit foncier de France . Celui-ci a par ailleurs accepté de consentir des avances rémunérées à l'Etat, d'un montant maximal d'un milliard d'euros, au cas où les provisions versées par le Trésor seraient insuffisantes pour couvrir les appels de primes.

3. Depuis 2006, la programmation budgétaire s'est révélée systématiquement défaillante , obligeant l'Etat à recourir massivement aux avances du Crédit foncier. Le découvert cumulé, fin 2008, s'élevait à près de 963 millions d'euros.

4. La budgétisation des primes constitue un exercice délicat car elle nécessite d'anticiper le comportement des épargnants. En revanche, votre rapporteur spécial déplore que l'évaluation initiale n'ait jamais tenu compte du report de charge accumulé . L'Etat a ainsi profité des avances du Crédit foncier pour créer une charge extra-budgétaire au mépris des principes d'annualité, d'universalité et de sincérité budgétaires.

5. Pour des raisons conjoncturelles, le montant des primes versées en 2009 et 2010 a connu une très forte diminution , qui doit conduire à envisager l'apurement définitif du découvert auprès du Crédit foncier à la fin de l'exercice 2010.

6. En 2011 et 2012, le montant des primes versées devrait à nouveau augmenter sensiblement pour des raisons économiques et fiscales. Votre rapporteur spécial s'inquiète par conséquent du montant inscrit dans le projet de loi de finances - 1,1 milliard d'euros - qui, au regard des dépenses passées, se révèle modeste.

Au 10 octobre 2010, date limite fixée par la LOLF, 98 % des réponses au questionnaire avaient été adressées à votre rapporteur spécial.

I. LA MISSION « ENGAGEMENTS FINANCIERS DE L'ETAT »

Les crédits de la mission « Engagements financiers de l'Etat » progressent, en valeur, de 6 % entre 2010 et 2011, cette hausse étant concentrée sur la charge de la dette négociable (+ 7 %). Cette évolution traduit la progression de la charge d'intérêts que doit supporter l'Etat sous l'effet de l'accroissement de l'encours de sa dette.

Evolution en valeur et à périmètre courant des crédits de paiement de la mission

(en euros)

NB : aucune modification de maquette n'intervient en 2011.

Source : commission des finances, d'après le projet annuel de performances

A. LE PROGRAMME 117 « CHARGE DE LA DETTE ET TRÉSORERIE DE L'ETAT »

C'est sur le programme 117 « Charge de la dette et trésorerie de l'Etat » que s'impute l'accroissement des crédits de la mission, les CP ouverts pour honorer le paiement des intérêts de la dette négociable augmentant de 6 % (+2,4 milliards d'euros).

1. Le financement de l'Etat en 2011
a) Le besoin de financement pour 2011

La lecture du tableau de financement de l'Etat, tel qu'il figure à l'article d'équilibre du projet de loi de finances, prévoit un besoin de financement de 189,4 milliards d'euros en 2011 . Ce besoin résulte, pour 92 milliards d'euros, du déficit budgétaire et, pour 97,4 milliards d'euros, des amortissements de dettes à moyen et long termes ou reprises par l'Etat. Il s'inscrit donc en diminution de 50 milliards d'euros par rapport à 2010, la réduction du déficit (- 60 milliards d'euros) étant partiellement compensée par l'augmentation des amortissements (+ 10 milliards d'euros).


Evolution du tableau de financement de l'Etat

(en milliards d'euros)

(1) LFR du 7 mai 2010

Source : documentation budgétaire

Votre rapporteur spécial observe que le montant des tombées obligataires de 2011 est évalué à 96,8 milliards d'euros, compte tenu du rachat, entre janvier et fin septembre 2010, de 16 milliards d'euros de titres (BTAN et OAT) arrivant à échéance en 2011 ( cf . encadré).

La conduite du programme de financement
à moyen et long termes de l'Etat en 2010

Les émissions à moyen et long termes (OAT et BTAN) nettes des rachats s'élèvent à 148,9 milliards d'euros au 30 septembre 2010, soit 79,2 % des 188 milliards d'euros annoncés pour l'année 2010 ; le degré d'avancement est légèrement inférieur à celui de l'année dernière, puisqu'à la même époque, en 2009, 82,6 % du programme avait été réalisé. Ce montant est le résultat de 165,2 milliards d'euros d'émissions brutes (138,6 milliards d'euros en 2009 à la même époque) et 16,3 milliards d'euros (2,3 milliards d'euros en 2009 au même moment) de rachats de titres de maturité 2011 - ce qui témoigne de la bonne avancée du programme de rachats, qui permettra de diminuer le montant des tombées, et donc celui du besoin de financement de l'Etat, en 2011 .

Au cours du premier semestre 2010, la part des émissions sur les maturités supérieures à 10 ans, sur l'ensemble des émissions à taux fixe, s'établit à 46,5 %, en augmentation par rapport à l'année dernière, où elle s'établissait à 42,8 %. La demande reste très soutenue pour les maturités très longues (supérieures à 15 ans), qui représentent 19,2 % des émissions à taux fixe, contre 18,1 % sur l'ensemble de l'année 2009, et intègrent notamment le lancement, au début du mois de mars, d'un nouveau titre de référence de maturité 50 ans, l'OAT 25 avril 2060, pour un montant de 5 milliards d'euros et à un taux de rendement de 4,17 %. La demande est encore plus manifeste pour la maturité 10 ans , qui attire 27 % des émissions sur ce compartiment, contre 21,4 % sur l'ensemble de l'année dernière, et provient d'investisseurs de différentes catégories, notamment de banques, d'assureurs français et de banques centrales.

De ce fait, la durée de vie moyenne de la dette augmente et s'établit, à la fin du mois de septembre, à 7 ans , retrouvant ainsi un niveau proche de celui qui prévalait à l'automne 2008 et peu éloigné de son plus haut niveau historique de 7,28 années, atteint en avril 2007.

Source : réponses au questionnaire

Toutes choses égales par ailleurs, les tombées obligataires atteindraient en outre un pic en 2012, où elles pourraient s'élever à plus de 116 milliards d'euros 1 ( * ) .


Tombées de dette à moyen et long termes

(en milliards d'euros)

Remarque 1 : les montants pour 2011 et 2012 ne tiennent pas compte des éventuels rachats qui pourront être effectués d'ici à la fin de 2010 pour les titres d'échéance 2011 et d'ici à la fin de 2011 pour les titres d'échéance 2012.

Remarque 2 : le montant pour 2013 ne tient pas compte des émissions à deux ans à réaliser en 2011, et qui viendront majorer les amortissements en 2013.

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires et l'Agence France Trésor

b) Les ressources de financement

La couverture du besoin de financement serait assurée par des émissions nettes à moyen et long termes d'un montant global de 186 milliards d'euros, soit un léger repli par rapport à 2010 (188 milliards d'euros). Au total, le plafond de variation de la dette à moyen et long termes s'élèverait à 89,2 milliards d'euros en 2011.

Les autres ressources de financement s'établissent comme suit :

1) une variation négative des dépôts de correspondants est attendue, à hauteur de 3,0 milliards d'euros. Elle correspond à une approche prudente et relativement conventionnelle, et anticipe notamment une décollecte des collectivités territoriales après la hausse significative des dépôts constatée en 2009 ;

2) le solde du compte de Trésor demeurerait quasiment stable (+ 1,2 milliard d'euros), la variation résultant des écarts qui peuvent être estimés entre les besoins de trésorerie du début de l'année 2011 et ceux du début de l'année 2012 ;

3) les autres ressources de trésorerie sont attendues à + 3,0 milliards d'euros, et comprennent la charge d'indexation et les indexations à l'émission. Votre rapporteur spécial rappelle en effet que la charge d'indexation est inscrite en ressource de financement afin de neutraliser l'impact de la charge budgétaire correspondante, intégrée au besoin de financement mais qui ne donne pas lieu à décaissement . Les primes et décotes sont, comme toujours en prévision, nulles, même si elles sont susceptibles d'apporter de substantielles ressources de trésorerie en gestion ( cf. infra ) ;

4) compte tenu de ces éléments, l'encours des bons du Trésor à taux fixe et à intérêts précomptés (BTF) diminuerait modérément (- 0,7 milliard d'euros), confirmant la trajectoire baissière enclenchée en 2010.

2. Une dette négociable en forte croissance

L'encours de la dette nominale passerait de 1 224,8 milliards d'euros à fin 2010 à 1 315,1 milliards d'euros fin 2011, soit une augmentation de 7,4 % (et de 51 % depuis 2005).

En 2011 comme au cours des années précédentes, la hausse de l'encours des titres à moyen et long termes (OAT et BTAN) résulte principalement de l'évolution du déficit budgétaire, qui constitue le principal déterminant de l'appel net au marché. Ainsi, depuis 2007, l'évolution de cet encours progresse au même rythme que cet appel net, qui s'est établi à 28,5 milliards d'euros en 2007, 31 milliards d'euros en 2008, 54,9 milliards d'euros en 2009 et 105 milliards d'euros en 2010.


Evolution de l'encours de la dette négociable

(en milliards d'euros)

* Nominal pour les titres à taux fixe, nominal × coefficient d'indexation à la date considérée pour les titres indexés.

Source : documentation budgétaire

a) Un reflux salutaire de la dette à court terme

La structure de l'encours témoigne, par ailleurs, d'un reflux salutaire de l'endettement à court terme (BTF), dont l'analyse requiert de revenir sur l'évolution observée ces dernières années. La variation de l'encours des BTF est dictée par les évolutions non anticipées du besoin de financement de l'Etat, qu'il s'agisse d'une variation en cours d'année du déficit budgétaire, du compte du Trésor ou des dépôts de correspondants. Ainsi :

1) en 2007 , la variation des BTF en exécution (+ 12,2 milliards d'euros) s'est avérée légèrement supérieure à la variation prévue en LFI (+ 12 milliards d'euros), et ce en dépit d'une baisse du besoin de financement en exécution. Ce hiatus résulte du choix fait par l'Etat de baisser le montant de ses émissions à moyen et long termes de manière à maintenir la liquidité du segment des BTF, dans un contexte ou l'encours de BTF était très bas ;

2) en 2008 , la variation des BTF (+ 59,8 milliards d'euros) a résulté du creusement du besoin de financement en exécution (+ 38,1 milliards d'euros) par rapport à la loi de finances initiale, qui anticipait une variation de + 24,3 milliards d'euros ;

3) en 2009 , à l'inverse, l'ampleur de la dégradation du déficit budgétaire a conduit à réviser par deux fois le tableau de financement de l'Etat . Les émissions nettes à moyen et long termes ont ainsi été relevées de 30 milliards d'euros par rapport à la loi de finances initiale, la variation des BTF en exécution s'établissant à + 75,8 milliards d'euros, soit environ 28 milliards d'euros de moins que la somme de la variation prévue en LFI (+ 20,9 milliards d'euros) et du creusement du besoin de financement en exécution (83,1 milliards d'euros).

Si, compte tenu du niveau historiquement bas des taux courts, ces évolutions ont indiscutablement permis de financer notre endettement « de crise » à moindre coût, votre rapporteur spécial avait plusieurs fois pointé les risques associés à l'accroissement de notre endettement à court terme, en cas de retournement des taux . De ce point de vue, il convient donc de saluer l'inversion de tendance observée en 2010 , où l'encours des BTF devrait refluer de 14,5 milliards d'euros, alors même qu'une hausse de 31 milliards
d'euros était prévue en loi de finances initiale. Selon l'Agence France Trésor, cette correction de plus de 45 milliards d'euros a été rendue possible par l'augmentation des dépôts des correspondants 2 ( * ) et par d'importantes contributions du compte du Trésor 3 ( * ) (17,2 milliards d'euros en 2010).

Au total, l'encours de dette à court terme devrait s'établir à 199,6 milliards d'euros à fin 2010, soit 16,1 % de la dette totale, contre 18,6 % fin 2009 (- 2,5 %). En 2011, selon l'AFT, « la baisse de la part des BTF devrait se poursuivre à un rythme relativement soutenu pour passer sous la barre des 15 % du stock de la dette » .


Evolution de l'encours de la dette négociable de l'Etat

(en milliards d'euros - valeur nominale)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

b) Une dette détenue à plus de 70 % par les « non-résidents »

Enfin, 70,6 % de la dette négociable étaient détenus par les non-résidents fin juin 2010 (84,1 % des BTF, 89,8 % des BTAN et 61,7 % des OAT), contre 65,9 % fin juin 2009 et 61,8 % fin juin 2008. Selon l'Agence France Trésor, un tiers de la dette serait toutefois détenue par des non-résidents ressortissants de la zone euro . Ces estimations résultent du croisement des statistiques de la balance des paiements fournies par la Banque de France et d'une étude du FMI ( Coordinated Portfolio Investment Survey ). Selon les réponses au questionnaire, « si l'on fait l'hypothèse que la structure de la détention de l'ensemble de la dette extérieure de la France est identique à la structure de la détention de la dette de l'Etat et que cette structure de détention n'a pas évolué entre 2008 et 2010, il est possible d'estimer la proportion de la dette de l'Etat qui est détenue par des non-résidents situés à l'intérieur de la zone euro, soit environ un tiers (...) ».

Notre dette serait donc détenue à un tiers par des créanciers domestiques, à un tiers par des créanciers « quasi-domestiques » et à un dernier tiers par des non-résidents au sens plein du terme. Interrogés sur ce point, les responsables de l'Agence France Trésor font valoir qu'un niveau de détention élevé de la dette française par des non-résidents atteste de la confiance de la communauté des investisseurs dans la qualité de la signature et l'économie française et sécurise la gestion de la dette en accroissant sa diversification géographique et par détenteur 4 ( * ) . Cette diversification permet également de diminuer le coût de la charge de la dette en augmentant la concurrence potentielle pour l'achat des titres de dette française. L'AFT relève en outre que la demande émanant des principaux détenteurs de dette souveraine est généralement « stabilisante » : la demande structurelle des banques centrales est, à cet égard, peu sensible au taux d'intérêt et ces banques pratiquent une gestion de leurs actifs assez proche de la stratégie de détention jusqu'à l'échéance, ce qui en fait des investisseurs de long terme qui stabilisent le marché en absorbant, par leurs achats récurrents, l'essentiel des émissions nettes.

