Rapport n° 266 (2007-2008) de M. François ZOCCHETTO , fait au nom de la commission des lois, déposé le 9 avril 2008

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N° 266

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2007-2008

Annexe au procès-verbal de la séance du 9 avril 2008

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur la proposition de loi, ADOPTÉE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, créant de nouveaux droits pour les victimes et améliorant l' exécution des peines ,

Par M. François ZOCCHETTO,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Jacques Hyest, président ; MM. Patrice Gélard, Bernard Saugey, Jean-Claude Peyronnet, François Zocchetto, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, M. Georges Othily, vice-présidents ; MM. Christian Cointat, Pierre Jarlier, Jacques Mahéas, Simon Sutour, secrétaires ; M. Nicolas Alfonsi, Mme Michèle André, M. Philippe Arnaud, Mme Eliane Assassi, MM. Robert Badinter, José Balarello, Laurent Béteille, Mme Alima Boumediene-Thiery, MM. François-Noël Buffet, Marcel-Pierre Cléach, Pierre-Yves Collombat, Jean-Patrick Courtois, Yves Détraigne, Michel Dreyfus-Schmidt, Pierre Fauchon, Gaston Flosse, Bernard Frimat, René Garrec, Jean-Claude Gaudin, Charles Gautier, Jacques Gautier, Mme Jacqueline Gourault, M. Jean-René Lecerf, Mme Josiane Mathon-Poinat, MM. François Pillet, Hugues Portelli, Marcel Rainaud, Henri de Richemont, Jean-Pierre Sueur, Mme Catherine Troendle, MM. Alex Türk, Jean-Pierre Vial, Jean-Paul Virapoullé, Richard Yung.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (13 ème législature ) : 575, 610 et T.A. 84

Sénat : 171 (2007-2008)

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION

Réunie le mercredi 9 avril 2008 sous la présidence de M. Jean-Jacques Hyest, président, la commission des lois a examiné en première lecture, sur le rapport de M. François Zocchetto, la proposition de loi n° 171 (2007-2008), adoptée par l'Assemblée nationale, créant de nouveaux droits pour les victimes et améliorant l'exécution des peines .

Le rapporteur a d'abord souligné que l'exécution des décisions de justice constituait une préoccupation très largement partagée au sein du Parlement comme en témoignait notamment les recommandations de la mission d'information de la commission des lois du Sénat sur les procédures rapides de traitement des affaires pénales présentées en 2006.

La commission a approuvé les objectifs poursuivis par la proposition de loi à travers ses trois volets :

- créer de nouveaux droits pour les victimes d'infractions ;

- encourager la présence des prévenus à l'audience et améliorer l'efficacité de la signification des décisions ;

- améliorer l'exécution des peines d'amende et des suspensions ou retraits du permis de conduire.

La commission a proposé de compléter le dispositif d'aide au recouvrement des dommages et intérêts afin de renforcer les garanties données aux victimes : elle suggère ainsi de retarder le point de départ du délai durant lequel une demande d'aide au recouvrement peut être présentée par les personnes dont la requête aurait été jugée irrecevable par la CIVI ; de même a-t-elle souhaité ouvrir une voie de recours pour les victimes qui se seraient vu opposer par le fonds de garantie la forclusion de ce délai (article premier).

Elle a aussi cherché à mieux prendre en compte la situation de la personne condamnée en portant de un à deux mois le délai dans lequel elle doit acquitter les dommages et intérêts et en écartant, en cas de retard dans ce paiement, l'application d'une majoration pour les condamnés à une sanction-réparation ou à un sursis avec mise à l'épreuve assorti d'une obligation d'indemnisation de la victime (article premier).

La commission a aussi souhaité encadrer davantage le dispositif d'indemnisation des victimes de véhicules détruits, d'une part en en limitant le champ d'application aux seuls véhicules incendiés et, d'autre part, en exigeant que le propriétaire ait satisfait aux obligations liées à l'assurance responsabilité civile.

La commission a enfin adopté plusieurs amendements simplifiant ou précisant les mécanismes destinés à renforcer la signification des décisions de justice ainsi que l'exécution de certaines peines.

La commission a adopté la proposition de loi ainsi modifiée .

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Le Sénat est appelé à examiner en première lecture la proposition de loi créant de nouveaux droits pour les victimes et améliorant l'exécution des peines adoptée par l'Assemblée nationale le 17 janvier 2008. Ce texte présenté par MM. Jean-Luc Warsmann et Etienne Blanc reprend les principales propositions à caractère législatif 1 ( * ) du rapport issu de la mission d'information sur l'exécution des décisions de justice pénale créée par la commission des lois de l'Assemblée nationale le 29 juillet 2007 2 ( * ) .

L'exécution des décisions de justice constitue une préoccupation très largement partagée au sein du Parlement. Lorsque votre commission des lois s'était intéressée voici trois ans aux procédures rapides de traitement des affaires pénales 3 ( * ) , elle avait estimé que celles-ci devraient trouver un prolongement nécessaire dans une exécution rapide des décisions de justice. M. Jean-Louis Nadal avait alors plaidé devant la mission d'information constituée au sein de votre commission pour un « traitement en temps réel de l'exécution des peines ».

Sans doute des progrès importants ont-ils été accomplis au cours des dernières années, en particulier à la suite de la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité. Notre collègue député, M. Jean-Luc Warsmann a d'ailleurs largement contribué à ces évolutions par son rapport sur les peines alternatives à la détention, les modalités d'exécution des courtes peines, la préparation des détenus à la sortie de prison remis au garde des sceaux en avril 2003.

Ainsi le législateur a autorisé la réduction de 20 % du montant de l'amende en cas de paiement volontaire dans le délai d'un mois suivant la condamnation afin d'améliorer le taux de recouvrement des amendes (article 707-2 du code de procédure pénale).

De même, l'obligation pour les juridictions de remettre, à l'issue de l'audience, une convocation devant le juge de l'application des peines, lorsque la personne a été condamnée à une peine d'emprisonnement inférieure ou égale à un an (article 474 du code de procédure pénale) a favorisé les aménagements de peine et accéléré les délais de mise à exécution des mesures de suivi en milieu ouvert. La mise en place des bureaux de l'exécution des peines 4 ( * ) , destinés à faciliter l'exécution complète ou un début d'exécution des peines prononcées, a permis de relayer dans les tribunaux (176 tribunaux de grande instance en sont actuellement dotés) les efforts du législateur.

Cependant, comme l'a constaté la mission d'information mise en place par l'Assemblée nationale, le bilan de l'exécution des peines demeure encore insuffisant. Ainsi, le taux de recouvrement de l'ensemble des amendes prononcées par ordonnance pénale ou par jugement correctionnel ne dépasse pas 50 %. Si, l'exécution des peines d'emprisonnement est encore mal appréhendée faute d'un outil statistique adapté, néanmoins, selon une évaluation conduite à l'échelle des sept juridictions franciliennes 5 ( * ) , une peine d'emprisonnement sur cinq et un travail d'intérêt général sur dix n'étaient pas exécutés près de trois ans après leur prononcé.

En 2004, le délai moyen de mise à exécution d'une peine d'emprisonnement était de 7,2 mois et celui d'un travail d'intérêt général de 4,9 mois. Le délai moyen de recouvrement des amendes pénales s'élevait, quant à lui, à 6,2 mois.

L'exécution des décisions pénales suscitent un autre motif d'insatisfaction : la difficulté pour les victimes d'obtenir le paiement des dommages et intérêts qui leur ont été alloués.

Il apparaît donc nécessaire d'améliorer encore les dispositifs actuels. Tel est l'objet de la présente proposition de loi, articulée autour de trois volets :

- créer de nouveaux droits pour les victimes d'infractions ;

- encourager la présence des prévenus à l'audience et améliorer l'efficacité de la signification des décisions ;

- améliorer l'exécution des peines d'amende et de suspension ou de retrait du permis de conduire.

Votre commission des lois souscrit très largement aux objectifs poursuivis par ce texte. Cependant, à la lumière notamment des auditions organisées à l'initiative de votre rapporteur 6 ( * ) , elle a souhaité prolonger la réflexion engagée par les députés afin de compléter sur plusieurs points les dispositions proposées.

I. RENFORCER L'INDEMNISATION DES VICTIMES D'INFRACTIONS

1. L'état du droit : un système protecteur malgré certaines lacunes

En principe, les victimes ou leurs ayants droit peuvent obtenir réparation du dommage causé par l'infraction en exerçant leur action contre les auteurs, les complices ou les tiers civilement responsables soit devant un tribunal pénal, soit devant un tribunal civil une fois l'action publique engagée.

Cependant, avant même que l'action publique ait été engagée ou si les poursuites engagées n'ont pas permis d'obtenir une réparation effective et suffisante, les victimes de certaines infractions peuvent obtenir réparation en formant un recours devant une commission juridictionnelle instituée dans le ressort de chaque tribunal de grande instance, la commission d'indemnisation des victimes d'infractions ( CIVI ). La loi du 3 janvier 1977 avait réservé ce recours aux seules hypothèses de préjudice corporel résultant d'une infraction aux personnes (article 706-3 du code de procédure pénale). La loi du 2 février 1981 l'a étendu aux cas de préjudices matériels causés par certaines infractions aux biens (article 706-14 du code de procédure pénale). Enfin, la loi du 30 décembre 1985 a élargi le dispositif aux préjudices résultant d'infractions à caractère sexuel (article 706-3 du code de procédure pénale).

