TITRE II - AUDITION DE L'ENFANT ET LIENS ENTRE PROTECTION SOCIALE ET PROTECTION JUDICIAIRE DE LA JEUNESSE
Article 4 (art. 338-1 du code civil)
Audition de l'enfant dans le cadre
des procédures judiciaires qui le concernent
Objet : Cet article reconnaît au mineur capable de discernement le droit à être entendu par le juge dans toutes les procédures qui le concernent, dès lors qu'il en fait la demande.
I - Le dispositif proposé
Cet article modifie sur deux points l'article 388-1 du code civil qui fixe les conditions dans lesquelles un mineur capable de discernement peut être entendu par un juge dans toutes les procédures le concernant :
- son paragraphe I fait de l'audition directe par le juge la procédure de droit commun : l'audition par un tiers désigné par le juge, notamment par un psychologue spécialiste de la petite enfance, ne pourra donc plus intervenir que « lorsque l'intérêt de l'enfant le commande » . Le recours à cette procédure devra donc désormais être motivé par le juge, alors qu'il pouvait jusqu'ici y faire appel de façon discrétionnaire ;
- son paragraphe II prévoit que l'audition de l'enfant par le juge dans les affaires qui le concernent est de droit, dès lors qu'il en fait la demande. Le juge ne pourra donc plus l'écarter comme c'est le cas aujourd'hui. Il convient de préciser que cette possibilité nécessitait toutefois déjà une décision spécialement motivée.
Ces modifications visent en réalité à mettre le droit français en conformité avec la convention internationale des droits de l'enfant, qui stipule dans son article 12 que « les Etats parties garantissent à l'enfant qui est capable de discernement le droit d'exprimer librement son opinion sur toute question l'intéressant, les opinions de l'enfant étant dûment prises en considération eu égard à son âge et à son degré de maturité. À cette fin, on donnera notamment à l'enfant la possibilité être entendu dans toute procédure judiciaire ou administrative l'intéressant, soit directement, soit par l'intermédiaire d'un représentant ou d'un organisme approprié, de façon compatible avec les règles de procédure de la législation nationale. »
La reconnaissance d'un droit de l'enfant à être entendu, sans autre restriction que sa capacité de discernement, dans les procédures qui le concernent résulte d'ailleurs également du règlement communautaire n° 2201/203 du 27 novembre 2003 relatif à la compétence, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale (règlement dit « Bruxelles II bis »), entré en vigueur le 1 er mars 2005 qui précise que l'enfant doit avoir la « possibilité d'être entendu, à moins qu'une audition n'ait été jugée inappropriée eu égard à son âge ou à son degré de maturité » .
II - La position de votre commission
Votre commission approuve la reconnaissance d'un droit de l'enfant à être entendu à sa demande dans le cadre des affaires qui le concernent. L'appréciation laissée au juge jusqu'à présent était en effet souvent vécue par les intéressés comme une négation de leur existence en tant que sujet de droit.
Il est en revanche particulièrement important que l'audition de l'enfant reste un droit pour lui et non une obligation pour le juge : s'il doit être entendu à sa demande, cela ne signifie pas qu'il faille systématiquement l'auditionner s'il ne manifeste pas de volonté dans ce sens. Il faut en quelque sorte laisser à l'enfant le droit d'être silencieux.
Lorsque l'audition semble nécessaire au juge, il faut impérativement tenir compte du fait que, dans le cas de certains traumatismes, il est très douloureux de faire revivre à l'enfant ce qu'il a vécu. Il convient donc de ne pas multiplier les auditions de l'enfant et de s'organiser de façon à pouvoir recueillir ses dires une fois pour toute.
Votre commission insiste également sur la nécessité de veiller aux conditions de l'audition de l'enfant : il est en effet très difficile, pour un enfant, de se sentir l'enjeu de ses parents. Dans les cas de conflit familial, il faut donc s'assurer de la neutralité de l'audition, qui doit alors pouvoir se faire hors de la présence des parents. Dans ces cas particuliers, il paraît d'ailleurs indispensable que le juge demande la désignation d'un avocat de l'enfant.
Sous le bénéfice de ces observations, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
Article 5 (art. L. 226-2-1, L. 226-3 et L. 226-4 du code de
l'action sociale et des familles)
Recueil des informations
préoccupantes sur les mineurs en danger et procédure de
signalement à l'autorité judiciaire
Objet : Cet article réforme le dispositif départemental de signalement des enfants en danger en créant des cellules opérationnelles départementales de recueil des informations préoccupantes et en rationalisant la procédure de saisine de l'autorité judiciaire.
I - Le dispositif proposé
Cet article vise à améliorer le dispositif départemental de signalement des enfants en danger, dont l'origine remonte à la loi du 10 juillet 1989 précitée et qui repose sur l'animation, par le président du conseil général, d'un dispositif centralisé de recueil des informations concernant les mineurs maltraités, en concertation avec le préfet.
Mais ce dispositif, qui représentait pourtant à l'époque une avancée considérable, s'est avéré comporter un défaut originel : en quelque sorte, si le réservoir d'informations était prévu, on ignorait comment l'alimenter. Dans ces conditions, des informations essentielles étaient susceptibles d'échapper au président du conseil général, ce qui altérait sa capacité de repérage des enfants en danger.
