Date d'expiration des pouvoirs de l'Assemblée nationale
BONNET (Christian)
RAPPORT 242 (2000-2001) - Commission mixte paritaire
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Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale
Annexe au procès-verbal de la séance du 29 mars 20010.
le 29 mars 2001.
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION MIXTE PARITAIRE (1) CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS RESTANT EN DISCUSSION DE LA PROPOSITION DE LOI ORGANIQUE modifiant la date d'expiration des pouvoirs de l' Assemblée nationale,
PAR M.
BERNARD ROMAN, PAR M.CHRISTIAN BONNET,
Député. Sénateur.
(1)
Cette commission est composée de
: M. Gérard
Gouzes, député,
président ;
M. Jacques
Larché, sénateur
, vice-président
;
M. Bernard Roman, député ;
M. Christian
Bonnet, sénateur,
rapporteurs.
Membres titulaires
: MM. Jean-Yves Caullet, Michel Hunault,
Renaud Donnedieu de Vabres, Jacques Brunhes, Jean-Pierre Michel,
députés
; MM. Patrice Gélard, Pierre
Fauchon, Paul Girod, Simon Sutour, Mme Nicole Borvo,
sénateurs.
Membres suppléants
: MM. Jacques Floch,
Jérôme Lambert, Mme Nicole Feidt, MM. André
Vallini, René Dosière, Patrick Devedjian, Dominique Bussereau,
députés
; MM. Robert Badinter, Jean-Pierre Bel,
Guy-Pierre Cabanel, Jean-Patrick Courtois, Jean-Jacques Hyest, Lucien Lanier,
Henri de Richemont,
sénateurs.
Voir les numéros :
Assemblée nationale
:
2602, 2665, 2741, 2757, 2773, 2791
et T.A.
600.
Sénat
:
166, 186
et T.A.
61
(2000-2001).
Élections et référendums.
MESDAMES, MESSIEURS,
La commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les
dispositions restant en discussion de la proposition de loi organique modifiant
la date d'expiration des pouvoirs de l'Assemblée nationale s'est
réunie le 29 mars 2001 à l'Assemblée nationale.
Elle a tout d'abord procédé à la nomination de son bureau
qui a été ainsi constitué :
-- M. Gérard Gouzes, député,
président ;
-- M. Jacques Larché, sénateur, vice-président.
La Commission a ensuite désigné M. Bernard Roman,
député, et M. Christian Bonnet, sénateur,
respectivement rapporteurs pour l'Assemblée nationale et le Sénat.
Avant que la commission mixte paritaire ne procède à l'examen des
dispositions restant en discussion, souhaitant faire une déclaration
préalable,
M. Jacques Larché, vice-président,
a indiqué que les sénateurs avaient pris acte de la
décision de l'Assemblée nationale de convoquer une commission
mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion de la proposition de
loi organique modifiant la date d'expiration des pouvoirs de l'Assemblée
nationale. Il a précisé, toutefois, qu'ils n'avaient
répondu à cette invitation que par simple courtoisie. Il a
considéré, en effet, que cette proposition de loi, telle qu'elle
ressortait de la première lecture, était à ce stade
relative au Sénat, compte tenu des modifications apportées au
texte initial, et qu'elle devait, en conséquence, être
votée dans les mêmes termes par les deux assemblées, en
application de l'article 46, alinéa 4, de la Constitution. Il
a, ensuite, précisé que cette interprétation ne
conférait pas au Sénat une sorte de droit de veto, qui lui
permettrait, le cas échéant, de faire obstacle à
l'adoption de tout texte organique, dès lors que le Gouvernement pouvait
s'opposer à l'adoption d'amendements en usant de la procédure
dite du « vote bloqué » prévue par
l'article 44, alinéa 3, de la Constitution. Il a
rappelé, à cet égard, que le précédent garde
des Sceaux, Mme Elisabeth Guigou, avait déjà recouru
à cette procédure devant le Sénat. Constatant que cette
procédure n'avait pas été ici mise en oeuvre à
l'occasion de la première lecture, il a considéré qu'il ne
lui appartenait pas d'apprécier les raisons de ce choix, mais simplement
d'en tirer les conséquences en demandant que cette proposition de loi
fasse désormais l'objet d'un examen en deuxième lecture avant
toute réunion d'une commission mixte paritaire. Il a indiqué
qu'en toute hypothèse, cette loi, comme toutes les lois organiques, ne
pourrait être promulguée qu'après déclaration par le
Conseil constitutionnel de sa conformité avec la Constitution. Il a
rappelé que celui-ci portait une attention particulière au
respect des procédures d'adoption des lois organiques et, dans ce
contexte, il a réaffirmé solennellement qu'il contestait le bien
fondé de la réunion d'une commission mixte paritaire à ce
stade de la navette. Il a conclu son propos en précisant qu'il revenait
au Gouvernement d'inscrire la proposition de loi à l'ordre du jour de
l'Assemblée nationale puis du Sénat, pour une deuxième
lecture et d'utiliser, le cas échéant, la procédure de
vote bloqué pour faire en sorte que la proposition de loi ne soit pas
relative au Sénat à l'issue de cette deuxième lecture s'il
souhaitait réunir la commission mixte paritaire.
