ARTICLE 23
Création d'un Fonds de financement des prestations
sociales des non-salariés agricoles appelé à se substituer
au budget annexe des prestations sociales agricoles
(BAPSA)
Commentaire : le présent article vise à
créer un établissement public national à caractère
administratif, dénommé Fonds de financement des prestations
sociales des non-salariés agricoles, appelé à se
substituer définitivement au BAPSA au plus tard le 1
er
janvier 2005, en conservant globalement les mêmes attributions.
I. LE DROIT EXISTANT
A. LE BUDGET ANNEXE DES PRESTATIONS SOCIALES AGRICOLES
Dans le droit actuel, la section 1 du chapitre 1
er
du titre III du
livre VII du code rural contient les dispositions relatives au budget
annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA).
Le BAPSA a été institué par l'article 58 de loi de
finances pour 1960
157(
*
)
et
retrace les recettes et les dépenses de prestations légales
correspondant aux risques maladie, maternité et invalidité, aux
prestations familiales et à l'assurance vieillesse (y compris les
prestations prises en charge par le fonds de solidarité vieillesse) des
personnes non-salariées des professions agricoles
158(
*
)
.
Le BAPSA a ainsi pour objet d'identifier le coût des prestations sociales
servies aux quelques 600.000 exploitants agricoles, à leurs ayants
droits et aux retraités relevant de ce régime, soit un total de
plus de 2,2 millions de bénéficiaires selon les statistiques
du ministère de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et
des affaires rurales.
Dans le présent projet de loi de finances, les crédits du BAPSA
pour 2004 s'élèvent à
15,005 milliards d'euros
, en
hausse de 2,6 % par rapport aux dotations initiales de la loi de finances pour
2003.
D'après les dispositions de l'actuel article L. 731-1 du code rural, le
BAPSA est rattaché pour ordre au budget général de l'Etat
et sa gestion administrative est confiée au ministre chargé de
l'agriculture assisté d'un comité de gestion du budget annexe. En
outre, le Conseil supérieur des prestations sociales agricoles (CSPSA),
composé notamment de représentants de la profession agricole,
participe également à la gestion administrative du BAPSA.
Enfin, il faut préciser que les caisses de la mutualité sociale
agricole, départementales ou pluridépartementales, sont
chargées de la gestion des régimes obligatoires de protection
sociale des salariés et non-salariés agricoles. L'actuel
régime de protection sociale agricole est donc caractérisé
par une gestion mutualiste et de proximité.
B. LES CONSÉQUENCES DES DISPOSTIONS DE LA LOI ORGANIQUE DU
1
ER
AOUT 2001 RELATIVE AUX LOIS DE FINANCES SUR L'EXISTENCE DU
BAPSA
Si la loi organique du 1
er
août 2001 relative aux lois de
finances (LOLF) n'a pas supprimé les budgets annexes, la
rédaction de son article 18 rend encore plus rigoureuses les conditions
qui autorisent d'y recourir : les budgets annexes devront désormais
retracer «
les seules opérations des services de l'Etat,
non dotés de la personnalité morale résultant de leur
activité de production de biens ou de prestations de services donnant
lieu au paiement de redevances, lorsqu'elles sont effectuées à
titre principal par lesdits services
».
Il ressort du texte adopté que le législateur organique a
estimé nécessaire de conserver le seul budget annexe de
l'aviation civile. Le BAPSA devrait donc être amené à
disparaître au plus tard d'ici le premier exercice d'entrée en
vigueur des dispositions budgétaires de la loi organique, à
savoir d'ici 2006.
A cet égard, dans son rapport sur l'exécution des lois de
finances pour 2001, la Cour des comptes rappelait que «
le BAPSA
ne répond pas aux conditions fixées par l'article 20 de
l'ordonnance du 2 janvier 1959 qui dispose que les établissements
dotés d'un budget annexe doivent « produire des biens ou
rendre des services donnant lieu à paiement de prix ». Il ne
produit aucun bien et retrace les opérations financières de
services qui ne sont pas rendus par l'Etat. De plus, les contributions des
assurés ne représentent qu'une part limitée des recettes
et la part des financements publics dans la prise en charge des prestations de
ce régime ne cesse de croître
. Le BAPSA ne correspondant pas
davantage aux conditions fixées par l'article 18 de la loi organique du
1
er
août 2001, la Cour ne peut qu'appeler à sa
suppression
».
