Section 3 - Dispositions relatives aux dépenses d'accidents du travail et de maladies professionnelles
Article 42 (art. L. 242-7, L. 422-4, L. 422-5 du code de la sécurité sociale) - Réforme de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles
Objet : Cet article instaure une nouvelle incitation financière à la prévention des risques professionnels et renforce les dispositifs de majoration existants.
I - Le dispositif proposé
Cet article complète la transposition de l'accord conclu entre les partenaires sociaux le 12 mars 2007 sur la prévention, la tarification et la réparation des risques professionnels.
Le 1° modifie l'article L. 242-7 du code de la sécurité sociale. Il renvoie à un arrêté la fixation du taux de cotisation et de la durée de la majoration de cotisation ainsi que la fixation d'un montant forfaitaire minimum . Cette dernière mesure, véritable apport de l'article, est destinée à remédier au caractère peu dissuasif du système actuel de majoration, calculé en fonction du risque auquel sont exposés les salariés d'un établissement et de sa durée, et qui aboutit souvent à exiger des montants financièrement faibles. L'objectif du Gouvernement est de parvenir par ce moyen à obtenir que 100 % des injonctions à la prise de mesures de prévention soient suivies d'effet contre seulement 50 % aujourd'hui.
Le 2° vise à remédier aux cas où une entreprise a pris des dispositions ponctuelles pour éviter d'acquitter une majoration de cotisation, mais pas les mesures durables, permettant d'éviter la répétition des situations de risque. A cette fin, il est ici proposé de compléter l'article L. 422-4 du code de la sécurité sociale relatif aux cas où une injonction préalable n'est pas requise pour imposer une cotisation supplémentaire à une entreprise. Désormais, lorsque des situations particulièrement graves de risque exceptionnel auront déjà fait l'objet d'une première injonction à l'établissement ou à l'entreprise, la majoration pourra être imposée directement. Les situations visées seront définies par arrêté après consultation des comités techniques nationaux chargés de mener les études sur les risques professionnels et les moyens de les prévenir.
Le 3° prévoit la généralisation d'un dispositif expérimental mis en place en 2008 à la suite de la conférence tripartite sur l'amélioration des conditions de travail d'octobre 2007. Ce dispositif permet aux caisses régionales d'assurance maladie (Cram), qui deviendront au 1 er janvier 2010 les caisses d'assurance retraite et de la santé au travail (Carsat) en application de la loi HPST, d'attribuer directement aux entreprises de moins de cinquante salariés des subventions dans le cadre de contrats simplifiés de prévention. Ce dispositif permet d'éviter une procédure complexe et lourde qui exige l'existence d'une convention d'objectifs de la branche professionnelle dans laquelle se trouve l'entreprise et l'intervention de multiples acteurs (les comités techniques nationaux et régionaux, le directeur régional du travail et le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail).
II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a adopté, contre l'avis de la commission des affaires sociales et avec un avis de sagesse du Gouvernement, un amendement proposé par Dominique Tian, limitant la possibilité d'imposer une majoration de cotisation sans nouvelle injonction au seul cas où le même établissement aura déjà fait précédemment l'objet d'une injonction.
III - La position de votre commission
Votre commission est favorable à la modernisation du système de calcul des cotisations des entreprises au financement du régime AT-MP. Elle note que les mesures législatives proposées s'inscrivent dans le cadre d'une réforme plus vaste de la tarification des risques. Celle-ci, qui relève du pouvoir réglementaire et a été approuvée par l'ensemble de partenaires sociaux réunis au sein de la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles (CAT/MP), devrait être mise en place pour 2012.
Plus précisément, le fait de renforcer l'effectivité des injonctions adressées aux entreprises est particulièrement nécessaire : les statistiques données par le ministère du travail font apparaître que la moitié seulement d'entre elles sont aujourd'hui suivies d'effet. Ce constat est d'autant plus inquiétant que le nombre des injonctions adressées aux entreprises chaque année est faible (950), et que l'objectif défini par la convention d'objectifs et de gestion 2009-2012 ne prévoit de l'augmenter que de 10 %.
La restriction de la possibilité de majoration immédiate aux seuls cas où l'établissement aurait déjà fait l'objet d'une injonction ne paraît dès lors peu satisfaisante. En effet, il est important que les entreprises prennent leurs responsabilités en matière de prévention de risque le plus tôt possible et non au coup par coup, en fonction des contrôles exercés. Pour certains secteurs comme le nettoyage, la taille des établissements est en elle-même une limite à la mise en oeuvre de mesures de prévention et la seule politique de protection cohérente se place au niveau de l'entreprise. Néanmoins le législateur doit également tenir compte du fait que les partenaires sociaux ont marqué leur attachement à une tarification du risque par établissement, afin de tenir compte des différences de situation et d'activité . Revenir sur cet aspect des négociations risquerait de déséquilibré le compromis qui a été trouvé sur la réforme des règles de tarification.