* Le domaine de l'indemnisation

Dans tous les cas, la réparation est subordonnée à plusieurs conditions tenant à la victime. En premier lieu, celle-ci doit être de nationalité française . Dans le cas contraire, les faits doivent avoir été commis sur le territoire national à l'encontre d'une personne ressortissante d'un Etat membre de l'Union européenne ou en situation régulière au jour des faits ou de la demande. Ensuite, la réparation peut être réduite ou refusée à raison de la faute de la victime .

La réparation est intégrale ou limitée selon les infractions. Elle est intégrale pour des faits volontaires ou non présentant le « caractère matériel d'une infraction » 7 ( * ) lorsque ces faits soit ont entraîné la mort, une incapacité permanente ou une incapacité totale de travail égale ou supérieure à un mois , soit constituent un viol, une agression sexuelle, une atteinte sexuelle sur mineur ou une infraction de traite d'êtres humains.

La réparation est en revanche limitée pour les atteintes à la personne ayant entraîné une incapacité totale de travail inférieure à un mois et pour certaines atteintes aux biens : vol, escroquerie, abus de confiance, extorsion de fonds, destruction, dégradation ou détérioration d'un bien appartenant à la victime. Elle est subordonnée à deux conditions : d'abord, la victime doit être dans l'impossibilité d'obtenir à un titre quelconque réparation effective et suffisante de son préjudice et se trouver de ce fait dans une « situation matérielle ou psychologique grave » ; ensuite, elle doit disposer d'un niveau de ressources inférieur au plafond prévu par l'article 4 de la loi du 10 juillet 1991 pour bénéficier de l'aide juridictionnelle partielle (1.311 euros par mois). L'indemnisation maximale est alors égale au triple du montant mensuel de ce plafond.

* La procédure

L'indemnité est allouée par une commission -qui a le caractère d'une juridiction civile- composée de deux magistrats et d'une personne majeure, de nationalité française, s'étant signalée par l'intérêt qu'elle porte aux problèmes des victimes (article 706-4 du code de procédure pénale).

La demande doit être présentée dans les trois ans suivant la date de l'infraction , ce délai étant prorogé à l'année qui suit la décision définitive sur l'action publique lorsque des poursuites pénales ont été engagées (article 706-5 du code de procédure pénale) 8 ( * ) .

La demande est transmise au fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et autres infractions ( FGTI ) qui doit présenter une offre dans un délai de deux mois. Si la victime accepte l'offre, le fonds transmet le constat d'accord au président de la commission qui l'homologue ; si le fonds refuse ou si la victime n'est pas d'accord, l'instruction se poursuit (article 706-5-1 du code de procédure pénale).

Lorsque des poursuites pénales ont été engagées, la commission peut se prononcer sur la demande d'indemnité sans attendre que le juge répressif ait lui-même statué sur l'action publique (article 706-7 du code de procédure pénale). La commission peut surseoir à statuer jusqu'à cette décision ; elle le doit si la victime le demande.

Lorsque la juridiction civile ou pénale statuant sur l'action civile a accordé à la victime une indemnité supérieure à celle accordée par la commission, la victime peut demander un complément d'indemnité dans un délai d'un an après la décision définitive sur les intérêts civils.

Les sommes sont versées par le fonds de garantie qui est subrogé dans les droits de la victime pour obtenir des personnes responsables du dommage ou tenues de le réparer le remboursement de l'indemnité. Il peut exercer ce recours devant un tribunal civil mais aussi, ce qui est exceptionnel, devant un tribunal répressif en se constituant partie civile (article 706-11 du code de procédure pénale).

Le législateur a également prévu d'autres dispositifs spécifiques de réparation. En particulier, l'indemnisation des victimes d'acte de terrorisme , instituée par la loi du 9 septembre 1986, garantit la réparation intégrale du préjudice corporel par le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions. Le préjudice matériel ne peut être couvert que par le contrat d'assurance (qui, en vertu de la loi du 9 septembre 1986, ne peut exclure la garantie de l'assureur pour ce type de dommages). Si elle conteste l'offre du fonds de garantie, la personne peut saisir le juge civil.

Par ailleurs, la réparation des dommages subis à l'occasion d'accidents de la circulation , fait l'objet, depuis la loi du 5 juillet 1985, de dispositions particulières applicables devant les juridictions répressives en cas de poursuites pour homicide ou atteinte à l'intégrité de la personne par imprudence (les victimes ne peuvent se voir opposer la force majeure ou le fait d'un tiers ; s'agissant des dommages corporels, les victimes autres que les conducteurs, sont indemnisés sans que puisse leur être opposée leur propre faute, à moins qu'il ne s'agisse d'une faute inexcusable ayant été la cause exclusive de l'accident). L'indemnisation incombe au fonds de garantie des assurances obligatoires (FGAO) lorsque l'auteur n'est pas assuré ou qu'il n'est pas identifié.

En l'état du droit, les victimes d'infraction pénale non éligibles à une indemnisation par la CIVI, doivent mettre en oeuvre les voies classiques de recouvrement pour obtenir la réparation effective qui leur a été reconnue par la juridiction répressive. Elles sont alors contraintes d'avancer les frais entraînés par le recours à un huissier de justice et de s'engager dans une procédure lourde et complexe pour un résultat souvent éloigné du montant des sommes allouées et des frais exposés.

2. La proposition de loi : des mesures utiles mais perfectibles

Aussi, la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale vise-t-elle à compléter le dispositif actuel sur deux points.

* L'aide au recouvrement des dommages et intérêts

En premier lieu, elle met en place une aide au recouvrement des dommages et intérêts pour toute personne qui, victime d'une infraction et s'étant portée partie civile, ne peut bénéficier d'une indemnisation par la commission d'indemnisation des victimes d'infractions. Cette aide au recouvrement serait assurée par le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et autres infractions (articles premier et 2) dont les missions seraient ainsi étendues. Elle prendrait deux formes : le versement d'une avance, plafonnée à 3.000 euros, sur les dommages et intérêts due à la partie civile ; la prise en charge à la place de la victime des démarches de recouvrement. Le FGTI servirait ainsi d'intermédiaire entre la victime et l'auteur des faits : il dispose à cet égard de l'expérience nécessaire acquise au titre de ses interventions dans le cadre des procédures devant la CIVI.

L'aide au recouvrement répond à un véritable besoin, comme l'ont souligné de nombreux praticiens du droit lors de leur audition par votre rapporteur.

Le système d'indemnisation de la CIVI ne permet pas en effet de prendre en compte, comme l'a souligné Mme Sylvie Sauton, directrice de l'Association départementale d'aide aux victimes (ADAVIP), des infractions telles que l'abus d'ignorance ou de faiblesse ou encore le recel. De même, les atteintes aux personnes n'ayant pas entraîné une interruption de travail de plus de trente jours ne sont pas indemnisées si elles ne sont pas à l'origine d'une « situation matérielle ou psychologique grave ». Or cette condition est appréciée généralement de manière rigoureuse. Mme Anne-Marie Maysonnave, ancien bâtonnier du barreau de Laval, a ainsi rappelé que des coups et blessures sans séquelles sérieuses ne donnaient pas accès à indemnisation par la CIVI.

Cependant, l'aide au recouvrement devrait surtout concerner des préjudices matériels d'une gravité limitée mais susceptibles de concerner un grand nombre de personnes. Selon une évaluation conduite par le fonds de garantie au tribunal de grande instance de Créteil, juridiction dont le volume d'affaires serait représentatif de la moyenne nationale, sur 1.700 dossiers ayant donné lieu en 2007 à des dommages et intérêts, 60 % avaient concerné un montant inférieur à 1.000 euros, 20 % un montant compris entre 1.000 et 2.000 euros et 3 % seulement un montant supérieur à 10.000 euros.

L'aide au recouvrement suscite cependant deux séries d'interrogations.

La première concerne l' articulation de ce dispositif avec les régimes actuels d'indemnisation . Si les victimes éligibles à la CIVI sont explicitement écartées de l'aide au recouvrement, tel n'est pas le cas des victimes susceptibles de bénéficier d'autres systèmes -victimes de l'amiante bénéficiaires du fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA), victimes du terrorisme bénéficiaires du fonds de garantie terrorisme, victimes d'accidents de la circulation couvertes par l'assureur du véhicule impliqué ou du fonds de garantie en cas de non assurance. Cependant, il est permis de penser que les victimes privilégieront le recours à ces dispositifs spécifiques dans la mesure où ils permettent le plus souvent, contrairement à l'aide au recouvrement -qui se traduirait par une avance plafonnée à 3.000 euros-, le versement d'une indemnisation couvrant l'intégralité du préjudice. Il conviendra cependant de veiller à une bonne information entre les différents organismes gestionnaires de ces fonds afin d'éviter le recours abusif à l'aide au recouvrement pour des dommages déjà indemnisés.

