II. LE COÛT DE LA DETTE

Le coût de la dette est la résultante d'un effet-volume, qui tient donc à l'accroissement du volume de la dette, et d'un effet-prix correspondant à l'évolution du taux moyen d'intérêt, applicable à cette dette. Il semble que les effets de la baisse des taux s'épuisent progressivement.

La décomposition en « effet-taux » et « effet-volume » de l'augmentation annuelle de la charge de la dette

1. Principe de la décomposition

Un exemple fictif fera comprendre le principe de la décomposition.

Supposons que l'Etat emprunte au cours d'une année 100 milliards d'euros au taux de 5 %. Ces 100 milliards permettent de financer un déficit budgétaire de 40 milliards et de refinancer 60 milliards d'emprunts anciens arrivés à échéance et qui avaient été émis il y a dix ans au taux de 9 %.

L'accroissement en volume du stock de la dette est de 40 milliards, auquel s'applique le taux de 5 %.

L'effet-volume est donc égal à 40 x 5 % = 2 milliards.

Les 60 autres milliards empruntés ne servent qu'à refinancer des emprunts anciens arrivés à échéance, mais à un coût plus faible de 4 % = (9 % - 5 %).

L'effet-volume est donc égal à 60 x (- 4 %) = - 2,4 milliards.

Au total le stock de la dette a augmenté de 40 milliards, mais la charge de la dette a diminué de - 2,4 + 2 = - 0,4 milliard.

2. Application à la charge de la dette en 2001

La charge nette de la dette négociable a augmenté de 8,2 milliards de francs en 2001. Sa décomposition entre « effet-volume » et « effet-taux » est perturbée à la marge par l'existence d'un troisième type d'effet, dit « effet calendaire » tenant à des reports de charges d'une année sur l'autre.

OAT

BTAN

BTF

Total

Effet-taux

- 2,58

- 1,75

- 0,98

- 5,31

Effet-volume

+ 8,18

- 0,05

+ 2,64

+ 10,77

Effets calendaires

+ 2,19

+ 0,55

-

+ 2,74

Total augmentation de la charge

+ 7,79

- 1,25

+ 1,66

+ 8,20

L'augmentation de 8,2 milliards de la charge nette de la dette négociable entre 2000 et 2001 peut être décomposée en :

- un alourdissement de 10,8 milliards de francs lié à un « effet-volume » imputable à hauteur de 8,2 milliards aux OAT émises en 2000 et dont la première échéance a été payée en 2001 et à hauteur de 2,6 milliards de BTF. La dette a en effet augmenté en volume de 156 milliards en 2000 des OAT et celle des BTF de 162,8 milliards en 2001 ; la dette due aux BTAN est restée stable ;

- un « effet-taux » favorable de - 5,3 milliards de francs qui concerne tous les compartiments. Le gain sur les taux d'intérêt est surtout élevé pour les OAT (le taux moyen des 98 milliards d'OAT refinancés en 2000 est tombé de 7,52 % avant refinancement à 4,89 % après refinancement, soit un gain de - 2,63 %). Le gain en taux moyen avant et après refinancement pour les BTAN n'est que de - 0,6 %, mais le volume refinancé s'élève à 282 milliards d'où une réduction de charge de - 1,75 milliard de francs. Enfin le gain de taux pour les BTF est de - 0,34% , du fait de la baisse des taux courts en 2001 ; il engendre un effet-taux de - 0,98 milliard de francs;

- un alourdissement de 2,7 milliards de francs de la charge nette dans l'année des opérations de l'année et tenant pour l'essentiel à des effets calendaires.

En conclusion en 2001, l'effet-taux négatif a compensé 50 % de l'effet-volume positif.

L'évolution des taux à l'émission au cours des dernières années et des derniers mois a en effet été particulièrement favorable pour la charge de la dette, comme le montrent les graphiques suivants.

Évolution des taux à court et long terme des titres de dette de l'Etat.

Le bleu budgétaire prévoit pour les prochains mois une remontée des taux par rapport à la conjoncture favorable connue au cours des dernières années, mais cette remontée correspond à la situation économique telle qu'elle était prévue en août 2002 puisque depuis 1995 le gouvernement a pris la bonne décision : s'en tenir strictement en matière de taux d'intérêt à la prévision du « consensus » des économistes. Il n'est évidemment pas impossible qu'une baisse éventuelle des taux à court terme qui serait décidée par la BCE conduise à une diminution du taux à trois mois en 2003.

Prévision des taux d'intérêt dans le bleu « charges communes »

Fin 2000

Fin 2001

2002

consensus forecast des économistes
(août 2002)

2003

consensus forecast des économistes
(août 2002)

Taux à 3 mois

4,86%

3,29%

3,4%

3,9%

Taux à 10 ans

5,00%

5,07%

5,0%

5,3%

L'effet des taux sur la charge budgétaire de la dette n'est néanmoins ni univoque, ni immédiat. Il dépend de la structure de la dette de l'Etat et de la maturité des divers titres.

Pour les BTF, l'évolution des taux de marché se répercute immédiatement sur la charge budgétaire des émissions.

Pour les BTAN, l'impact est en majeur partie différé. Certes, les lignes nouvellement créées le sont à des taux reflétant la situation du marché. Mais, en terme de charge budgétaire, ceci n'apparaît vraiment que l'année suivante, avec le passage en « année pleine » (l'année d'émission, la charge est surtout dépendante des phénomènes calendaires). Par ailleurs, une partie des émissions de l'année se substitue aux remboursements : ce qui importe alors pour l'évolution de la charge de la dette est moins le niveau des taux sur les lignes émises que l'écart avec celui des lignes échues.

Pour les OAT, on retrouve, amplifié, le même phénomène que pour les BTAN (c'est ainsi qu'une OAT dix ans émise en 1992 au taux fixe de 8,5% et arrivant à échéance en 2003 sera remboursée grâce à l'émission d'une nouvelle OAT dix ans émise à un taux fixe à 5,3 % ; le gain en terme de taux d'intérêt est donc égal à (8,5% - 5,3 %) = 3,2%). S'y ajoute l'impact supplémentaire, pour la partie pérenne de la dette, des taux variables. Mais, là-encore, un décalage existe entre la situation du marché et sa traduction sur la charge budgétaire : pour les lignes « TEC 10 », qui représentent l'essentiel des lignes à taux variable, l'intérêt est payé tous les trois mois, et calculé à partir du taux observé à la fin de la période d'intérêts précédente.

L'indice lié à la charge de la dette pourrait ainsi reprendre progressivement à partir de 2003 une évolution plus pentue, plus proche de celui du stock de la dette.

Évolution de la charge nette de la dette

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