S'agissant de la généralisation du système d'aides financières simplifiées, celui-ci est conforme au principe d'une rénovation du système d'incitation à la prévention fixé par l'accord du 12 mars 2007 et traduit par la définition d'un programme spécifique 24 ( * ) de la convention d'objectifs et de gestion 2009-2012. Deux cents contrats simplifiés ont été signés entre les Cram et des entreprises de moins de cinquante salariés entre 2008 et la fin du premier semestre 2009, ce qui montre l'intérêt suscité par ce dispositif dans les petites entreprises. Cependant, s'agissant d'une mesure dont le coût est évalué à 5 millions d'euros par an, il conviendra de s'assurer que les mesures de sécurité auxquelles sont destinées les sommes seront effectivement prises. La mise en place d'un système d'aide au lieu d'un système d'avance ne doit pas se traduire par une baisse des contrôles et votre commission souhaite sur ce point recueillir les assurances du Gouvernement.
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.
Article 43 - Dotations annuelles du fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante et du fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante
Objet : Cet article fixe le montant de la contribution de la branche AT-MP du régime général au financement du fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Fcaata) et du fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva).
I - Le dispositif proposé
Cet article détermine le montant de la contribution de la branche AT-MP aux deux fonds de l'amiante pour 2010.
Le paragraphe I fixe à 880 millions d'euros le montant de la contribution au fonds de cessation d'activité anticipée des travailleurs de l'amiante (Fcaata), soit un niveau stable par rapport à 2009.
Le paragraphe II fixe le montant du versement au fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva), dont la vocation est d'apporter aux personnes malades une réparation intégrale de leur préjudice, à 315 millions d'euros, soit un montant identique à celui des quatre dernières années.
L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.
II - La position de votre commission
Votre commission juge convenable le niveau des dotations proposé pour les deux fonds en 2010, compte tenu, à la fois, des moyens financiers de la branche et des besoins de financement des fonds. Elle vous demande d'adopter cet article sans modification.
Article 43 bis - Faisabilité d'une voie d'accès individuelle au fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante
Objet : Cet article, inséré par l'Assemblée nationale, tend à ce qu'un rapport évalue la faisabilité d'une voie d'accès individuelle au fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Fcaata).
I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale
Cet article, adopté à l'initiative de la commission des affaires sociales, vise à faire progresser la réflexion sur la réforme du Fcaata en demandant au Gouvernement d'étudier dans un rapport la faisabilité d'une voie d'accès individuel au dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante. Actuellement, celui-ci est ouvert aux seuls :
- salariés ou anciens salariés d'établissement figurant sur une liste établie par arrêté des ministres chargés du travail, de la sécurité sociale et du budget ;
- salariés ou anciens salariés affiliés au régime général ou à la mutualité sociale agricole et souffrant d'une maladie professionnelle provoquée par l'amiante, selon une liste de maladies éligibles.
En sont donc exclues les personnes qui ont été exposées à l'amiante mais dans une entreprise non répertoriée, ou souffrant d'une pathologie non reconnue comme liée à l'amiante, ou n'étant pas affiliées aux régimes visés. Si la justice impose de leur accorder le bénéfice du régime financé par le Fcaata, la nécessité d'établir des critères précis permettant de juger du caractère fondé d'une demande et la nécessaire préservation des finances publiques ont jusqu'à présent empêché d'ouvrir plus largement l'accès au fonds.
Une voie d'accès individuel pourrait donc apporter une solution à ce problème d'équité, à condition que le nombre de personnes concernées et les modalités de leur accès au Fcaata soient déterminés de manière claire. Ce sont ces questions que devra éclaircir le rapport demandé au Gouvernement pour le 30 septembre 2010.
II - La position de votre commission
Dans son rapport sur le drame de l'amiante 25 ( * ) , la mission commune d'information du Sénat a souligné son souhait « que la législation tende vers un traitement égalitaire de l'ensemble des personnels ayant été exposés à l'amiante » . L'étude de la mise en place d'une voie individuelle d'accès au Fcaata peut permettre d'y contribuer. Celle-ci ne doit cependant pas se faire au détriment de l'étude d'autres moyens de remédier aux inégalités d'accès notamment pour ce qui concerne les fonctionnaires.
Pour autant, et à la lumière de son expérience, votre commission est consciente des limites de l'exercice consistant à s'en remettre à la présentation d'un rapport demandé au Gouvernement. Elle souhaite donc que celui-ci soit effectivement remis dans les délais prescrits.
Sous le bénéfice de ces observations, elle vous demande d'adopter cet article sans modification.