Il en résulte que, actuellement, la concertation avec l'autorité judiciaire n'est prévue par la loi que dans un second temps, et ce uniquement pour définir les modalités de réponse aux situations d'urgence : dans ces conditions, le président du conseil général peut ne pas être informé de l'existence d'une saisine de l'autorité judiciaire ou ne l'être qu' a posteriori , à l'occasion de la remise, par décision de justice, de l'enfant au service de l'aide sociale à l'enfance.
Les professionnels susceptibles d'avoir connaissance de situations de maltraitance à enfant ne sont pas non plus juridiquement tenus de transmettre les informations à leur disposition aux services du conseil général. Il est alors difficile d'opérer des recoupements entre les faisceaux d'indices détenus par les différents intervenants, ce qui est d'autant plus regrettable qu'un meilleur partage de l'information pourrait permettre de déceler des situations d'enfants en danger qui passent aujourd'hui inaperçues.
C'est à ce défaut d'organisation que souhaite répondre le présent article, en rationalisant la centralisation et le traitement, à l'échelon départemental, des informations préoccupantes sur les mineurs en danger.
Son paragraphe I organise la transmission systématique au président du conseil général des informations sur les mineurs en danger par les personnes qui « mettent en oeuvre » ou qui « apportent leur concours » à la politique de protection de l'enfance. Relèvent de la première catégorie le service de l'aide sociale à l'enfance et l'autorité judiciaire. La seconde est beaucoup plus large et regroupe les autres services du conseil général susceptibles de connaître des situations d'enfants en danger (services sociaux, services de PMI), les administrations de l'Etat comme l'éducation nationale ou les services de la protection judiciaire de la jeunesse, les communes par le biais des centres communaux d'action sociale (CCAS), les associations gestionnaires d'établissements ou de services accueillant des enfants ou encore les professionnels de santé, qu'ils soient libéraux ou hospitaliers.
La rédaction retenue se réfère à une notion nouvelle : celle d'information préoccupante . Il s'agit en fait des informations de toute nature qui peuvent constituer des indices de danger pour l'enfant : la transmission n'est donc pas limitée aux informations qui, à elles seules, pourraient déclencher un signalement judiciaire, elle englobe celles qui constituent un motif de préoccupation pour le professionnel concerné mais qui demandent à être recoupées ou approfondies par le biais d'une enquête sociale.
Il n'est donc pas possible de délimiter a priori les informations qui doivent être transmises au président du conseil général. C'est à chaque professionnel d'opérer un tri en confrontant les informations dont il dispose avec les objectifs de la politique de protection de l'enfance : le texte précise en effet que les informations à transmettre sont celles qui peuvent permettre de mieux analyser la situation globale de l'enfant et de déterminer si et comment l'enfant doit faire l'objet d'une mesure de protection.
Le projet de loi précise enfin que la transmission des informations au président du conseil général ne saurait se faire au mépris du droit au respect de la vie privée : les parents ou le tuteur doivent être avertis de cette transmission d'information. Seul l'intérêt supérieur de l'enfant peut amener les professionnels à ne pas y procéder : cela peut être le cas lorsque l'information concerne un enfant maltraité par ses parents et que le fait de les aviser risque de provoquer de nouvelles violences à son égard.
Le paragraphe II s'attache ensuite à rendre plus efficace le mécanisme de centralisation et de traitement des informations recueillies grâce au dispositif de transmission systématique au président du conseil général, à travers la création de cellules départementales opérationnelles de recueil, de traitement et d'évaluation des informations préoccupantes sur les mineurs en danger.
Il apporte quatre améliorations fondamentales par rapport au processus actuel de recueil des informations sur l'enfance en danger qui reste largement informel et variable d'un département à l'autre :
- il réaffirme le rôle central du président du conseil général dans le dispositif de recueil des informations et fait obligation aux services de l'Etat et à l'autorité judiciaire d'y apporter leur concours, là où le dispositif actuel fait mention d'une simple concertation ;
- il formalise le recueil des informations en un lieu désormais clairement identifiable par toutes les personnes, y compris les particuliers, susceptibles de transmettre des informations : à cet effet, il confie au département le soin passer des protocoles avec les services de l'Etat et l'autorité judiciaire afin de mettre en place des cellules opérationnelles de recueil ;
- il transforme le dispositif actuel limité au simple recueil des informations en un dispositif également chargé de les évaluer et de décider de la suite à leur donner : il est ainsi précisé que la décision de saisir ou non l'autorité judiciaire est prise à la suite de l'évaluation menée par la cellule opérationnelle ;
- il organise le traitement statistique des informations préoccupantes, grâce à une transmission obligatoire de ces informations, sous une forme anonymisée, aux nouveaux observatoires départementaux de la protection de l'enfance et à l'Observatoire national de l'enfance en danger (Oned).
Le paragraphe III parachève le nouveau dispositif de signalement en précisant les conditions dans lesquelles les informations préoccupantes transmises au président du conseil général peuvent aboutir à une saisine de l'autorité judiciaire et, parallèlement, les modalités d'information du département par le juge, lorsque celui-ci est saisi directement.
