B. LES TERMES DU DÉBAT BUDGÉTAIRE EN 2009
Le déroulement de la négociation budgétaire communautaire obéit à un schéma récurrent. Sur la base de l'avant-projet de budget de la Commission , le Conseil adopte un projet de budget généralement plus « restrictif » visant à renforcer la discipline budgétaire et à tirer les conséquences de la fréquente sous-exécution des crédits. Le Parlement européen , jugeant traditionnellement que les politiques communautaires n'ont pas les moyens de leurs objectifs, augmente sensiblement les montants votés par le Conseil et prévus par la Commission. L'issue de la négociation entre les deux branches de l'autorité budgétaire conduit au vote d'un budget souvent proche des prévisions de la Commission.
1. Les propositions de la Commission et le vote du Conseil
a) L'avant projet de budget de la Commission confirme la priorité donnée à la stratégie de Lisbonne
En crédits d'engagement , 134,4 milliards d'euros sont proposés par l'avant projet de budget (APB) de la Commission pour l'année 2009, soit une augmentation de 3,1 % par rapport au budget 2008 9 ( * ) .
Les principales augmentations de crédits traduisent la volonté de la Commission de consacrer la part la plus significative du budget communautaire à la mise en oeuvre de la stratégie de Lisbonne pour la croissance, la compétitivité et l'emploi. Les crédits d'engagement de la rubrique 1a « Compétitivité » augmentent ainsi de 5,5 %, et le 7 ème Programme cadre pour la recherche et le développement (PCRD) voit notamment sa dotation augmenter de 10 % 10 ( * ) . Un effort significatif est également consacré à l'environnement , que retrace l'augmentation de 8 % des crédits d'engagement du programme LIFE+, ainsi qu'à la gestion des flux migratoires et à la coopération policière et judiciaire (+ 15 % de crédits d'engagement consacrés à la rubrique 3a « Liberté, sécurité et justice »).
Les crédits de paiement inscrits à l'APB 2009 affichent en revanche une baisse significative de 3,3 % par rapport au budget 2008. Ils s'élèvent à 116,7 milliards d'euros, soit 0,9 % du RNB de l'Union. Les années 2007 et 2008 ont en effet concentré les derniers paiements au titre des programmes 2000-2006 de la politique de cohésion et du développement rural, ainsi que la majeure partie des avances de paiement pour la nouvelle programmation 2007-2013.
b) Les « coupes » de la Présidence française approuvées à l'unanimité par le Conseil
Adopté à l'unanimité du Conseil, le projet de budget proposé par la Présidence française se veut « réaliste ». Les coupes réalisées en crédits d'engagement et en crédits de paiement ont principalement pour origine la prise en compte de la sous-exécution passée de certains programmes ou ont une vocation « tactique » , en vue de la négociation à venir avec le Parlement européen.
La hausse des crédits d'engagement est limitée à 133,9 milliards d'euros , soit un montant supérieur de 2,8 % au budget 2008. Les réductions de crédits affectent particulièrement les dépenses agricoles (-382,1 millions d'euros, dont 150 millions d'euros de moins pour les interventions de marché) et les dépenses d'administration (102,4 millions d'euros). Une coupe tactique de 78,3 millions d'euros est par ailleurs opérée au sein de la rubrique 1a « Compétitivité pour la croissance et l'emploi », afin de ménager une marge sous plafond suffisante pour financer les initiatives traditionnelles du Parlement européen en la matière. 160 millions d'euros sont en outre dégagés pour le financement des actions de l'Union en Palestine et au Kosovo grâce à un double mouvement de mise en réserve et de majoration de crédits.
115 milliards d'euros de crédits de paiement sont inscrits au projet de budget 2009 (0,89 % du RNB de l'Union), ce qui accentue la baisse significative opérée par l'APB de la Commission. Cette tendance tire les enseignements de la sous-exécution de certains programmes en 2007 et 2008. Sont notamment retranchés 471,3 millions d'euros au sein de la rubrique 1a, 250 millions d'euros 11 ( * ) sur la rubrique 1b « Cohésion pour la croissance et l'emploi », 497 millions d'euros sur la rubrique 2 (dont 115 millions d'euros au titre du développement rural et 150 millions d'euros au titre des interventions de marché) et 392 millions d'euros 12 ( * ) sur la rubrique 4 « Actions extérieures » 13 ( * ) .
