III. LE BUDGET DU TRAVAIL OFFRE ENFIN UNE VISION CLAIRE DE LA POLITIQUE DE L'EMPLOI : 60 % DES CRÉDITS SONT DÉVOLUS AUX EXONÉRATIONS DE CHARGES
Le budget du travail avait subi, ces dernières années, de multiples modifications de son périmètre qui en avaient fortement restreint la cohérence, et qui nécessitaient de procéder à un calcul consolidé afin de recouvrer une vision satisfaisante du coût de la politique de l'emploi .
Avec la disparition du FOREC, dont dispose l'article 18 du présent projet loi de finances, la compensation des allègements généraux de charges auprès de la sécurité sociale sera à nouveau supportée par le budget du travail. Ainsi, la hausse spectaculaire des crédits pour 2004, supérieure à 100 %, correspond à une hausse de 2,91 % dans le nouveau périmètre budgétaire.
A. LES TRIBULATIONS DU BUDGET DU TRAVAIL
La politique d'allègement des charges sociales, pesant en particulier sur les emplois peu qualifiés, a connu une montée en charge progressive, notamment à partir de la mise en place, en 1993, de la ristourne dégressive sur les bas salaires, dite « ristourne Juppé ».
Dans un premier temps, la compensation par le budget de l'Etat de ces exonérations de cotisations sociales avait entraîné une forte progression du budget du travail, passé de 12,87 milliards d'euros en 1993 à 22,93 milliards d'euros en 1997. Au cours de la même période, en effet, le montant des exonérations de cotisations sociales compensées était passé de 1,84 milliard d'euros à 10,17 milliards d'euros. Logiquement, une part croissante des crédits inscrits au budget du travail était consacrée au financement de ces compensations d'exonérations de charges sociales, de 14,3 % en 1993 à 44,4 % en 1997.
Puis la politique de réduction du temps de travail suivie par le précédent gouvernement à partir de 1997 l'a conduit à procéder à certaines modifications du périmètre du budget du travail.
Certes, la première modification, intervenue en loi de finances initiale pour 1999, allait dans le bon sens, puisqu'elle consistait en un transfert des crédits finançant la « ristourne Juppé » pour un montant de 6,10 milliards d'euros du budget des charges communes vers le budget du travail.
Mais à compter de 2000, la création du FOREC s'est traduite par une débudgétisation massive , le budget du travail se voyant priver, au profit de l'établissement public, des crédits destinés à compenser les exonérations générales de cotisations sociales. Cette orientation a été systématisée jusqu'en 2003, le FOREC accueillant même, à compter du 1 er juillet, le dispositif unifié de compensation d'exonération de charges sociales programmé par la « loi Fillon ».
Ainsi, le coût prévisionnel des allègements de charges financés par le FOREC en 2003 devait s'élever à 16,56 milliards d'euros, soit un montant pour la première fois supérieur à celui qui avait été prévu pour le budget du travail (15,72 milliards d'euros).
B. L'ÉVOLUTION DU COÛT TOTAL DE LA POLITIQUE DE L'EMPLOI
Dès lors, il est nécessaire, pour une meilleure appréhension de l'évolution du coût de la politique de l'emploi, de reconstituer l'évolution d'un budget du travail qui aurait enregistré le coût de la compensation des exonérations prise en charge par le FOREC jusqu'en 2003.
Le tableau suivant retrace cette évolution consolidée.
Evolution des moyens du travail dans le périmètre 2004
(en milliers d'euros)
|
2002 |
2003 |
2004 7 ( * ) |
évolution 2004 / 2003 |
Lois de finances initiales et projet de loi de finances pour 2004 |
16 754 000 |
15 724 000 |
32 543 000 |
106,96% |
FOREC (droits constatés) |
15 560 000 |
15 900 000 |
|
-100,00% |
Total |
32 314 000 |
31 624 000 |
32 543 000 |
2,91% |
Il en ressort, compte tenu d'une inflation évaluée à 1,7 % pour 2004, une faible progression en volume (+ 1,19 %) des moyens mis en oeuvre.
C. L'AXE MAJEUR DE LA POLITIQUE DE L'EMPLOI : LES EXONÉRATIONS DE CHARGES
La quasi stagnation des moyens de l'emploi recouvre les mouvements suivants :
1°) une forte augmentation (+ 6,97 %) des moyens mis au service de l'ensemble des dispositifs d'exonération de charges sociales, comme le montre le tableau suivant.
Evolution des moyens consacrés aux
exonérations de charges
(périmètre travail +
FOREC)
(en milliers d'euros)
|
2002 |
2003 |
2004 |
évolution 2004 / 2003 |
Total des exonérations prises en charge par le budget du travail |
2 677 760 |
2 311 470 |
19 480 290 |
742,77% |
FOREC (droits constatés) |
15 560 000 |
15 900 000 |
- |
-100,00% |
Total des exonération prises en charge par le budget du travail et le FOREC (jusqu'en 2003) |
18 237 760 |
18 211 470 |
19 480 290 |
6,97% |
Cette augmentation recouvre elle-même deux mouvements d'inégale ampleur : une très forte augmentation des ressources consacrées aux dispositifs généraux d'exonération (7,55 %) , et une moindre -quoique substantielle- augmentation des moyens consacrés aux dispositifs spéciaux d'exonération (2,98 %) ;
2°) en contrepartie, une diminution de 4,29 % des moyens consacrés aux autres dispositifs de l'emploi , essentiellement imputable à la baisse des moyens affectés aux dispositifs destinés aux publics prioritaires relevant du secteur non marchand (supra).
