B. AMÉLIORER LE RÈGLEMENT DES LITIGES EN RESPONSABILITÉ MÉDICALE
Dans un second volet, la proposition de loi entend faciliter le règlement des litiges survenant à l'occasion d'un dommage fautif.
1. La réforme de l'expertise médicale
Passage obligé de la victime, quel que soit le régime de responsabilité, l'expertise médicale comporte aujourd'hui de graves lacunes. Elle est de plus en plus contestée.
L'expertise constitue la seule voie permettant à la victime d'établir la survenance de l'événement générateur de l'accident individuel fautif ou non fautif. Cette mesure d'investigation, ordonnée dans la quasi-totalité des cas en référé, suppose, pour présenter des garanties d'objectivité élémentaires, qu'elle soit conduite par des professionnels dont l'indépendance professionnelle, la compétence et la neutralité scientifiques ne puissent être mises en doute.
Or, les travaux effectués par la mission conjointe IGAS-IGSJ ont montré que l'indépendance ou la compétence technique des experts n'étaient pas toujours garanties par les modes actuels de sélection, ni contrôlées avec une suffisante vigilance 9 ( * ) .
La mission IGAS-IGSJ souligne à cet égard que " la mise en place de structures d'expertise offrant de réelles garanties de compétence et d'indépendance passe par la désignation, en amont de toute procédure juridictionnelle, d'un collège d'experts agréés par les parties. "
C'est précisément ce que prévoit la proposition de loi qui institue un Collège de l'expertise en responsabilité médicale , composé de magistrats des deux ordres de juridiction, de représentants de la Conférence des doyens, du Conseil national de l'ordre des médecins, des associations de malades et de personnalités qualifiées, chargé d'établir une liste nationale des médecins experts.
L'inscription sur cette liste vaudrait pour une durée renouvelable de cinq ans. Le Collège pourrait, après une procédure contradictoire, radier de la liste un expert dont les qualités professionnelles se seraient révélées insuffisantes ou qui aurait manqué à ses obligations déontologiques ou d'indépendance.
2. L'institution d'une commission régionale de conciliation
La proposition de loi institue dans chaque région une commission régionale de conciliation ayant pour mission de faciliter le règlement amiable des litiges entre usagers du système de soins et les professionnels et établissements de santé.
Cette commission est destinée à favoriser des solutions rapides aux difficultés rencontrées par les patients dans leur accès au système de santé.
Au-delà de sa mission de conciliation, la commission peut aussi, avec l'accord des parties -le patient, d'une part, et le médecin, l'établissement de santé public ou privé ou leur assureur, d'autre part- rendre des sentences arbitrales.
Le recours à cette commission de conciliation n'est qu'une possibilité offerte aux différentes parties : elle n'est en rien un passage obligé pour une éventuelle procédure contentieuse.
3. L'obligation d'assurance en responsabilité pour les médecins, les sages-femmes et les établissements de santé
Enfin, la proposition de loi rend obligatoire la souscription d'assurances professionnelles pour les médecins, les sages-femmes et les établissements de santé.
Ceux-ci doivent en effet toujours être en mesure de répondre, par l'intermédiaire de leur assurance, des conséquences de leurs actes fautifs, ou même non fautifs lorsqu'est prévue une responsabilité sans faute, comme c'est le cas pour les infections nosocomiales.
L'assurance de responsabilité est destinée à garantir la responsabilité du souscripteur pour les risques engendrés par son activité professionnelle. S'agissant des médecins et des établissements de santé, elle couvre aussi bien leur responsabilité contractuelle que délictuelle.
D'une manière générale, le caractère obligatoire de l'assurance de responsabilité professionnelle permettra d'en limiter les exclusions et d'offrir un cadre élargi pour le marché de l'assurance médicale. Dans le système de santé, seules existent actuellement des obligations d'assurance pour la recherche biomédicale et pour les établissements de transfusion sanguine, au profit des donneurs.
L'obligation d'assurance améliorera globalement la protection des patients qui ne pourront courir le risque d'une insolvabilité du médecin jugé responsable d'un accident médical.
Le dispositif devrait naturellement comporter, comme pour les autres assurances obligatoires, un bureau commun de tarification destiné à fixer le tarif de la couverture des professionnels à haut risque.
* 9 On rappellera à cet égard que la Fédération nationale des compagnies d'experts judiciaires avait formulé dès 1999, à la demande de la Chancellerie, des propositions de réforme de l'expertise judiciaire, propositions qui , à ce jour, sont restées lettre morte.