Il faut rappeler ici que la création du BAPSA est liée à
l'importance des ressources fiscales et budgétaires affectées
dès l'origine au financement du régime agricole de protection
sociale. S'y sont ajoutées ensuite les recettes issues des
mécanismes de compensation démographique. Cependant, le BAPSA
n'est aujourd'hui techniquement qu'un compte d'avances et il n'assure pas la
réalité de la dépense ni du fonctionnement du
régime de protection sociale des exploitants agricoles.
Enfin, dans la mesure où les ressources inscrites au BAPSA n'ont pas
vocation à figurer toutes sur le budget de l'agriculture (ressources
fiscales) ni même dans le budget de l'Etat (compensation en provenance
d'autres régimes) le BAPSA a, avant tout, une fonction d'information.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
Le présent article a pour objet de substituer au BAPSA un
établissement public administratif appelé Fonds de financement
des prestations sociales des non-salariés agricoles et amené, au
plus tard à compter du 1
er
janvier 2005, à exercer
globalement les mêmes attributions que celles du budget annexe.
Il remplace ainsi la section du code rural consacrée au budget annexe
des prestations sociales agricoles par une nouvelle section intitulée
«
Fonds de financement des prestations sociales des
non-salariés agricoles
».
A. LA CRÉATION DU FONDS DE FINANCEMENT DES PRESTATIONS SOCIALES
DES NON-SALARIÉS AGRICOLES
1. Nature juridique du nouveau fonds de financement
a) Un établissement public national à caractère
administratif
D'après les dispositions proposées par le présent article
pour l'article L. 731-1 du code rural, il est créé un fonds dont
la mission est d'assurer le financement des prestations sociales des
non-salariés agricoles.
La gestion de ces prestations et le recouvrement des cotisations
correspondantes sont assurés dans les conditions prévues aux
articles L. 723-2 et L. 731-30 du code rural, c'est-à-dire par les
caisses de mutualité sociale agricole (MSA), départementales ou
pluridépartementales, et en laissant le libre choix aux assujettis de
s'assurer, en matière de maladie, maternité et invalidité,
auprès des caisses de la MSA ou auprès de tout organisme
privé d'assurance.
Le nouveau Fonds de financement des prestations sociales des
non-salariés agricoles prend la forme d'un établissement public
national à caractère administratif, soumis au contrôle de
l'Etat.
b) Un conseil d'administration et un comité de surveillance
D'après les dispositions proposées par le présent article
pour l'article L. 731-2 du code rural, le conseil d'administration du nouveau
fonds de financement est constitué de représentants de l'Etat.
Ce conseil d'administration est assisté d'un comité de
surveillance composé notamment de membres du Parlement, de
représentants des organisations professionnelles agricoles
représentatives ainsi que de représentants de la mutualité
sociale agricole.
La composition du conseil d'administration et du comité de surveillance
ainsi que les règles et conditions de fonctionnement et de gestion de
l'établissement seront fixées par décret en Conseil d'Etat.
D'après les informations recueillies par votre rapporteur
général, le rôle de comité de surveillance du
nouveau Fonds de financement devrait être confié à l'actuel
Conseil supérieur des prestations sociales agricoles (CSPSA).
c) Une organisation en quatre sections
D'après les dispositions proposées par le présent article
pour l'article L. 731-7 du code rural, le Fonds de financement des prestations
sociales des non-salariés agricoles est organisé en quatre
sections :
- assurance maladie, invalidité et maternité ;
- prestations familiales ;
- assurance vieillesse et veuvage ;
- charges de gestion du fonds.
Ces sections correspondent aux trois branches de la sécurité
sociale pour lesquels le BAPSA était compétent, auxquelles
s'ajoutent une section consacrée aux charges de gestion du nouveau fonds
de financement.
d) Les relations financières entre le fonds et les organismes de
sécurité sociale d'une part, entre le fonds et l'Etat d'autre
part
D'après les dispositions proposées par le présent article
pour l'article L. 731-9 du code rural, les relations financières entre
le nouveau fonds de financement et les organismes de sécurité
sociale d'une part, entre le fonds et l'Etat d'autre part, font l'objet de
conventions destinées notamment à garantir la neutralité
en trésorerie des flux financiers pour les organismes de
sécurité sociale.