La seconde série d'interrogations porte sur le financement de l'aide au recouvrement . Actuellement, le FGTI traite, au titre du fonds « infraction » quelque 17.000 dossiers par an. Son financement est assuré à hauteur de 240 millions d'euros par les contributions des assurés (3,30 euros par contrat d'assurances de bien), 50 millions d'euros par les actions récursoires conduites par le fonds -principalement sur l'auteur des faits et 30 à 40 millions d'euros par le produit des placements.

L'aide au recouvrement pourrait se traduire par la prise en charge de 35.000 dossiers supplémentaires par an, soit un besoin de financement estimé par les représentants du ministère des finances entendus par votre rapporteur à 20 millions d'euros 9 ( * ) (chacun de ces dossiers devant représenter un montant limité selon le FGTI).

Ce montant serait financé, selon les responsables du fonds de garantie, par l'action récursoire sur l'auteur des faits. Il n'est pas certain, malgré les moyens supplémentaires donnés au Fonds par la proposition de loi pour obtenir des informations auprès de l'auteur des faits (article 706-11 du code de procédure pénale), que ce système permette de couvrir les avances accordées aux victimes.

En effet, comme l'ont noté des magistrats rencontrés par votre rapporteur, la majorité des personnes condamnées connait une situation pécuniaire délicate et ne consacre à l'indemnisation de la victime que 10, 20 ou 30 euros par mois. Il ne faut pas négliger, par ailleurs, le fait que certains juges d'application des peines sont moins rigoureux pour imposer le paiement de la réparation dès lors qu'une personne morale comme le fonds de garantie est subrogée dans les droits de la victime.

Votre commission estime que ces incertitudes ne doivent pas conduire à remettre en cause l'avancée que constitue l'aide au recouvrement. Elle juge cependant opportun de prévoir, dans les trois années suivant l'entrée en vigueur de la loi, une évaluation complète du dispositif, assortie d'une clause de révision si, à la lumière de l'expérience, des ajustements se révèlent nécessaires.

Par ailleurs votre commission vous propose de compléter le dispositif proposé afin de renforcer les garanties données aux victimes : elle suggère ainsi de retarder le point de départ du délai dans lequel une demande d'aide au recouvrement peut être présentée pour les personnes dont la requête aurait été jugée irrecevable par la CIVI ; de même a-t-elle souhaité ouvrir une voie de recours pour les victimes qui se seraient vu opposer par le fonds de garantie la forclusion de ce délai (article premier).

Votre commission a aussi cherché à mieux prendre en compte la situation de la personne condamnée en portant de un à deux mois le délai dans lequel elle doit acquitter les dommages et intérêts et en écartant, en cas de retard dans ce paiement, l'application d'une majoration pour les condamnés à une sanction réparation ou à un sursis avec mise à l'épreuve assorti d'une obligation d'indemnisation de la victime (article premier).

* L'extension de l'indemnisation des victimes de destruction de voitures

La proposition de loi favorise l' indemnisation des victimes d'une destruction volontaire de leur véhicule en assouplissant le dispositif actuel : d'une part, la condition de « situation matérielle ou psychologique grave » causée par l'infraction, requise pour les infractions contre les biens entrant dans le champ d'application de la CIVI, serait écartée ; d'autre part, le plafond de ressources que la victime ne doit pas dépasser pour pouvoir prétendre à une indemnisation (correspondant au montant prévu par la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique pour bénéficier de l'aide juridictionnelle partielle) serait relevé de 50 % (article 3).

Ces mesures ont suscité des réserves de la part de plusieurs des interlocuteurs de votre rapporteur. Comme l'ont noté les représentants du ministère des finances, les victimes d'une destruction, d'une dégradation ou d'une détérioration d'un bien peuvent déjà, sur le fondement de l'article 706-14 du code de procédure pénale, obtenir une indemnisation dès lors qu'elles se trouvent dans une « situation matérielle ou psychologique grave » et qu'elles répondent aux conditions de ressources prévues par la loi.

La suppression de la première de ces conditions et le relèvement du plafond de ressources serait de nature à atténuer le « ciblage social » de ce dispositif. Ensuite, le risque incendie peut aujourd'hui être pris en charge par l'assurance privée (pour un coût, pour l'assuré, de l'ordre de 10 euros par an). L'Etat doit-il se substituer à ce système pour devenir, selon l'appréciation du ministère des finances, l'« assureur de droit commun » ?

Outre cette objection de principe, il convient de faire état des observations exprimées par les représentants des compagnies d'assurance, entendus par votre rapporteur : la mesure ferait reposer les conséquences du défaut d'assurance des uns sur les autres qui s'assurent (puisque l'essentiel des ressources du FGTI provient d'un droit sur les contrats d'assurance) ; elle pourrait également favoriser une certaine déresponsabilisation des propriétaires de véhicules ; enfin, elle créerait un risque de dérive financière puisque, selon les estimations produites par l'Association française de l'assurance, le surcoût lié à cette indemnisation représenterait près de 26 % des recettes actuelles du FGTI. Selon les données fournies par les représentants des compagnies d'assurance, 47.000 véhicules ont été brûlés au cours de l'année 2006 dont les ¾ appartiendraient à des personnes se situant en dessous du plafond de ressources proposé par la proposition de loi. La moitié seulement de ces personnes serait couverte contre le risque incendie 10 ( * ) .

Les magistrats entendus par votre rapporteur craignent que ce dispositif n'introduise une inégalité injustifiée de traitement avec les victimes d'autres dommages aux biens, voire de dommages corporels qui peuvent être indemnisés dans les conditions plus strictes de l'article 706-14 du code de procédure pénale.

Votre commission estime néanmoins, à l'instar des députés, que le véhicule est aujourd'hui un instrument d'accès au travail très largement partagé et qu'il justifie une prise en compte spécifique parmi les autres biens susceptibles d'être détruits ou dégradés. Cependant afin d'éviter que l'indemnisation ne donne lieu à des fraudes 11 ( * ) ou des abus, elle considère utile d'encadrer le dispositif proposé, d'une part, en limitant son champ d'application aux seuls véhicules détruits par incendies, d'autre part, en exigeant que le propriétaire ait satisfait aux obligations liées à l'assurance de responsabilité civile.

Par ailleurs, l'évaluation de la loi dans un délai de trois ans après son entrée en vigueur permettrait d'apporter, le cas échéant, les correctifs nécessaires.

* *

*

La proposition de loi, aussi utile soit-elle, ne répond pas à toutes les préoccupations des victimes. A la suite de ses échanges avec Mme Françoise Rudetzki, déléguée générale de l'Association SOS Attentats, votre rapporteur souhaite attirer l'attention sur la nécessité de mieux garantir l'indemnisation du préjudice exceptionnel spécifique subi par les victimes des attentats. En effet, ce préjudice est actuellement indemnisé par le FGTI sur la base d'une simple décision du conseil d'administration de ce fonds, en date du 27 octobre 1987. En revanche, il n'est pas admis par les tribunaux bien qu'il soit pourtant attesté par les études épidémiologiques conduites notamment par l'INSERM. Il serait donc très utile qu'au-delà du FGTI, les pouvoirs publics dans leur ensemble, reconnaissent le principe de cette réparation dont la pérennité devrait par ailleurs être confortée.

II. L'AMÉLIORATION DE L'EXÉCUTION DES DÉCISIONS PÉNALES

1. La signification des décisions pénales

* L'état du droit

La mission d'information de l'Assemblée nationale a constaté que le taux et les délais d'exécution des décisions de justice apparaissaient nettement moins satisfaisants lorsque le jugement a été rendu alors que le prévenu n'était pas présent à l'audience ou qu'il n'y était pas représenté. Dans ce cas, le jugement est dit « contradictoire à signifier » par opposition au jugement contradictoire.

Le jugement est contradictoire dans deux hypothèses :

- lorsque le prévenu est présent à l'audience ;

- lorsque le prévenu demande à être jugé en son absence en étant représenté au cours de l'audience par un avocat ; la juridiction peut renvoyer l'affaire si elle estime nécessaire la comparution personnelle du prévenu ; si celui-ci ne répond pas à cette nouvelle citation, il peut cependant être jugé contradictoirement si son avocat est présent et entendu -le tribunal gardant la faculté de renvoyer de nouveau l'affaire.

Le jugement est contradictoire à signifier dans trois cas de figure :

- si le prévenu a été régulièrement cité à comparaître et s'il est établi qu'il a eu connaissance de la citation le concernant et n'a pas comparu ou n'a pas fourni d'excuse valable reconnue par la juridiction (article 410 du code de procédure pénale) ;

- si le prévenu a demandé à être jugé en son absence mais que la juridiction a demandé sa comparution personnelle et que le prévenu et son avocat sont absents à l'audience de renvoi (article 411, dernier alinéa, du code de procédure pénale) ;

- si la citation n'a pas été délivrée à la personne prévenue ou qu'il n'est pas établi que celui-ci ait eu connaissance de la citation mais qu'un avocat se présente pour assurer la défense du prévenu (article 412, alinéa 2, du code de procédure pénale).