3. La charge de la dette négociable et ses déterminants

La charge de la dette devrait s'établir à 45,4 milliards d'euros en 2011, dont 44,7 milliards d'euros au titre de la dette négociable, 0,7 milliard d'euros au titre de la trésorerie ( cf. infra ) et 3 millions d'euros au titre de la dette non négociable 5 ( * ) .

a) Une hausse importante en 2011, après de « bonnes nouvelles » en 2010

Ce montant global s'inscrit en augmentation de 4,5 milliards d'euros par rapport aux dernières estimations pour 2010 , année durant laquelle la charge de la dette devrait à nouveau être sensiblement inférieure aux prévisions : soit 41 milliards d'euros au lieu de 43 milliards anticipés par la LFR du 9 mars 2010. Outre la moindre rémunération due par le Trésor au titre des dotations non consomptibles (analysée plus loin), cette baisse serait principalement due au très bas niveau des taux courts 6 ( * ) (- 1,6 milliard d'euros) et aux effets calendaires 7 ( * ) (- 0,5 milliard d'euros).

L'augmentation de la charge de la dette attendue en 2011 résulterait principalement :

1) d'un effet volume sur la dette à plus d'un an , dont le stock aura augmenté de 105 milliards d'euros en 2010 (environ + 3,3 milliards d'euros) ;

2) d'un effet taux également haussier (+ 0,8 milliard d'euros), en raison de l'augmentation des taux courts (attendus à 1,16 % 8 ( * ) en moyenne contre environ 0,5 % en 2010).

En revanche, l'évolution des taux longs n'alourdirait pas la charge de la dette en 2011 , ces taux se maintenant à un niveau modéré en 2011 (3 % à 10 ans en moyenne annuelle, contre 3,2 % en 2010). Votre rapporteur spécial rappelle, à cet égard, que l'impact des variations de taux sur la charge budgétaire de la dette à moyen et long termes n'est pleinement constitué que l'année suivant l'émission. Les taux bas de 2010 produiront donc leurs pleins effets à la baisse sur la charge de la dette de 2011. Enfin, l'AFT souligne que « dans la mesure où le volume élevé des émissions et la demande des marchés conduisent à réabonder chaque année des lignes anciennes dont les taux faciaux diffèrent en règle générale des taux d'émission, une partie importante de la baisse des taux de marché enregistrée en 2010 se traduit par la perception de primes à l'émission » . Ces primes et décotes sont prises en compte en comptabilité générale comme en comptabilité nationale, mais non en comptabilité budgétaire 9 ( * ) . Leur montant net atteint 5,8 milliards d'euros à la fin septembre 2010, soit, comme l'a fait valoir le directeur général de l'AFT, l'équivalent des prêts consentis à la Grèce.

Ces considérations conduisent votre rapporteur spécial à revenir brièvement sur les enjeux associés à la qualité de la signature française sur les marchés . Comme l'indique l'indicateur de spread qui suit, la France fait toujours partie, avec l'Allemagne et les Pays-Bas, du trio de tête des Etats de la zone euro se finançant dans les meilleures conditions.

Ecart des conditions de financement dans la zone euro

(en points de base)

Ce graphique est élaboré en comparant les taux d'une dette sur le marché secondaire à une moyenne pondérée des conditions de financement des pays de la zone euro sur l'ensemble des maturités. Les Etats sous l'axe du zéro se financent à de meilleures conditions que la moyenne de la zone euro.

Source : Agence France Trésor

L'étude plus fine du spread moyen entre la France et l'Allemagne montre néanmoins que celui-ci a pu se creuser fortement au cours de l'année 2010, pour atteindre un pic de 46,69 points de base en juin dernier, et avant de se rétablir à 28,92 points de base le 22 octobre dernier. Selon l'AFT, trois raisons principales expliquent ces évolutions :

1) dans un contexte de forte volatilité des marchés, les investisseurs privilégient les produits financiers les plus liquides , et notamment les contrats futurs sur le Bund allemand, qui induisent une liquidité plus importante des titres sous-jacents ;

2) le décrochage de juin 2010 est survenu lorsque la BAFIN a fait part de sa décision unilatérale d'interdire temporairement les ventes à découvert sur titres obligataires cotés en Allemagne et sur actions de sociétés côtés en Allemagne. Ce « cavalier seul » a été interprété comme un affaiblissement de la cohésion de la zone euro et a entraîné un report vers la signature la plus sûre ;

3) enfin, la qualité relative du crédit s'apprécie traditionnellement en observant le déficit public et non l'endettement. Cette focalisation sur le flux de dette plus que sur son stock permet, à nouveau, à l'Allemagne de bénéficier d'une appréciation plus favorable que la France.

Le spread toutes maturités entre la France et l'Allemagne en 2010

(en points de base)

Source : commission des finances, d'après l'AFT

b) Une programmation pluriannuelle révélatrice du choc à venir

Votre rapporteur spécial rappelle enfin que le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 prévoit une augmentation annuelle de la charge de la dette de plus de 4 milliards d'euros par an , imputable aux deux tiers à l'augmentation de l'encours de la dette ( cf . graphique).

En 2012 , la charge de la dette croîtrait de 5,1 milliards d'euros par rapport à 2011 pour s'établir à 50,5 milliards d'euros. Cette hausse s'expliquerait par un effet volume sur la dette de moyen et long termes (+ 3,0 milliards d'euros) et par une hausse des taux à 3 mois d'environ 110 points de base entre 2011 et 2012, partiellement compensée par les gains de refinancement dont l'Etat continuerait de bénéficier. Au total, l'effet taux contribuerait à hauteur de 1,5 milliard d'euros à l'augmentation de la charge de la dette. La provision pour charge d'indexation croîtrait de 0,4 milliard d'euros sous l'effet d'une croissance de l'indice des prix de 0,25 %.

En 2013 , la charge de la dette croîtrait de 4,7 milliards d'euros par rapport à 2012, à raison de + 2,7 milliards d'euros dus à l'effet volume et de + 2 milliards d'euros dus à l'effet taux. Le Gouvernement qualifie son hypothèse de taux de « très prudente » , en anticipant une hausse des taux à 3 mois d'environ 140 points de base entre 2012 et 2013, de sorte que ceux-ci atteindraient 3,5 % en moyenne annuelle, soit le niveau qui prévalait en 2008, avant la crise.


L'évolution de la charge de la dette

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

4. La trésorerie de l'Etat et l'impact des investissements d'avenir

L'action 3 « Trésorerie de l'Etat » voit ses crédits augmenter de 538 millions d'euros entre la LFI pour 2010 et le PLF 2011 (+437 %). Cette évolution résulte essentiellement de la rémunération des dotations non consomptibles confiées aux opérateurs de l'Etat chargés de la mise en oeuvre des investissements d'avenir .

a) Les déterminants « traditionnels » de la charge de trésorerie

Hors rémunération des dotations non consomptibles, les charges nettes de trésorerie devraient s'établir à 92 millions d'euros en 2011 (contre 123 millions d'euros en 2010), soit -292 millions d'euros de rémunération des dépôts des correspondants et 200 millions d'euros de produits de placement. Ces produits proviennent des placements sur les marchés financiers des excédents ponctuels de trésorerie .

S'agissant de la gestion optimisée de la trésorerie, la Cour des comptes avait souligné, dans sa note d'exécution budgétaire 2009, la nécessité de remobiliser le réseau comptable de la direction générale des finances publiques (DGFiP) et de mettre à niveau les systèmes d'information pour assurer le respect de l'obligation d'annonce des collectivités territoriales et de leurs établissements. Interrogé sur ce point, le responsable de programme fait valoir que la DGFiP a d'ores et déjà entamé une « action informelle mais directe de resensibilisation de son réseau comptable à l'occasion des journées interrégionales qu'elle organise mensuellement en province » . Le déploiement du nouveau logiciel de saisie des ordres (BdF direct) a également permis de rappeler directement au niveau local l'obligation et l'importance qui s'attache à son respect. Ces rappels informels semblent déjà avoir porté leurs premiers fruits, puisqu'au 31 juillet 2010, le taux d'annonce s'élevait à un peu moins de 97 % . Selon les réponses au questionnaire, « cette amélioration doit être consolidée et poursuivie. Il est ainsi prévu que la DGFiP, avec l'appui de l'AFT, conduise des actions plus spécifiques et formalisées de rappel à l'obligation d'annonce, notamment à l'occasion du déploiement d'un module de validation ou de refus par l'AFT des ordres passés pour le jour même en contravention avec les obligations réglementaires . Par ailleurs, des actions ciblées sur les départements à forts enjeux et dont le taux de respect de l'obligation d'annonce est le plus bas seront mises en oeuvre ».

b) L'impact des investissements d'avenir

La hausse des crédits de l'action 3 est imputable à la rémunération des dotations non consomptibles placées auprès du Trésor par les opérateurs chargés de la mise en oeuvre des investissements d'avenir. Cette rémunération mobilisera 569 millions d'euros en 2011 , après n'avoir représenté qu'environ 200 millions d'euros en 2010, compte tenu des délais de conclusion des conventions entre l'Etat et les opérateurs 10 ( * ) . Selon les réponses au questionnaire, en raison de la montée en charge des sélections de projet et de l'effet « année pleine » pour les projets déjà sélectionnés, ce coût devrait être encore supérieur en 2012 (+ 0,1 milliard d'euros).

B. LES AUTRES PROGRAMMES DE LA MISSION

Les trois autres programmes de la mission voient leur dotation diminuer en valeur, sous l'effet de la baisse attendue des appels en garantie de l'Etat, du tassement relatif des primes à servir au titre de l'épargne-logement et de l'extinction progressive des dispositifs donnant lieu à majoration de rente.

1. Le programme 114 « Appels en garantie de l'Etat »

227,3 millions d'euros en AE=CP sont demandés, pour 2011, au titre du programme 114 « Appels en garantie de l'Etat », soit une diminution de 8 % en valeur par rapport à la budgétisation 2010. Ce programme retrace la dépense associée à l'ensemble des dispositifs pour lesquels l'Etat a octroyé sa garantie. Plus de la moitié des crédits sont regroupés sur l'action 4 « Développement international de l'économie française » (122,5 millions d'euros), qui retrace les dépenses liées aux garanties mises en oeuvre par la Compagnie française pour le commerce extérieur ou COFACE (assurance-crédit, assurance-prospection, garantie de change, garantie du risque économique, garanties de taux d'intérêts et garanties du risque exportateur).

Pour mémoire, et selon le compte général de l'Etat annexé au projet de loi de règlement pour 2009, la dette garantie 11 ( * ) , qui constitue 9,4 % des engagements hors bilan de l'Etat, a connu une progression spectaculaire en passant de 78,6 milliards d'euros en 2008 à 150 milliards d'euros en 2009 (+ 90,8 %). Ce phénomène résulte directement des mesures de soutien mises en oeuvre consécutivement à la crise de liquidité qui a affecté les établissements financiers. L'Etat garantit notamment les titres de créances émis par la Société de financement de l'économie française (77 milliards en contre-valeur euros) et les fonds levés par Dexia et trois de ses filiales auprès d'établissements de crédit et de déposants institutionnels (engagement maximal de 36,5 milliards d'euros). La garantie de protection des épargnants (19,2 % des engagements hors-bilan) s'élève, quant à elle, à 307,02 milliards d'euros (+ 6,1 %). Elle couvre l'ensemble des dépôts effectués par les épargnants sur les livrets réglementés ainsi que les créances détenues par les établissements de crédit sur le fonds d'épargne 12 ( * ) au titre de la centralisation partielle des dépôts effectués sur les livrets.

Dans sa note d'exécution budgétaire relative à l'exercice 2009, la Cour des comptes avait recommandé la redéfinition de l'architecture du programme, afin de mieux faire apparaître les enjeux financiers et les risques associés aux garanties octroyées par l'Etat . Etaient ainsi suggérés une présentation du portefeuille des garanties, des encours garantis et des garanties sans effet direct sur le budget général, ainsi qu'une évaluation des recettes tirées de l'octroi de garanties, le renseignement du résultat technique des activités d'assurance et le suivi de l'évolution des frais de gestion.

Le responsable de programme ne semble pas convaincu de la nécessité d'enrichir de ces éléments la documentation budgétaire, au motif que « les enjeux financiers et les risques associés aux garanties octroyées par l'Etat sont présentés dans le rapport annuel sur les opérations effectuées par la Coface pour le compte de l'Etat » , transmis annuellement au Parlement. Votre rapporteur spécial ne partage pas ce point de vue, et rappelle que les projets annuels de performance ont été conçus, dès l'origine, comme des documents « autosuffisants », proposant au Parlement une information consolidée et ne nécessitant pas de recoupements entre sources multiples. Sans aboutir à la constitution d'une « somme » annuelle sur l'Etat garant, un rappel des principaux ordres de grandeur serait donc le bienvenu dans les bleus à venir.

a) Les caractéristiques de l'exécution 2010

23,3 millions d'euros avaient été consommés au 31 août 2010 sur les 247,8 millions d'euros ouverts en LFI pour 2010. Aucun appel en garantie n'avait été enregistré au titre des actions 1 « Agriculture et environnement », 3 « Financement des entreprises et industrie » et 4 « Développement international de l'économie française ». D'après les éléments contenus dans les réponses au questionnaire, l'exécution des crédits devrait atteindre 111,1 millions d'euros au 31 décembre 2010, soit 45 % des crédits ouverts en LFI.


Prévision d'exécution 2010

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire

22,9 millions d'euros ont d'ores et déjà été payés dans le domaine du logement , principalement au titre du fonds de garantie à l'accession sociale (FGAS). Le responsable de programme indique également que la totalité des crédits de l'action 4 « Développement international de l'économie française » devraient être consommés, à raison de 63 millions d'euros pour l'assurance prospection, 6 millions d'euros pour la garantie de change, 8,6 millions d'euros pour la garantie du risque économique et 8,5 millions d'euros pour la garantie du risque exportateur. Ces montants correspondent au solde des procédures déficitaires gérées par la Coface au titre de l'année 2009.

b) La budgétisation en 2011

L'action 1 « Agriculture et environnement » voit sa dotation reconduite en 2011 et l'action 3 13 ( * ) « Financement des entreprises et industrie » n'est pas dotée.

Les crédits de l'action 2 « Soutien au domaine social, logement, santé » augmentent de 10 % (+ 2,6 millions d'euros) pour s'établir à 28,8 millions d'euros. Cette révision est inspirée par la prudence et tire les conséquences de l'augmentation du montant des sinistres en 2010 (1,8 million d'euros au 31 août contre 0,6 million d'euros en 2009 à la même date), dans un contexte de crise.

Les crédits de l'action 4 « Développement international de l'économie française » augmentent significativement (+ 42 %) et atteignent 122,5 millions d'euros en 2011. Cette hausse concerne exclusivement les dispositifs d'assurance-prospection (+ 32,3 millions d'euros) et de garantie du risque exportateur (+ 11,1 millions d'euros), auxquels les entreprises ont de plus en plus recours.