Ces dispositions ne fournissent aucune indication quant au contenu de ces
conventions. Elles ont toutefois pour objet de permettre de déterminer,
par le biais d'une convention, le calendrier ou l'échéancier des
versements des taxes, impôts et contributions, afin que les organismes
concernés ne supportent aucune charge financière indue lorsqu'ils
recourent à des ressources non permanentes.
2. Définition des recettes et des dépenses du nouveau Fonds de
financement
a) La définition des recettes du Fonds de financement des prestations
sociales des non-salariés agricoles
D'après les dispositions proposées par le présent article
pour l'article L. 731-4 du code rural, les recettes du fonds sont
constituées par deux types de recettes : les recettes dites
« techniques » et les produits de gestion du fonds.
(1) Les recettes techniques du fonds
Le présent article fixe la liste des recettes techniques du fonds :
ces recettes sont globalement calquées sur celles qui étaient
auparavant affectées au budget annexe des prestations sociales
agricoles, mentionnées par l'actuel article L. 731-4 du code rural.
Elles comprennent les éléments figurant dans le tableau
suivant :
Liste des recettes techniques affectées au Fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles
Divers impôts, taxes et amendes affectés |
Taxe sur les farines, taxe sur les tabacs fabriqués, taxe sur les corps gras alimentaires, prélèvement sur le droit de consommation sur les tabacs, CSG et C3S. |
Cotisations dues par les assujettis |
Cotisations techniques affectées au service des prestations familiales, de l'assurance maladie-maternité-invalidité, de l'assurance vieillesse et veuvage, de l'assurance volontaire et personnelle, cotisations de solidarité et cotisations acquittées dans les départements d'outre-mer. |
Subventions du FSI et du FSV |
Financement des allocations complémentaires de prestations en invalidité et vieillesse par le Fonds spécial d'invalidité (FSI) et le Fonds de solidarité vieillesse (FSV), non comprises les majorations pour enfants. |
Contribution de la CNAF |
Contribution d'équilibre de la caisse nationale d'allocations familiales (CNAF) correspondant à la différence entre les prestations versées aux bénéficiaires et les cotisations recouvrées, la branche étant financièrement équilibrée. |
Compensation démographique |
Versements au titre de la compensation démographique entre régimes pour les risques maladie et vieillesse, résultant de l'article L. 134-1 du code de la sécurité sociale. |
Versement de l'Etat au titre de l'AAH |
Remboursement par l'Etat des prestations versées aux bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapés (AAH). |
Dons et legs |
Le cas échéant, affectation des dons et legs dont l'établissement public administratif pourrait être bénéficiaire. |
Prélèvements sur le fonds de réserve |
Procédure de prélèvement sur les réserves constituées par le fonds afin d'équilibrer le budget de l'établissement. |
Dotation budgétaire de l'Etat |
Subvention inscrite au budget général destinée, le cas échéant, à équilibrer le fonds (financement du fonctionnement de l'établissement et des dépenses techniques si besoin). |
Le
b)
du III
du présent article précise que les taxes
instaurées par les articles 1609
vicies
, 1609
unvicies
et
1618
septdecies
du code général des
impôts
159(
*
)
sont
affectées au nouveau fonds de financement à compter du
1
er
janvier 2005.
En outre, le
c) du III
du présent article dispose qu'à
compter du 1
er
janvier 2004, une
quote-part du produit du
droit de consommation sur les tabacs
mentionné à l'article
575 du code général des impôts est affectée au
nouveau fonds de financement selon des modalités
déterminées chaque année en loi de finances.
Pour 2004,
ces modalités sont définies par l'article 24 du présent
projet de loi de finances qui fixe cette quote-part à 0,31 % du total
des droits, soit 30 millions d'euros environ. Il s'agit, en outre, de la
seule ressource du Fonds de financement des prestations sociales des
non-agricoles en 2004
.