Les jugements contradictoires à signifier doivent donner lieu à signification par huissier . Le délai d'appel ne commence à courir qu'à compter de la signification de la condamnation et, si la décision à signifier est une condamnation à une peine d'emprisonnement ferme ou assortie d'un sursis partiel, à compter de la date à laquelle le prévenu a eu connaissance de la condamnation (article 498-1 du code de procédure pénale).

La condamnation ne devient définitive qu'à l'expiration du délai d'appel, soit dix jours après la signification de la décision et, dans le cas d'une condamnation à une peine d'emprisonnement, dix jours après que la personne a eu connaissance personnellement de la condamnation.

Le principe d'une signification personnelle de la décision de condamnation à une peine d'emprisonnement a été introduit dans le code de procédure pénale par la loi du 9 mars 2004 afin de mettre en conformité notre droit avec la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme relative au droit à un procès équitable. Elle se heurte cependant à certaines difficultés pratiques évoquées par le rapport de la mission d'information de l'Assemblée nationale sur l'exécution des décisions de justice, en particulier les changements d'adresse fréquents, les défauts de réclamation des lettres recommandées et, de manière plus générale, le « faible degré de diligence des huissiers de justice pour signifier les décisions, a fortiori lorsque les requêtes de signification proviennent d'une autre parquet que celui de la juridiction dans le ressort de laquelle ils sont installés ».

Les taux d'exécution des peines prononcées par jugement contradictoire à signifier sont inférieurs de près d'un tiers à ceux des peines prononcées par jugement contradictoire et les délais d'exécution des jugements contradictoires à signifier sont deux à trois fois plus longs que ceux des jugements contradictoires. Or, les jugements contradictoires représentaient en 2004 16 % des condamnations prononcées par les tribunaux correctionnels 12 ( * ) .

Taux et délai moyen de mise à exécution au 31 décembre 2005
des peines prononcées en 2004 par les sept juridictions franciliennes
en fonction de la nature du jugement

Jugement contradictoire

Jugement contradictoire
à signifier

Taux (en %)

Délai (en mois)

Taux (en %)

Délai (en mois)

Emprisonnement ferme

90,9

4,3

60,7

11,3

Sursis avec mise à l'épreuve

91,4

4,5

54,2

12,4

Amende

73,6

4,5

44,2

10,7

Source : Ministère de la Justice

* Le dispositif proposé

La proposition de loi vise d'abord à inciter le prévenu à être présent à l'audience ou, à défaut, à s'y faire représenter. Elle prévoit à ce titre de majorer le droit fixe de procédure dû par le condamné en cas d'absence injustifiée à l'audience (qui serait ainsi porté de 90 à 180 euros pour les procédures devant le tribunal correctionnel). Cette majoration serait toutefois écartée si la personne condamnée, bien qu'absente à l'audience, s'acquitte du montant du droit fixe de procédure dans le mois suivant la date où il a eu connaissance de la décision. Les citations à comparaître informeraient l'intéressé qu'il encourre une majoration en cas de non comparution ou de non représentation à l'audience (article 4).

Ensuite, le texte fixe aux huissiers de justice un délai maximal de quarante-cinq jours pour procéder aux significations de jugement tout en leur conférant des moyens supplémentaires pour procéder à cette signification avec la faculté de laisser un avis de passage (ce qui n'est actuellement possible qu'en matière civile) et de procéder à la signification à leur étude (articles 5 et 6).

2. L'exécution des peines d'amende

Enfin, la proposition de loi comporte plusieurs dispositions destinées à améliorer l'exécution des peines d'amende (avec la faculté donnée au trésor public d'accorder des remises totales ou partielles d'amendes forfaitaires majorées comme il peut le faire en matière d'amendes fiscales ou d'impositions - article 7) ou de suspension ou de retrait du permis de conduire . Ainsi, l' opposition au transfert de certificat d'immatriculation qui ne peut actuellement être exercée par le trésor public, au titre des moyens de contraintes dont il dispose pour obtenir le paiement des amendes, qu'aux seuls propriétaires de véhicule qui ont changé d'adresse sans modifier leur certificat d'immatriculation, serait applicable à l'ensemble des redevables d'amendes routières (article 8).

Par ailleurs, les autorités judiciaires, préfectorales et policières auraient un accès direct au fichier national des permis de conduire (article 9).

Enfin, la proposition de loi (article 10) ouvre la faculté pour toute personne condamnée de s'acquitter du montant du droit fixe de procédure directement auprès du bureau d'exécution des peines et de bénéficier d'une réduction de 20 % sur le droit en cas de paiement volontaire dans un délai d'un mois (une telle possibilité assortie de cette réduction n'est actuellement donnée qu'aux personnes condamnées à une peine d'amende).

Votre commission souscrit à ces différentes mesures mais vous soumettra plusieurs amendements destinés à en clarifier la rédaction ou à les conforter.

*

* *

Au bénéfice de ces observations et sous réserve des amendements qu'elle vous soumet, votre commission vous propose d'adopter la présente proposition de loi .

EXAMEN DES ARTICLES

CHAPITRE PREMIER - DISPOSITIONS TENDANT À CRÉER DE NOUVEAUX DROITS POUR LES VICTIMES D'INFRACTIONS

Article premier (Titre XIV bis nouveau, art. 706-15-1, 706-15-2, 474-1 nouveaux et 706-11 du code de procédure pénale) - Institution d'un dispositif d'aide au recouvrement des dommages et intérêts pour les victimes d'infractions

Cet article institue un dispositif d'aide au recouvrement des dommages et intérêts pour les victimes d'infractions qui ne sont pas couvertes par les dispositions des articles 706-3 et 706-14 du code de procédure pénale et ne peuvent donc pas obtenir réparation par la commission d'indemnisation des victimes d'infractions (CIVI). A cette fin, il insère un chapitre XIV bis comprenant deux articles (706-15-1 et 706-15-2) à la suite du chapitre XIV relatif au « recours en indemnité ouvert à certaines victimes de dommages résultant d'une infraction » (livre quatrième - « De quelques procédures particulières »). Il crée aussi un article 471-1 et modifie l'article 706-11 afin de faciliter l'obtention par la victime des dommages et intérêts prononcés.

Article 706-15-1 nouveau du code de procédure pénale Champ d'application

Cet article détermine le champ d'application du nouveau dispositif d'aide au recouvrement.

Les bénéficiaires sont définis par défaut : il s'agit de toutes les personnes physiques qui :

- soit ont été victimes d'une infraction non visée par les articles 706-3 (infractions autres que celles, d'une part, ayant entraîné la mort, une incapacité permanente ou totale de travail égale ou supérieure à un mois et, d'autre part, constituant une agression sexuelle, une infraction de traite des êtres humains ou une atteinte sexuelle sans violence sur mineur de 15 ans) et 706-14 (infractions autres que : vol, escroquerie, abus de confiance, extorsion de fonds, destruction d'un bien ; atteintes à la personne ayant entraîné une incapacité totale de travail inférieure à un mois) ;

- soit ont été victimes d'une des infractions visées par l'article 706-14 mais ne répondent pas à la double condition fixée par cet article (situation matérielle ou psychologique grave dans laquelle se trouve la personne ; ressources inférieures au plafond retenu pour obtenir l'aide juridictionnelle partielle).

Les conditions fixées pour l'aide au recouvrement sont plus rigoureuses que celles actuellement prévues pour la réparation du préjudice par la commission d'indemnisation des victimes d'infractions. D'abord, cette aide ne pourrait bénéficier qu'aux personnes physiques et non aux personnes morales. Ensuite, alors que la CIVI peut intervenir si des poursuites pénales n'ont pas été encore engagées et même lorsque les faits ne constituent pas une infraction punissable faute d'élément intentionnel ou légal, la personne ne pourrait solliciter l'aide au recouvrement que si elle a bénéficié d'une décision définitive lui accordant des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait d'une infraction pénale.

En revanche, puisque cette aide ne serait possible qu'en application d'une décision juridictionnelle, elle concernerait non seulement le recouvrement des dommages et intérêts mais aussi celui des frais de procédure qui peuvent être accordés à la victime en application des articles 375 ou 475-1 du code de procédure pénale.

Article 706-15-2 nouveau du code de procédure pénale - Conditions de saisine du fonds de garantie

Cet article fixe les conditions dans lesquelles la personne peut demander une aide au recouvrement. Il détermine à cet égard deux délais :

* Le délai à partir duquel la demande peut être formulée

Il est fixé à trente jours suivant le jour où la décision est devenue définitive. Votre commission vous soumet un amendement rédactionnel et un amendement précisant qu'il s'agit de la décision concernant les dommages et intérêts 13 ( * ) .

Ce délai de trente jours est destiné à permettre à la personne condamnée de régler, d'une part, les dommages et intérêts et, d'autre part, les frais de procédure accordés en application des articles 375 ou 475-1 du code de procédure pénale. Il peut apparaître cependant excessivement court d'autant plus qu'au-delà des trente jours, l'intéressé devrait supporter une majoration au titre des frais de gestion du fonds en application du nouvel article 474-1 inséré par la proposition de loi dans le code de procédure pénale.

