B. UN LOURD TRAVAIL PRÉPARATOIRE POUR LES ADMINISTRATIONS CENTRALES ET LES SERVICES DÉCONCENTRÉS DE L'ÉTAT
1. Un immense chantier pour l'administration
La
nouvelle loi organique relative aux lois de finances ne constitue pas, pour les
administrations, une perspective lointaine mais, bien au contraire, se situe au
premier rang de leurs préoccupations. C'est pourquoi votre rapporteur
général, conscient de l'ampleur du chantier ouvert pour les
quatre années à venir, souhaite en esquisser quelques volets. Il
se réjouit d'ailleurs de la mise en place, sous l'égide de la
direction du budget et de la délégation interministérielle
à la réforme de l'État, de groupes de travail, de la
parution d'une lettre relative à la « Nouvelle gestion
publique », de l'ouverture d'un site Internet dédié, de
l'organisation des premiers colloques destinés tout à la fois
à mobiliser les acteurs, à envisager l'ensemble des champs du
travail et à évoquer les inquiétudes suscitées par
la réforme.
Un des volets les plus urgents réside certainement dans la
définition précise des nouveaux concepts. Si les travaux
préparatoires de la loi organique offrent le cadre de
référence, il apparaît qu'il est parfois difficile de
passer des concepts à leur mise en place effective. Les contours des
missions et des programmes, la réflexion sur les indicateurs, la
définition de la performance constituent autant de sujets de
réflexion actuellement pour les gestionnaires de crédits. Les
parlementaires ont largement fait part de leurs idées sur ces termes,
mais il reste à leur donner corps. De ce point de vue,
l'expérience menée dans le cadre du projet de loi de finances
2002 de présenter les crédits relatifs à la charge de la
dette publique sous forme de programme constitue une initiative
intéressante.
D'autres questions surgissent, plus floues ou qui avaient été
abordées au cours du débat et laissées de
côté car sans conséquence normative dans la loi organique
elle-même. Le lien entre la loi organique et la gestion des ressources
humaines dans l'administration, la question de la sanction -positive ou
négative- du respect des objectifs, la réflexion sur l'avenir du
contrôle financier (et donc de l'actualité de la loi de 1922 qui
l'établit), l'aspect précis de la nomenclature infra-programme,
l'articulation des objectifs des programmes avec d'éventuels
sous-objectifs et actions, la mise en oeuvre de la réforme au niveau
déconcentré sont autant de questions importantes qui se posent
désormais aux administrations. Or, force est de constater que chacune ne
se trouve pas au même stade d'avancement de ses travaux.
Il convient
ainsi que le gouvernement veille à ce que les administrations les moins
engagées dans ce processus n'accusent pas un retard trop important
.
2. L'indispensable réforme comptable et patrimoniale
Les
réformes comptables ne constituent pas le chantier le moins important de
ce point de vue. Si l'expérimentation du logiciel comptable ACCORD
fournit une bonne base pour étudier des développements futurs, le
travail à réaliser, ne serait-ce que d'un point de vue technique,
impressionne. Et pourtant, il s'agit ici de la clef de la réussite de la
réforme : sans comptabilité d'engagement, l'objectif de
transparence ne sera pas atteint ; sans comptabilités analytiques,
l'objectif de budgétisation orientée vers les résultats
restera un voeu pieux.
De la même façon une attention
très soutenue doit être apportée à la
comptabilité patrimoniale :
sans elle en effet l'objectif
d'image fidèle des comptes de l'Etat se limitera désormais
à de beaux discours. Le travail commence certainement par la mise en
place d'un référentiel comptable. Votre rapporteur
général se réjouit d'ailleurs de ce que le présent
projet de loi de finances contienne les dispositions législatives
nécessaires à l'élaboration de ce
référentiel.
Il importe aussi, de ce point de vue comme sur d'autres sujets comme la
certification des comptes par exemple, que la Cour des comptes
accélère sa réflexion sur les conséquences de la
réforme de la loi organique du point de vue de ses moyens, de son
organisation et de ses méthodes de travail.
Enfin, au-delà de ces aspects, la réforme de l'ordonnance
organique doit avoir une double traduction concrète immédiate.
La première traduction devra rapidement se voir dans les
premières dispositions applicables. Il conviendra ainsi d'arrêter
d'ici à l'été 2002 le nouveau mode de dépôt
des disponibilités des collectivités locales. Il conviendra
également, dès le projet de loi de finances pour 2003, de
commencer le travail de transition en matière de taxes parafiscales.
La seconde traduction est plus délicate, mais au moins aussi importante.
Elle concerne l'esprit même de la loi et les changements de comportements
qu'elle devrait provoquer. La dénonciation de l'obscurité et de
la complexité des comptes était commune. Il en va de même
pour l'analyse des relations, en matière budgétaire, entre le
Parlement et les services du ministère des finances, entre ce dernier et
les ministères gestionnaires, entre le Parlement et la Cour des comptes,
etc. Occasion de dialoguer dans un esprit républicain, occasion aussi de
remettre à plat des procédures et manières de travailler
vieilles de plusieurs décennies, la nouvelle loi organique doit
inaugurer un esprit nouveau dans le travail budgétaire, gage de plus
d'efficacité et de démocratie. Votre rapporteur
général espère que, trois mois après la publication
du nouveau texte organique, les vieilles habitudes n'ont pas déjà
repris le dessus.