L'action 5 « Autres garanties » voit en revanche ses crédits fortement diminuer (- 44 %) pour atteindre 74,9 millions d'euros. L'ajustement porte sur le « provisionnement d'appels en garantie non connus à ce stade » , qui passe de 124,4 millions d'euros en 2010 à 65,3 millions d'euros en 2011. Ce mouvement n'étant expliqué ni dans le projet annuel de performances ni dans les réponses au questionnaire budgétaire, on peut soupçonner qu'il résulte de considérations d'opportunité, et plus précisément de la nécessité de « gager » l'inflation des crédits ouverts au titre des autres actions.

2. Le programme 145 « Epargne »

Le programme 145 « Epargne » voit ses crédits diminuer de 11 % en 2011, sous l'effet de la baisse du montant de primes d'épargne-logement à servir. Votre rapporteur spécial a consacré, en 2010, des travaux de contrôle au financement et à la budgétisation des primes d'épargne-logement. Les résultats de ces travaux sont annexés au présent rapport et incluent une analyse de la prévision budgétaire du programme 145 pour 2011.

3. Le programme 168 « Majoration de rentes »

Les CP du programme 168 « Majoration de rentes » diminuent de 4 % en valeur en 2011, pour s'établir à 196 millions d'euros. Cette évolution traduit l'extinction progressive des dispositifs donnant lieu à décaissements au titre du présent programme , qui explique également l'absence d'objectifs et d'indicateurs de performance.

a) Une exécution 2010 en ligne avec la prévision

Le programme 168 est exécuté globalement en une seule fois au cours du second semestre de l'année, après que les demandes de remboursement ont été transmises par les débirentiers (sociétés d'assurance 14 ( * ) et mutuelles) au cours du premier semestre et vérifiées au fur et à mesure de leur réception. Les écarts entre le réalisé 2010 et la prévision en loi de finances initiale apparaissent très faibles (204,1 millions d'euros dépensés contre 205,5 millions d'euros prévus) et témoignent de l'amélioration des méthodes de prévision 15 ( * ) .

b) Une extinction progressive

Au titre du présent programme, l'Etat participe au financement des majorations légales de rentes viagères issues de contrats souscrits avant le 1 er janvier 1987, dans les conditions suivantes :

1) pour les contrats antérieurs au 1 er janvier 1977, l'Etat finance au minimum 80 % des majorations pour les rentes versées ;

2) pour les contrats postérieurs à cette date, 10 % des majorations versées sont à la charge de l'Etat.

Le dispositif étant fermé, les droits acquis disparaissent avec la diminution progressive de la population des crédirentiers 16 ( * ) . Selon les réponses au questionnaire, la charge budgétaire représentée par le dispositif des majorations légales de rentes viagères diminue progressivement chaque année, suivant une baisse moyenne de 3 % par an. « Compte tenu de l'âge des crédit-rentiers 17 ( * ) , les majorations légales de rentes viagères vont continuer de décroître et cesseront d'ici une vingtaine d'années, en l'état actuel des estimations sur l'évolution de la mortalité, basées sur les tables de mortalité en vigueur » . L'évolution des crédits pour 2011 confirme donc cette tendance.

II. LE COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L'ETAT »

Le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'Etat » retrace les opérations en capital intéressant les participations financières de l'Etat (programme 731) et les contributions au désendettement de l'Etat et de ses administrations publiques résultant de la valorisation optimale de ces participations (programme 732).

Ses recettes sont constituées par le produit des cessions de titres, parts ou droits de sociétés détenus directement ou indirectement par l'Etat, les reversements de dotations en capital, produits de réduction de capital ou de liquidation, les remboursements des avances d'actionnaires et créances assimilées, les remboursements de créances résultant d'autres interventions financières de nature patrimoniale de l'Etat et les versements du budget général.

Ses dépenses comprennent les dotations à la Caisse de la dette publique et celles contribuant au désendettement d'établissements publics de l'Etat, les dotations au Fonds de réserve pour les retraites, les augmentations de capital, les avances d'actionnaires et prêts assimilés, ainsi que les autres investissements financiers de nature patrimoniale de l'Etat et les commissions bancaires, frais juridiques et autres frais qui sont directement liés à ces opérations.

A. UNE NOUVELLE STRATÉGIE POUR L'ETAT ACTIONNAIRE

Dans le prolongement des Etats généraux de l'industrie tenus le 4 mars 2010, la stratégie mise en oeuvre par l'Etat actionnaire a été profondément révisée. Ce nouveau « cap » s'est matérialisé, le 15 septembre 2010, par la nomination d'un commissaire aux participations de l'Etat , en la personne de Jean-Dominique Comolli. Votre rapporteur spécial a souhaité revenir sur les nouvelles orientations ainsi proposées, après avoir dressé le bilan des interventions de l'Etat actionnaire pour faire face à la crise.

1. L'Etat actionnaire face à la crise

Parallèlement aux moyens budgétaires et fiscaux mobilisés dans le cadre du Plan de relance, plusieurs dispositifs intéressant directement l'Etat actionnaire ont été mis en oeuvre pour faire face à la crise économique et soutenir l'activité. Outre la création de la Société de prises de participation de l'Etat (SPPE), la conclusion du pacte automobile et l'accélération des investissements des entreprises publiques, l'Etat a mis sur pieds un fonds stratégique d'investissement (FSI) dont l'articulation avec l'Agence des participations de l'Etat mérite d'être examinée.

a) L'Etat actionnaire face à la crise

Deux années après sa création, la Société de prises de participation de l'Etat a rempli son mandat, qui était d'apporter aux banques les fonds propres nécessaires au maintien du crédit en faveur des ménages et des entreprises. La SPPE aura souscrit, en deux tranches, près de 21 milliards d'euros de titres de fonds propres émis par les principaux établissements de crédit, à raison de 9,95 milliards d'euros sous forme de titres super subordonnés à durée indéterminée (TSSDI), 9,8 milliards d'euros sous forme d'actions de préférence (AP) et 1 milliard d'euros d'actions ordinaires pour la société Dexia.

Le remboursement par les établissements financiers des titres de fonds propres sont intervenus en octobre et novembre 2009, à l'exception de BPCE. Parallèlement, les emprunts obligataires souscrits par la SPPE auprès de la Caisse de la dette publique ont été remboursés le 4 décembre 2009. Le financement de la SPPE a été assuré par l'émission de 7,7 milliards d'euros de titres à court terme, remboursés à hauteur de 3,4 milliards d'euros à la mi-octobre 2010. Au 15 septembre 2010, l'Etat détient encore, à travers la SPPE, une participation de 1 milliard d'euros au capital de Dexia, et des titres super-subordonnés et actions de préférence émis par BPCE pour un montant de 2,9 milliards d'euros.

Les comptes de la société font apparaître un résultat net de 724 millions d'euros en 2009, lui permettant de verser à l'Etat 637 millions d'euros de dividendes et 162 millions d'euros d'impôt sur les sociétés .

L'Etat actionnaire a, en second lieu, pris part à la mise en oeuvre du « Pacte automobile » signé le 9 février 2009, en négociant avec les constructeurs la conclusions de prêts remboursables in fine , combinant un taux fixe de 6 % et un taux variable en fonction des résultats opérationnels. 377 millions d'euros d'intérêts ont été perçus au titre de 2010 et le retour à meilleure fortune de Renault et PSA leur a permis de rembourser par anticipation 10 milliards d'euros en septembre 2010.

Au titre des dispositifs exceptionnels, il convient enfin de mentionner les investissements exceptionnels consentis par les entreprises publiques (SNCF, RATP, la Poste, EDF, GDF-Suez), initialement chiffrés à 4 milliards d'euros . Les taux de réalisation constatés au terme de l'année 2010 sont globalement satisfaisants, pour l'ensemble des entreprises concernées ( cf . encadré).

La participation des entreprises publiques au plan de relance

La SNCF a consacré 327 millions d'euros au plan de relance gouvernemental, soit un taux de réalisation de 82 % sur 400 millions d'euros et de 94,5 % sur les 346 millions d'euros engagés fin 2009. Les principaux projets retenus par SNCF pour sa participation au plan de relance ont été les suivants : opérations de rénovation et de mi-vie sur les TGV pour 119 millions d'euros ; acquisition de locomotives diesel pour 65 millions d'euros ; projets de vidéosurveillance et mise en conformité des gares pour 50 millions d'euros et projets de télécommunications pour 26 millions d'euros.

La RATP a contribué à hauteur de 450 millions d'euros d'investissements, dont la totalité a été engagée à fin mai 2010. Ces investissements ont porté sur des opérations destinées à renouveler et compléter le matériel roulant, en particulier sur la ligne A du RER et le réseau de bus, ainsi qu'à améliorer l'accessibilité des stations, les rénover et les moderniser. L'État s'était engagé à participer à l'effort de la RATP à travers une dotation en capital à hauteur de 150 millions d'euros. Cette dotation a effectivement été versée le 30 juillet 2010.

La Poste : lors de son conseil d'administration de décembre 2008, La Poste a annoncé une participation au plan de relance de 600 millions d'euros, avec 241 millions d'euros en 2009 et 359 millions d'euros en 2010. Près de 60 % de cette contribution concerne les investissements immobiliers et le développement durable, le solde étant consacré notamment aux systèmes d'information. Les objectifs 2009 ont été atteints avec 241 millions d'euros de décaissements et les objectifs 2010 devraient également être satisfaits dans la mesure où l'ensemble des 600 millions d'euros fait l'objet d'une programmation et de premiers décaissements s'agissant du solde de 359 millions d'euros. L'essentiel des actions engagées est donc en lien avec les investissements immobiliers : rénovation et aménagements intérieurs de bureaux de poste et de plates-formes de distribution du courrier ; construction de nouveaux bâtiments ; réalisation de travaux améliorant la qualité environnementale des constructions, etc. En définitive, 70 % des projets concernent l'immobilier et le développement durable, compte tenu de leur impact sur l'emploi et sur le développement des PME associées à ces projets.

Le groupe EDF a annoncé en décembre 2008 une contribution de 2,5 milliards d'euros au plan de relance en 2009. Ce montant comprend une contribution de 1,1 Md€ au titre de l'outil de production électrique d'EDF SA et de 300 millions d'euros au titre des activités relatives aux systèmes électriques insulaires. Il comprend également une contribution de 300 millions d'euros au titre du réseau de transport géré par RTE et de 300 millions d'euros au titre des réseaux de distribution gérés par ERDF. Il comprend enfin un montant de 200 millions d'euros au titre de la part française des investissements dans le nouveau nucléaire à l'international et de 300 millions d'euros au titre des activités d'énergies renouvelables. Le taux d'exécution de ces investissements était, début 2010, supérieur à 92 %. Au total, le groupe a ainsi investi en 2009 en France près de 7,1 milliards d'euros au titre des activités d'EDF SA, de RTE et d'ERDF, dans un contexte de forte reprise de ses investissements opérationnels de maintenance du parc de production centralisé et des réseaux de transport et de distribution, d'une part, et de poursuite de plusieurs grands chantiers, dont celui de Flamanville 3, d'autre part.

Enfin, le groupe GDF-Suez s'est engagé à investir 200 millions d'euros additionnels en 2009 par rapport au 1,5 milliard d'euros investi par le groupe et ses filiales chaque année en France dans les infrastructures, soit une hausse d'environ 15 % : 100 millions d'euros ont été consacrés à la distribution de gaz naturel, 60 millions d'euros au transport et 40 millions d'euros au stockage. 90 % des investissements prévus dans le cadre du plan de relance ont été réalisés fin 2009 et le solde début 2010.

Source : jaune « Etat actionnaire »

b) Le Fonds stratégique d'investissement et son articulation avec l'Agence des participations de l'Etat

La création du FSI, en décembre 2008, a répondu à l'objectif de remédier au déficit structurel en fonds propres des entreprises françaises . Le fonds poursuit trois stratégies principales consistant à apporter des fonds propres permettant aux entreprises de dynamiser leur croissance organique ou de procéder à des acquisitions, à souscrire au capital d'entreprises en mutation pour accompagner leur transformation et à stabiliser l'actionnariat des entreprises, le cas échéant par rachat de titres. Le FSI est détenu à 51 % par la Caisse des dépôts et consignations et à 49 % par l'État. Ces deux actionnaires l'ont doté de 20 milliards d'euros, dont 14 milliards d'euros de titres de participation et 6 milliards d'euros de liquidités. Sur ces 6 milliards d'euros, 2,4 milliards d'euros ont d'ores et déjà été versés au FSI, le complément pouvant être appelé par le fonds en fonction de ses besoins.

Fin juillet 2010, le FSI avait engagé 2,3 milliards d'euros directement ou via les fonds qu'il a créés. 35 investissements directs ont été décidés pour un montant total engagé de 1,4 milliard d'euros. Plusieurs prises de participations ont été effectuées, notamment dans des PME de croissance, et 257 millions d'euros ont été mobilisés dans le cadre de fonds sectoriels pour la modernisation des équipementiers automobiles, le développement des biotechnologies et de la filière bois. Ces fonds ont, en contrepartie, été abondés par 523 millions d'euros de financements extérieurs. Le FSI a, en outre, mis en place un dispositif de financement en fonds propres dédié aux PME, doté de 1 milliard d'euros.

Votre rapporteur spécial a auditionné le nouveau commissaire aux participations de l'Etat sur l'articulation des missions du FSI et de l'APE . Conformément à sa vocation, l'APE exerce naturellement le rôle de l'Etat actionnaire auprès du FSI, en veillant aux intérêts patrimoniaux de l'Etat. A ce titre, l'agence examine la stratégie du FSI et ses principaux projets d'investissement. Ce rôle se matérialise par la participation du commissaire aux participations de l'Etat aux réunions des organes de gouvernance du FSI, dont il est administrateur. Le commissaire est ainsi membre des trois comités permanents que sont le comité d'investissement, le comité d'audit et des risques et le comité des rémunérations.

Au-delà de cette articulation fonctionnelle, la question se pose de la différence de nature entre les missions du FSI et de l'APE. Selon les réponses au questionnaire budgétaire, « la mission confiée au FSI est différente de celle qui a été assignée à l'APE, même si les deux entités peuvent poursuivent certains objectifs voisins. L'APE gère, pour l'essentiel, un portefeuille de participations historiques de l'Etat qui lui a été apporté à sa création et qui comprend une part importante de participations majoritaires , et l'agence a pour mission essentielle de tenir le rôle d'actionnaire d'entreprises à participation publique pour le compte de l'Etat . L'agence a notamment pour mission d'analyser la stratégie et les grandes décisions de gestion des entreprises qu'elle contrôle, et de proposer au ministre chargé de l'économie la position de l'Etat actionnaire sur ces sujets.