Votre commission vous propose par un amendement de le porter à deux mois afin de laisser un temps supplémentaire à l'auteur des faits pour s'acquitter de sa dette.

Si à l'expiration de ce délai le condamné ne s'est pas acquitté de cette obligation, un nouveau délai s'ouvre au cours duquel la partie civile peut alors saisir le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions d'une demande d'aide au recouvrement.

* Le délai dans lequel la partie civile peut saisir le fonds de garantie

Ce délai est fixé à un an à compter du jour où la décision concernant les dommages et intérêts est devenue définitive, à l'instar de la durée retenue pour le délai dans lequel la commission des victimes d'infractions peut être saisie après qu'une juridiction a statué définitivement sur l'action publique (article 706-5 du code de procédure pénale).

De même que la commission d'indemnisation des victimes d'infractions peut relever le requérant de la forclusion « lorsqu'il n'a pas été en mesure de faire valoir ses droits dans les délais requis ou lorsqu'il a subi une aggravation de son préjudice ou pour tout autre motif légitime », le fonds de garantie pourrait relever le demandeur de la forclusion « pour tout motif légitime ».

Sans doute, le fonds de garantie n'est-il pas, contrairement à la CIVI, un organisme juridictionnel. Cependant la disposition a un précédent avec la possibilité donnée par le code des assurances (R. 421-12) au fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (FGAO) de relever la victime de la forclusion encourue.

Dans la mesure où la charge financière du recouvrement pèsera alors sur le FGTI, celui-ci ne sera toutefois pas toujours enclin à lever la forclusion. En tout état de cause, il semble nécessaire d'ouvrir à la victime une voie de recours contre la décision du FGTI, ce que ne prévoit pas le texte adopté par les députés. Votre commission vous soumet un amendement afin de permettre à la victime dont la demande tendant à la levée de la forclusion aurait été rejetée de saisir le président du tribunal de grande instance qui statue par ordonnance sur requête dans les conditions prévues par les articles 493 à 498 du code de procédure civile.

Le présent article prévoit par ailleurs que la partie civile est tenue de communiquer au fonds de garantie les renseignements destinés à faciliter le recouvrement de la créance. Enfin, elle pourrait « seule ou agissant conjointement avec le débiteur » renoncer à l'assistance au recouvrement. Dans cette hypothèse, les frais de gestion et les frais de recouvrement déjà engagés par le fonds demeureraient exigibles.

Article additionnel après l'article 706-15-2 - Recours à l'aide au recouvrement dans l'hypothèse où la personne condamnée fait l'objet d'une obligation d'indemnisation de la victime

Votre commission s'est interrogée à la suite d'observations formulées par plusieurs magistrats sur l'articulation entre le délai fixé à la personne condamnée pour régler les dommages et intérêts dans un délai de trente jours -délai que votre commission propose de porter à deux mois- et l'obligation qui peut être fixée à l'auteur des faits d'indemniser la victime. Dans le cadre d'un sursis avec mise à l'épreuve, par exemple, l'obligation de « réparer en tout ou partie, en fonction de ses facultés contributives, les dommages causés par l'infraction » (article 132-45, 5° du code pénal) s'exécute pendant un délai d'épreuve qui peut être de trois ans, voire davantage en cas de récidive (article  132-42 du code pénal).

D'une part, il importe que l'obligation d'indemniser la victime dans le cadre de la peine n'interdise pas à la victime de recourir à l'aide au recouvrement dans le délai de deux mois. Tel est l'objet du présent article additionnel que votre commission vous propose par un amendement .

D'autre part, il ne semble pas justifié que la personne condamnée à une sanction réparation ou à un sursis avec mise à l'épreuve assorti de l'obligation d'indemniser la victime, ait à supporter la majoration prévue par l'article 474-1, proposée par le texte adopté par les députés. En effet, dans le cadre du sursis avec mise à l'épreuve, notamment, la juridiction de jugement ou le juge d'application des peines sont seuls compétents pour déterminer les délais dans lesquels la personne condamnée doit s'acquitter de ces obligations.

Tel sera l'objet de l'amendement présenté à l'article L. 422-9, introduit par l'article 2 de la présente proposition de loi.

Article 474-1 nouveau du code de procédure pénale - Information du condamné sur l'obligation de paiement des dommages et intérêts

Cet article prévoit une obligation systématique d'information, à l'issue de l'audience, de la personne condamnée sur les conséquences qu'emporterait l'absence de paiement volontaire des dommages et intérêts dans le délai de trente jours.

Votre commission vous soumet un amendement de coordination afin de porter ce délai à deux mois.

L'information serait, en pratique, assurée par le bureau d'exécution de peines. Il lui serait indiqué que le recouvrement pourrait, si la partie civile le demande, être exercé par le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions et qu'une majoration des dommages et intérêts pourrait être perçue par le fonds, en sus des frais de recouvrement, au titre des frais de gestion.

Cette disposition vise à inciter la personne condamnée à exécuter ses obligations dans le délai imparti. Dans l'esprit du rapporteur de la proposition de loi à l'Assemblée nationale, M. Etienne Blanc, elle constitue le pendant de l'article 474 du code de procédure pénale pour le volet civil de la décision de condamnation. L'article 474 du code de procédure pénale, introduit par la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, prévoit qu'une personne condamnée à une peine d'une durée inférieure ou égale à un an se voit remettre, à l'issue de l'audience, un avis de convocation à comparaître, dans un délai compris entre 10 et 30 jours, devant le juge de l'application des peines en vue de déterminer les modalités d'exécution de la peine -cet avis précisant que, sauf exercice par le condamné des voies de recours, la peine prononcée contre lui sera mise à exécution en établissement pénitentiaire s'il ne se présente pas, sans excuse légitime, à cette convocation 14 ( * ) . Cette mesure vise à assurer une exécution rapide des peines.

Article 706-5 du code de procédure pénale - Aménagement du point de départ de délai dans lequel une demande d'aide au recouvrement peut être présentée par une victime dont la demande a été rejetée par la CIVI

Les victimes qui ont d'abord cru pouvoir bénéficier du dispositif d'indemnisation prévu par les articles 706-3 et 706-14 et dont la demande est finalement jugée irrecevable par la CIVI auraient le droit de demander l'aide au recouvrement. Cependant, compte tenu de la durée de la procédure devant la CIVI, le délai d'un an dans lequel cette demande doit être présentée risquerait d'être dépassé car il courre à compter de la décision définitive allouant des dommages et intérêts. Aussi votre commission vous soumet-elle un amendement afin que, pour les victimes dont la demande a été jugée irrecevable par la CIVI, ce délai puisse courir à compter de la notification de la décision de la commission.

Article 706-11 du code de procédure pénale - Renforcement des pouvoirs d'information du fonds de garantie

L'article premier tend à conforter le pouvoir d'information dévolu au fonds de garantie afin d'exercer l'action nécessaire tant au titre de l'indemnité versée actuellement aux victimes de certaines infractions dans le cadre de la procédure devant la CIVI que du paiement des dommages et intérêts prévus par la présente proposition de loi.

En l'état du droit, le fonds de garantie doit passer par l'intermédiaire du procureur de la République , compétent pour « requérir de toute personne ou administration la communication de renseignements sur la situation professionnelle, financière, fiscale ou sociale des personnes ayant à répondre du dommage ». L'article 706-11 du code de procédure pénale précise également que le secret professionnel ne peut être opposé au procureur de la République -les renseignements recueillis ne pouvant être utilisés à d'autres fins que l'action récursoire et leur divulgation étant interdite.

Le texte proposé par l'article premier pour le dernier alinéa de l'article 706-11 ouvre au fonds la possibilité d'obtenir directement les informations nécessaires auprès des organismes susceptibles de connaître l'état des ressources du débiteur. Une telle faculté est déjà reconnue par l'article L. 581-8 du code de la sécurité sociale aux « organismes débiteurs de prestations familiales (...) en vue du recouvrement des avances alimentaires impayées ».

En contrepartie, cependant, alors que l'article 706-11, dans sa rédaction actuelle, fait référence à « toute personne ou administration », la liste de ces organismes serait circonscrite aux administrations ou services de l'Etat et des collectivités publiques, aux organismes de sécurité sociale, aux organismes chargés des prestations sociales, aux établissements financiers et aux entreprises d'assurance. En outre, le secret professionnel serait opposable au fonds -puisque la nouvelle rédaction, contrairement au texte actuel de l'article 706-11, ne l'exclut pas.

Par ailleurs, la rédaction proposée reprend la disposition actuelle selon laquelle les informations ne peuvent être recueillies à d'autres fins que celles de l'action récursoire, y compris lorsque celle-ci intervient dans le nouveau cadre de l'aide au recouvrement institué par la proposition de loi. De même, elle prévoit que la divulgation de ces informations est interdite.

Par ailleurs, la proposition de loi procède aussi à une coordination visant à supprimer, à l'article 706-11, la référence -abrogée par la loi du 15 juin 2000- au plafond de compétence de la juridiction chargée de statuer sur les dommages et intérêts figurant à l'article 420-1 du code de procédure pénale.