(2) Les produits de gestion
Au titre des produits de gestion, le fonds reçoit deux types de
recettes :
- les produits financiers : contrairement à l'actuel budget annexe
des prestations sociales agricoles, le nouveau fonds de financement sera
autorisé à percevoir des recettes issues du placement de sa
trésorerie. En pratique, le fonds étant appelé à
emprunter pour financer son besoin de trésorerie lié au
décalage entre le calendrier d'encaissement des recettes et celui du
paiement des prestations, cette possibilité devrait être rarement
utilisée et ne concerner que le financement du budget de fonctionnement
du fonds ;
- d'une manière générale, toutes les recettes
autorisées par les lois et règlements.
(3) La possibilité de recourir à des ressources non permanentes
D'après les dispositions proposées par le présent article
pour l'article L. 731-6 du code rural, le fonds peut recourir à des
ressources non permanentes dans les conditions prévues au 5° du I
de l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale.
Cet article dispose que «
chaque année, la loi de
financement de la sécurité sociale fixe, pour chacun des
régimes obligatoires de base comptant plus de 20.000 cotisants actifs ou
retraités titulaires de droits propres, ou des organismes ayant pour
mission de concourir à leur financement qui peuvent légalement
recourir à des ressources non permanentes, les limites dans lesquelles
ses besoins de trésorerie peuvent être couverts par de telles
ressources
».
Ces ressources non permanentes font référence à
l'autorisation donnée par le Parlement à chacun des
régimes obligatoires de base de recourir à l'emprunt pour
financer leur besoin de trésorerie courante.
Le régime des exploitants agricoles est le second régime,
après le régime général, à
bénéficier de cette autorisation qui s'établit à
2.210 millions d'euros en 2003, et à 4.100 millions d'euros en 2004,
d'après les dispositions de l'article 59 du projet de loi de financement
de la sécurité sociale pour 2004.
b) La définition des dépenses du Fonds de financement des
prestations sociales des non-salariés agricoles
D'après les dispositions proposées par le présent article
pour l'article L. 731-5 du code rural, les dépenses prises en charge par
le nouveau fonds de financement sont de deux ordres : les dépenses
techniques du fonds et les charges et moyens de gestion du fonds.
(1) Les dépenses techniques
Les dépenses techniques du fonds recouvrent globalement celles qui
étaient financées par le budget annexe des prestations sociales
agricoles jusqu'à présent, mentionnées par l'actuel
article L. 731-5 du code rural.
Elles comprennent les éléments qui figurent dans le tableau
ci-dessous :
Liste des dépenses techniques à la charge du Fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles
Dépenses de prestations |
Versements destinés au paiement des différentes prestations servies par le fonds aux non-salariés agricoles (famille, maladie-maternité-invalidité, vieillesse, veuvage), à l'exception des majorations de pensions accordées en fonction du nombre d'enfants et des prestations de l'assurance vieillesse complémentaire obligatoire allouées en application des articles L. 732-56 à L. 732-62 et L. 762-35 à L. 762-39 du code rural. |
Participation financière de l'Etat prévue à l'article L. 732-58 du code rural |
Participation financière de l'Etat au financement du régime de retraite complémentaire obligatoire des non-salariés agricoles. |
Contributions du régime des exploitants agricoles à d'autres régimes |
Contributions du régime des non-salariés agricoles aux assurances sociales des étudiants et au régime d'assurance obligatoire des praticiens et auxiliaires médicaux conventionnés. |
Contribution aux dépenses relatives aux systèmes d'information de l'assurance maladie |
Contribution du régime des exploitants agricoles aux dépenses relatives aux systèmes d'information de l'assurance maladie prévus par l'ordonnance n° 96-345 du 24 avril 1996 relative à la maîtrise médicalisée des dépenses de soins. |
Charges financières |
Charges financières du fonds. |
Il faut
souligner que les dépenses liées à la prise en charge de
cotisations destinée à aider les agriculteurs en
difficulté ne figurent pas au sein des dépenses techniques du
nouveau fonds alors qu'elles faisaient partie des dépenses prises en
charge par le BAPSA. Au cours de la discussion du présent article
à l'Assemblée nationale, le ministre délégué
au budget et à la réforme budgétaire s'est engagé
à ce que ce type de dépenses continue d'être pris en charge
par le Fonds de financement des prestations sociales des non-salariés
agricoles.