« De son côté, le FSI a été créé pour prendre des participations au capital d'entreprises stratégiques pour l'économie française présentant des besoins en fonds propres . A ce titre, le FSI a vocation à investir dans des PME de croissance, dans des entreprises de taille moyenne présentant un potentiel de création de valeur via la maîtrise de technologies innovantes ou la construction de positions concurrentielles favorables, dans des entreprises de taille moyenne présentes dans des secteurs en phase de mutation et susceptibles d'émerger comme acteur de référence de leur secteur, et dans des grandes entreprises présentant un besoin de fonds propres ou de stabilisation de leur capital dans le cadre de la réalisation de projets industriels structurants. Il a pour objectif essentiel de réaliser des investissements minoritaires au capital d'entreprises stratégiques pour une durée limitée (même si le FSI est un investisseur de long terme), et de faire tourner son portefeuille d'actifs ».

Votre rapporteur spécial prend acte de ce distinguo, tout en ne s'avouant pas entièrement convaincu de la nécessité de créer une structure supplémentaire , en l'occurrence le FSI, à la gouvernance apparemment complexe, et ce dans un contexte où la stratégie de l'Etat actionnaire bascule de la stricte défense des intérêts patrimoniaux vers la promotion d'une politique industrielle plus active. Il proposera, dans ces conditions, à votre commission, de consacrer une mission de contrôle sur pièces et sur place au FSI dans le courant de l'année 2011. Cette mission sera également l'occasion d'examiner l'articulation existant entre les fonds sectoriels créés par le FSI et les projets conduits dans le cadre des investissements d'avenir .

2. Une stratégie industrielle autant que patrimoniale

Ainsi qu'il a déjà été évoqué, la stratégie mise en oeuvre par l'Etat actionnaire a fait l'objet d'une redéfinition au lendemain des Etats généraux de l'industrie. Selon le jaune « Etat actionnaire » annexé au projet de loi de finances, « la démarche retenue conduit l'Etat à mettre désormais au premier plan la vision industrielle du pilotage de ses participations et à affirmer ainsi, pour les entreprises concernées, une stratégie de développement industriel et économique claire de long terme, dans le respect de ses intérêts patrimoniaux et de l'objet social de chacune de ses participations » . Cette réorientation d'importance ne transparaît étonnamment pas dans le projet annuel de performances...

a) Une politique industrielle plus active

Deux mesures principales incarnent, à ce stade, la réorientation de la stratégie de l'Etat actionnaire. La première consiste à faire siéger un représentant du ministère de l'industrie ou du ministère technique compétent aux côtés du représentant de l'APE dans les conseils d'administrations des entreprises industrielles. La seconde réside dans la formalisation des réunions régulières entre les présidents des entreprises et les ministres concernés au sujet de la stratégie, des investissements et des résultats, à l'instar de tous les actionnaires significatifs d'entreprises privées. On observe donc que ces innovations sont essentiellement procédurales et leur caractère véritablement opérationnel (ou, au contraire, cosmétique), dépendra ultimement des personnalités qui seront chargées de les mettre en oeuvre. Plus encore, ce sont les décisions d'investissement qui attesteront, dans les mois à venir, de la consistance de notre stratégie industrielle.

L'Etat actionnaire a enfin engagé une enquête 18 ( * ) sur les politiques industrielles menées par les entreprises de son périmètre. Cette enquête a porté sur la localisation des investissements, de l'emploi, de la valeur ajoutée ou de la recherche et développement. Ses résultats enseignent que les investissements sur le territoire français ont augmenté de 2 % entre 2008 et 2009, alors que l'investissement stagnait toutes zones géographiques confondues. Les entreprises publiques prévoient une accentuation de ce mouvement en 2010, avec une prévision d'augmentation des investissements sur le territoire français de 14 %. Selon l'APE, les autres indicateurs de la contribution des entreprises publiques à la politique industrielle française sont également orientés favorablement, comme en témoignent l'augmentation de près de 4 % entre 2008 et 2009 de la valeur ajoutée ou l'accroissement de 19 % de la recherche et développement localisés en France.

b) Une réorientation paradoxalement « oubliée » par le projet annuel de performances

Votre rapporteur spécial prend acte des nouvelles orientations proposées par le Gouvernement et des actions concrètes initiées pour les mettre en oeuvre.

Les Etats généraux de l'industrie s'étant déroulés au premier trimestre de l'année 2010, il est néanmoins regrettable que ce nouveau « cap » ne soit nullement matérialisé dans le projet annuel de performances 2011 du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'Etat ». La présentation stratégique du programme 731 « Opérations en capital intéressant les participations financières de l'Etat » reprend mot pour mot celle de 2010 et demeure donc axée sur la meilleure valorisation possible des participations financières de l'Etat , déclinés en deux objectifs que sont l'augmentation de la valeur des participations et le succès des opérations de cession .

De la même manière, les indicateurs de performance traduisent une vision purement patrimoniale de la stratégie du programme , centrée sur la rentabilité opérationnelle des capitaux employés, la rentabilité financière des capitaux propres, la marge opérationnelle, la soutenabilité de l'endettement, la distribution de dividendes... De politique industrielle, il n'est donc guère question.

Compte tenu du caractère déjà très sommaire de ce bleu budgétaire ( cf. infra ), on ne saurait trop rappeler que les projets annuels de performances n'ont pas qu'une vocation informative, voire décorative, et doivent procéder à une justification précise et actualisée des politiques publiques pour lesquelles les crédits sont demandés . Nonobstant l'existence d'un jaune budgétaire consacré à l'Etat actionnaire, votre rapporteur spécial recommande donc vivement qu'une refonte complète du PAP soit opérée d'ici à la fin de l'année 2011, afin de permettre au Parlement de statuer sur la base d'informations cohérentes avec les ambitions affichées par le Gouvernement.

B. UN PROJET ANNUEL DE PERFORMANCES DE PORTÉE LIMITÉE

En dehors des aspects stratégiques, le PAP associé au présent compte d'affectation spéciale revêt une portée limitée, dans la mesure où la plupart des évaluations de crédits et des prévisions de recettes font l'objet d'une inscription conventionnelle et peu ou prou reconduite année après année. Cette singularité s'explique par la volonté du Gouvernement de ne pas adresser de « signaux » prématurés aux marchés sur d'éventuelles opérations de cessions ou de prises de participations, susceptibles d'affecter la cotation des entreprises publiques.

1. Une prévision de recettes conventionnelle
a) 1 milliard d'euros de recettes en 2010

Au 21 septembre 2010, 1 milliard d'euros de recettes avaient été encaissées sur le CAS. Près de 160 millions d'euros de recettes ont d'abord été tirées des opérations de cessions de titres de participations intervenues en 2010, à rapprocher des 4,98 milliards d'euros d'inscription « conventionnelle » en LFI. Ces cessions ont principalement concerné Charbonnages de France (140 millions d'euros), France Télécom (11,7 millions d'euros), Corsabail (1 million d'euros) et DCNS (7 millions d'euros). D'ici à la fin de l'exercice budgétaire, les seules prévisions de recettes liées à une cession de titres de participation qu'il est possible d'anticiper concernent un règlement différé d'ORS (EDF), pour 44,4 millions, d'euros et la cession par l'Etat de la totalité de sa participation dans la CADEC, pour 4 millions d'euros.

Les recettes du CAS au 21 septembre 2010

(en euros)

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire

Le produit des réductions de capital et de distributions par fonds de capital s'établit à 322 millions d'euros et les versements du budget général à 549 millions d'euros, au titre du fonds national d'amorçage, du financement de l'économie solidaire et de France Brevets.

Ces données résultent des réponses au questionnaire budgétaire, questionnaire dans lequel il était expressément demandé que les chiffrages en exécution soient assortis d'un commentaire détaillé et d'une justification des écarts à la prévision. Ces éléments n'ont pas été transmis par la direction générale du Trésor.

b) Les prévisions pour 2011

Le PAP 2011 anticipe à nouveau 5 milliards d'euros de recettes, soit 5,59 % de la valeur du portefeuille des participations cotées de l'Etat au 15 septembre 2010. Ces recettes se composent :

1) de 4,83 milliards d'euros de produit de cessions . Comme chaque année, les documents budgétaires précisent que « pour des raisons de confidentialité, inhérentes notamment à la réalisation de cessions de titres de sociétés cotées, il n'est pas possible au stade de l'élaboration du projet de loi de finances, de détailler la nature des cessions envisagées. La stratégie de cession dépend très largement de la situation des marchés, actuellement très difficile, des projets stratégiques de entreprises intéressées, de l'évolution de leurs alliances ainsi que des orientations industrielles retenues par le Gouvernement. Dans ce contexte, le responsable du programme évalue les opportunités de la meilleure valorisation patrimoniale possible pour l'Etat et peut proposer au ministre et au Gouvernement de réaliser une opération » ;

2) de 80 millions d'euros de reversements de dotations en capital et de produits de réduction de capital et de liquidation résultant d'opérations relatives à la remontée de trésorerie de l'ERAP dans le cadre de la liquidation de la société et l'arrivée à échéance de plusieurs garanties importantes détenues par la SGGP (société de défaisance du GAN) ;

3) de 70 millions d'euros de remboursements de créances rattachées à des participations financières, correspondant au remboursement à l'Etat de la dette de l'Entreprise minière et chimique ;

4) de 20 millions d'euros de retours sur investissement pour l'Etat de plusieurs fonds de capital risque (fonds de câblage Internet, fonds de co-investissement pour les jeunes entreprises, fonds de promotion pour le capital risque 2000, fonds public pour le capital risque, fonds de fonds technologique 3).

2. Des dépenses peu justifiées

Pour les raisons évoquées précédemment, certains montants de dépenses figurent « pour ordre » dans le bleu associé au présent compte d'affectation spéciale. Cette particularité ne dispense néanmoins pas de décrire avec quelque consistance le peu d'opérations figurant dans la justification au premier euro ou, le cas échéant, de fournir des réponses au questionnaire budgétaire qui complètent, et non répètent, les développements du PAP.

a) Les dépenses en 2010

4,5 milliards d'euros sont enregistrés en dépenses au 21 septembre 2010. Ce montant ne résulte que minoritairement d'opérations en capital ou d'achats de titre. En effet, 499,3 millions d'euros ont été dépensés, au bénéfice de la CDC, dans le cadre des investissements d'avenir pour le financement de l'économie sociale et solidaire (99,5 millions d'euros) et du Fonds national d'amorçage (399,8 millions d'euros).

En second lieu, les 3,7 milliards d'euros de crédits du Plan Campus ont enfin été décaissés au bénéfice de l'Agence nationale de la recherche (ANR). Votre rapporteur spécial s'était, avec la Cour des comptes, interrogé sur le caractère patrimonial de cette opération et, partant, sur l'opportunité de la faire supporter par le CAS « Participations financières de l'Etat ». Les réponses au questionnaire indiquent, que « les modalités d'utilisation de la dotation de 3,687 milliards d'euros versée à partir du CAS PFE au profit de l'ANR et destinée à financer des projets de rénovation universitaire sont strictement encadrées par la convention signée entre l'Etat et l'ANR 19 ( * ) (...), qui précise que cette dotation ne sera ni consommée ni affectée de manière irrévocable , dans le respect des conditions fixées à l'article 21 de la LOLF ».

Les dépenses enregistrées au 21 septembre 2010

(en euros)

Source : réponses au questionnaire

b) La prévision pour 2011

Les crédits demandés pour 2011 au titre du programme 731 « Opérations en capital intéressant les participations financières de l'Etat » s'élèvent à 1 milliard d'euros en AE et CP, soit le même montant qu'en 2010. Si aucune dépense n'est anticipée en matière d'achat ou de souscription de titres, 890 millions d'euros doivent être consacrés aux augmentations de capital, dotations en fonds propres, avances d'actionnaires et prêts assimilés (action 1). Selon la justification au premier euro, ces opérations intéressent l'augmentation du capital de La Poste de 2,7 milliards d'euros, dont 1,5 milliard d'euros pour la CDC et 1,2 milliard d'euros pour l'Etat, la libération d'une nouvelle tranche de l'augmentation de capital de la Société française du tunnel routier du Fréjus , souscrite par Autoroutes de France, la libération d'une nouvelle tranche de l'augmentation de capital du FSI et la contribution française aux augmentations de capital des banques régionales de développement , conformément aux décisions prises dans le cadre du G20.

10 millions d'euros seraient consacrés à différents fonds de capital risque 20 ( * ) (action 4) et 100 millions d'euros aux commissions versées aux banques au titre des opérations réalisées (action 5), soit 2 % du produit des cessions prévues.

Au titre du programme 732 « Désendettement de l'Etat et d'établissements publics de l'Etat », 4 milliards d'euros de crédits seraient enfin consacrés à l'Etablissement public de financement et de restructuration (EPFR), afin de permettre la poursuite de l'amortissement de la dette envers le Crédit Lyonnais et le paiement des intérêts (1,1 milliard d'euros), ainsi qu'à la Caisse de la dette publique , pour contribuer au désendettement de l'Etat (2,9 milliards d'euros).

La même prévision, soit 4 milliards d'euros, avait été proposée en 2009, exercice au cours duquel aucune consommation de crédits n'a été enregistrée au titre du désendettement, ce qui devrait se reproduire en 2010. La prévision apparaît donc à nouveau purement formelle , en ce qu'elle ignore la « mise en sommeil » de fait de la politique de désendettement résultant de la crise.

LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a, en seconde délibération, adopté un amendement du Gouvernement minorant de 905 699 euros en AE et de 989 152 euros en CP les crédits du programme 168 « Majorations de rentes » de la mission « Engagements financiers de l'Etat », afin de gager les ouvertures opérées sur les autres missions du budget général.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 17 novembre 2010, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a procédé à l'examen du rapport spécial de M. Jean-Pierre Fourcade , rapporteur spécial, sur la mission « Engagements financiers de l'Etat », le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'Etat », puis a entendu une communication du rapporteur spécial sur le financement des primes d'épargne logement (PEL).

M. Jean-Pierre Fourcade , rapporteur spécial. - Les crédits de la mission « Engagements financiers de l'Etat » progressent, en valeur, de 6 % entre 2010 et 2011, pour s'établir à 46,9 milliards d'euros. L'encours de la dette nominale passerait de 1 224,8 milliards d'euros à fin 2010 à 1 315,1 milliards d'euros fin 2011, soit une augmentation de 7,4 % et de 51 % depuis 2005. La structure de l'encours témoigne, néanmoins, d'un reflux salutaire de l'endettement à court terme, qui passerait de 18,6 % fin 2009 à moins de 15 % fin 2011. 70,6 % de la dette négociable étaient détenus par les non-résidents fin juin 2010. Un tiers de cette dette serait détenue par des non-résidents ressortissants de la zone euro.