Dans sa nouvelle rédaction, l'article L. 226-4 du code de l'action sociale et des familles indique d'abord dans quels cas la protection administrative doit céder le pas à la protection judiciaire de l'enfance en danger : ainsi, la saisine du juge doit intervenir lorsque les mesures de protection administrative sont insuffisantes pour assurer de façon satisfaisante la protection de l'enfant ou lorsque il est impossible d'évaluer correctement la situation de l'enfant ou que la famille refuse l'intervention du service de l'ASE ou est dans l'impossibilité de collaborer avec elle.
Comme aujourd'hui, et pour d'évidentes raisons de coordination, le président du conseil général qui transmet un dossier au procureur doit l'informer de l'ensemble des mesures déjà tentées pour aider l'enfant et sa famille.
L'article L. 226-4 précise ensuite aussi les informations devant être mises à la disposition du président du conseil général par l'autorité judiciaire, afin de lui permettre d'avoir une vision globale de l'enfance en danger sur son territoire :
- il fait ainsi obligation, pour tous les professionnels qui travaillent dans les services publics ou les établissements publics ou privés concourant à la protection de l'enfance et qui saisissent directement le procureur du cas d'un mineur, d'en informer simultanément le président du conseil général ;
- il autorise le procureur, lorsqu'il est saisi par une personne qui n'est pas soumise à l'obligation de transmission simultanée au président du conseil général, et notamment par un particulier, à en informer ce dernier s'il le juge opportun.
II - La position de votre commission
Votre commission approuve le choix du conseil général comme pivot du dispositif départemental de signalement et la réaffirmation du principe de subsidiarité de l'action judiciaire car elle a constaté ces dernières années une dérive importante vers la judiciarisation de la protection de l'enfance.
Elle reconnaît que ces principes ne sont pas nouveaux mais force est de constater que les conditions de leur respect n'étaient pas réunies. Elle se félicite donc que le projet de loi donne aux départements les moyens d'une véritable centralisation de l'information, grâce à la transmission systématique des informations préoccupantes par tous les acteurs de la protection de l'enfance, même s'ils saisissent directement l'autorité judiciaire et qu'il clarifie les cas pour lesquels la saisine du juge est nécessaire.
D'aucuns craignent un engorgement de la cellule départementale, soulignant qu'il existe un risque de voir les professionnels se décharger sans discernement sur le président du conseil général de toutes les informations dont ils disposent, dès le moindre soupçon de risque éventuel. Votre commission reconnaît que de tels comportements ne peuvent être écartés mais elle estime qu'ils devraient rester marginaux, et ce d'autant plus que les différents partenaires travaillent déjà, sous l'égide du ministère, à la définition des bonnes pratiques de signalement et à l'élaboration d'indicateurs partagés.
Mais si le projet de loi s'attache à rendre exhaustive l'information du président du conseil général, il laisse curieusement subsister une fuite dans le dispositif de centralisation des informations préoccupantes, au profit de l'institution judiciaire : ainsi, le procureur de la République conserve la possibilité de ne pas transmettre les signalements qu'il reçoit en provenance de particuliers. Ceci est d'autant plus singulier que la parfaite transparence des informations entre les deux principaux acteurs de la protection de l'enfance semble être le préalable à toute amélioration de la coordination de leurs actions.
C'est la raison pour laquelle votre commission vous propose de parfaire, par amendements , le circuit d'information entre départements et justice, en instaurant une transmission systématique de tous les signalements reçus directement par le Parquet, ainsi qu'un retour d'information obligatoire sur les suites données par la justice aux signalements effectués par le département.
Elle est consciente de la réticence du Parquet en la matière, qui estime que lorsqu'un signalement ne débouche sur aucune procédure judiciaire, la transmission au département risque de stigmatiser inutilement les familles aux yeux des services sociaux. Elle considère toutefois que cette méfiance est infondée et que l'absence de procédure judiciaire ne signifie aucunement qu'aucun suivi social ne soit nécessaire.
Votre commission rappelle également que la centralisation des informations préoccupantes par le département ne signifie que la circulation de l'information ne doive se faire à sens unique. Elle comprend tout particulièrement l'agacement de certains maires qui signalent des familles en difficulté mais ne parviennent jamais à savoir si une solution leur a été proposée. Si la loi en vigueur pose déjà cette obligation de retour d'information dans le cas de professionnels ayant effectué un signalement, il convient d'étendre explicitement, par amendement , cette obligation au cas des signalements effectués par des élus.
Votre commission se félicite également de la création des cellules départementales de recueil des informations préoccupantes sur les mineurs en danger : il est en effet particulièrement important, notamment vis-à-vis du grand public, de pouvoir identifier précisément l'organisme à contacter pour signaler un enfant en danger.
Elle insiste toutefois sur le fait qu'il convient de laisser une certaine souplesse d'organisation aux départements : si un lieu unique, avec une dénomination équivalente dans tous les départements, est nécessaire pour recueillir les informations et effectuer un premier tri, l'évaluation précise des situations individuelles doit éventuellement pouvoir se faire, selon l'organisation souhaitée par les départements, de façon territorialisée.
