CHAPITRE II : DE LA LUTTE CONTRE LE BLANCHIMENT DE CAPITAUX
L'instauration de mécanismes fiduciaires ne doit pas être un moyen de faciliter le blanchiment de capitaux. Or, comme l'a souligné le Groupe d'action financière (GAFI), les fiducies peuvent contribuer à masquer des activités de blanchiment ou de financement du terrorisme 60 ( * ) . Il est donc indispensable de soumettre la constitution et l'activité des fiducies à des règles de déclaration auprès des pouvoirs publics permettant d'assurer des contrôles efficaces.
Aussi votre commission vous propose-t-elle de reprendre, dans ses conclusions, le chapitre II de la proposition de loi, son intitulé ainsi que son article unique.
Article 2
(art. L. 562-2-1 du code monétaire et
financier)
Déclaration de sommes ou d'opérations
soupçonnées d'être illicites
Votre commission vous propose, à l'article 2 de ses conclusions, de reprendre partiellement les dispositions figurant au même article de la proposition de loi. Il s'agit de modifier certaines dispositions actuelles en matière de déclaration de soupçons pour tenir compte de l'institution de la fiducie en droit français .
La proposition de loi prévoit, d'une part, d'imposer au fiduciaire ès qualité le respect des obligations découlant de l'article L. 562-1 du code monétaire et financier et, d'autre part, d'imposer aux professions juridiques réglementées d'effectuer une déclaration de soupçons lorsqu'elles participent, en assistant leur client, à la préparation ou à la réalisation de transactions concernant la constitution, la gestion ou la direction de fiducies soumises au droit français .
Sur le premier point, votre commission estime inutile de modifier l'article L. 562-1 du code monétaire et financier afin d'imposer expressément au fiduciaire le respect des obligations de surveillance, de conservation de données et de déclaration de soupçons notamment prescrites par l'article L. 562-2 du même code.
Une telle modification serait justifiée et indispensable si la qualité de fiduciaire était ouverte à toute personne physique ou morale, dès lors que ces obligations ne s'imposent actuellement qu'à des catégories limitativement énumérées par l'article L. 562-1 de ce code.
Or, dans ses conclusions, votre commission a fait le choix de restreindre la qualité de fiduciaire aux établissements de crédit, au Trésor public, à la Banque de France, à La Poste, à l'Institut d'émission des départements d'outre-mer (IEDOM), à l'Institut d'émission d'outre-mer (IEOM) et à la Caisse des dépôts et consignations, aux entreprises d'investissement, ainsi qu'aux entreprises d'assurance 61 ( * ) .
Ces entités juridiques, seules susceptibles d'être désignées fiduciaires, sont déjà, en tant que telles, inclues dans le champ d'application personnel des diverses obligations de déclaration qui s'imposent lorsque le caractère illicite de sommes ou d'opérations est soupçonné .
Aussi, sans le prévoir expressément, les entités susmentionnées devront, y compris lorsqu'elles agissent en qualité de fiduciaire, déclarer à TRACFIN :
- les opérations qui portent sur des sommes qui pourraient provenir du trafic de stupéfiants, de la fraude aux intérêts financiers de la Communauté européenne, de la corruption ou d'activités criminelles organisées ou qui pourraient participer au financement du terrorisme ;
- les opérations dont l'identité du donneur d'ordre ou du bénéficiaire reste douteuse malgré les diligences effectuées ;
- les opérations effectuées par les organismes financiers pour compte propre ou pour compte de tiers avec des personnes physiques ou morales, y compris leurs filiales ou établissements, agissant sous forme ou pour le compte de fonds fiduciaires ou de tout autre instrument de gestion d'un patrimoine d'affectation dont l'identité des constituants ou des bénéficiaires n'est pas connue.
En revanche, dans ses conclusions, votre commission vous propose de modifier l'article L. 562-2-1 du code monétaire et financier .
Cette modification est indispensable afin de ne pas laisser hors du champ de la procédure de déclaration de soupçon spécifique prévue pour les professions juridiques réglementées visées au 12 de l'article L. 562-2-1 du code monétaire et financier 62 ( * ) , l'hypothèse où ces professionnels assisteraient leur client à la préparation ou à la réalisation de transactions concernant la constitution, la gestion ou la direction de fiducies régies par le nouveau titre IV du code civil. A l'heure actuelle, en effet, cette disposition ne vise que les fiducies soumises au droit étranger.
Votre commission vous propose donc d'adopter l'article 2 ainsi rédigé par ses conclusions .
* 60 Rapport du GAFI-XII sur les typologies du blanchiment de capitaux (2000-2001), pp. 9-10.
* 61 Voir, supra, le commentaire de l'article 2014 nouveau du code civil, tel que rédigé par l'article 1 er des conclusions de votre commission.
* 62 Sont visés : les notaires, les huissiers de justice, les administrateurs et mandataires judiciaires, les avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, les avocats ainsi que les avoués près les cours d'appel.