La charge de la dette devrait s'établir à 45,4 milliards d'euros en 2011, soit une augmentation de 4,5 milliards d'euros par rapport aux dernières estimations pour 2010. Cette augmentation résulterait principalement d'un effet volume sur la dette à plus d'un an et de l'augmentation des taux courts. Le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 prévoit une augmentation annuelle de la charge de la dette de plus de 4 milliards d'euros par an, imputable aux deux tiers à l'augmentation de l'encours. J'observe, à cet égard, un frémissement des taux courts à la fin de cette année, puisque le taux des BTF à trois mois s'établit à 0,605 % en septembre, contre 0,49 % en août. Il nous faudra donc être attentifs à cette évolution.

La hausse des crédits de l'action 3 « Trésorerie de l'Etat » est enfin imputable à la rémunération des dotations non consomptibles placées auprès du Trésor par les opérateurs chargés de la mise en oeuvre des investissements d'avenir. Cette rémunération mobilisera 569 millions d'euros en 2011.

J'en viens à présent au compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'Etat ». Dans le prolongement des Etats généraux de l'industrie, la gestion des participations de l'Etat est désormais axée sur la conduite d'une politique industrielle active. Cette évolution s'est notamment matérialisée par la nomination d'un commissaire aux participations de l'Etat. J'estime que le cadre d'intervention renouvelé de l'Etat actionnaire pose avec une acuité grandissante la question de l'articulation des missions de l'Agence des participations de l'Etat (APE) et du Fonds stratégique d'investissement (FSI). Je consacrerai donc une mission de contrôle au FSI au premier semestre 2011.

Le projet annuel de performances demeure construit sur une approche purement patrimoniale de la gestion des participations de l'Etat. La réorientation majeure de la stratégie de l'Etat actionnaire ne transparaît donc ni dans la présentation stratégique des programmes, ni dans les objectifs et indicateurs de performance, ce qui contribue à vider un peu plus de sa substance un document déjà fort peu consistant. Enfin, 4 milliards d'euros de crédits sont encore prévus pour contribuer au désendettement de l'Etat et de ses établissements publics. Cette prévision apparaît hautement théorique, compte tenu de la mise en sommeil objective de cette politique depuis le début de la crise.

Sous le bénéfice de ces observations, j'invite la commission à adopter sans modification les crédits de la mission « Engagements financiers de l'Etat » et du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'Etat ».

Je conclurai mon intervention en rendant compte à notre commission des résultats du contrôle que j'ai mené, en 2010, sur le financement des primes d'épargne-logement (PEL). Les primes d'épargne-logement sont versées, par l'Etat, lors de la clôture d'un compte d'épargne-logement ou d'un plan d'épargne-logement. Il s'agit d'un dispositif public d'aide à l'accession à la propriété qui fonctionne comme une « dépense de guichet », contrainte par le nombre de demandes. Le programme « Epargne » de la présente mission porte, dans le présent PLF, plus de 1,1 milliard d'euros au titre du financement de ces primes.

Par convention du 17 décembre 1992, l'Etat a confié la gestion des primes au Crédit foncier de France (CFF), qui sert d'intermédiaire avec les banques de la place. Le CFF a par ailleurs accepté de consentir des avances rémunérées à l'Etat, d'un montant maximal d'un milliard d'euros, au cas où les provisions qui lui sont versées par le Trésor seraient insuffisantes pour couvrir les appels de primes.

Le contrôle budgétaire sur le financement des primes d'épargne-logement résulte d'observations de la Cour des comptes qui a révélé que la budgétisation initiale a régulièrement sous-estimé les besoins réels conduisant l'Etat à recourir massivement aux avances rémunérées auprès du CFF. Fin 2008, le découvert cumulé de l'Etat s'élevait à plus de 963 millions d'euros. Par ce montage, nous assistons à une sorte de « débudgétisation » du déficit puisque l'Etat se refinance auprès du CFF et non par le biais de l'Agence France Trésor. Cette pratique est contraire au principe d'annualité, d'universalité et, surtout, de sincérité budgétaires. Il n'est pas certain non plus qu'elle constitue une bonne opération financière pour l'Etat. Le coût des avances rémunérées du CFF ayant été estimé, en 2008, supérieur de 500 000 euros à celui des BTF.

Le procédé est d'autant plus critiquable que, ces dernières années, la loi de finances initiale n'a jamais prévu de marges de manoeuvre suffisantes pour résorber le découvert inscrit auprès du Crédit foncier. La ligne budgétaire de l'année n'était destinée qu'à financer les primes de l'année. Le découvert était par conséquent reporté l'année suivante : l'Etat a fait de la cavalerie. A la décharge du Gouvernement, le calcul du montant nécessaire au financement des primes d'épargne-logement exige d'anticiper le comportement des épargnants, qui dépend principalement de paramètres économiques et fiscaux, ainsi que du nombre de PEL et de l'encours par génération. Il n'est donc pas répréhensible que, certaines années, l'Etat ait été contraint d'utiliser les avances rémunérées du CFF.

A l'inverse, en 2009 et 2010, le taux de clôture a été très inférieur à celui initialement attendu. Cette heureuse surprise conjoncturelle a permis de réduire le déficit auprès du Crédit foncier à 719 millions d'euros fin 2009 et il pourrait s'établir à 82 millions d'euros fin 2010. L'année 2010 constitue une opportunité unique pour apurer définitivement le déficit. En 2011 et 2012 en revanche, le nombre de primes versées pourrait connaître un accroissement très important pour des raisons fiscales. En effet, à compter de la dixième année, les intérêts cumulés sur les PEL sont soumis à la fiscalité. Or les plans contractés en 2001 et 2002 représentent plus de 28 % de l'encours total des PEL. Il faut donc s'attendre à un taux de clôture massif ces deux prochaines années. Il est à craindre que les 1,1 milliard d'euros inscrit dans le PLF pour 2011 ne soient pas un montant suffisant pour couvrir tous les appels de primes, auquel cas nous assisterions de nouveau au creusement d'un déficit auprès du CFF.

Un projet de réforme du PEL est annoncé par le Gouvernement, dont nous ignorions encore la teneur exacte. En tout état de cause, depuis 2002, le versement des primes est conditionné à l'octroi d'un prêt immobilier qui peut être utilisé pour des travaux ou pour l'achat d'une résidence secondaire. On peut donc légitimement s'interroger sur la finalité des primes d'épargne-logement : s'agit-il d'un dispositif d'aide à l'accession à la propriété ou de soutien au secteur immobilier et du bâtiment ? La réforme permettra peut-être d'avancer sur ce sujet.

M. Joël Bourdin . - Le rapporteur spécial peut-il nous renseigner sur l'évolution de la charge associée aux titres indexés sur l'inflation ? Ce poste me semble devoir être surveillé de près, tant il rappelle les pages les plus sombres de notre histoire financière...

M. Jean-Pierre Fourcade , rapporteur spécial . - La provision pour indexation est estimée à 2,5 milliards d'euros en 2011. Vous avez raison de souligner que les titres indexés constituent un facteur de risque potentiel, comme en témoigne le choc d'inflation survenu en 2008, choc qui a eu des répercussions fortes sur la charge de la dette.

Mme Nicole Bricq . - Quelle est la tendance observée sur la part respective des titres courts et des titres à moyen et long termes ? Par ailleurs, où en est-on du remboursement des prêts consentis dans le cadre des mesures de soutien aux banques et au secteur automobile ?

M. Jean-Pierre Fourcade , rapporteur spécial . - La diminution des BTF devrait se poursuivre en 2011, et leur encours devrait baisser de 0,7 milliard d'euros. Les BTF représenteraient alors 15 % de l'encours total. S'agissant des mesures prises pour faire face à la crise, la Société de prises de participation de l'Etat (SPPE) aura souscrit, en deux tranches, près de 21 milliards d'euros de titres de fonds propres émis par les principaux établissements de crédit, à raison de 9,95 milliards d'euros sous forme de titres super subordonnés à durée indéterminée (TSSDI), 9,8 milliards d'euros sous forme d'actions de préférence (AP) et 1 milliard d'euros d'actions ordinaires pour la société Dexia. Au 15 septembre 2010, l'Etat détient encore, à travers la SPPE, une participation de 1 milliard d'euros au capital de Dexia, et des titres super-subordonnés et actions de préférence émis par BPCE pour un montant de 2,9 milliards d'euros. Les comptes de la société font apparaître un résultat net de 724 millions d'euros en 2009, lui permettant de verser à l'Etat 637 millions d'euros de dividendes et 162 millions d'euros d'impôt sur les sociétés. S'agissant du « Pacte automobile », 377 millions d'euros d'intérêts ont été perçus au titre de 2010 à raison des prêts aux constructeurs, et le retour à meilleure fortune de Renault et PSA leur a permis de rembourser par anticipation 10 milliards d'euros en septembre.

A l'invitation du rapporteur spécial, la commission a alors décidé de proposer au Sénat l'adoption sans modification des crédits de la mission « Engagements financiers de l'Etat » et du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'Etat ». Elle a donné acte au rapporteur spécial de sa communication sur le financement des primes d'épargne-logement (PEL), qui a été annexée au présent rapport.

* *
*

Réunie à nouveau le jeudi 18 novembre 2010, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission, après avoir pris acte de l'amendement adopté par l'Assemblée nationale, a confirmé sa décision de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Engagements financiers de l'Etat » et du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'Etat ».

ANNEXE 1 - RÉSULTATS DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE FINANCEMENT DES PRIMES D'ÉPARGNE-LOGEMENT

I. LE FINANCEMENT DES PRIMES D'ÉPARGNE-LOGEMENT

A l'occasion de l'examen des projets de loi de règlement pour 2008 et 2009, votre rapporteur spécial a relevé plusieurs imperfections tenant aux modalités de financement des primes d'épargne-logement.

Les développements qui suivent sont le fruit d'une mission de contrôle sur pièces et sur place menée au cours de l'année 2010, et ont eu pour objet d'établir les causes des sous-budgétisations récurrentes dont fait l'objet le financement de ces primes, ainsi que de l'inflation des frais associés à leur gestion.

L'ensemble de ces éléments permet d'analyser la sincérité de la dotation pour 2011 de l'action 1 « Epargne logement » du programme « Epargne » de la mission « Engagements financiers de l'Etat ».

A. LES PRIMES D'ÉPARGNE-LOGEMENT

1. Une prime conditionnée à l'octroi d'un prêt d'épargne-logement

Selon l'article L. 315-1 du code de la construction et de l'habitation, « le régime de l'épargne logement a pour objet de permettre l'octroi de prêts aux personnes physiques qui ont fait des dépôts à un compte d'épargne-logement et qui affectent cette épargne au financement de logements destinés à l'habitation principale ». Cet article ne mentionne pas les plans d'épargne-logement (PEL), car, juridiquement, ils s'apparentent à une modalité particulière de compte d'épargne-logement (CEL).

L'article L. 315-4 du même code précise que « les bénéficiaires d'un prêt d'épargne-logement reçoivent de l'Etat, lors de la réalisation du prêt, une prime d'épargne dont le montant est fixé compte tenu de leur effort d'épargne ».

Les modalités de liquidation de cette prime sont fonction de la date de souscription du compte . En effet, les CEL et les PEL sont des contrats signés entre le déposant et sa banque. Leur régime juridique est donc celui en vigueur à la date de la signature. Ainsi, pour les PEL souscrits depuis 1981, il a été modifié à douze reprises.

Dans tous les cas, elle est plafonnée à 1 525 euros pour les PEL et à 1 144 euros pour les CEL .

Pour les PEL, depuis 2002, la prime est octroyée à la réalisation du prêt (et non plus au terme du plan) et est égale à 2/5 e des intérêts versés par l'établissement teneur du plan. Elle peut être majorée pour tenir compte des personnes à la charge de l'emprunteur (art. R. 315-40 du code de la construction et de l'habitation) 21 ( * ) .

Pour les CEL, depuis 1998, la prime est également octroyée à la réalisation du prêt et est égale à la moitié des intérêts acquis .

Plusieurs dispositions adoptées en 2005 prévoient l'assujettissement à l'impôt sur le revenu des nouveaux intérêts générés à partir du 1 er janvier 2006 sur les PEL détenus depuis plus de douze ans , ou arrivés à l'échéance de leur contrat pour les PEL ouverts avant le 1 er avril 1992 22 ( * ) , ainsi que l'assujettissement aux prélèvements sociaux 23 ( * ) , à compter du 1 er janvier 2006, de la prime d'épargne à la date de son versement, et au dixième anniversaire du PEL des intérêts capitalisés puis des intérêts acquis chaque année 24 ( * ) . Le prélèvement a donc un caractère rétrospectif lors de sa première année d'application.

2. Une gestion confiée au Crédit foncier de France

La liquidation des primes d'épargne-logement est assurée, pour le compte de l'Etat, par le Crédit foncier de France (CFF). Chaque établissement distributeur des PEL et CEL acquitte les primes auxquelles il a droit et transmet au CFF la demande de remboursement des sommes correspondantes. Le CFF bénéficie, à son tour, d'une provision en provenance du budget général , imputée sur le programme 145 « Epargne » de la mission « Engagements financiers de l'Etat » ( cf. infra ).

Le CFF ne distribue pas de PEL ou de CEL pour son compte propre. Il agit comme une « banque de règlement » au nom de l'Etat. Ses relations avec ce dernier sont régies par une convention du 17 décembre 1992 , signée dans le cadre du recentrage des activités de l'établissement sur le crédit immobilier 25 ( * ) . Selon la direction générale du Trésor, « la signature d'une convention avec un seul établissement gestionnaire permettait de clarifier les versements de l'Etat par le financement des primes d'épargne logement et de regrouper les fonctions de contrôle au sein du même organisme » 26 ( * ) . Les stipulations de cette convention prévoient, notamment, que :

1) « afin de permettre au Crédit foncier d'assurer le paiement des primes d'épargne, il est versé par le Trésor, dans les caisses de cet établissement, une provision dont le montant est fixé d'un commun accord entre les parties contractantes » (article 10) ;

2) « les frais et dépenses de fonctionnement auxquels donnent lieu les services assurés en exécution de la [...] convention sont remboursés semestriellement par le Trésor au Crédit foncier sur la production d'états justificatifs » (article 11) ;

3) les mouvements liés au versement des provisions et au versement des primes sont « retracés en date de valeur dans un compte de fonctionnement spécifique » . « Ce compte fonctionne au taux quotidien du marché monétaire [...] majoré au débit et minoré au crédit d'une marge de 1/8 ème de point au profit du Crédit foncier » . Depuis 2007, et par avenants successifs, il a été convenu entre l'Etat et le CFF que le décalage entre les versements de l'Etat et le paiement des primes par le CFF ne puisse aboutir à constituer un solde débiteur supérieur à 1 milliard d'euros et que serait appliqué audit solde un taux égal 27 ( * ) au taux EONIA majoré de 6,5 points de base ( cf. infra ).