Par ailleurs, votre commission souhaite apporter deux amendements de précision au texte proposé :
- le premier pour rappeler que, lorsque les informations transmises sont couvertes par le secret professionnel, la procédure est organisée de façon à respecter les règles posées par l'article 7 du présent projet de loi pour le secret partagé ;
- le second pour rétablir la précision, prévue par les règles en vigueur mais oubliée dans le projet de loi, selon laquelle les associations de protection de l'enfance peuvent également participer au dispositif départemental de recueil des informations préoccupantes.
Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.
Article 6 (art. 375 du code civil)
Coordination entre protection
administrative et protection judiciaire des mineurs en danger
Objet : Cet article vise à améliorer la coordination des interventions du département et de l'autorité judiciaire en permettant au juge de vérifier qu'il a bien été saisi à bon escient.
I - Le dispositif proposé
Cet article complète le dispositif de coordination entre département et autorité judiciaire mis en place en matière de centralisation des informations préoccupantes sur les mineurs en danger et de signalement.
Il parachève d'abord l'harmonisation des définitions retenues par le code de l'action sociale et des familles et par le code civil concernant les situations de danger justifiant une intervention des dispositifs de protection de l'enfance, en incluant dans le code civil la référence aux situations mettant en danger le développement de l'enfant.
Il parfait ensuite la coordination entre les interventions du département et de l'autorité judiciaire en matière de signalement : pour ce faire, il autorise le juge à vérifier qu'il a été saisi à bon escient par le président du conseil général. Le juge pourra donc désormais s'assurer que les signalements effectués par le président du conseil général rentrent bien dans les deux catégories prévues par l'article L. 226-4 du code de l'action sociale et des familles, à savoir l'inefficacité ou l'insuffisante protection apportée par les mesures de protection administrative ou l'impossibilité, pour le département, d'intervenir auprès d'une famille du fait d'un refus ou d'une impossibilité de coopération de la part de celle-ci.
II - La position de votre commission
Les difficultés de coordination entre protection administrative et protection judiciaire de l'enfance ont conduit, ces dernières années, à une judiciarisation excessive des interventions en faveur des enfants en danger. Cette situation était d'ailleurs alimentée par le fait que le principe de subsidiarité n'était clairement posé que dans le cadre de la maltraitance et non pour les autres situations de danger.
Or, il paraît nécessaire de préserver l'espace de la protection administrative, qui permet une action éducative dans le respect de l'autorité parentale, moins traumatisante que la protection judiciaire. Il semble donc opportun de permettre au juge de vérifier qu'il a bien été saisi à bon escient.
Sous le bénéfice de ces observations, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
Article 7 (art. L. 221-6 du code de l'action sociale et des
familles)
Partage d'informations entre personnes également soumises
au secret professionnel
Objet : Cet article détermine les conditions dans lesquelles des professionnels de la protection de l'enfance, également soumis au secret professionnel, peuvent partager entre eux des informations confidentielles en vue d'assurer la protection d'un enfant.
I - Le dispositif proposé
Pour que le partage des informations au sein de la cellule opérationnelle départementale prévu par l'article 5 fonctionne de façon satisfaisante, il est indispensable que les professionnels les plus directement concernés et qui sont, pour la plupart, soumis au secret professionnel par la loi, puissent y participer sans risquer de voir leur responsabilité pénale engagée. Faute de quoi, le dispositif de centralisation des informations préoccupantes serait privé de ses sources les plus sérieuses.
C'est la raison pour laquelle le présent article modifie l'article L. 221-6 du code de l'action sociale et des familles qui fixe les règles relatives au secret professionnel et au partage d'informations applicables aux professionnels de la protection de l'enfance.
Aujourd'hui, ce partage n'est autorisé que dans des cas très restreints :
- entre les professionnels du service départemental d'ASE d'un même département lorsqu'ils sont également soumis au secret professionnel ;
- entre ces mêmes professionnels et le président du conseil général ou, le cas échéant, l'élu ayant reçu délégation pour les questions relatives à la protection de l'enfance. Une transmission des informations confidentielles au cadre administratif désigné par le président du conseil général pour diriger le service de l'ASE est également prévue ;
- enfin, sous certaines conditions, entre professionnels des services d'ASE de départements différents.
En droit, aucun partage n'est donc possible avec les professionnels d'autres services participant aux missions de la protection de l'enfance, qu'il s'agisse des professionnels relevant d'autres services du conseil général, comme les assistantes sociales de secteur ou les médecins et infirmières de la PMI, ou de professionnels extérieurs au département comme les médecins scolaires, les inspecteurs de la DDASS ou encore les praticiens hospitaliers ou libéraux.
Dans les faits, la plupart des départements ont déjà mis en place des dispositifs d'analyse commune des situations, notamment entre tous les professionnels relevant de ses services, qu'ils exercent ou non leurs missions au sein de l'aide sociale à l'enfance. Mais si ces pratiques sont tolérées par l'autorité judiciaire car elles visent à améliorer la détection et la protection des mineurs en danger, elles restent à la merci d'actions pénales intentées par les parents pour non-respect du secret professionnel.
C'est la raison pour laquelle le présent article s'attache à sécuriser le partage d'informations nécessaire à ce travail en commun des professionnels de la protection de l'enfance. A cet effet, il autorise les personnes soumises au secret professionnel qui participent aux missions de la protection de l'enfance à partager entre elles des informations qui seraient normalement soumises au secret.
