2. Des dépenses contenues
a) La loi de finances initiale
Le projet de loi de finances initiale pour 2005 affichait, pour la troisième année consécutive, une norme de progression des dépenses de l'Etat de 0 % en volume par rapport à la loi de finances initiale pour 2004 à périmètre constant. La prévision d'inflation était de 1,8 %.
Les dépenses nettes à périmètre constant s'établissaient à 288,8 milliards d'euros. Les changements de périmètre ont en effet été limités en 2005 , à 396 millions d'euros. La plupart de ces changements de périmètre sont liés à la décentralisation (- 346 millions d'euros : parmi les dépenses les plus importantes, on relève la décentralisation des bourses professionnelles médicales, de la formation initiale des travailleurs sociaux, du fonds de solidarité logement et de l'aide à la médiation locative), à la débudgétisation (- 286 millions d'euros) des crédits affectés au financement des infrastructures de transport à l'AFITF 7 ( * ) , et, en sens inverse, à la budgétisation (+ 114 millions d'euros) du fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien (FIATA) et des retraites anticipées de charbonnages de France (+ 127 millions d'euros).
A périmètre courant, qui sert de base de comparaison entre la loi de finances initiale et le projet de loi de règlement, les dépenses nettes s'établissaient à 288,5 milliards d'euros .
b) Les mouvements de crédits en cours d'exercice
Viennent s'ajouter aux dépenses inscrites en loi de finances initiale, les crédits reportés de 2004 vers 2005, les ouvertures de crédits au titre des fonds de concours et les modifications de crédits liées à des plus-values de recettes constatées sur les comptes d'affectation spéciale et les budgets annexes.
Viennent diminuer le volume des crédits sur l'exercice 2005, les reports de crédits vers 2006 et les décrets d'annulation non associés aux décrets d'avance et à la loi de finances rectificative de l'automne 2005.
(1) Les reports : une division des reports par deux en un seul exercice
L'exercice 2005 fait apparaître un solde net des reports vers 2006 par rapport à ceux provenant de 2005 de - 6,7 milliards d'euros. Les reports « entrants » sur l'exercice 2004 s'établissaient à 11,9 milliards d'euros (ces reports étaient en hausse par rapport à l'exercice précédent de 1,75 milliard d'euros). Les reports de 2005 vers 2006 sont de 5,2 milliards d'euros.
Evolution des reports de crédits
(en millions d'euros)
Source : présent projet de loi de règlement
Aussi loin que remonte la mémoire de votre commission des finances en matière de reports, c'est-à-dire 1992, jamais le niveau des reports ne s'était établi à un niveau aussi bas. Il faut se féliciter d'un des premiers effets vertueux de la LOLF, qui, par la fixation d'un plafond de reports fixé à 3 % des crédits, pourrait bien être parvenue à briser « l'épée de Damoclès des reports ». Il convient de rappeler que les reports constituent une réserve de dépenses différées faisant peser le risque, au cours des exercices suivants, de décaissements importants venant perturber le pilotage de la dépense.
La répartition des reports entre budget général, budgets annexes et comptes spéciaux du Trésor montre la prédominance des reports issus du budget général, répartis presque à égalité entre crédits civils et crédits militaires .
Répartition des reports entre budget
général, budgets annexes
et comptes spéciaux du
Trésor en 2005
(en millions d'euros)
2455
2133
29
573
0
1000
2000
3000
4000
5000
6000
Comptes spéciaux du
trésor
Budgets annexes
Budget général (dépenses
militaires)
Budget général (dépenses
civiles)
Source : présent projet de loi de règlement
(2) Les fonds de concours
5,8 milliards d'euros ont été ouverts en 2005 par voie de fonds de concours. La Cour des comptes, dans son rapport relatif aux résultats et à la gestion budgétaire de l'Etat pour 2005, note que les fonds de concours ont connu une forte croissance par rapport à 2004 (+ 22 %), en raison de la progression des fonds de concours hors Europe, « avec un bond de près de 41 % pour une part communautaire stable en valeur absolue ».
Evolution en montant des fonds de concours
(en millions d'euros)
Source : Cour des comptes
Le nombre de fonds de concours a poursuivi sa progression en 2005, avec 556 fonds : cette progression concerne également les fonds de faible importance. S'agissant ainsi des fonds recevant moins de 152.400 euros, leur nombre s'établit à 142, contre 133 un an avant.