Article 44 (art. L. 176-1 du code de la sécurité sociale) - Versement annuel de la branche accidents du travail et maladies professionnelles à la branche maladie du régime général
Objet : Cet article détermine le montant du reversement forfaitaire de la branche AT-MP du régime général à la branche maladie, en 2010, au titre de la sous-déclaration et de la sous-reconnaissance des accidents du travail et des maladies professionnelles.
I - Le dispositif proposé
L'article 30 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997, codifié à l'article L. 176-1 du code de la sécurité sociale, a institué un reversement forfaitaire annuel de la branche AT-MP du régime général vers la branche maladie, afin de compenser les dépenses supportées par cette dernière au titre des affections non prises en charge par la branche AT-MP alors qu'elles ont une origine professionnelle. L'article 54 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 a étendu ce mécanisme à la prise en compte de la sous-déclaration des accidents du travail.
L'article L. 176-2 du code de la sécurité sociale dispose en outre que le montant de ce versement est fixé chaque année en loi de financement de la sécurité sociale et qu'une commission présidée par un magistrat de la Cour des comptes, actuellement Noël Diricq, remet tous les trois ans au Parlement et au Gouvernement, après avis de la commission des AT-MP, un rapport évaluant « le coût réel pour la branche maladie de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles ». Le dernier rapport de cette commission a été rendu en juillet 2008.
Le présent article fixe le montant de ce reversement pour 2010 à 710 millions d'euros, montant égal à celui de 2009.
L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.
II - La position de votre commission
Votre commission a déjà rappelé la raison d'être de ce reversement forfaitaire qu'elle juge légitime, bien qu'il pèse sur les comptes de la branche AT-MP. Elle vous demande d'adopter cet article sans modification.
Article 44 bis - Réflexion d'ensemble sur l'évolution des tableaux des maladies professionnelles
Objet : Cet article, inséré par l'Assemblée nationale, propose que le Gouvernement dépose devant le Parlement, avant le 30 juin 2010, un rapport sur l'évolution des tableaux des maladies professionnelles.
I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale
Cet article, adopté à l'initiative de la commission des affaires sociales et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, tend à lutter contre le phénomène de sous-déclaration des maladies professionnelles en demandant au Gouvernement de faire évoluer les tableaux de reconnaissance des maladies : dans ce but, un rapport sur les mesures nécessaires devra être remis au Parlement avant le 30 juin 2010.
II - La position de votre commission
Votre commission a déjà étudié l'impact néfaste de la sous-déclaration des maladies professionnelles et des accidents du travail. L'évolution des tableaux des maladies professionnelles, pour laquelle plusieurs mécanismes ont déjà été mis en place, ne paraît cependant pas être de nature à y remédier. La priorité devrait plutôt être de renforcer la médecine du travail et la formation des médecins généralistes, pour permettre de déterminer clairement les causes professionnelles des maladies et accidents, et permettre leur indemnisation adéquate. En ce domaine, les négociations sociales semblent être dans une impasse ; il appartient aux pouvoirs publics de prendre leurs responsabilités.
En conséquence, votre commission vous demande de supprimer cet article .
Article 45 - Objectif de dépenses de la branche accidents du travail et maladies professionnelles pour 2010
Objet : Cet article fixe à 12,9 milliards d'euros en 2010 l'objectif de dépenses de la branche AT-MP, dont 11,4 milliards pour le seul régime général.
I - Le dispositif proposé
L'article 7 de la loi organique du 2 août 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale a inséré dans le code de la sécurité sociale un article L.O. 111-7-1 qui dispose que « dans la partie comprenant les dispositions relatives aux dépenses pour l'année à venir, ... chaque objectif de dépenses par branche, décomposé le cas échéant en sous-objectifs, fait l'objet d'un vote unique portant tant sur l'ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale que sur le régime général ».
Pour l'ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, le présent article fixe donc l'objectif de dépenses de la branche AT-MP pour 2010 à 12,9 milliards d'euros et à 11,4 milliards pour le seul régime général.
L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.
II - La position de votre commission
L'objectif de dépenses tous régimes confondus s'inscrit en progression de 2,33 % par rapport aux dépenses qui devraient être effectivement réalisées en 2009. Cette hausse mesurée aboutira pourtant à une aggravation du déficit de la branche en raison de la faiblesse des recettes. Votre commission souhaite que cet objectif d'évolution des dépenses soit respecté afin que le déséquilibre de la branche puisse rapidement être corrigé.
Elle vous demande d'adopter cet article sans modification .
* 24 Programme 4
* 25 Rapport d'information Sénat n° 37 (2005-2006) de Gérard Dériot et Jean-Pierre Godefroy, fait au nom de la mission commune d'information, déposé le 26 octobre 2005.