Ce partage d'informations est toutefois strictement encadré :
- il n'est autorisé que dans le but de permettre l'évaluation de la situation de l'enfant et la définition des mesures les plus appropriées pour assurer sa protection. En conséquence, les informations susceptibles d'être légalement partagées sont limitées à celles qui sont strictement nécessaires à l'accomplissement de ces deux objectifs. Elles ne sont de plus partageables que dans des cas d'espèce et non a priori et de façon générale ;
- il ne peut intervenir qu'après information des titulaires de l'autorité parentale. Cette exigence n'est levée que lorsque l'information préalable des parents fait courir un risque supplémentaire à l'enfant.
II - La position de votre commission
Votre commission est en total accord avec la notion de secret professionnel partagé, telle qu'elle est définie par le présent article : il ne s'agit pas en effet de divulguer des informations confidentielles mais bien de partager un secret et donc une responsabilité entre professionnels soumis au même devoir envers l'enfant et sa famille.
Le secret professionnel est une condition essentielle de la relation de confiance qui peut s'établir entre la famille et le professionnel, qu'il s'agisse de l'assistante sociale ou du médecin de famille. C'est dans le cadre de cette relation de confiance que doit être analysée la disposition du texte qui prévoit une information des parents préalablement à tout partage, dès lors que cette information est conforme à l'intérêt de l'enfant.
La question se pose, bien entendu, de savoir qui détermine si l'intérêt de l'enfant autorise l'information préalable des parents. Certains ont évoqué la possibilité de confier à une autorité indépendante le soin d'apprécier si cette condition est remplie. Mais cela reviendrait en réalité à contourner le principe de l'information préalable. Il faut donc bien admettre que c'est à chaque professionnel de déterminer, en son âme et conscience, si l'intérêt de l'enfant s'oppose à l'information de ses parents.
Si elle approuve donc la notion de secret professionnel partagé, votre commission tient toutefois à souligner les difficultés pratiques que pourront rencontrer les professionnels pour garantir que l'information n'est effectivement partagée qu'entre personnes également soumises au secret professionnel. De fait, même si tous les intervenants de la protection de l'enfance s'y sentent déontologiquement tenus, tous n'y sont pas juridiquement soumis.
Tous les professionnels oeuvrant dans le domaine de la protection de l'enfance ne sont pas astreints au secret professionnel. On distingue en réalité deux catégories de personnels soumis au secret : les personnels concernés du fait de leur profession : les professionnels concernés sont définis par la loi ou par la jurisprudence. Dans le domaine de la protection de l'enfance, il s'agit essentiellement des assistantes sociales et des élèves assistantes en stage (article L. 411-3 du code de l'action sociale et des familles) . La jurisprudence a étendu cette catégorie en s'appuyant sur la notion de « confident nécessaire » . Mais elle a toujours refusé cette qualité aux éducateurs, aux directeurs d'établissements ou encore aux psychologues (Cass. Crim., 4 novembre 1971, ministère public contre Raguenès et Gauthier) ; les personnels concernés du fait de fonctions particulières : les fonctions concernées sont énumérées par la loi. Il s'agit : - des personnes qui participent aux missions du service d'aide sociale à l'enfance (article L. 221-6 du code de l'action sociale et des familles) ; - des personnes qui collaborent au service départemental de protection maternelle et infantile (article L. 2112-9 du code de la santé publique) ; - des agents du service national d'accueil téléphonique pour l'enfance maltraitée (article L. 226-9 du code de l'action sociale et des familles) ; - de toute personne amenée à intervenir dans l'instruction, l'attribution ou la révision des admissions à l'aide sociale (article L. 133-5 du code de l'action sociale et des familles) ; - des membres de la commission départementale de l'éducation spéciale (CDES) (circulaires interministérielles n os 76-156 et 31 du 22 avril 1976 et n os 79-389 et 50 S du 14 novembre 1979) ;
Ainsi, si les assistantes sociales, les infirmières et
le personnel médical sont tous soumis au secret, le personnel
éducatif et les intervenants sociaux autres que les assistantes sociales
ne le sont pas automatiquement. La question est enfin délicate à
trancher pour les enseignants qui, étant fonctionnaires, sont soumis
à un principe de discrétion professionnelle, qui se rapproche,
sans toutefois se confondre entièrement, de la notion de secret
professionnel
(article 26 de la loi n° 83-634 du 13 juillet
1985 portant droits et obligations des fonctionnaires)
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Votre commission vous propose, outre un amendement de coordination , de clarifier le texte sur deux points :
- elle estime préférable, pour des raisons de lisibilité, de séparer, en deux articles distincts au sein du code de l'action sociale et des familles, les règles relatives au partage d'informations confidentielles au sein du service de l'ASE et celles relatives au partage entre les professionnels du service de l'ASE et d'autres professionnels ;
- il convient également d'unifier le vocabulaire employé pour désigner les personnes autorisées à partager des informations couvertes par le secret professionnel avec celui retenu à l'article 5 qui prévoit l'obligation de transmission des informations préoccupantes au département, afin de ne pas laisser entendre que le champ des professionnels concernés est différent.
Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.
Article 8 (art. L. 226-3-1 du code de l'action sociale et des
familles)
Création d'observatoires départementaux de la
protection de l'enfance
Objet : Cet article vise à créer, dans chaque département, un observatoire de la protection de l'enfance, chargé d'organiser un dispositif local de statistiques sur l'enfance en danger et de contribuer, par ses propositions, à l'amélioration de la politique départementale de protection de l'enfance.