Evolution du nombre de fonds de concours (y.c. moins de 152.400 euros)
Source : Cour des comptes
(3) Les décrets d'avance
Cinq décrets d'avance, pris au cours de l'exercice 2005, ont porté sur un montant de 1.874 millions d'euros, les ouvertures de crédits étant compensées par des annulations à due concurrence. Ces décrets ont été ratifiés par la loi de finances rectificative n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 :
- le décret d'avance n° 2005-194 du 25 février 2005 a ouvert, au titre des dépenses ordinaires, 10 millions d'euros sur le budget des affaires étrangères pour financer la participation de la France aux secours organisés suite au raz-de-marée survenu en Asie du sud-est en décembre 2004 ;
- le décret d'avance n° 2005-401 du 29 avril 2005 a ouvert 213,5 millions d'euros de crédits de dépenses ordinaires, au profit du budget des charges communes (0,63 million d'euros), du budget de l'équipement (2 millions d'euros), des crédits du ministère de l'intérieur (85,88 millions d'euros), de ceux du ministère du travail, de la santé et de la cohésion sociale (125 millions d'euros) et du budget de l'outre-mer (9,4 millions d'euros). Ce décret d'avance a permis d'assurer le financement des surcoûts liés à l'organisation du référendum sur le traité visant à établir une Constitution européenne, à compléter les crédits dédiés à l'hébergement des demandeurs d'asile, et à indemniser les collectivités territoriales de Guadeloupe touchées par des catastrophes naturelles ;
- le décret d'avance n° 2005-1206 du 26 septembre 2005 a ouvert 611 millions d'euros de crédits de paiement sur plusieurs chapitres de fonctionnement du ministère de la défense, pour financer notamment les OPEX, à hauteur de 421 millions d'euros. Ces ouvertures ont été gagées par des annulations équivalentes sur les titres V et VI du ministère de la défense ;
- le décret d'avance n° 2005-1361 du 3 novembre 2005 a ouvert 285 millions d'euros de crédits de dépenses ordinaires au bénéfice du budget des charges communes (200 millions d'euros), afin d'introduire une aide forfaitaire attribuée à certains ménages utilisant un chauffage au fioul, sur le budget de l'économie, des finances et de l'industrie (41 millions d'euros) et sur celui du travail, de la santé et de la cohésion sociale (24 millions d'euros) ;
- le décret d'avance n° 2005-1479 du 1 er décembre 2005 a ouvert 727,8 millions d'euros de crédits de dépenses ordinaires pour faire face à une insuffisance de crédits au titre des rémunérations des personnels de l'Etat (444 millions d'euros) et des crédits destinés à la participation de la France aux opérations de maintien de la paix de l'ONU (93,3 millions d'euros), ainsi que pour financer les mesures de prévention et de lutte contre la grippe aviaire (150 millions d'euros).
Il convient de souligner que, s'agissant des décrets d'avance n° 2005-1206 et n° 2005-1479, l'ouverture des crédits correspondait à des dotations volontairement, et notoirement, sous-estimées en loi de finances initiale pour 2005 (opérations de maintien de la paix du budget du ministère des affaires étrangères et opérations extérieures du ministère de la défense). Compte tenu de l'avis 8 ( * ) sur le projet de décret d'avance du 10 mars 2006 relatif à l'épidémie de chikungunya et à l'épizootie de grippe aviaire, rendu en application de l'article 13 de la LOLF, par votre commission des finances, la condition d'urgence qui permet l'ouverture de crédits dans le cadre d'un décret d'avances doit être entendue comme « une situation qu'il n'était pas possible de prévoir au moment de la préparation et du vote de la loi de finances initiale » . Votre rapporteur général a ainsi précisé que la commission des finances « se trouverait ainsi fondée à émettre un avis défavorable sur un projet de décret d'avance ouvrant des crédits sur un programme pour lequel le principe de sincérité des lois de finances, prévu par l'article 32 de la LOLF, n'aurait pas été respecté, selon l'examen qui en aurait été fait au moment de la procédure d'adoption du projet de loi de finances par le Parlement. Un décret d'avance ne saurait ainsi être pris s'agissant de crédits pour lesquels les prévisions de dépenses dont on disposait au moment de la préparation de la loi de finances initiale n'auraient pas été prises en compte ».
Si l'article 13 avait été applicable en 2005, rien ne permet de supposer que l'avis de votre commission des finances aurait été complètement favorable sur ces deux décrets d'avance.
(4) La régulation budgétaire
Comme les années précédentes ont été constituées en début d'exercice 2005 des réserves de précaution 9 ( * ) . En février 2005, a été mise en place une réserve de 3,95 milliards d'euros de crédits de paiement et de 2,2 milliards d'euros d'autorisations de programme. Elle a été complétée en juillet 2005, à hauteur de 950 millions d'euros, auxquels il convient d'ajouter 2,5 milliards d'euros au titre des crédits de report. Au total, les réserves de précaution ont donc atteint, en 2005, 7,4 milliards d'euros pour faire face aux aléas de gestion et ralentir la progression de la dépense.
