EXAMEN EN COMMISSION
Au cours de sa réunion du mercredi 14 janvier 2009, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Philippe Richert sur la proposition de loi n° 147 (2008-2009) abrogeant la loi n° 2008-790 instituant un droit d'accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires pendant le temps scolaire.
Un large débat a suivi l'exposé du rapporteur.
M. Serge Lagauche a souligné les difficultés de disposer des informations et des contacts utiles pour mettre en oeuvre le service d'accueil.
Il s'est interrogé sur l'ampleur des efforts nécessaires à l'application de cette loi au regard d'un phénomène limité pour lequel des solutions à l'amiable peuvent être trouvées.
Tout en se prononçant en faveur de l'abrogation de cette loi, il a proposé que son application soit laissée à l'appréciation des maires.
M. Ivan Renar s'est interrogé sur la légitimité de certaines lois votées pour apporter une réponse d'ordre législatif à des circonstances particulières.
Il a estimé, ensuite, que toute intervention répressive ne constituait en aucune façon une réponse aux difficultés de mise en oeuvre de la loi, que ce soit à l'égard des maires ou des familles.
Il a relevé que cette loi conduisait à créer, en cours d'année, des charges nouvelles pour les collectivités territoriales, et ce sans concertation préalable avec l'ensemble des communes.
Après avoir considéré les raisons fondamentales qui peuvent conduire un maire à une attitude de refus, il a défendu également le respect de l'autonomie des communes.
Mme Marie-Christine Blandin a estimé que, au-delà du débat sur la légitimité de la loi et de sa propre conviction, la loi était inapplicable. Elle a déclaré que les récents arbitrages budgétaires avaient tout particulièrement affecté le secteur de la vie associative alors même qu'il constitue un vivier de personnels susceptibles de permettre la mise en oeuvre de la loi de manière satisfaisante.
M. Claude Domeizel a souligné les difficultés d'application du dispositif d'accueil en milieu rural et s'est prononcé pour l'abrogation de la loi.
Il a estimé que la compétence exercée par l'État sur le personnel enseignant le contraignait aussi à assurer l'accueil des élèves en cas d'absence ou de grève des enseignants.
M. Jean-Pierre Plancade a regretté la contrainte qui a pesé sur l'adoption de la loi.
Il a établi une distinction entre les maires se refusant à appliquer la loi et ceux n'en ayant pas les capacités. Il s'est inquiété de l'utilisation de ce nouveau cadre législatif à des fins de défense de revendications corporatistes.
S'appuyant sur l'exemple du centre-ville de Toulouse, il a relevé que, sans remettre en cause le droit de grève des enseignants, une réflexion s'avère nécessaire sur cette question et ses effets pervers qui affectent tout particulièrement les parents les plus modestes.
Mme Françoise Cartron a témoigné des difficultés rencontrées par les maires, notamment des communes moyennes, dans la mise en oeuvre de la loi. Elle a déclaré que les parents d'élèves contactés pour figurer sur la liste des personnes susceptibles d'assurer le service d'accueil se sont déclarés incompétents pour assurer cet accueil dans un cadre scolaire.
A titre d'exemple, elle a cité le cas du maire de Bordeaux qui n'a pu mettre en place le service d'accueil dans toutes les écoles de la commune.
Elle a indiqué que le réseau de la solidarité au sein des écoles était de nature à apporter une solution plus pertinente à l'accueil des élèves en cas de grève des enseignants que le vote de dispositions législatives complexes.
Elle a conclu son propos sur le fait que l'obligation faite aux maires d'appliquer la loi ne devait connaître aucune exception, faisant ainsi allusion à la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain.
M. Philippe Richert, rapporteur, a apporté les éléments de réponse suivants :
- la loi étant votée et ayant été déclarée conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel, elle doit naturellement s'appliquer. S'il apparaît normal que les maires qui n'arrivent pas à la mettre en oeuvre, en dépit de leurs tentatives, ne soient pas poursuivis, il n'est en revanche pas admissible que certains s'exonèrent par principe de cette obligation ; dans ce cas, il est justifié qu'ils soient poursuivis au titre de leurs fonctions ;
- la loi a été mise en oeuvre dans la plupart des communes même si cela n'a pas été sans difficulté. Entre 80 et 90 % des communes sont dans ce cas dans la majeure partie des académies même si ce taux n'atteint que 40 à 50% dans quelques rares départements. Cette situation ne justifie donc pas une abrogation de la loi.
M. Jean-Luc Fichet a fait part, néanmoins, du réel mécontentement exprimé par de très nombreux maires à l'occasion du discours du Premier ministre au dernier congrès des maires. Il a jugé difficile de demander aux parents ou aux agents communaux d'assurer le « service minimum » en cas de grève des enseignants. Il a estimé que le problème ne se poserait pas si les classes n'étaient pas surchargées et si l'on n'avait pas décidé des suppressions de postes.
M. Philippe Richert, rapporteur, a rappelé qu'il s'agissait d'assurer la garde des enfants et non pas de remplacer les enseignants.
M. Yannick Bodin a indiqué que tous les recours effectués par le préfet de Seine-et-Marne avaient été rejetés, dans la mesure où il est impossible d'établir une distinction entre les maires ne voulant pas appliquer la loi et ceux ne le pouvant pas. Il en a conclu qu'il convenait de choisir entre « l'enterrement » naturel de la loi et son abrogation, cette dernière lui semblant être la solution la plus claire.
Après avoir cité les taux élevés de communes ayant mis en place le dispositif dans un certain nombre d'académies, en dépit des difficultés rencontrées, M. Philippe Richert, rapporteur, a souligné que la réalité de la situation ne justifiait pas une abrogation de la loi.
A l'issue de ces échanges de vues et suivant les conclusions de son rapporteur, la commission a rejeté la proposition de loi n° 147 (2008-2009) abrogeant la loi n° 2008-790 instituant un droit d'accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires pendant le temps scolaire.