III. RÉFORMER L'ÉTAT POUR UNE MEILLEURE EFFICIENCE DE LA DÉPENSE PUBLIQUE
L'administration s'est modernisée au cours des quinze dernières années. L'accueil du public a été amélioré, un grand nombre de formalités ont été allégées. L'Etat a su montrer la voie de l'investissement dans les nouvelles technologies.
S'il y a eu modernisation de l'Etat, il n'y a pas eu pourtant de véritable réforme de l'Etat. Les actions menées se sont préoccupées des gestionnaires des services publics souvent, des usagers des services publics parfois, du citoyen-contribuable trop rarement. La logique d'efficacité a pu être présente dans la modernisation de l'administration, la logique d'efficience 62 ( * ) en a été trop fréquemment absente.
Or, compte tenu du poids des dépenses publiques aujourd'hui, et de la nécessité de réduire les déficits publics, l'enjeu de toute la politique du gouvernement résidera dans le renforcement de la productivité de la dépense publique, et en particulier de la « dépense fonction publique ». Il faut donc passer d'une préoccupation d'efficacité, dont les résultats n'ont pas pu être pleinement mesurés, à un impératif d'efficience de l'action publique. Le « toujours plus » a montré sa perversité, la priorité est désormais à la gestion par objectifs. La qualité du service rendu en est un, et ne peut être évaluée qu'en rapport avec les coûts engendrés.
Pour rendre la dépense publique plus productive, les marges de manoeuvre et les outils existent. L'ambition du gouvernement ne manque pas et les premiers exemples d'une voie à suivre apparaissent déjà.
A. « L'ARDENTE OBLIGATION » DE LA RÉFORME DE L'ÉTAT
1. Ériger la réforme en loi du service public
Trop longtemps négligées, la réforme de l'Etat, et son corollaire, la recherche d'une meilleure efficience de l'action publique, sont pourtant inscrites dans les grandes lois du service public forgées dès le XIX eme siècle. En ce sens, la réforme de l'Etat constitue un retour aux sources mêmes du service public. La mutabilité constitue en effet un principe fondamental du « service public ».
Il faut rappeler que la doctrine administrative distingue traditionnellement trois critères, ou « lois du service public » : il s'agit de la continuité, de l'égalité de tous devant le service et de la mutabilité (« la possibilité de modifier le régime du service »).
L'intérêt général varie avec le
temps et le régime des services publics doit pouvoir évoluer
selon ses exigences. Dès lors, ni les agents, ni les usagers, ne peuvent
se prévaloir d'un droit acquis au maintien du statut en vigueur au
moment où ils sont entrés en relations avec le service. Les
hausses de tarifs sont immédiatement applicables aux usagers, même
lorsqu'ils sont liés au service par un contrat d'abonnement, sous
réserve du respect du principe de non-rétroactivité. Les
agents subissent immédiatement tous les changements apportés
à leur statut ; ils peuvent, en théorie, être
licenciés en cas de suppression ou de réorganisation du service
faisant disparaître leur emploi. Quant aux cocontractants de
l'administration, ils sont assujettis au pouvoir de modification
unilatérale de leurs obligations par l'administration, avec la
contrepartie pécuniaire dont la théorie du fait du prince pose le
principe.
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* 62 La mesure de l'efficience se fait en rapportant l'impact des politiques publiques aux moyens mis en oeuvre ; on la distingue ainsi de l'efficacité, dont la mesure est le rapport entre l'impact des politiques publiques et les objectifs fixés. L'administration peut ainsi gagner en efficacité sans forcément gagner en efficience.