B. QUELQUES ORDRES DE GRANDEUR

1. Le nombre et l'encours des PEL et CEL

A partir de 2003, le nombre de PEL a décru pour deux raisons :

- l'article 80 de la loi de finances pour 2003 a conditionné l'octroi de la prime d'épargne logement à la souscription d'un prêt immobilier . Le PEL est donc devenu un produit d'épargne longue moins attractif ;

- de surcroît, les intérêts des PEL sont soumis aux prélèvements sociaux à partir de la dixième année et à l'impôt sur le revenu à partir de la douzième année . En conséquence, les détenteurs de plans ont tendance à les clôturer massivement avant l'arrivée à ces deux échéances.

Évolution du nombre de CEL et PEL depuis 1990

Source : direction générale du Trésor

Le tableau reproduit ci-dessous montre l'encours au 31 décembre 2009 pour chaque génération de PEL. L'encours total est estimé à près de 159 milliards d'euros .

Ces données sont essentielles pour prévoir le nombre et le montant des primes d'épargne-logement qui seront amenées à être versées dans le futur . En particulier, pour les raisons fiscales et sociales mentionnées plus haut, les plans qui arrivent à échéance de dix et douze ans sont, structurellement, ceux dont le taux de clôture est le plus important. Par exemple, les plans ouverts entre le 1 er janvier 2001 et le 11 décembre 2002 regroupent plus de 28 % de l'encours total. Ainsi, il apparaît fort probable que le nombre et le montant des primes octroyées en 2011 et 2012 soient élevés , d'autant plus que les plans ouverts à cette époque peuvent être clôturés sans obligation de souscrire un prêt immobilier.

Collecte des PEL pour chaque génération depuis 1990 au 31 décembre 2009

(en millions d'euros)

Taux avec primes

Taux par génération

Encours

6 %

6 % / 1990

1 265

6 %

6 % / 1991

1 882

6 %

6 % / 1992

2 377

6 %

6 % / 1993

8 002

6 %

6  % / 01-01-94 au 06-02-94

4 478

5,25 %

5,25 % / 07-02-94 au 31-12-94

1 267

5,25 %

5,25 % / 1995

2 561

5,25 %

5,25 % / 1996

6 262

5,25 %

5,25 % / 01-01-97 au 22-01-97

3 981

4,25 %

4,25 % / 23-01-97 au 31-12-97

1 410

4,25 %

4,25 % / 01-01-98 au 08-06-98

2 219

4 %

4 % / 09-06-98 au 31-12-98

1 375

4 %

4 % / 01-01-99 au 25-07-99

4 708

3,60 %

3,6 % / 26-07-99 au 31-12-99

1 407

3,60 %

3,6 % / 01-01-00 au 30-06-00

2 822

4,50 %

4,5 % / 01-07-00 au 31-12-00

7 694

4,50 %

4,5 % / 01-01-01 au 31-12-01

19 468

4,50 %

4,5 % / 01-01-02 au 11-12-02

25 922

4,50 %

4,5 % / 12-12-02 au 31-07-03

8 607

3,50 %

3,5 % / 01-08-03 au 31-12-03

1 411

3,50 %

3,5 % / 01-01-04 au 31-12-04

4 319

3,50 %

3,5 % / 01-01-05 au 31-12-05

5 424

3,50 %

3,5 % / 01-01-06 au 31-12-06

12 129

3,50 %

3,5 % / 01-01-07 au 31-12-07

7 273

3,50 %

3,5 % / 01-01-08 au 31-12-08

9 369

3,50 %

3,5 % / 2009

11 322

TOTAL

158 956

Source : direction générale du Trésor

2. Le nombre et le montant des primes

Nombre de primes versées depuis 1990

Source : direction générale du Trésor

Après une période où le taux de clôture a été fort (début des années 2000), la tendance s'est logiquement inversée : un grand nombre de plans ayant été fermés, le stock s'est réduit.

Le pic de fermetures observé en 2006 doit clairement être rapproché des dispositions de la loi de finances et de la loi de financement de la sécurité pour 2006 précitées.

Pour les mêmes raisons, le montant moyen des primes augmente ( cf. graphique ci-dessous). Les plans fermés suite aux nouvelles dispositions fiscales et sociales étaient dont l'ouverture avait été conclue il y a plus de dix ou douze ans - et pour lesquels l'effort d'épargne devait être important. Dès lors, il s'agit également des plans ayant accumulé le plus d'intérêts et qui ouvrent droit à des primes élevées.

Montant moyen des primes versées depuis 1990

(en euros)

Source : direction générale du Trésor

II. UNE PRÉVISION BUDGÉTAIRE ALÉATOIRE, UNE GESTION COÛTEUSE POUR LES FINANCES PUBLIQUES

De 2006 à 2008, les crédits inscrits au budget général ont été systématiquement insuffisants pour faire face au paiement, par le Crédit foncier, des primes d'épargne-logement. Cette situation a abouti à la constitution d'une dette à l'égard du CFF dont les modalités de résorption restent à définir. Elle atteste également de la nécessité d'améliorer la fiabilité de la prévision budgétaire en la matière.

A. DES SOUS-BUDGÉTISATIONS RÉPÉTÉES, PRÉJUDICIABLES AUX INTÉRÊTS FINANCIERS DE L'ETAT

Le paiement des primes afférentes aux comptes épargne et aux plans d'épargne logement ainsi que le paiement des frais de gestion du dispositif s'imputent sur l'action 1 « Epargne logement » du programme 145 « Epargne », au sein de la mission « Engagements financiers de l'Etat » 28 ( * ) . Les primes ont fait l'objet, en loi de finances pour 2010, d'une dotation de 1,25 milliard d'euros, dont 750 000 euros au titre des frais de gestion de ce dispositif par le CFF.

1. Un report de charge croissant jusqu'en 2009

Ainsi que l'a souligné la Cour des comptes dans ses notes relatives à l'exécution budgétaire de 2008 et 2009, les crédits inscrits en loi de finances initiale pour 2006, 2007 et 2008 ont été systématiquement insuffisants pour couvrir les primes d'épargne-logement servies par le Crédit foncier . Malgré des ouvertures de crédits complémentaires en loi de finances rectificative (en 2006 et 2007) ou par décret d'avance (en 2008), cette situation s'est traduite par l'existence, à la fin de chaque exercice, d'un report de charge croissant, aboutissant à la constitution d'une dette totale de 963 millions d'euros à fin 2008, à l'égard du CFF ( cf . tableau).

Evolution du report de charge de 2007 à 2009

(en millions d'euros)

Source : direction générale du Trésor

Comme l'indique le tableau qui précède, la tendance qui vient d'être décrite a toutefois connu une inflexion forte en 2009, année où les primes servies ont atteint 907,7 millions d'euros, soit une diminution de 43 % par rapport à 2008 et de 38,5 % par rapport à 2007 . Selon la direction générale du Trésor, ce mouvement s'explique :

1) par les taux de clôture élevés observés en 2007 (19,96 %) et 2008 (19,5 %), auxquels succède logiquement « une stabilisation, voire un ralentissement des fermetures de PEL et du volume financier de primes versées » ;

2) par le contexte économique , dans lequel « les épargnants n'ont pas souhaité retirer leurs liquidités du PEL, compte-tenu du rendement intéressant (proposé) par rapport aux autres produits d'épargne réglementés ». De la même manière, certains PEL des générations 1997-1999, ayant atteint ou dépassé dix ou douze ans d'ancienneté, n'ont pas eu intérêt à être clôturés car ils continuent à présenter un rendement comparativement intéressant, et ce malgré leur fiscalisation ;

3) enfin, par des taux d'emprunt immobilier peu attractifs pour ces générations (4,80 % pour la génération 1997, 4,60 % pour la génération 1998 et 4,31 % pour la génération 1999, contre 4,43 % de taux moyen pour un prêt libre en 2009).

1,157 milliard d'euros de crédits avaient été inscrits à l'action 1 pour financer, en 2009, les primes d'épargne logement et les frais de fonctionnement exposés par le CFF. En exécution, les primes ont atteint 907,657 millions d'euros, et les frais facturés par le CFF 4,661 millions d'euros (dont 3,219 millions d'euros d'intérêts débiteurs, 0,68 million d'euros de commissions de gestion et 0,69 million d'euros de frais de gestion). A ce total de 912,319 millions d'euros, se sont ajoutés 759 315 euros de fongibilité entre l'action 1 et l'action 2 29 ( * ) . 244 millions d'euros restaient donc disponibles, qui ont été intégralement utilisés pour résorber une partie de la dette contractée à l'égard du CFF. Le report de charge est ainsi passé de 963 millions d'euros fin 2008 à plus de 719 millions d'euros fin 2009.

L'exécution 2010 semble à nouveau marquée par la baisse sensible de fermeture de PEL de près de 40 % par rapport à 2010 et d'environ 61 % par rapport à 2009. Ainsi, au 1 er novembre 2010, près de 514 millions d'euros de primes avaient été versés contre environ 802 millions d'euros à la même date en 2009. Au total, d'après les prévisions de la direction générale du Trésor, en 2010, le montant des primes versées ne devrait pas excéder 612 millions d'euros .

2. Une entorse aux principes budgétaires

La persistance d'un report de charge de plusieurs centaines de millions d'euros enfreint plusieurs principes budgétaires . Dans sa note d'exécution budgétaire 2009, la Cour des comptes considérait tout d'abord que l'Etat, en demeurant débiteur à l'égard du CFF, « met à mal trois des quatre principes budgétaires », et en l'occurrence :

1) le « correct calibrage » des dotations en loi de finances initiale, ce que votre rapporteur spécial analyse comme une entorse au principe de sincérité ;

2) le principe d' universalité , en « faisant financer par un établissement de crédit des dépenses qui doivent juridiquement être inscrites au budget » ;

3) le principe d' annualité , en « repoussant d'un exercice sur l'autre la charge non budgétée des dépenses d'épargne logement ». Sur ce dernier point, le Gouvernement a pu avancer que le découvert de l'Etat auprès du CFF correspondait à une volonté de « lissage » d'une dépense dont l'inflation était considérée comme ponctuelle . Votre rapporteur spécial partage l'analyse de la Cour des comptes, selon laquelle un tel lissage peut se concevoir s'il s'opère au moyen d'une réserve de trésorerie préalablement constituée, mais ne présente guère d'intérêt s'il se traduit par la constitution d'une dette et le paiement d'intérêts. Les arguments du Gouvernement sont donc, à cet égard, difficilement recevables.

Outre qu'elles peuvent s'analyser comme une entorse aux principes budgétaires, il n'est pas certain que les avances consenties par le CFF constituent une bonne opération financière pour l'Etat , dans la mesure où leurs conditions 30 ( * ) sont moins avantageuses que celles que l'Agence France Trésor pourrait consentir à d'autres services auxquels sont consenties de telles avances.

Dans sa note d'exécution budgétaire 2008, la Cour avait comparé la rémunération des avances du CFF avec les émissions de Bons du Trésor à taux fixe (BTF) par l'AFT. Elle en avait conclu que « aux sept dates d'émission (de BTF à 1 mois intervenues en 2008), la rémunération versée au CFF [...] a toujours été supérieure au taux des BTF, sans même prendre en compte la capitalisation mensuelle des intérêts ».

Ainsi, en 2008, année où les intérêts versés ont été les plus élevés, le coût du financement par le CFF aurait été supérieur d'environ 500 000 euros par rapport au recours à des BTF. En revanche, le CFF estime que, au moins pour la période récente, les conditions qu'il propose sont plus favorables à l'Etat que celles d'un refinancement par les BTF.

Il va de soi que les exigences du marché constituent un facteur déterminant pour apprécier la comparaison entre le financement par BTF et les avances rémunérées consenties par le CFF. En tout état de cause, la politique monétaire non conventionnelle actuelle, qui perturbe la vision des taux à court terme, ne permet pas de se prononcer sur le surcoût pour l'Etat. Quoi qu'il en soit, votre rapporteur spécial adhère aux remarques de la Cour des comptes : il n'est pas souhaitable qu'un déficit de cette ampleur soit débudgétisé.

Par ailleurs, comme indiqué plus haut, les avenants successifs à la convention de 1992 entre l'Etat et le Crédit foncier ont prévu qu'en cas de solde débiteur, l'Etat paierait au CFF des intérêts au taux EONIA majoré de 6,5 points de base. La direction générale du Trésor rappelle que le taux initialement prévu était égal au taux EONIA+12,5 points de base, et que les avenants successifs ont donc permis de « limiter le coût du portage du découvert auprès du CFF ».

D'après les réponses au questionnaire, ces clauses ont entraîné le paiement par l'Etat de montants d'intérêts égaux à 12,54 millions d'euros en 2007, 21,2 millions d'euros en 2008 et 3,3 millions en 2009.

Ces montants, qui gagneraient à figurer explicitement dans la justification au premier euro des projets et rapports annuels de performances , ne sont pas directement corrélés à celui du report de charge constaté, chaque année, en début de gestion, mais à la variation du solde du compte ouvert auprès du CFF.

Les intérêts étant calculés à la fin de chaque mois, le paiement des provisions par l'Etat a pour effet de minorer le solde débiteur auquel sont appliqués les intérêts débiteurs, voire de le transformer en solde créditeur auquel sont appliqués des intérêts créditeurs .

Afin de minorer au maximum les intérêts débiteurs en début d'année, la direction générale du Trésor verse une provision importante dès qu'elle dispose des crédits budgétaires, c'est-à-dire, le plus souvent, pour le mois de février. Ainsi, en 2009, pour éviter de dépasser le seuil d'un milliard d'euros prévu par la convention Etat-CFF, la provision transférée en janvier, correspondant à la quasi-totalité de la dotation budgétaire votée en loi de finances pour 2009, a permis de rétablir un solde créditeur. Une telle opération ne consiste pas à apurer le découvert mais à le combler provisoirement. Il s'agit donc d'une opération de « cavalerie » qui consiste à pousser les déficits en avant sans les résorber ( cf. tableau ci-après).

Au 1 er novembre 2010, près de 404 000 euros d'intérêts avaient été versés au Crédit foncier, ce qui met en évidence la très forte diminution du découvert .