Source : annexe « Relations financières avec l'Union européenne » au projet de loi de finances pour 2009
2. Les principaux points en débat avant l'examen par le Parlement européen
Prévu le 23 octobre 2008, l'examen du projet de budget en première lecture par le Parlement européen pourrait, comme en 2008, « achopper » sur le financement des actions extérieures de l'Union.
a) Une stratégie de saturation systématique des plafonds
Dans une résolution adoptée le 13 octobre 2008, prise sur le rapport de Mme Jutta Haug, la Commission des budgets (COBU) du Parlement « déplore le fait que le Conseil (ait) encore réduit un APB déjà maigre » , portant les crédits de paiement « à un étiage sans précédent » et « sans commune mesure avec les priorités politiques et les engagements de l'UE ». Le rapporteur a notamment estimé que la croissance, l'emploi et la lutte contre le changement climatique devaient constituer les priorités du budget communautaire en 2009, priorités insuffisamment prises en compte par l'APB de la Commission. Le projet de budget du Conseil a par ailleurs été jugé peu réaliste, en ce qu'il accroissait significativement l'écart entre engagements et paiements.
Partant, et malgré le risque de sous-exécution importante des paiements encouru au titre de 2008, la commission des budgets a adopté une stratégie de saturation systématique des plafonds en crédits d'engagement et crédits de paiement , portant ces derniers à 123,858 milliards d'euros et 0,954 % du RNB de l'Union.
b) L'action extérieure demeure au coeur des débats
Déclinée par rubriques , cette stratégie de saturation a notamment consisté à augmenter considérablement (+ 4,3 milliards d'euros) les crédits de paiement de la rubrique 1b « Cohésion », déjà en retrait de 14 % entre l'APB 2009 et le budget 2008 et ayant subi des coupes de la part du Conseil.
La COBU a également restauré les montants prévus par l'APB pour la rubrique 2 « Gestion et conservation des ressources naturelles », voire à les dépasser s'agissant du développement rural (+ 898 millions d'euros en crédits de paiement) et le programme environnemental LIFE+ (+ 131 millions d'euros en crédits de paiement). Ont en outre été approuvées trois initiatives nouvelles financées par la marge sous plafond de la rubrique. Ces initiatives concernent la création d'un fonds pour la restructuration dans le secteur laitier et pour la préparation et l'accompagnement de la suppression des quotas (600 millions d'euros), le financement de mesures contre le changement climatique (15 millions d'euros en crédits de paiement), ainsi que la création d'un instrument financier pour l'adaptation de la flotte de pêche aux conséquences de la hausse du prix du carburant , non doté de crédits.
Les montants de l'APB ont en outre été globalement rétablis au sein des rubriques 3a « Liberté, sécurité et justice », 3b « Citoyenneté » et 5 « Administration ».
Au total, votre rapporteur spécial observe que c'est à nouveau la rubrique 4 « Actions extérieures » qui fera l'objet des négociations les plus âpres entre les deux branches de l'autorité budgétaire , rubrique dont le Parlement européen estime qu'elle est chroniquement sous-dotée. Au sein de cette rubrique, la COBU a notamment adopté un amendement dit « astérisque », soit au-delà du plafond des perspectives financières, sous lequel elle a regroupé les principales priorités du Parlement européen en matière d'action extérieure. Cet amendement prévoit notamment 250 millions d'euros pour la facilité alimentaire, une augmentation de 80 millions d'euros des crédits en faveur de la Palestine, 20 millions d'euros pour l'Afghanistan et 40 millions d'euros pour le Kosovo 14 ( * ) .
* 9 Il en résulte une marge sous plafond de 2,6 milliards d'euros.
* 10 Dans sa contribution finale au rapport général, et dans le prolongement des travaux de contrôle qu'il a menés conjointement avec ses collègues Philippe Adnot et Christian Gaudin, rapporteurs spéciaux de la mission « Recherche et enseignement supérieur », votre rapporteur spécial consacrera des développements plus détaillés au financement et à la gouvernance de la politique européenne de recherche.
* 11 Les crédits de convergence destinés aux nouveaux Etats membres sont majorés de 50 millions d'euros et les crédits de l'objectif « Compétitivité régionale et emploi » à destination des anciens Etats membres sont minorés de 300 millions d'euros.
* 12 Dont 244 millions d'euros initialement dévolus à la réserve pour aide d'urgence, qui n'a vocation à être abondée que par redéploiements en gestion.
* 13 Une présentation des détaillée des évolutions de crédits par rubrique budgétaire figure dans le jaune « Relations financières avec l'Union européenne » annexé au projet de loi de finances pour 2009.
* 14 A ce stade, un financement de ces priorités par l'instrument de flexibilité n'est toutefois pas exclu.