I. - Le dispositif proposé
Faute d'un accord entre partenaires sur la méthodologie à retenir pour le recueil des informations, les données statistiques actuelles sur la protection de l'enfance sont aujourd'hui en grande partie inexploitables : le chiffrage des enfants en danger se heurte en effet à l'hétérogénéité des définitions de ce concept, à la multiplicité des sources et à des différences importantes dans les méthodes de comptabilisation retenues par chaque acteur.
Le premier rapport d'activité de l'Observatoire national de l'enfance en danger (Oned) 7 ( * ) montre les limites du système statistique actuel : par exemple, les départements recensent le nombre d'enfants confiés à l'ASE, alors que la justice comptabilise les mesures d'assistance éducative qu'elle prononce. Or, il est impossible d'apparier ces deux sources, puisque le même enfant peut être comptabilisé deux fois, lorsque qu'il est confié à l'ASE par décision judiciaire.
De la même façon, aucun rapprochement entre les données disponibles en amont et en aval de la décision de protection n'est réalisable : les statistiques en amont s'attachent toutes à un événement (signalement pour le conseil général, plainte pour l'autorité judiciaire, appel téléphonique pour le Snatem), alors que celles en aval s'attachent soit à l'enfant, soit, plus fréquemment, aux mesures prononcées qui peuvent être multiples pour un même enfant.
C'est la raison pour laquelle cet article prévoit la création, dans chaque département, d'un observatoire de la protection de l'enfance chargé de recueillir et d'analyser les données chiffrées relatives à la protection de l'enfance dans le département. Leur composition est prévue de façon à permettre la coordination méthodologique nécessaire à l'exercice de leurs missions : y siègeront en effet des représentants des trois grands acteurs de la protection de l'enfance, à savoir conseil général, justice et services de l'Etat. S'y ajouteront les représentants des établissements et services participant aux missions de protection de l'enfance dans le département.
De tels observatoires ne sont pas entièrement nouveaux : selon l'Oned, treize départements ont déjà mis en place des structures assez proches dans leur conception de celle prévue par le projet de loi et sept autres préparent leur création. Mais lorsqu'ils existent, ils se heurtent à la difficulté de parvenir à une certaine exhaustivité des données. Ils peinent notamment à mobiliser les informations en provenance de l'autorité judiciaire.
Tirant les leçons de ces difficultés, le présent article adosse les nouveaux observatoires départementaux au dispositif de recueil des informations préoccupantes sur les mineurs en danger prévu par l'article 5 : ils disposeront ainsi des données anonymisées issues des informations centralisées par la cellule départementale de signalement.
Dans la mesure où toutes les informations préoccupantes transitent désormais par ces cellules, même lorsqu'elles font l'objet d'un signalement direct à l'autorité judiciaire, les observatoires départementaux pourront accéder à des données exhaustives, au moins en ce qui concerne la situation des enfants en amont de la décision de protection.
Mais le projet de loi va plus loin, puisqu'il confie également à ces observatoires deux autres missions :
- celle de centraliser et d'examiner les rapports d'évaluation externe que les établissements et services d'accueil intervenant dans le domaine de la protection de l'enfance ont l'obligation de faire réaliser tous les ans en application de l'article L. 312-8 du code de l'action sociale et des familles ;
- celle d'élaborer des propositions d'amélioration du dispositif de protection de l'enfance dans le département.
Les observatoires ne doivent pas constituer de simples organismes de recueil statistique mais également contribuer au développement de l'évaluation, afin d'adapter la politique départementale de protection de l'enfance aux besoins de la population : suffisamment proches du terrain mais sans être en prise directe avec les situations individuelles, ils doivent permettre l'élaboration et le suivi d'indicateurs d'efficacité des mesures de protection, ainsi que l'évaluation de la qualité de la prise en charge des mineurs confiés à l'ASE.
II - La position de votre commission
Votre commission ne peut que se féliciter de la création des observatoires départementaux de la protection de l'enfance qui répondent à une demande exprimée à de nombreuses reprises, notamment par l'Oned qui avait fait part de son besoin de pouvoir s'appuyer sur des instances locales compétentes pour assurer sa mission de synthèse nationale des données sur la protection de l'enfance.
Leur double compétence de recueil statistique et d'expertise sur la politique de protection de l'enfance devrait également faire de ces structures des outils précieux pour les départements en matière de pilotage de l'offre de prise en charge.
Afin de donner à ces observatoires toute l'ampleur qu'ils méritent, votre commission vous propose donc, outre un amendement rédactionnel, de compléter ce dispositif sur deux points :
- un premier amendement vise ainsi à élargir les compétences des observatoires départementaux au suivi du schéma d'organisation sociale et médico-sociale, pour sa partie concernant les établissements et services destinés aux enfants en danger : ayant une vision détaillée des besoins, du fait de leurs missions statistiques, les observatoires pourraient en effet formuler des avis éclairés sur l'adaptation de l'offre de prise en charge ;
- un second amendement tend à prévoir la participation de représentants des associations de protection de l'enfance aux observatoires départementaux : en effet, dès lors que le rôle qui leur est confié dépasse le strict cadre du recueil et de l'analyse statistique et s'étend à l'évaluation et à la formulation d'avis sur l'ensemble de la politique départementale de la protection de l'enfance, il paraît indispensable de l'ouvrir aux représentants des usagers. Cette mesure permettrait en outre de respecter un certain parallélisme des formes avec la composition retenue pour le conseil d'administration de l'Observatoire national de l'enfance en danger.
Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.
Article 9 (art. 375-3, 375-4 et 375-9 du code civil,
art. L. 222-5 et L. 223-3 du code de l'action sociale et des
familles)
Inscription de l'accueil de jour parmi les mesures de placement
susceptibles d'être décidées par le juge
Objet : Cet article inscrit l'accueil de jour parmi les mesures de placement susceptibles d'être décidées par le juge pour la protection de l'enfant.
I - Le dispositif proposé
Aujourd'hui, dans le cadre des mesures d'assistance éducative, le juge est placé devant une alternative stricte : soit il maintient l'enfant dans sa famille, en le faisant suivre par un service d'action éducative en milieu ouvert (AEMO), soit il l'extrait de son milieu familial. Il peut alors décider de le confier :
- à son autre parent, lorsque père et mère sont effectivement séparés ;
- à un autre membre de sa famille ou à un proche, appelé « tiers digne de confiance » ;
- au service départemental de l'aide sociale à l'enfance qui organise alors son accueil, soit chez un assistant familial, soit dans un établissement ;
- ou, enfin, à un établissement spécialisé répondant à la problématique particulière de l'enfant : il peut notamment s'agir d'un établissement sanitaire ou d'éducation spéciale, lorsque la santé ou le handicap de l'enfant l'exigent.
Mais cette dichotomie traditionnelle entre action à domicile et hébergement de l'enfant n'est plus adaptée dans un contexte où la recherche de solutions individualisées est privilégiée. De nombreuses expériences innovantes ont été menées dans les départements pour moduler les prestations d'accueil en fonction des besoins de l'enfant et de sa famille mais elles nécessitent aujourd'hui d'être sécurisées sur le plan juridique.
Tenant compte de cette nécessaire diversification des modes de prise en charge, le présent article, dans son paragraphe I , crée une nouvelle modalité de placement susceptible d'être mobilisée par le juge : l'accueil de jour. Cette prestation, qui se caractérise par un accueil de l'enfant dans une structure de proximité ou dans une famille habilitée, sur des temps non scolaires, constitue en effet une mesure originale de soutien éducatif sans hébergement qui mérite d'être reconnue et encouragée.
L'Oned recense aujourd'hui deux types d'expériences d'accueil de jour : - la première catégorie prévoit un accueil de l'enfant , sur des temps non scolaires (mercredis, week-ends, soirées, vacances...), sans hébergement et des entretiens avec les parents au sein d'un internat éducatif ou d'une structure conçue spécifiquement pour le projet ;
- la seconde correspond à un
accueil de la
famille
, le plus souvent collectif, avec en parallèle des
entretiens individuels. Les activités développées dans ce
cadre s'orientent vers des actions de soutien à la fonction parentale.
Elles sont fondées sur des actions concrètes de la vie
quotidienne et l'intervention du professionnel en direction des enfants, sous
le regard des parents, doit conduire ceux-ci à interroger la pertinence
de leurs propres actions. Les regards croisés entre parents, et non plus
le seul avis du professionnel, permettent le renforcement du sentiment de
compétence parentale.
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La reconnaissance de l'accueil de jour ne constitue toutefois pas l'unique ouverture du projet de loi aux nouvelles formes de soutien à la famille et d'hébergement de l'enfant : elle doit en effet être appréciée à la lumière des dispositions des articles 12 et 13 qui créent respectivement une nouvelle forme d'action éducative à domicile (l'aide à la gestion du budget familial) et de nouvelles modalités de placement (placement exceptionnel ou périodique ou encore hébergement à temps partiel).
Les paragraphes II à IV constituent des dispositions de coordination, visant à inscrire cette nouvelle modalité du placement dans divers articles du code civil et du code de l'action sociale et des familles.
II - La position de votre commission
Votre commission ne peut que se féliciter de la reconnaissance de l'accueil de jour qui constitue une pratique déjà expérimentée avec succès par de nombreux départements mais dont le développement est freiné par une absence de base légale adaptée.
Elle souhaite apporter à cet article un amendement tendant à rectifier une erreur matérielle et vous propose d'adopter cet article ainsi amendé .
Article 10 (art. L. 221-4 et L. 223-5 du code de l'action
sociale et des familles)
Information réciproque du président
du conseil général et de l'autorité judiciaire sur la
situation des mineurs faisant l'objet d'une mesure de protection
Objet : Cet article complète le dispositif de coordination entre les départements et l'autorité judiciaire, en prévoyant une information réciproque du président du conseil général et du juge des enfants concernant la situation des enfants protégés. Il renforce également le suivi des enfants placés, en confiant au service de l'ASE le soin d'établir un rapport annuel sur la situation de chaque enfant.