Évolution du solde débiteur de l'Etat auprès du CFF entre 2006 et 2010

(en euros)

2006

2007

2008

2009

2010

Provisions reçues

Primes payées

Provisions reçues

Primes payées

Provisions reçues

Primes payées

Provisions reçues

Primes payées

Provisions reçues

Primes payées

Janvier

0,00

182 263 830,36

220 000 000,00

153 550 356,38

220 000 000,00

132 375 295,08

1 083 144 075,09

143 351 490,72

0,00

48 910 560,47

Février

235 000 000,00

225 986 545,49

865 000 000,00

184 871 876,17

973 000 000,00

175 091 204,99

0,00

142 401 262,50

819 242 824,31

58 277 295,94

Mars

220 000 000,00

216 947 060,36

200 000 000,00

156 807 371,67

0,00

146 220 542,14

0,00

92 716 312,11

0,00

60 642 783,71

Avril

350 000 000,00

164 380 671,18

77 000 000,00

117 554 820,25

0,00

146 955 806,07

0,00

79 095 433,22

90 000 000,00

53 821 215,86

Mai

0,00

129 286 573,91

0,00

109 677 285,25

0,00

112 518 077,46

0,00

56 787 286,23

70 000 000,00

45 171 262,66

Juin

200 000 000,00

147 209 271,73

0,00

112 765 600,73

0,00

133 311 784,13

0,00

68 799 458,25

0,00

55 618 453,51

Juillet

85 000 000,00

118 151 431,55

0,00

118 455 200,80

0,00

134 811 994,13

0,00

66 606 326,58

110 000 000,00

52 580 938,90

Août

0,00

94 962 734,65

0,00

75 427 876,27

0,00

79 237 611,37

0,00

43 444 317,57

39 256 066,08

Septembre

85 000 000,00

100 545 296,49

0,00

81 916 724,10

145 000 000,00

107 064 655,09

70 000 000,00

49 790 763,82

50 000 000,00

47 478 646,81

Octobre

0,00

135 598 226,55

0,00

119 254 879,97

0,00

167 211 852,87

0,00

59 301 663,45

52 287 117,54

Novembre

0,00

124 048 992,94

0,00

116 488 647,96

0,00

114 014 960,91

0,00

48 339 593,95

Décembre

0,00

144 881 694,10

0,00

128 988 890,95

151 855 924,91

139 310 829,63

2 605 963,15

57 023 219,70

Total

1 175 000 000,00

1 784 262 329,31

1 362 000 000,00

1 475 759 530,50

1 489 855 924,91

1 588 124 613,87

1 155 750 038,24

907 657 128,10

1 139 242 824,31

514 044 341,48

Solde débiteur année n

- 609 262 329,31

- 113 759 530,50

- 98 268 688,96

248 092 910,14

Solde débiteur année n-1

- 95 702 408,82

- 715 299 633,68

- 842 703 558,34

- 963 363 591,95

- 719 242 824,31

Commission gestion année n

- 1 341 361,09

- 1 107 294,82

- 1 191 424,57

-680 997,95

Intérêts débiteurs année n

-8 993 534,46

- 12 537 099,34

- 21 199 920,08

- 3 291 144,55

Solde débiteur total

- 715 299 633,68

- 842 703 558,34

- 963 363 591,95

- 719 242 824,31

Source : direction générale du Trésor

B. UNE DETTE PERSISTANTE À L'ÉGARD DU CFF, QUE NE JUSTIFIE PAS ENTIÈREMENT LE CARACTÈRE ALÉATOIRE DE LA PRÉVISION

1. Une prévision délicate

S'agissant de la sincérité de la prévision budgétaire, votre rapporteur spécial prend volontiers acte du fait qu'elle constitue un exercice difficile . Comme le fait valoir la direction générale du Trésor, « la dépense épargne-logement est délicate à appréhender car fortement dépendante des comportements des détenteurs de PEL et de CEL, ces derniers étant attentifs à l'évolution de deux facteurs principaux qui conditionnent l'attractivité du PEL en tant que produit d'épargne et produit d'accession :

« - des facteurs économiques : taux de rémunération du PEL au regard du taux de rémunération des autres produits d'épargne (livret A, assurance-vie), taux d'un prêt PEL au regard des taux de prêts libres ;

« - des facteurs réglementaires , voire fiscaux , l'arrivée d'un PEL à une maturité de 10 ans ou 12 ans (n'étant) pas sans conséquence en matière fiscale ».

L'ensemble de ces éléments conduit le Gouvernement à souligner la difficulté de « prendre en compte dans l'exercice de chiffrage l'ensemble des facteurs économiques ou conjoncturels qui jouent un rôle déterminant dans la clôture des plans et comptes d'épargne-logement et dans le déclenchement du paiement de la prime » . On relève néanmoins que « les effets de la fiscalisation peuvent être mieux anticipés lors de l'exercice de prévision budgétaire : en effet celui-ci repose principalement sur un chiffrage prévisionnel des taux de clôture pour chaque génération de PEL. Or, lors de cet exercice, est pris en compte l'impact que pourraient avoir les effets de la fiscalisation sur les générations de PEL de 10 ans et 12 ans : pour ces générations, le taux de clôture est systématiquement majoré entraînant ainsi une augmentation du montant de primes susceptibles d'être versées ».

Concrètement, la prévision inscrite au projet annuel de performances croise :

1) les statistiques générationnelles , fournies par les huit principaux établissements de crédit servant les primes (nombre de PEL ouverts à la fin de chaque année, montant de leur encours, prime moyenne acquise pour chaque génération de plan donnée) ;

2) l'évolution du montant de primes versées au cours des dernières années ;

3) l'évolution du taux de clôture des PEL, dans leur ensemble et par génération, depuis au moins deux ans.

Selon le Trésor, « l'analyse comparative de l'ensemble de ces données, associée à la prise en compte des effets de la réglementation fiscale actuelle permet, dans une certaine limite, d'extrapoler sur les trois années à venir les taux de clôture de l'ensemble des générations de PEL et d'en déduire le montant de primes à payer ».

L'évolution des crédits sur trois ans inscrits dans le projet annuel de performances annexé au présent projet de loi de finances montre que la dotation du programme 145 « Epargne » devrait croître d'environ 0,72 % en 2012 (1 129 millions d'euros) pour ensuite diminuer de près de 1,43 % en 2013 (1 113 millions d'euros). Ces variations ne semblent pourtant pas correspondre au dynamisme attendu en termes de clôture de plans en 2011 et 2012 ( cf. infra ).

2. Apurer la dette à l'égard du CFF et prévenir sa reconstitution

Il n'est donc pas contestable que le calibrage annuel du besoin de crédits constitue un exercice délicat, car soumis à de nombreux aléas. Pour autant, votre rapporteur spécial considère que les prévisions élaborées au cours des trois dernières années ne pouvaient être qualifiées de totalement sincères dans la mesure où, au-delà des difficultés liées à l'estimation des crédits nécessaires pour couvrir les primes de l'année à venir, elles ne prévoyaient aucune marge de manoeuvre supplémentaire pour résorber le report de charge accumulé qui, lui, était certain.

En effet, si le décalage entre prévision et exécution est difficilement évitable, une prévision sincère devrait néanmoins tenir compte des éventuelles insuffisances constatées au titre des années passées pour procéder à des ajustements réguliers des crédits ouverts en loi de finances initiale, afin d'éviter l'accroissement du découvert de l'Etat auprès du Crédit foncier.

Il ne semble pas qu'une telle pratique ait été observée au cours des dernières années et, dans ces conditions, votre rapporteur spécial recommande que la budgétisation de l'action 1 du programme « Epargne » tienne compte, à l'avenir, de la nécessité de résorber les reports de charge attendus en fin de gestion. Par exemple, à la fin de l'année 2008, la dotation budgétaire votée pour l'année 2009 était à peine suffisante pour couvrir les découverts de l'année précédente. La reconstitution d'une dette était par conséquent certaine.

Il a fallu des événements conjoncturels (la baisse inopinée du nombre de primes versées en 2010) pour que le découvert soit sensiblement diminué et qu'il soit même possible d'envisager sa résorption définitive au cours de l'année 2011 ( cf. infra ). Au 1 er novembre 2010, le découvert ne s'élevait plus qu'à 42,5 millions d'euros .

Selon les réponses du Gouvernement au questionnaire de votre rapporteur spécial, la dépense associée aux primes devrait avoisiner 612 millions d'euros en 2010, soit un montant bien inférieur de celui constaté en 2009. 1 249,525 millions d'euros ayant été inscrits en loi de finances initiale, le surplus de crédits disponibles par rapport aux besoins devrait s'établir à environ 637,525 millions d'euros. Si ce surplus était affecté entièrement à la résorption du report de charge existant, le report de charge résiduel pourrait passer de 719 millions d'euros début 2010 à environ 82 millions d'euros début 2011 , à la condition que la réserve de précaution initiale - consistant à geler 5 % des crédits votés en début d'exercice, soit 109 millions d'euros - soit levée.

Votre rapporteur spécial préconise cette solution - ou l'ouverture de crédits supplémentaire en loi de finances rectificative pour 2010 - afin de débuter l'année 2011 sur des bases financières totalement assainies. Une telle démarche apparaît d'autant plus souhaitable que, selon la Cour des comptes, « de nouveaux pics de dépenses devraient être observés » 31 ( * ) entre 2011 et 2013, « compte tenu de l'arrivée à échéance de grosses générations de prêts de 10-12 ans, impactés par les dispositions fiscales et sociales décidées en 2005 et 2006 ».

C. DES COÛTS DE GESTION ÉLEVÉS ET INSUFFISAMMENT CONTRÔLÉS

Outre les intérêts dus au Crédit foncier en cas de provisions insuffisantes et de solde débiteur, les modalités actuelles de financement de l'épargne-logement occasionnent des frais de gestion insuffisamment maîtrisés.

1. Les frais de gestion liés aux primes d'épargne-logement

Aux termes de l'article 11 de la convention de 1992, « les frais et dépenses de fonctionnement auxquels donnent lieu les services assurés en exécution de la présente convention sont remboursés semestriellement par le Trésor au Crédit foncier sur la production d'états justificatifs qu'il appartient à cet établissement de fournir à la direction du Trésor » .

Votre rapporteur spécial observe que les frais de gestion exposés par le CFF pour le paiement des primes d'épargne-logement sont passés de 330 484 euros en 2002 à 690 646 euros en 2009, après un pic à 710 497 euros en 2008. La loi de finances initiale pour 2010 les évalue à 750 000 euros et le projet de loi de finances pour 2011 à plus de 866 000 euros. Entre 2002 et 2009, l'augmentation annuelle de ces frais aura donc été de 14 % en moyenne.

Évolution des frais de gestion facturés par le CFF

(en euros)

Source : commission des finances, d'après les réponses du Crédit foncier de France.

Selon le projet annuel de performances pour 2010, cette augmentation notable s'explique par le fait que le Crédit foncier a, à compter de 2005, « été amené à réaliser de nombreux développements informatiques afin de tenir compte des modifications réglementaires », telles que l'obligation de souscrire un prêt immobilier pour bénéficier du versement de la prime, ou de répondre aux demandes de l'administration (contrôle accentué des homonymies...). De même, en 2008, la modification du « schéma de comptabilité analytique » du CFF « a eu un impact sur la répartition des différents coûts de sa structure et par conséquent sur le montant des frais de gestion facturés ».

Selon les réponses au questionnaire, la direction générale du Trésor « contrôle le relevé de dépenses fourni par le CFF et vérifie à ce titre les sommes de l'ensemble des postes de dépenses qui composent les frais de gestion (dépenses de personnel, dépenses de matériel, charges) ».

Pour l'année 2009, les frais se sont décomposés ainsi :

Frais de personnel

417 925,43

Frais de matériel

113 448,15

Charges

130 100,68

Total

661 474,26

Ce contrôle s'opère tant par rapport à l'évolution des frais constatée les semestres précédents que par rapport aux justificatifs fournis par le Crédit foncier, expliquant d'éventuelles hausses des coûts.

Votre rapporteur spécial a pu constater que les justificatifs détaillent chaque poste de dépense très précisément et il convient de souligner l'effort de comptabilité analytique qui a été entrepris. Le CFF est ainsi en mesure d'indiquer que 2,97 ETP sont affectés au traitement des primes d'épargne-logement en 2010 (contre 3,47 en 2009 et 4,06 en 2008).

Néanmoins, il ne serait possible de porter une appréciation sur la justesse de ces documents qu'à l'appui d'un contrôle approfondi sur place et au vu des pièces comptables certifiées. La direction générale du Trésor a expliqué qu'elle ne mandate pas de commissaire aux comptes pour expertiser la gestion du CFF. En revanche, de telles missions ont déjà été confiées à l'Inspection générale des finances. La dernière remonte à l'année 2003. Il serait souhaitable que l'IGF soit à nouveau mandatée pour expertiser en profondeur la gestion du CFF , non pas que votre rapporteur spécial mette en doute la fiabilité et la véracité des données transmises mais parce qu'il est sain qu'un mandant contrôle à échéance régulière son mandataire.

Votre rapporteur spécial relève enfin que, parmi l'ensemble des dépenses non liées directement au paiement des primes d'épargne-logement, seuls les frais de gestion stricto sensu font l'objet d'une présentation distincte dans les documents budgétaires, en tant que crédits de fonctionnement (titre 3).

Il n'en est pas de même de la commission de gestion perçue par le CFF, soit près de 570 000 euros en 2009 et environ 347 000 euros au 1 er novembre 2010, sans que l'on puisse en expliquer clairement la raison. Elle représente la rémunération du service rendu par le CFF à l'Etat et est égale à 0,0625 % hors TVA des primes versées chaque mois.

Lors de son audition par votre rapporteur spécial, la Cour des comptes a fait valoir qu'il serait plus logique que la commission soit calculée en fonction du nombre de dossiers traités plutôt qu'en fonction du montant des primes . En effet, seul le traitement des dossiers constitue un acte de gestion pour le CFF et ce quel que soit le montant de la prime. Votre rapporteur spécial adhère à cette préconisation .

La rémunération totale du CFF dépend de plusieurs facteurs comme le montre le tableau ci-dessous. Depuis 2002, elle a ainsi fluctuée dans une fourchette de 1 à 17, principalement du fait d'intérêts débiteurs élevés.

Rémunération du CFF au titre de la gestion des primes d'épargne-logement

(en euros)

Frais de gestion

Dont frais informatiques

Commissions de gestion

Intérêts débiteurs Trésor

Total

2002

303 153,48

61 170,00

832 294,81

1 651 346,35

2 786 794,64

2003

335 216,34

81 883,00

568 210,59

428 690,47

1 332 117,40

2004

377 193,81

75 071,00

537 614,86

982 391,90

1 897 200,57

2005

634 291,69

247 635,00

608 759,18

1 117 801,75

2 360 852,62

2006

654 103,25

221 624,00

1 121 539,37

8 993 534,47

10 769 177,09

2007

670 536,15

233 881,00

925 831,79

12 537 099,35

14 133 467,29

2008

713 812,97

262 739,00

996 174,38

21 199 920,09

22 909 907,44

2009

661 474,27

254 282,00

569 396,30

3 291 144,55

4 522 015,12

Source : Crédit foncier de France

2. Les frais de gestion associés aux prêts au secteur aidé

Hors primes associées aux CEL et PEL, la Cour des comptes relève, dans sa note d'exécution budgétaire relative à l'exercice 2009, que le financement des prêts du Crédit foncier au secteur aidé 32 ( * ) se caractérisent également par d'importants frais de gestion .