Votre commission vous soumet un amendement de coordination et vous propose d'adopter l'article premier ainsi modifié .

Article 2 (art. L. 422-4, section 1 et section 2 nouvelles, art. 422-7 à 422-10 nouveaux du code des assurances) - Mise en oeuvre de l'aide au recouvrement

Cet article tend à compléter le code des assurances afin de déterminer les modalités de mise en oeuvre de l'aide au recouvrement dont le principe a été posé aux articles 706-15-1 et 706-15-2 nouveaux du code de procédure pénale. Il crée ainsi deux nouvelles sections, la première regroupant les articles actuels concernant l'indemnisation des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions (articles L. 422-1 à L. 422-6), la seconde intitulée « aide au recouvrement des dommages et intérêts pour les victimes d'infractions » comportant quatre nouveaux articles (articles L. 422-7 à L. 422-10).

Les 1° et 2° de l'article 2 procèdent aux coordinations nécessaires à l'insertion du nouveau dispositif.

Section 2 nouvelle du code des assurances - Aide au recouvrement des dommages et intérêts pour les victimes d'infractions
Article L. 422-7 nouveau du code des assurances - Modalités de paiement des dommages et intérêts

Cet article prévoit que l'aide au recouvrement se concrétise par le paiement à la victime d'une indemnité dont le montant est différencié selon la somme des dommages et intérêts et des frais de procédure dus à la victime.

Si cette somme est inférieure à 1.000 euros , le fonds de garantie assurerait le paiement intégral à la victime.

Si elle est supérieure à 1.000 euros , le fonds accorderait une provision correspondant à 30 % du montant des dommages et intérêts et des frais de procédure dans la limite d'un plafond de 3.000 euros . Le montant de cette provision ne pourrait cependant être inférieur à 1.000 euros.

Dans les deux hypothèses, le versement devrait intervenir dans un délai d'un mois à compter de la réception de la demande d'aide au recouvrement.

Votre commission vous propose, par un amendement , de porter ce délai à deux mois afin d'en harmoniser la durée avec celle retenue pour le délai dans lequel, selon l'article 706-5-1 du code de procédure pénale, le fonds de garantie doit actuellement présenter à la victime de certaines infractions une offre d'indemnisation.

En outre, M. Jean Leonnet, président du FGTI, a attiré l'attention de votre rapporteur sur la nécessité de donner au fonds un délai raisonnable d'instruction de la demande présentée par la victime.

Par ailleurs, le fonds de garantie serait subrogé dans les droits de la victime dans les conditions prévues par l'article 706-11.

Votre commission vous soumet un amendement afin de préciser l'alinéa pertinent de l'article 706-11 auquel il est renvoyé.

Pour les sommes supérieures à la provision versée, l'article L. 422-7 prévoit que le fonds de garantie disposera d'un mandat.

Article L. 422-8 nouveau du code des assurances - Moyens d'action du fonds de garantie

Cet article rappelle, comme le prévoit l'article 706-11, que le fonds de garantie peut exercer toutes voies de droit utiles pour obtenir des personnes responsables du dommage causé par l'infraction ou tenues à un titre quelconque d'en assurer la réparation le paiement des dommages et intérêts et des frais de procédure. Il pourra naturellement, dans cette mission, recourir au ministère d'huissier.

De même, il précise que le fonds de garantie peut se faire communiquer les renseignements nécessaires à l'exercice de sa mission d'aide au recouvrement dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article 706-11 du code de procédure pénale tel qu'il serait modifié par l'article premier de la présente proposition de loi.

Article L. 422-9 nouveau du code des assurances - Pénalités au titre des frais de gestion

Cet article prévoit que les sommes à recouvrer par le fonds de gestion sont majorées d'une pénalité au titre des frais de gestion. Cette pénalité correspondrait à un pourcentage, fixé par le ministre chargé des assurances, du montant des dommages et intérêts et des frais de procédure accordés à la victime.

En outre, le fonds recouvrirait les frais d'exécution qu'il pourrait engager et qui ne se confondent pas avec les frais de gestion.

Par coordination avec l'amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 706-15-2 proposé à l'article premier de la proposition de loi, votre commission vous soumet un amendement afin de prévoir que la personne condamnée à une sanction réparation ou à un sursis avec mise à l'épreuve assorti de l'obligation d'indemniser la victime, ne devrait supporter aucune pénalité au titre des frais de gestion.

Article L. 422-10 nouveau du code des assurances - Utilisation des sommes recouvrées

Cet article précise que les sommes recouvrées par le fonds de garantie sont affectées en priorité au remboursement au fonds de garantie des indemnités ou des provisions versées à la partie civile, des frais d'exécution et d'une partie des frais de gestion. Celle-ci correspond à un pourcentage des sommes déjà versées à la victime par le fonds de garantie au titre d'indemnités ou de provisions.

Lorsque le fonds de garantie possède mandat pour recouvrer des sommes supérieures à la provision versée, il la verse à la partie civile après avoir perçu, au titre des frais de gestion, un pourcentage de ces sommes identique à celui prévu à l'alinéa précédent.

En tout état de cause, les frais de gestion perçus ne sauraient dépasser le plafond correspondant au pourcentage prévu par l'article L. 422-9 nouveau du code des assurances.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 2 ainsi modifié .

Article 3 (art. 706-14 du code de procédure pénale) - Amélioration des conditions d'indemnisation d'un propriétaire de véhicule détruit

Le présent article améliore les conditions d'indemnisation d'une personne dont le véhicule a été détruit, dégradé ou détérioré.

En l'état du droit, l'indemnisation relève du régime fixé par l'article 706-14 du code de procédure pénale : la personne victime d'une destruction d'une dégradation ou d'une détérioration d'un bien lui appartenant peut obtenir réparation de la commission d'indemnisation des victimes d'infraction à la double condition :

- qu'elle ne puisse obtenir une « réparation ou une indemnisation effective et suffisance de son préjudice » et se trouve de ce fait dans une situation matérielle ou psychologique grave ;

- que ses ressources soient inférieures au plafond fixé par l'article 4 de la loi du 10 juillet 1971 relative à l'aide juridique pour bénéficier de l'aide juridictionnelle partielle compte tenu, le cas échéant, de ses charges de famille.

La proposition de loi assouplit ces deux conditions lorsque le bien détruit, dégradé ou détérioré est un « véhicule terrestre à moteur ». D'une part, la victime ne serait pas tenue d'établir qu'elle se trouve dans une situation matérielle ou psychologique grave. La mission d'information de l'Assemblée nationale sur l'exécution des décisions de justice pénale concernant les personnes majeures avait estimé que « compte tenu de la nécessité pour un grand nombre de nos concitoyens de pouvoir disposer d'un véhicule, la gravité du préjudice devrait être présumée ». D'autre part, le plafond de ressources exigé est relevé puisqu'il correspondrait à 1,5 fois le plafond des ressources prévu par l'article 4 de la loi du 10 juillet 1991. L'indemnisation serait ainsi ouverte aux victimes dont les ressources mensuelles ne dépassent pas 1.966,5 euros -compte non tenu des majorations pour charges de familles 15 ( * ) au lieu de 1.311 euros comme aujourd'hui 16 ( * ) . L'ensemble des autres conditions retenues pour l'indemnisation de la victime (article 706-3 à 706-12 du code de procédure pénale) est naturellement maintenu .

Tout en partageant le souci exprimé par les députés de mieux indemniser la perte d'un véhicule à la suite d'une infraction, votre commission a souhaité tenir compte des interrogations exprimées par la majorité des personnes entendues par son rapporteur en encadrant davantage le dispositif proposé. Ainsi elle vous soumet un amendement tendant à limiter son champ d'application aux seuls véhicules détruits par incendie, ainsi qu'à en réserver le bénéfice, aux propriétaires ayant satisfait à l'obligation d'assurance de responsabilité civile afin de ne pas encourager les comportements délictueux.

Elle suggère en outre d'insérer ce dispositif dans un nouvel article du code de procédure pénale afin d'en bien marquer la spécificité.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 3 ainsi modifié .

CHAPITRE II - DISPOSITIONS TENDANT À ENCOURAGER LA PRÉSENCE DES PRÉVENUS À L'AUDIENCE ET À AMÉLIORER L'EFFICACITÉ ET LA SIGNIFICATION DES DÉCISIONS

Article 4 (art. 1018 A du code général des impôts, art. 390 et 390-1 du code de procédure pénale) - Majoration du droit fixe de procédure

Cet article tend à compléter le code général des impôts, afin de majorer le droit de procédure dû par le condamné lorsque ce dernier n'a pas comparu à l'audience ou ne s'y est pas fait représenté.

En l'état du droit, l'article 1018 A du code général des impôts prévoit un droit fixe de procédure dû par chaque condamné dont le montant se différencie en fonction de la juridiction qui rend la décision : ainsi ce droit est actuellement de 90 euros pour les décisions des tribunaux correctionnels, de 120 euros pour les décisions de cour d'appel statuant en matière correctionnelle et de police, de 375 euros pour les décisions de la Cour de cassation statuant en matière criminelle, correctionnelle ou de police.