(2) Les charges et moyens de gestion
Les dépenses de gestion du fonds comprennent les frais de fonctionnement
du conseil d'administration et de l'agence comptable du fonds.
Les charges de gestion de l'actuel budget annexe des prestations sociales
agricoles étaient couvertes par le ministère chargé de
l'agriculture.
(3) Les frais d'assiette et de recouvrement
D'après les dispositions proposées par le présent article
pour l'article L. 731-8 du code rural, les frais d'assiette et de
recouvrement des divers impôts, taxes et amendes affectés au fonds
sont à la charge de celui-ci en proportion du produit qui lui est
directement affecté. Leur montant est fixé par
arrêté du ministre chargé du budget et du ministre
chargé de l'agriculture dans la limite de 0,5 % de ce produit.
Dans le dispositif actuel, le BAPSA faisant partie du budget de l'Etat, les
frais d'assiette et de recouvrement ne lui sont pas imputés.
D'après les estimations disponibles, le montant des frais d'assiette et
de recouvrement pourrait s'élever à près de 27 millions
d'euros en 2004
160(
*
)
.
3. Suppression des dispositions relatives au BAPSA au sein du code rural
Par coordination avec les dispositions relatives à la création du
nouveau Fonds de financement des prestations sociales des non-salariés
agricoles, le présent article supprime les dispositions relatives au
budget annexe des prestations sociales agricoles au sein du code rural.
Ainsi, le
a) du II
du présent article abroge l'article L. 731-3
du code rural qui mentionnait les avances accordées par le Trésor
au BAPSA. Le
b) et
le
c) du II
du présent article visent
à remplacer, à chaque fois que cela est nécessaire, la
référence au BAPSA par celle au nouveau fonds.
Enfin, le
a) du III
du présent article dispose, par coordination,
que les articles 1003-1 à 1003-6, 1003-8 à 1003-10 et 1142-27 du
code rural (ancien) - articles relatifs à la création du BAPSA -
sont abrogés.
B. L'ANNÉE 2004 : UNE ANNÉE DE TRANSITION
1. Le BAPSA pour 2004 : dernier BAPSA de l'histoire
Le
f) du III
du présent article précise que les droits et
obligations de l'Etat au titre du BAPSA seront transférés au plus
tard le 31 décembre 2004 au Fonds de financement des prestations
sociales des non-salariés agricoles. Celui-ci est, en outre,
chargé des opérations de liquidation du budget annexe.
Le
d) du III
du présent article dispose que, nonobstant les
dispositions du I du présent article créant le Fonds de
financement des prestations sociales des non-salariés agricoles, le
budget annexe des prestations sociales agricoles continue de retracer les
opérations financières de la protection sociale des
non-salariés agricoles jusqu'au 31 décembre 2004 sur la base des
dispositions des articles L. 731-1 à L. 731-10 et L. 762-1-1 du code
rural en vigueur dans leur rédaction antérieure à celle
introduite par le présent projet de loi de finances.
2. Le financement de la mensualisation du versement des retraites des
non-salariés agricoles par le nouvel établissement public
dès 2004
a) Le principe de la mensualisation du versement des pensions de retraite
servies aux exploitants agricoles
(1) Les dispositions de la loi du 21 août 2003 portant réforme des
retraites
L'article 105 de la loi du 21 août 2003 portant réforme des
retraites
161(
*
)
a
inséré, dans le code rural, un nouvel article L. 732-55 disposant
que les pensions de retraite de base du régime d'assurance vieillesse
des personnes non-salariées des professions agricoles ainsi que leurs
majorations et accessoires sont payables mensuellement et à terme
échu dans des conditions fixées par décret, à
compter du 1
er
janvier 2004.
La question de la mise en place de la mensualisation des retraites agricoles,
indispensable notamment pour les petites retraites, évoquée de
longue date, avait fait l'objet, lors de la précédente
législature, d'une proposition de la caisse centrale de la
mutualité sociale agricole consistant à financer le passage
à la mensualisation par un emprunt à long terme. Le gouvernement
avait alors souligné qu'un financement de cette mesure par l'emprunt,
même s'il permettait d'étaler la charge financière, serait
plus coûteux que l'application immédiate et en une seule fois du
dispositif, chiffrée aujourd'hui à 1,4 milliard d'euros environ,
puisqu'il faudrait ajouter à la charge de l'emprunt le coût
cumulé des frais d'intérêt d'un montant de l'ordre de 30
à 35 millions d'euros par an.