Ainsi, 40 % des dépenses de l'action 2 « Instruments de financement du logement » du programme 143 « Epargne » correspondent à des frais de gestion et la commission de gestion versée au CFF, soit 1,955 million d'euros, « représente la moitié du montant des aides versées par l'Etat en 2009 (3,8 millions d'euros) » . S'agissant de mécanismes de prêts en extinction, la Cour recommande de mettre un terme à leur gestion par le Crédit foncier en faisant racheter par l'Etat le portefeuille résiduel de prêts.

III. LA DOTATION PRÉVUE DANS LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2011 CONSTITUE UN MINIMUM

A. UN DÉCOUVERT CUMULÉ TRÈS FAIBLE À LA FIN DE L'ANNÉE 2010

Comme indiqué plus haut, l'année 2010 constitue une opportunité pour résorber définitivement le découvert de l'Etat auprès du CFF compte tenu de la diminution très sensible du nombre de primes versées cette année.

La levée de la réserve de précaution initiale, soit 109 millions d'euros, ou l'ouverture de crédits en loi de finances rectificative permettrait utilement de se remettre en conformité avec les principes budgétaires et, accessoirement, d'en terminer avec une « politique de l'autruche » qui a consisté à ne pas voir les déficits croissants reportés d'une année sur l'autre .

B. VERS UNE AUGMENTATION DU NOMBRE DE CLÔTURES

Si les préconisations de votre rapporteur spécial n'étaient pas suivies d'effets, il ne pourrait qu'exprimer de sérieux doutes sur la sincérité de la budgétisation pour 2011 .

Près de 1 115,7 millions d'euros sont inscrits au titre du paiement des primes d'épargne-logement et 866 244 euros au titre des frais de gestion.

Si l'on soustrait de cette somme le découvert 2010, qui devrait s'établir autour de 82 millions d'euros, environ 1 milliard d'euros serait consacré aux primes en 2011. Or, comme cela a été rappelé, les générations de PEL contractés en 2001 et en 2002 recouvrent près de 28 % de l'encours total des PEL. Elles devraient être massivement clôturées dans les deux ans qui viennent afin d'éviter la fiscalisation et les prélèvements sociaux sur les intérêts. En conséquence, le nombre et le montant des primes risquent d'être élevés. A titre de comparaison, durant l'année 2009, un peu plus d'un million de primes ont été versées pour un montant de près de 900 millions d'euros. Il s'agit d'un point bas historique jamais atteint depuis 1990 , puisque, auparavant, au moins de 1,5 million de primes avaient été distribuées chaque année.

La situation de 2009 et 2010 est donc exceptionnelle. En 2006, 2007 et 2008, en moyenne, plus de 1,6 milliard d'euros de primes ont été appelées . Ce chiffre semble mieux correspondre à la réalité de la dépense budgétaire à laquelle il faut s'attendre pour les années à venir.

Dans un tel contexte , votre rapporteur spécial exprime son plus grand scepticisme sur la prévision budgétaire pour l'année 2011 et peut-être plus encore pour les années 2012 et 2013 puisque sur la période triennale le budget consacré aux primes est en baisse d'environ 0,22 %.

Par ailleurs, 866 244 euros sont destinés à couvrir les frais de gestion. Ce montant est probablement trop élevé au regard de l'exécution budgétaire 2009 (environ 570 000 euros). Néanmoins, cette somme n'a qu'un caractère évaluatif puisque les frais de gestion sont remboursés sur pièces justificatives. En tout état de cause, votre rapporteur spécial souhaite qu'une analyse approfondie de ces frais de gestion puisse être menée pour expliquer l'augmentation régulière dont ils font l'objet.

IV. QUELLE VOCATION POUR LA PRIME D'ÉPARGNE-LOGEMENT ?

D'après les informations transmises par la direction du Budget, environ 47 % des prêts immobiliers octroyés à la fermeture d'un PEL sont destinés à la réalisation de travaux . De même, par exception, « peuvent bénéficier d'un prêt d'épargne-logement [et de la prime subséquente] les résidences utilisées à titre personnel et familial pour le repos et les loisirs » 33 ( * ) , c'est-à-dire les résidences secondaires . Ainsi, près de 53 % des bénéficiaires de la prime appartiendraient au trois derniers déciles de la population la plus aisée et 29 % appartiendraient au dernier décile.

Il apparaît dès lors légitime de s'interroger sur la vocation de la prime d'épargne-logement. Si elle a été conçue comme un instrument d'aide à l'accession à la propriété, force est de constater qu'elle ne remplit qu'imparfaitement son objectif .

Faut-il dès lors limiter la prime aux primo-accédants ou à l'achat d'une résidence principale ? Il y a là une réflexion stratégique qui dépasse le simple cadre de ce contrôle et s'insère dans le champ plus global de l'avenir des aides publiques d'accession à la propriété.

ANNEXE 2 - LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. AUDITIONS PRÉPARATOIRES À L'EXAMEN DU PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2011

Agence France Trésor

M. Philippe Mills, directeur général

M. Anthony Requin, directeur général adjoint

M. Hervé Naerhuysen, responsable de la cellule trésorerie

Agence des participations de l'Etat

M. Jean-Dominique Comolli, commissaire aux participations de l'Etat

M. Olivier Bourges, directeur général adjoint

M. Elie Beauroy, secrétaire général

II. AUDITIONS MENÉES DANS LE CADRE DU CONTRÔLE SUR LE FINANCEMENT DES PRIMES D'ÉPARGNE-LOGEMENT

Cour des comptes

M. François Monier, première chambre

M. Philippe Ravalet, première chambre

Mme Christine Baillion, première chambre

Direction générale du Trésor (ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi)

M. Charles Sarrazin, chef du bureau du financement du logement et des activités d'intérêt général

Mme Bénédicte Meton, adjointe au chef de bureau

Direction du budget (ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique)

M. Laurent Machureau, sous-directeur de la 4 ème sous-direction

M Fabrice Perrin, chef du bureau du logement, de la ville et des territoires

Mme Lorraine Pinto, adjointe au chef du bureau

Crédit foncier de France

M. Thierry Dufour, directeur général délégué

M. Daniel Denoyelle, directeur de la plateforme bancaire

M. René Descheemaker, responsable du département Moyens de paiement et opérations de banque


* 1 Estimation au 30 septembre 2010.

* 2 La hausse des dépôts des correspondants s'explique principalement par l'obligation de dépôts des fonds reçus par les opérateurs sélectionnés dans le cadre des programmes d'investissement d'avenir (+ 34 milliards d'euros), par le dépôts des sommes allouées au Plan campus (+ 3,7 milliards d'euros) ainsi que par la rationalisation de certaines trésoreries publiques (+ 6 milliards d'euros).

* 3 La variation du compte se décompose comme suit : 5,4 milliards d'euros de primes et décotes à l'émission ; 7 milliards d'euros liés à la révision à la hausse du solde de fin 2009, ce qui, à solde fin 2010 constant, accroît à due concurrence les ressources de financement tirées du compte en 2010 ; enfin 4,5 milliards d'euros de rachats de titres venant à échéance en janvier 2011, ce qui permet, toutes choses égales par ailleurs, de réduire l'encaisse de précaution en fin d'année 2010.

* 4 Plus la dette est détenue de manière diversifiée du point de vue géographique et par type de détenteur, moins la réponse aux chocs affectant la demande de titre est uniforme.

* 5 La dette financière non négociable est composée des bons du Trésor sur formules et de divers emprunts d'Etat restés sous forme « papier » lors de l'opération de dématérialisation de la dette de l'Etat intervenue en 1984. L'ensemble des emprunts concernés est aujourd'hui totalement amorti, à l'exception de la dette perpétuelle (majorat, dotations et rentes viagères) qui représente un montant très faible inférieur à 7 000 euros. En l'absence d'émissions nouvelles depuis le 1 er janvier 1999, date à laquelle les bons du Trésor sur formule ont été supprimés, la gestion de la dette financière non négociable est aujourd'hui limitée aux opérations de remboursement des titres en capital et en intérêts, ainsi qu'à la comptabilisation des emprunts prescrits. Le capital restant dû au titre de la dette financière non négociable s'élevait, au 30 juin 2010, à 248 millions d'euros dont 95 au titre des bons du Trésor sur formule et 91 au titre des deux emprunts libératoire et obligatoire. Le montant payé au titre des intérêts s'est élevé, en 2009, à 1,4 million d'euros concernant essentiellement les bons du Trésor sur formule et à 0,46 million d'euros au cours du premier semestre 2010.

* 6 Initialement estimés à 1,3 % en moyenne annuelle, ils sont finalement attendus légèrement en deçà de 0,5 % sur l'année.

* 7 Ils résultent du choix de la date anniversaire pour les lignes créées et du choix des lignes abondées lors des adjudications effectivement opérées, donc de leurs dates anniversaires respectives : ces effets influent sur le montant des coupons courus ou versés.

* 8 La prévision de taux courts retenue dans le cadre du projet de loi de finances s'appuie sur les prévisions du consensus forecast , qui anticipent des taux à 3 mois de 1,3 % à la fin septembre 2011. Par interpolation avec les taux constatés en 2010, la moyenne annuelle des taux à 3 mois s'établirait à 1,0 %. Toutes maturités confondues, le taux moyen des BTF sur l'année 2011 atteindrait alors 1,16 %.

* 9 En application de l'article 25 de la LOLF, ces primes et décotes sont considérées comme des ressources de trésorerie.

* 10 En effet, les intérêts dus par l'Etat ne courent qu'à compter du versement effectif des fonds aux opérateurs gestionnaires des fonds. Ils sont donc conditionnés par la conclusion des conventions entre l'Etat et les opérateurs gestionnaires.

* 11 La dette garantie concerne les engagements des sociétés, organismes bancaires, collectivités ou établissements publics qui bénéficient de la garantie de l'Etat, c'est-à-dire ceux pour lesquels l'État s'est engagé, en cas d'éventuelle défaillance du débiteur, à effectuer lui-même le règlement des intérêts ou le remboursement des échéances d'amortissement prévues au contrat.

* 12 La part de l'encours centralisée au fonds d'épargne atteint 207 milliards d'euros.

* 13 Cette action porte notamment les garanties accordées à la Société de financement de l'économie française (SFEF) et à la Société de prises de participation de l'Etat (SPPE).

* 14 La majeure partie des crédits est versée aux sociétés d'assurance (plus de 90 % du montant total des dépenses du programme), qui gèrent le plus grand nombre de rentes bénéficiant de majorations légales au titre du programme (soit 343 851 rentes servies sur un total de 423 316 en 2009).

* 15 Celles-ci sont fondées sur le calcul de la diminution des demandes en fonction de l'application des tables de mortalité en vigueur pour les rentes viagères à partir de l'exécution de l'année en cours.

* 16 Cependant, les rentes en cours de constitution disposent de droits latents qui viennent progressivement contribuer à la charge de remboursement au fur et à mesure de l'arrivée en service de la rente. Cet effet haussier, relativement marginal, est difficile à prévoir, les entreprises d'assurance et les mutuelles n'étant pas en mesure d'établir de prévisions à ce sujet, notamment parce qu'il leur est impossible de déterminer par avance combien de crédirentiers seront en-dessous du plafond de ressources donnant accès au dispositif.

* 17 79 ans en moyenne.

* 18 Elle a concerné les 25 entreprises industrielles suivantes : ADP, Air France-KLM, Areva, ATMB, DCI, DCNS, EADS, EDF, France Télécom, GDF Suez, Giat, Imprimerie Nationale, LFB, la Française des jeux, La Monnaie de Paris, RATP, RFF, Renault, RTE, Safran, Semmaris, SNCF, SNCM, Thales et La Poste.

* 19 Convention Etat-ANR publiée au Journal officiel du 31 juillet 2010.

* 20 Fonds de co-investissement pour les jeunes entreprises (FCJE), qui a vocation à investir en fonds propres dans des PME technologiques, Fonds de promotion pour le capital risque 2000 (FPCR 2000) et Fonds de fonds technologique 3 (FFT 3) : ces fonds, constitués sous forme de fonds commun de placement à risques, ont vocation à investir dans des fonds de capital risque qui participent au financement de la création et du développement de PME innovantes.

* 21 Soit une majoration par personne à charge de 10 % du montant des intérêts acquis pris en compte pour le calcul du prêt dans la limite de 153 euros par personne à charge.

* 22 Article 7 de la loi de finances pour 2006 (n° 2005-1719 du 30 décembre 2005).

* 23 Article L. 136-7 du code de la sécurité sociale, tel que modifié par l'article 10 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 (n° 2005-1579 du 19 décembre 2005).

* 24 Au terme de cette période de dix ans, les nouveaux intérêts générés sont ensuite assujettis aux prélèvements sociaux chaque année.

* 25 Ce recentrage s'est opéré consécutivement à la perte par le CFF, en 1985, du quasi-monopole qu'il détenait sur la distribution des prêts aidés en accession.

* 26 Réponses au questionnaire de votre rapporteur spécial.

* 27 Les intérêts demeurent calculés mensuellement et capitalisés au dernier jour de chaque mois.

* 28 L'action 2 de ce programme « Instruments de financement du logement social » retrace quant à elle l'intervention de l'Etat au niveau des prêts du secteur aidé du Crédit foncier de France et des prêts conventionnés gérés par la Société de gestion du fonds de garantie de l'accession sociale à la propriété (SGFGAS), l'ensemble de ces prêts concourant à l'amélioration de l'accession à la propriété.

* 29 Ce redéploiement a contribué à financer un dépassement des dépenses initialement prévues et dû à la restructuration de prêts en faveur de l'outre-mer.

* 30 Soit EONIA+0,065 % et capitalisation mensuelle.

* 31 Note d'exécution budgétaire 2009.

* 32 Soit les prêts d'accession à la propriété (PAP), les prêts locatifs aidés (PLA), les prêts spéciaux immédiats (PSI), les prêts pour le financement d'immeubles à loyer moyen (ILM) et les prêts complémentaires fonctionnaires (PCF).

* 33 Article R*315-8 du code de la construction et de l'habitation.

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