Le décret d'annulation 10 ( * ) , pris le 3 novembre 2005, a annulé des crédits à hauteur de 3.063 millions d'euros 11 ( * ) .
(5) La loi de finances rectificative n° 2005-1720 du 30 décembre 2005
Hors ratification des cinq décrets d'avance précités et de la prise en compte du décret d'annulation de crédits pris le 3 novembre 2005, la loi de finances rectificative n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 a procédé aux mouvements de crédits suivants :
- des ouvertures de crédits à hauteur de 1.676 millions d'euros réparties entre budget général (1.154 millions d'euros, dont 1.072 millions d'euros pour les dépenses ordinaires, 47 millions d'euros pour les dépenses civiles en capital et 35 millions d'euros pour les dépenses militaires ordinaires), budget annexe de la légion d'honneur (2 millions d'euros) et comptes spéciaux du Trésor (520 millions d'euros) ;
- des annulations de crédits nets de 1.232 millions d'euros , sur le budget général, portant sur les dépenses ordinaires civiles, pour 1.079 millions d'euros, les dépenses civiles en capital, pour 128 millions d'euros, et les dépenses militaires ordinaires, pour 25 millions d'euros.
c) Le présent projet de loi de règlement
A l'issue des différents mouvements règlementaires précités et de la loi de finances rectificative, et avant l'intervention du présent projet de loi de règlement, le montant des dépenses nettes du budget général était de 285,4 milliards d'euros, contre 288,5 milliards d'euros en loi de finances initiale.
Le présent projet de loi de règlement prévoit des ouvertures de crédits de 2.126 millions d'euros et des annulations de 2.459 millions d'euros pour le budget général. Parmi les ouvertures figurent 1.161 millions d'euros au titre des dégrèvements et remboursements d'impôts, non pris en compte au titre des dépenses nettes.
Les ouvertures de crédits concernent essentiellement des chapitres aux dotations évaluatives dont les crédits sont portés en loi de règlement à hauteur des dépenses nettes constatées 12 ( * ) .
Répartition des ouvertures de crédits dans le projet de loi de règlement 2005
(en millions d'euros)
Dépenses en atténuation de recettes |
1.161 |
Dette publique |
55 |
Garanties |
63 |
Pensions |
109 |
Cotisations et prestations sociales |
258 |
Frais de justice et réparations civiles |
295 |
Participations de l'Etat au service d'emprunts à caractère économique |
73 |
Retraite du combattant |
21 |
Divers |
73 |
Total |
2.126 |
Source : présent projet de loi de règlement.
En outre, le présent projet de loi de règlement ouvre sur les budgets annexes 67 millions d'euros de crédits et annule 223 millions d'euros. S'agissant des comptes spéciaux du Trésor, les ouvertures atteignent 12.051 millions d'euros (4.609 millions d'euros pour le compte d'affectation spéciale n° 902-24 « Affectation des produits de cessions de titres, parts et droits de société », 6.322 millions d'euros au titre des avances à l'agence centrale des organismes d'intervention dans le secteur agricole (préfinancement des dépenses communautaires) et 1.120 millions d'euros afférents aux avances sur le montant des impositions des collectivités territoriales).
Au final, les dépenses nettes 13 ( * ) au titre du budget général retracées dans le présent projet de loi de règlement, prenant en compte les mouvements de crédits précités, le solde net des reports et les fonds de concours, s'établissent à 294,3 milliards d'euros.
Néanmoins, les dépenses financées par fonds de concours ne sont traditionnellement pas prises en compte pour mesurer l'écart entre la loi de finances initiale et la loi de règlement, car elles ne sont pas, par nature, comprises dans les prévisions.
Hors fonds de concours, les dépenses nettes du budget général se sont élevées à 288,5 milliards d'euros en 2005, au niveau de la loi de finances initiale . Le plafond voté par le Parlement a été respecté .
* 7 Agence pour le financement des infrastructures de transports de France.
* 8 Rapport d'information n° 252 (2005-2006).
* 9 La constitution des réserves de précaution concerne uniformément l'ensemble des crédits du budget général, après exclusion des dépenses obligatoires (rémunérations, pensions, charge de la dette, engagements contractuels) et des priorités gouvernementales (aide publique au développement, lutte contre le cancer, recherche, actions en faveur du handicap, renforcement de la sécurité routière).
* 10 Décret n° 2005-1362 du 3 novembre 2005.
* 11 Seuls 3.029 millions d'euros ont eu un impact sur le solde du budget général 2006 car 34,5 millions d'euros concernaient des crédits reportés sur le budget 2005.
* 12 A compter de l'exercice 2006, cette faculté sera restreinte en application des dispositions de la LOLF qui limitent le périmètre des crédits évaluatifs.
* 13 Hors remboursements et dégrèvements d'impôts, hors recettes d'ordre relatives à la dette.