La majoration proposée par le I du présent article ne concernerait que le droit dû pour les décisions des tribunaux correctionnels qui serait porté de 90 à 180 euros lorsque le condamné cité à personne ou ayant eu connaissance de la citation le concernant n'a pas comparu ou n'a pas été représenté dans les conditions prévues par les premier et deuxième alinéas de l'article  411 du code de procédure pénale.

Néanmoins, cette majoration ne s'appliquerait pas si le condamné s'acquitte volontairement du montant du droit de procédure dans un délai d'un mois à compter de la date où il a eu connaissance de la décision.

Cette disposition est ainsi une double incitation, d'une part, pour le prévenu à être présent à l'audience ou à y être représenté afin de réduire le nombre de jugements contradictoires à signifier dont la mise en oeuvre soulève des difficultés et, d'autre part, pour le condamné à acquitter le droit de procédure.

Afin de conforter ce caractère incitatif, le II de cet article prévoit que la citation ou la convocation en justice comporte une information sur la majoration du droit fixe de procédure en cas de non comparution ou de non représentation à l'audience.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 4 sans modification .

Article 5 (art. 559-1 nouveau du code de procédure pénale) - Délai de quarante-cinq jours fixé aux huissiers pour signifier les décisions pénales

Cet article tend à insérer un article additionnel dans le code de procédure pénale afin de fixer un délai de quarante-cinq jours à l'huissier afin d'accomplir les diligences destinées à délivrer son exploit lorsque celui-ci est une signification de décision.

Selon la mission d'information de l'Assemblée nationale, les « huissiers de justice ne se montrent pas toujours assez diligents pour procéder à la signification des jugements contradictoires à signifier ».

Le délai de quarante-cinq jours proposé par cet article laisserait à l'huissier le temps de procéder aux diligences prévues par le code de procédure pénale et en particulier l'envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception (soit trois semaines en moyenne compte tenu de la double présentation et de la conservation de la lettre pendant une durée de quinze jours par le bureau de poste) tout en permettant une accélération des significations.

A l'issue de ce délai, l'huissier informerait le ministère public qu'il n'a pu accomplir la signification. Comme tel est le cas actuellement lorsqu'il n'est pas établi que l'intéressé a reçu la lettre adressée par l'huissier ou lorsque l'exploit a été délivré au parquet, le procureur de la République pourrait requérir un officier ou un agent de police judiciaire afin de découvrir l'adresse de la personne et, le cas échéant, lui donner connaissance de l'exploit.

Votre commission estime que le délai de quarante-cinq jours pourrait s'avérer trop court dans certaines circonstances. Aussi vous soumet-elle un amendement afin de laisser le ministère public fixer un délai plus long pouvant aller jusqu'à trois mois, comme le prévoit l'article 656 du code de procédure civile.

Elle vous propose d'adopter l'article 5 ainsi modifié .

Article 6 (art. 557 et 558 du code de procédure pénale) - Avis de passage et signification de la décision à l'étude de l'huissier

Cet article ouvre aux huissiers la faculté de laisser un avis de passage et de procéder à la signification à leur étude.

Dans sa rédaction actuelle, l'article 557 du code de procédure pénale prévoit que si la personne visée par l'exploit est absente de son domicile, une copie est remise à une autre personne résidant dans ce domicile, l'huissier pouvant alors soit informer l'intéressé de cette remise par lettre recommandée avec avis de réception, soit lui adresser par lettre simple une copie de l'acte accompagnée d'un récépissé que le destinataire est invité à réexpédier par voie postale ou à déposer à l'étude de l'huissier. Si l'huissier ne trouve personne au domicile de l'intéressé, il doit, après avoir vérifié l'exactitude de l'adresse, remettre une copie de l'exploit à la mairie et en informer la personne par lettre recommandée avec avis de réception (article 558 du code de procédure pénale).

En revanche, aujourd'hui, ces dispositions ne permettent pas à l'huissier, comme le prévoit les articles 655 et 656 du nouveau code de procédure civile, de laisser un avis de passage.

Le présent article ouvre une telle faculté en matière pénale en assortissant l'avis de passage d'un récépissé qui devrait être réexpédié par courrier ou déposé à l'étude de l'huissier revêtu de la signature de l'intéressé.

En outre, cet avis de passage pourrait également inviter la personne à se présenter à l'étude de l'huissier afin que lui soit signifiée la décision 17 ( * ) .

Votre commission approuve le principe d'une signification à l'étude de l'huissier, comme le propose l'Assemblée nationale. Elle suggère cependant, tenant compte notamment des observations de la chambre nationale des huissiers, de simplifier le dispositif retenu et de prévoir la suppression de la signification à mairie sur le modèle de la récente reforme de la procédure civile.

Afin de garantir une meilleure transmission de l'information, il semble en effet préférable d'inviter les intéressés à se présenter à l'étude de l'huissier, soit par lettre recommandée avec accusé de réception, soit par lettre simple, soit par avis de passage, plutôt qu'à la mairie, pour recevoir la copie de l'exploit.

L'intéressé pourrait ainsi obtenir plus aisément, au regard des horaires d'ouverture des études, l'acte qui lui était destiné et, en outre, recevoir, le cas échéant, des informations complémentaires et techniques auxquelles il n'aurait jamais pu prétendre en cas de remise en mairie.

Il convient donc de ne pas modifier l'article 557 du code de procédure pénale, mais de réécrire plus avant l'article 558 et, par coordination, de modifier les articles 270, 492 et 498-1 du code de procédure pénale.

En outre, afin de répondre aux objections présentées notamment par le barreau de Paris, la nouvelle rédaction de l'article 558 prévoit que l'avis de passage doit être doublé par l'envoi d'une lettre simple, afin de renforcer l'efficacité de la signification.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 6 ainsi modifié .

Article additionnel après l'article 6 - Renforcement de certaines modalités de signification des décisions de justice

A la suite des observations présentées par les magistrats entendus par votre rapporteur, votre commission vous propose de compléter les modalités de signification des décisions de justice sur trois points.

En premier lieu, l'article 551 du code de procédure pénale prévoit actuellement qu'une partie civile peut faire délivrer une citation et que l'huissier doit déférer sans délai à cette réquisition.

Comme le propose la Cour de cassation dans son rapport annuel pour l'année 2006, le I du présent article complète ce texte, qui n'envisage que la citation délivrée par une partie civile, personne physique, pour prévoir l'hypothèse où elle est délivrée à l'initiative d'une personne morale, en reprenant la formulation retenue à l'article 648 du nouveau code de procédure civile.

Ensuite, aux termes de l'article 552 du code de procédure pénale, le délai de dix jours devant séparer le jour de la délivrance de la citation de celui fixé pour la comparution devant le tribunal correctionnel et le tribunal de police, doit être augmenté de deux mois lorsque la partie citée devant la juridiction française demeure à l'étranger. Le II du présent article propose de ramener ce délai à un mois si la partie citée réside dans un état membre de l'Union européenne.

Enfin, le III vise à permettre les significations pour les personnes détenues par les établissements pénitentiaires, ce qui évite de recourir à des huissiers. Il en est de même pour les personnes qui se trouvent dans un tribunal, la notification par un greffier ou un magistrat pouvant éviter le recours à un huissier. La solution proposée s'inspire des dispositions prévues par l'article 390-1 du code de procédure pénale en cas de poursuites.

Tel est l'objet de l'article additionnel que votre commission vous propose d'insérer par un amendement .

CHAPITRE III - DISPOSITIONS TENDANT À AMÉLIORER L'EXÉCUTION DES PEINES D'AMENDE ET DE SUSPENSION OU DE RETRAIT DU PERMIS DE CONDUIRE

Article 7 (art. 530-4 nouveau du code de procédure pénale) - Possibilité donnée au Trésor public d'accorder des remises sur les amendes forfaitaires majorées

Le présent article tend à insérer un nouvel article dans le code de procédure pénale afin de permettre au Trésor public d'accorder des remises totales ou partielles d'amendes forfaitaires majorées.

Une telle faculté actuellement reconnue aux services fiscaux en matière d'impôts et d'amendes fiscales leur est cependant refusée s'agissant des amendes pénales au motif que l'administration ne saurait remettre en cause une décision prononcée par l'autorité judiciaire. Toutefois, cet argument ne vaut pas pour les amendes forfaitaires -applicables pour un grand nombre de contraventions des quatre premières classes 18 ( * ) dont le montant est fixé de manière réglementaire. En effet, elles sont mises en oeuvre par l'agent verbalisateur et non par le juge.

Par ailleurs, comme l'a constaté la mission d'information de l'Assemblée nationale, les services du Trésor public, face à un condamné insolvable, ne peuvent in fine qu'inscrire l'amende en non valeur, en d'autres termes, renoncer au paiement de l'amende. Les députés ont estimé qu'il était « préférable pour les finances publiques de recouvrer une partie, même minime, d'une amende » plutôt que de renoncer intégralement à son paiement. En outre une « décision partiellement exécutée est préférable à une décision non exécutée ».