Les modalités du passage à la mensualisation du versement des pensions de retraite des non-salariés agricoles
L'article 118 de la loi n° 2001-1275 du 28
décembre 2001
de finances pour 2002 prévoyait, pour sa part, la présentation au
Parlement par le gouvernement d'un rapport relatif à la mensualisation
des retraites des non-salariés agricoles avant le 1
er
avril
2002. Cet article n'avait toutefois pas été suivi d'effets.
D'après les informations fournies par l'actuel gouvernement, le passage
d'un versement trimestriel à un versement mensuel des pensions de
retraites implique, lors de la première année d'application, le
paiement, non de douze mensualités, mais de quatorze. Dès lors,
sur un montant total de 8,35 milliards d'euros, le surcoût serait
d'environ 1,4 milliard d'euros.
Dans le système actuel de versement trimestriel des pensions de
retraite, au premier trimestre, les mensualités de janvier,
février et mars sont versées début avril. Le passage
à une mensualisation du versement des retraites implique donc d'avancer
le versement de janvier au début du mois de février, et celui de
février au début du mois de mars. Il faut donc emprunter le mois
de janvier pendant deux mois et le mois de février pendant un mois. Ce
qui équivaut à emprunter trois fois une mensualité durant
le premier trimestre. La même opération se renouvelant les trois
trimestres suivants, il faut donc finalement emprunter douze mensualités
sur un mois, ce qui correspond à emprunter une mensualité sur un
an. La mensualité étant d'environ 700 millions d'euros, le
coût, avec un taux d'intérêt de 5 %, est de l'ordre de 30
à 35 millions d'euros.
Le BAPSA fonctionnant en comptabilité d'encaissement -
décaissement et devant être équilibré, il est
nécessaire de compenser la dépense supplémentaire de 1,4
milliard d'euros, correspondant à deux mensualités, par une
recette équivalente.
(2) Les conséquences de la mensualisation du versement des retraites de
base pour le BAPSA
Concrètement, le BAPSA devrait financer en 2004 l'équivalent de
douze mois de pensions de retraite versées aux exploitants agricoles.
Ses premiers versements interviendraient début janvier 2004 ; ils
correspondraient au 4
e
trimestre échu de l'année 2003.
Le BAPSA devra financer par la suite neuf mois de prestations, versées
mensuellement, un emprunt, dont les charges financières seront
supportées par le nouveau fonds de financement, permettant de financer
les deux mois supplémentaires à la charge du BAPSA.
Au total, le calendrier de versement des pensions de retraite aux
non-salariés agricoles devrait donc être le suivant :
Calendrier du versement des pensions de retraite aux exploitants agricoles en 2004
Mois |
janv |
févr (1) |
mars (1) |
avril |
mai |
juin |
juillet |
août |
sept |
oct |
nov |
déc |
Versements correspondants |
10/03 à 12/03 |
01/04 |
02/04 |
03/04 |
04/04 |
05/04 |
06/04 |
07/04 |
08/04 |
09/04 |
10/04 |
11/04 |
(1)
Les versements du mois de février et du mois de mars seront
financés par l'emprunt contracté par la Mutualité sociale
agricole pour le compte du Fonds de financement des prestations sociales
agricoles
b) Le financement de la mensualisation par le recours à l'emprunt
D'après les dispositions du
e) du III
du présent article,
le Fonds de financement des prestations sociales des non-salariés
agricoles assure le remboursement, à la caisse centrale de la
mutualité sociale agricole, des intérêts de l'emprunt
contracté en 2004 pour le financement de la mensualisation des retraites
des non-salariés agricoles. L'établissement reçoit
à ce titre une quote-part du produit du droit de consommation sur les
tabacs, fixée par l'article 24 du présent projet de loi de
finances à 0,31 %, soit environ 30 millions d'euros.