I - Le dispositif proposé
Confier un rôle de chef de file au département en matière de protection de l'enfance suppose que celui-ci soit en mesure d'avoir une vision globale de la situation des enfants en danger relevant de son ressort territorial. La mise en place de la cellule départementale de signalement doit lui permettre d'atteindre cet objectif concernant la situation des enfants en amont des mesures de protection , mais il reste nécessaire d'améliorer son information pour ceux faisant l'objet d'une mesure de protection.
Si les services de l'aide sociale à l'enfance sont en mesure d'assurer un suivi des enfants qui font l'objet d'une mesure de protection administrative et de ceux qui lui sont confiés par une décision judiciaire, ils dépendent aujourd'hui totalement de la bonne volonté des magistrats pour accéder aux informations concernant les mineurs qui font l'objet d'un placement direct par le juge.
Ainsi, lorsqu'un enfant est placé directement par le juge des enfants auprès d'un particulier ou d'un établissement, les rapports annuels sur la situation de l'enfant que ceux-ci doivent établir ne sont transmis qu'à ce magistrat. C'est oublier les dispositions de l'article L. 227-2 du code de l'action sociale et des familles qui prévoit que les mineurs accueillis hors du domicile familial en application des dispositions relatives à l'assistance éducative sont sous la protection conjointe du président du conseil général et du juge des enfants, que l'enfant ait été ou non confié en pratique au service de l'ASE.
C'est la raison pour laquelle le présent article, dans son paragraphe I , autorise désormais le président du conseil général à se faire communiquer, par les établissements ou les services qui les accueillent, les informations concernant les enfants faisant l'objet d'une mesure de protection judiciaire nécessaires à l'accomplissement de sa mission de protection de l'enfance. Cette demande d'information doit naturellement se faire dans le respect du droit des familles, ce qui explique que le président du conseil général soit tenu d'informer les parents ou le tuteur de sa démarche.
Le paragraphe II vise, quant à lui, un second objectif : celui d'améliorer la qualité du suivi des enfants confiés au service de l'ASE. A cet effet, il étoffe un outil existant, à savoir le rapport qui doit être établi annuellement par ce service sur la situation des enfants qui lui sont confiés par le juge. L'amélioration proposée porte sur trois points :
- l'obligation, pour le service de l'ASE, d'établir chaque année un rapport sur la situation des enfants pris en charge est étendu des seuls enfants confiés par l'autorité judiciaire à tous les enfants placés sous sa responsabilité, quel que soit le type de protection dont ils bénéficient. Il convient de souligner que ce rapport ne se substitue pas à celui qui doit être transmis au juge par l'établissement ou le service d'accueil qui a directement en charge l'enfant, conformément à l'article 1199-1 du nouveau code de procédure civile ;
- l'objet du rapport annuel est précisé : alors qu'il reste aujourd'hui en pratique largement axé sur les questions éducatives, il devra désormais embrasser un champ beaucoup plus large et englober les aspects sanitaires et psychiques du développement de l'enfant, son insertion scolaire, ses relations sociales et, enfin, l'état de ses relations avec sa famille. En conséquence, il est précisé qu'il est établi sur la base d'une évaluation pluridisciplinaire ;
- le rapport est désormais transmis aux parents et sert donc de base à un bilan régulier de l'évolution de l'enfant. Il vient compléter les outils qui visent à maintenir un lien avec la famille, quelles que soient les modalités du droit de visite et d'hébergement décidées par ailleurs par le juge.
II - La position de votre commission
Votre commission partage la volonté d'améliorer la circulation de l'information entre président du conseil général et juge des enfants concernant les enfants faisant l'objet d'une mesure de protection. Cette information réciproque s'inscrit d'ailleurs dans l'esprit de l'article L. 227-2 du code de l'action sociale et des familles qui dispose que les enfants placés sont « sous la protection conjointe du président du conseil général et du juge des enfants » .
Elle approuve également le souci d'amélioration de la qualité du suivi des enfants confiés à l'aide sociale à l'enfance que traduit l'exigence du caractère pluridisciplinaire du rapport annuel sur la situation de l'enfant. Elle estime toutefois qu'il n'est pas utile de détailler dans la loi l'ensemble des sujets devant être abordés dans ce rapport.
Il convient en effet de conserver une certaine souplesse : suivant la situation de l'enfant, aborder l'ensemble des sujets aujourd'hui prévus par le projet de loi ne sera pas indispensable. De telles précisions, qui paraissent relever davantage de la circulaire que de la loi, pourraient en pratique conduire surtout les travailleurs sociaux à multiplier réunions de synthèse et papiers en tout genre. Votre commission vous propose donc de supprimer, par amendement , ces précisions, la référence à une évaluation pluridisciplinaire suffisant à garantir que le rapport ne restera pas cantonné, comme aujourd'hui, aux aspects éducatifs.
Elle souhaite en outre supprimer la référence faite par cet article au nouveau code de procédure civile : celui-ci relève en effet du décret. C'est donc aux décrets d'application du présent projet de loi de préciser que le rapport d'évaluation prévu à l'article 223-5 du code de l'action sociale et des familles ne se substitue pas au rapport qui doit être remis au juge par l'établissement qui accueille l'enfant en application du nouveau code de procédure civile.
Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.
* 7 Premier rapport annuel au Parlement et au Gouvernement de l'Observatoire national de l'enfance en danger, septembre 2005.