La faculté ainsi donnée au Trésor public serait circonscrite aux amendes forfaitaires majorées (c'est-à-dire celles qui, parce qu'elles n'ont pas été payées dans le délai légal de trente jours, ont été augmentées) et subordonnée à la situation de gêne ou d' indigence de la personne condamnée.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 7 sans modification .

Article 8 (art. L. 225-4 du code de la route) - Élargissement de la possibilité d'opposition au transfert du certificat d'immatriculation

Cet article vise à modifier l'article L. 225-4 du code de la route afin de renforcer la possibilité pour le Trésor public de s'opposer à un transfert d'immatriculation dans le cadre des moyens de contrainte dont il dispose pour obtenir le paiement des amendes.

En effet, en l'état du droit, le Trésor ne peut faire cette opposition que si, d'une part, une amende forfaitaire majorée a été émise et, d'autre part, si le contrevenant n'habite plus à l'adresse enregistrée au fichier national des immatriculations. Or cette seconde condition apparaît très restrictive comme l'a constaté la mission d'information de l'Assemblée nationale : « si une personne solvable refuse de payer une ou plusieurs amendes forfaitaires majorées dont elle est redevable, mais que son adresse est toujours celle enregistrée au fichier national des immatriculations, l'opposition au transfert du certificat d'immatriculation ne sera pas possible ».

L'intéressé pourra en conséquence vendre son véhicule sans avoir payé une amende, faisant ainsi perdre au Trésor une de ses garanties de paiement.

La nouvelle rédaction proposée pour l'article L. 322-1 du code de la route permet ainsi le recours à la procédure d'opposition, y compris lorsque le domicile du débiteur est celui enregistré au fichier national des immatriculations.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 8 sans modification .

Article 9 (art. L. 225-4 du code de la route) - Accès direct au fichier national des permis de conduire

Le présent article vise à donner aux autorités judiciaires, préfectorales et policières un accès direct au fichier national des permis de conduire.

Actuellement, les informations contenues dans ce fichier ne sont accessibles que sur demande alors qu'elles comportent des éléments tels que la date de suspension administrative du permis de conduire -date qu'il importe aux autorités judiciaires de connaître puisque la durée de la suspension administrative s'impute sur la durée de suspension susceptible d'être prononcée par la juridiction.

Si l'information relative à la suspension administrative est en principe jointe au dossier au moment de l'engagement des poursuites, tel n'est toutefois pas toujours le cas. Le bureau d'exécution des peines est ainsi contraint d'entreprendre des démarches successives auprès de la personne condamnée puis du fichier national des permis de conduire.

Un accès direct du bureau d'exécution des peines à ce fichier aurait le mérite de simplifier la procédure et de supprimer des délais inutiles. Un tel accès pourrait aussi être ouvert au préfet et aux services de police et de gendarmerie qui peuvent également avoir besoin de connaître facilement et rapidement les informations contenues dans le fichier.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 9 sans modification .

Article 10 (art. 707-2 du code de procédure pénale) - Assouplissement des modalités de paiement du droit fixe de procédure

Cet article tend à assouplir les modalités de paiement du droit fixe de procédure dû par les personnes condamnées.

Actuellement, seules les personnes condamnées à une peine d'amende peuvent s'acquitter auprès du bureau d'exécution des peines non seulement du montant de l'amende mais également du droit fixe de procédure sur lequel s'applique aussi, si le condamné règle le montant de l'amende dans le délai d'un mois à compter de la date du jugement, l'abattement de 20 % prévu par l'article 707-2 du code de procédure pénale. En revanche, la personne qui n'a pas été condamnée à une peine d'amende mais demeure soumise à l'obligation de paiement du droit fixe de procédure ne peut ni l'acquitter auprès du bureau d'exécution des peines (elle est seulement avisée par l'agent du bureau d'exécution des peines qu'elle recevra un avis de paiement du droit fixe de procédure), ni bénéficier de la réduction de 20 %.

Ce dispositif présente le double inconvénient de retarder le paiement du droit fixe de procédure que certaines personnes sont tout à fait disposées à payer immédiatement à l'issue de leur condamnation et de créer une rupture d'égalité entre les personnes condamnées à une peine d'amende susceptibles de bénéficier de la réduction de 20 % et celles condamnées à un autre type de sanction qui ne peuvent prétendre à cet avantage.

Aussi, la nouvelle rédaction proposée pour l'article 702-2 du code de procédure pénale permet-elle à toute personne condamnée de s'acquitter du droit fixe de procédure auprès du bureau d'exécution des peines et de bénéficier, si elle règle ce montant dans le délai d'un mois à compter de la date à laquelle le jugement a été prononcé, d'une diminution de 20 % de ce droit.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 10 sans modification .

CHAPITRE IV - DISPOSITIONS DIVERSES

Article additionnel avant l'article 11 - Réexamen d'ensemble de la loi

Compte tenu de l'impact financier de l'aide au recouvrement et de l'extension des conditions d'indemnisation des victimes de véhicules incendiés, votre commission vous soumet un article additionnel afin de prévoir une évaluation d'ensemble de la loi dans un délai maximum de trois ans après son entrée en vigueur.

Tel est l'objet de l'article additionnel que votre commission vous propose d'insérer par un amendement .

Article 11 - Dates d'entrée en vigueur

Cet article prévoit que :

- le dispositif d'aide au recouvrement des dommages et intérêts prévu par les articles 1 er et 2 serait applicable à toutes les décisions juridictionnelles rendues à compter du 1 er avril 2008 ;

- le dispositif relatif à l'indemnisation des victimes d'une destruction de leur véhicule (article 3) entrerait en vigueur le 1 er avril 2008.

Les autres dispositions seraient d'application immédiate.

Il est devenu nécessaire d'actualiser les délais d'entrée en vigueur des articles premier à 3.

Votre commission vous propose de les porter à trois mois après publication de la loi.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 11 ainsi modifié .

*

* *

Au bénéfice de ces observations et sous réserve des amendements qu'elle vous soumet, votre commission vous propose d'adopter la présente proposition de loi .

* 1 A l'exception des propositions qui pourraient trouver leur place dans le futur projet loi pénitentiaire.

* 2 Juger, et après ? Etienne Blanc, rapport d'information n° 505, Assemblée nationale, XIIè législature, décembre 2007.

* 3 Juger vite, juger mieux, Laurent Béteille, président, François Zocchetto, rapporteur, rapport d'information n° 17, Sénat 2005-2006 .

* 4 Décret du 13 mars 2004.

* 5 Paris, Evry, Créteil, Bobigny, Pontoise, Versailles et Nanterre.

* 6 Voir la liste des personnes entendues en annexe.

* 7 C'est-à-dire les faits constituant l'élément matériel d'une infraction mais ne réalisant pas nécessairement une infraction punissable faute d'éléments intentionnels -par exemple une infraction commise par une personne reconnue irresponsable pour cause de trouble mental (article. 122-1 du code pénal).

* 8 Lorsque l'auteur de l'infraction est condamné à des dommages-intérêts, le délai court à partir de l'avis donné par la juridiction à la partie civile que celle-ci peut saisir la commission d'indemnisation des victimes d'infractions.

* 9 M. Alain Bourdelat, directeur général du fonds de garantie, a indiqué que la prise en charge par le Fonds de l'aide au recouvrement impliquerait aussi le recrutement d'une quarantaine de personnes (qui complèterait un effectif actuel de 240 personnes).

* 10 Le coût moyen d'un véhicule incendié est de l'ordre de 3.000 euros (sur la base des sinistres réglés lors des émeutes de novembre 2005).

* 11 Selon le ministère de l'intérieur, le taux de fraude serait de l'ordre de 30 %.

* 12 Soit 68.648 condamnations sur 421.104.

* 13 La décision concernant les dommages et intérêts peut être distincte de la condamnation elle-même : il appartient alors à la juridiction civile de statuer sur les dommages et intérêts après que le tribunal correctionnel a rendu sa décision.

* 14 Ces dispositions sont également applicables aux personnes condamnées à une peine d'emprisonnement assortie d'un sursis avec mise à l'épreuve, à une peine d'emprisonnement avec sursis assortie de l'obligation d'un travail d'intérêt général ou bien à une peine de travail d'intérêt général -le condamné étant alors convoqué devant le service pénitentiaire d'insertion et de probation et non devant le juge de l'application des peines.

* 15 Soit 157 euros pour les deux premières personnes à charge et 99 euros par personne à charge supplémentaire.

* 16 La proposition de loi n'a cependant pas repris la proposition de la mission d'information de l'Assemblée nationale tendant à relever le plafond d'indemnisation actuellement fixé par l'article 706-14 au triple du montant mensuel du plafond de ressources pour bénéficier de l'aide juridictionnelle partielle, soit 3.550,83 euros à 5.000 euros.

* 17 En matière civile, l'avis de passage déposé en cas d'absence de la personne a pour objet de l'inviter à se présenter à l'étude de l'huissier pour retirer l'acte.

* 18 Elles représenteraient 90 % des amendes mises en recouvrement par le Trésor public.

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