En effet, il est prévu qu'en 2004, le fonds de financement emprunte les
sommes nécessaires à la couverture du besoin de trésorerie
lié au financement de deux mois de prestations supplémentaires
par l'intermédiaire de la MSA (le décalage entre le besoin
immédiat de financement et le délai nécessaire à la
création du fonds nécessitant de recourir à cette solution
transitoire), dans la limite de l'autorisation fixée par l'article 59 du
projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004.
En 2004, le besoin de financement supplémentaire lié à la
mise en oeuvre de la mensualisation par le fonds est en fait de 1.320 millions
d'euros, soit deux mois de prestations versées.
L'article 59 du projet de loi de financement de la sécurité
sociale pour 2004 prévoit, pour le régime des exploitants
agricoles, une autorisation de recourir à des ressources non permanentes
d'un montant de 4.100 millions d'euros, dont 2.100 millions d'euros au titre
des besoins courants du BAPSA et 1.400 millions d'euros au titre des besoins de
financement du fonds, liés à la mise en place de la
mensualisation des retraites agricoles. La charge financière des
emprunts est estimée respectivement à 61 millions d'euros et 30
millions d'euros.
III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
L'Assemblée nationale a apporté plusieurs modifications, d'ordre
avant tout technique, au présent article.
Elle a tout d'abord adopté un amendement présenté par le
gouvernement visant à préciser que les recettes et
dépenses du Fonds de financement des prestations sociales des
non-salariés agricoles sont retracées dans les comptes de
l'établissement public administratif dénommé
« Etablissement de gestion du Fonds de financement des prestations
sociales des non-salariés agricoles », créé
à cet effet. Cet établissement est soumis au contrôle de
l'Etat. Il s'agit d'une
précision technique qui vise à faire
apparaître dans les comptes de l'établissement public, à
des fins de transparence, les recettes et dépenses du fonds de
financement
.
L'Assemblée nationale a également adopté un amendement de
notre collègue député Yves Censi, rapporteur
spécial des crédits du BAPSA, visant à préciser que
le président du conseil d'administration de l'établissement
public est nommé par le ministre chargé de l'agriculture
et
que
la présidence du conseil de surveillance de
l'établissement est confiée à un membre du Parlement
.
Cette modification a pour but, d'une part, de réaffirmer le rôle
du ministre chargé de l'agriculture dans la conduite de la politique
sociale agricole, d'autre part, de permettre au Parlement de continuer à
suivre de près la question du financement de la protection sociale
agricole.
Enfin, l'Assemblée nationale a adopté un ensemble d'amendements
de nature rédactionnelle, présentés par notre
collègue député Gilles Carrez, rapporteur
général du budget.
IV. LA POSITION VOTRE COMMISSION DES FINANCES
A. DES PRINCIPES FONDATEURS À RESPECTER
1. Le maintien de la spécificité du régime social
agricole
L'actuel mode de financement des prestations sociales des non-salariés
agricoles est caractérisé par
une gestion mutualiste et de
proximité
. Votre rapporteur général estime que ces
deux principes fondateurs doivent demeurer à la base du fonctionnement
du nouveau fonds de financement.
Les dispositions du présent article ne semblent pas remettre en cause
ces principes puisqu'elles ne modifient pas les dispositions
législatives relatives au fonctionnement des caisses de mutualité
sociale agricole.
Ainsi, le principe de démocratie locale et la gestion par les caisses
départementales du régime social des agriculteurs ne sont pas
menacés par le nouveau mode de financement des prestations sociales
agricoles.
En outre, le rôle de la Caisse centrale de la mutualité sociale
agricole est conservé et le Conseil supérieur des prestations
sociales agricoles sera maintenu, voire renforcé si le rôle du
comité de surveillance du nouvel établissement public lui est
confié comme l'attestent les informations recueillies par votre
rapporteur général auprès des services du ministère
de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.
Enfin, le rôle du ministre chargé de l'agriculture devrait
également être maintenu, puisque ce dernier est responsable de
l'élaboration de la politique sociale agricole du régime des
salariés et des non-salariés, d'après les dispositions de
l'article L. 721-1 du code rural. Un amendement adopté par
l'Assemblée nationale a d'ailleurs permis de renforcer le rôle du
ministre chargé de l'agriculture en précisant au sein du
présent article que le président du conseil d'administration de
l'établissement public est nommé par lui.