Evolution des moyens du travail hors exonérations de charges
(en milliers d'euros)
|
2002 |
2003 |
2004 8 ( * ) |
évolution 2004 / 2003 |
Budget du travail (périmètre 2004) |
32 314 000 |
31 624 000 |
32 317 000 |
2,19% |
Total des exonérations prises en charge par le budget du travail et le FOREC jusqu'en 2003 |
18 237 760 |
18 211 470 |
19 480 290 |
6,97% |
Budget du travail (périmètre 2004) hors prise en charge des exonérations |
14 076 240 |
13 412 530 |
12 836 710 |
-4,29% |
Au total, les exonérations de charges dépassent pour la première fois en 2004 le seuil des 60 % des moyens dévolus au travail.
Votre rapporteur spécial a dressé le tableau suivant, qui récapitule l'évolution des moyens consacrés à l'ensemble des dispositifs d'exonération, afin d'établir ce résultat (ainsi que ceux qui précèdent) :
|
|
|
(en milliers d'euros) |
||
EVOLUTION DES EXONERATIONS DE COTISATIONS PRISES EN CHARGE PAR LE FOREC ET PAR LE BUDGET DU TRAVAIL |
|||||
|
2002 |
2003 |
2004 |
évolution |
|
2004 / 2003 |
|||||
LFI 2002 LFI 2003 PLF 2004 |
Contrats d'apprentissage |
824 750 |
814 520 |
791 340 |
-2,85% |
Contrats de qualification - jeunes |
423 700 |
411 980 |
363 340 |
-11,81% |
|
Contrats de qualification - adultes |
31 710 |
3 200 |
0 |
-100% |
|
Contrats initiative-emploi (CIE) |
427 920 |
142 000 |
47 000 |
-66,90% |
|
Insertion par l'économique |
57 920 |
42 230 |
43 710 |
3,50% |
|
Contrats de retour à l'emploi (CRE) |
9 910 |
9 910 |
9 910 |
0% |
|
Revenu minimum d'activité |
- |
- |
20 000 |
n.s. |
|
Allègements ciblés relevant le la promotion de l'emploi (agrégat 04 du budget du travail en périmètre 2003) |
901 850 9 ( * ) |
887 630 |
1 104 990 |
24,49% |
|
ALLEGEMENTS SPECIAUX : exonérations se situant dans le périmètre 2003 du budget du travail |
2 677 760 |
2 311 470 |
2 380 290 |
2,98% |
|
2002 / 2003 : FOREC en droits constatés & PLF 2004 |
Exonération de cotisation d'allocation familiale |
- |
- |
10 000 |
n.s. |
Ristourne bas salaires 1,3 SMIC (jusqu'au 1er juillet 2003) |
4 615 000 |
2 138 000 |
0 |
-100% |
|
Allègement "Aubry I" |
2 218 000 |
2 073 000 |
890 000 |
-57,07% |
|
Allègement "Aubry II" (jusqu'au
|
8 249 000 |
4 190 000 |
0 |
-100% |
|
ARTT "de Robien" |
478 000 |
530 000 |
408 000 |
-23,02% |
|
Allègement unique "Fillon" (à compter du 1er juillet 2003) |
- |
6 969 000 |
15 792 000 |
126,60% |
|
ALLEGEMENTS GENERAUX : exonérations se situant dans le périmètre 2003 du FOREC et relevant en 2004 du budget du travail (allègements généraux relevant de la promotion de l'emploi) |
15 560 000 |
15 900 000 |
17 100 000 |
7,55% |
|
COUT TOTAL DES EXONERATIONS DE CHARGES (budget du travail + FOREC jusqu'en 2003) |
18 237 760 |
18 211 470 |
19 480 290 |
6,97% |
|
FOREC (droits constatés) |
15 560 000 |
15 900 000 |
- |
-100% |
|
Montant du budget du travail |
16 754 000 |
15 724 000 |
32 317 000 |
105,53% |
|
Budget du travail (périmètre 2004) |
32 314 000 |
31 624 000 |
32 317 000 |
2,19% |
|
Part des exonérations dans le budget du travail (périmètre 2004) |
56,44% |
57,59% |
60,28% |
4,67% |
* 7 Montant réintégrant les transferts de crédits vers d'autres ministères en 2004 (cf avant-propos).
* 8 Hors réintégration des transferts de crédits vers d'autres ministères en 2004 (cf avant-propos).
* 9 Compte tenu de la part de l'abondement opéré en loi de finances rectificative pour 2002 correspondant à un ajustement aux besoins (170 millions d'euros).