2. La nécessité du maintien d'un débat parlementaire
Avec la disparition du budget annexe des prestations sociales agricoles, le
risque de voir disparaître un débat parlementaire
spécifique sur le régime de protection sociale des
non-salariés agricoles existe. Tel ne doit pas être le cas.
Plusieurs vecteurs peuvent être envisagés pour permettre au
débat parlementaire de s'exprimer sur cette question
.
D'abord, le
vote d'une dotation budgétaire de l'Etat
destinée, le cas échéant, à équilibrer le
fonds, devrait permettre au débat parlementaire de se développer
au sein de la discussion budgétaire.
Ensuite, il faut noter que, à compter de 2006 et en application des
dispositions de la loi organique du 1
er
août 2001 relative aux
lois de finances, le ministère de l'agriculture envisage la
constitution d'un programme consacré à la protection sociale
agricole
.
Enfin, il est possible d'envisager qu'au cours de l'examen du
projet de loi
de financement de la sécurité sociale
par le Parlement, un
débat spécifique au financement de la protection sociale agricole
soit organisé.
B. LA QUESTION DE LA PÉRENNITÉ ET DE LA FIABILITÉ
DES RESSOURCES AFFECTÉES AU NOUVEAU FONDS DE FINANCEMENT
Le présent article combiné aux dispositions de l'article 25
du présent projet de loi de finances modifie profondément la
structure de financement du régime de protection sociale des
non-salariés agricoles, d'une part, en supprimant l'affectation d'une
fraction du produit de la TVA à ce régime, d'autre part, en
faisant des recettes issues des droits tabacs (taxe sur les tabacs
fabriqués et droit de consommation sur les tabacs) une des principales
sources de financement du régime.
Si ces dispositions participent à la nécessaire clarification
des relations financières entre l'Etat et les régimes de
sécurité sociale, il est à craindre qu'elles ne
contribuent, à terme, à fragiliser le financement de la
protection sociale agricole
.
La recette issue de la TVA constituait en effet une recette stable, ayant une
évolution régulière. En revanche, les recettes issues des
droits sur les tabacs pourraient à l'avenir poser un problème de
fiabilité et de rendement, dans la mesure où le produit attendu
des hausses successives de ces droits est aléatoire, compte tenu
notamment de l'objectif de santé publique de baisse de la consommation
qui lui est associé, et du développement manifeste d'un
marché parallèle des cigarettes en France.
A titre d'exemple, le rapport de la commission des comptes de la
sécurité sociale de septembre 2003 a mis en évidence le
caractère aléatoire du rendement des droits sur la consommation
des tabacs en soulignant que «
la croissance du rendement des
prélèvements sur le tabac en 2003 se révèle
très inférieure à celle qui était prévue
dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003
(...). Alors que la hausse prévue des droits sur les tabacs était
de 1 milliard d'euros, le rendement ne devrait être que de 200 millions
d'euros, soit une perte de recettes de 800 millions d'euros par rapport
à la prévision
».
La nécessité d'une réflexion sur l'évolution des
recettes affectées au financement de la protection sociale des
non-salariés agricoles ne semble donc pas être
épuisée.
En outre,
le nouveau fonds de financement demeure destinataire d'une
éventuelle dotation budgétaire de l'Etat destinée, le cas
échéant, à équilibrer le fonds
, au même
titre que le BAPSA était destinataire d'une subvention budgétaire
d'équilibre.
Pour 2004, le fonds n'étant destinataire que de la quote-part du produit
des droits de consommation sur les tabacs, définie par le c) du III du
présent article, la question de la dotation budgétaire de l'Etat
au fonds ne se pose pas. En revanche, il faut souligner que le BAPSA ne sera
destinataire en 2004 d'aucune subvention budgétaire alors qu'il avait
reçu à ce titre 522,7 millions d'euros en 2003, 560,2
millions d'euros en 2002 et 823,7 millions d'euros en 2001.
La volonté du gouvernement semble donc être aujourd'hui de
financer le nouveau fonds avant tout par des taxes affectées, les
cotisations des assujettis ainsi que les traditionnels transferts de
compensation en provenance des autres organismes de sécurité
sociale,
la dotation budgétaire faisant office de solution d'urgence
en cas de déséquilibre durable
.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter cet article sans modification.