M. Gérard Gouzes, président,
a rappelé que,
conformément aux prérogatives qu'il tient de l'article 45,
alinéa 2 de la Constitution, le Gouvernement avait provoqué
la réunion de cette commission mixte paritaire, dont l'objet porte
effectivement sur les dispositions restant en discussion de la proposition de
loi organique relative à l'expiration des pouvoirs de l'Assemblée
nationale.
M. Bernard Roman, rapporteur pour l'Assemblée nationale,
a
jugé légitime que M. Jacques Larché exprime son
analyse constitutionnelle et a pris acte du fait que celui-ci
considérait que la réunion qui se tenait était une
« commission mixte paritaire virtuelle ». Il a
constaté que le président de la commission des Lois du
Sénat venait, lui-même, d'admettre, du moins implicitement, que le
Sénat, par la simple introduction d'un amendement le concernant, dans un
projet ou une proposition de loi organique, pouvait s'accorder le pouvoir de
faire obstacle à son adoption. Tout en reconnaissant que le Gouvernement
avait la faculté de s'opposer à cette manoeuvre en recourant
à la procédure du vote bloqué pour empêcher
l'adoption d'un tel amendement - la mise en oeuvre de cette faculté
par la précédente garde des Sceaux, rappelée par
M. Jacques Larché, ayant d'ailleurs été fort peu
appréciée par les sénateurs -, il a cependant
estimé que l'on ne pouvait subordonner le pouvoir constitutionnel du
Gouvernement de convoquer une commission mixte paritaire à l'exercice
par celui-ci d'une autre de ses prérogatives, en l'espèce le
recours au vote bloqué.
Le rapporteur pour l'Assemblée nationale a alors insisté sur le
fait que la question essentielle consistait à établir clairement
à quelle étape de la procédure il convenait
d'apprécier si un texte organique était ou non relatif au
Sénat. Il a constaté que la lettre même de
l'article 46 de la Constitution apportait une réponse indiscutable
à cette question, observant que cet article faisait mention des
« lois organiques » et non des
« projets » ou des « propositions » de
loi organique. Il a donc considéré que c'était au stade de
la dernière lecture, lorsque le texte est devenu définitif, qu'il
convenait d'apprécier si la loi organique est ou non relative au
Sénat. Il a renforcé cette argumentation textuelle en soulignant
que l'article 45 de la Constitution, relatif à la navette
parlementaire, faisait, au contraire, mention de « texte »,
sans que le terme de loi ne soit jamais employé. Il en a conclu que,
tant que la navette n'était pas terminée, le texte en discussion
ne pouvait, à l'évidence, être considéré
comme une loi, seul le vote ultime lui conférant cette qualité.
Enfin, il a souligné que cette interprétation était seule
conforme à l'esprit du texte constitutionnel, l'article 46,
alinéa 4, qui n'édicte d'ailleurs aucune règle de
procédure, n'ayant d'autre objet que de garantir que le Sénat ne
soit pas régi par des normes de valeur organique qu'il n'aurait pas
votées.
M. Christian Bonnet, rapporteur pour le Sénat
, a exprimé
son entier accord sur l'analyse juridique formulée dans son propos
introductif par M. Jacques Larché.
A l'issue d'une suspension de séance demandée par la
délégation du Sénat,
M. Jacques Larché,
vice-président,
a souligné que jamais une commission mixte
paritaire ne s'était réunie pour examiner les dispositions
restant en discussion d'un texte pour lequel la Constitution exigeait un vote
conforme des deux assemblées, c'est-à-dire pour un projet ou une
proposition de loi constitutionnelle ou un projet ou une proposition de loi
organique relative au Sénat. Il a évoqué, à cet
égard, l'exemple récent du projet de loi organique limitant le
cumul des mandats.
Faisant valoir que la Constitution confiait l'initiative des lois au
Gouvernement et aux membres du Parlement,
M. Paul Girod
a
estimé que, puisque le texte en discussion était une proposition
et non un projet de loi, l'assemblée qui n'en avait pas pris
l'initiative devait avoir toute faculté de la compléter. Il a
précisé que si cet exercice du droit d'amendement avait pour
effet de changer la nature du texte ce n'en était qu'une
conséquence ne remettant pas en cause ce droit.
M. Jacques Larché, vice-président,
a observé
que le fait que le texte soit d'origine parlementaire avait
empêché le Sénat de demander qu'il soit soumis à
référendum.
M. Pierre Fauchon
a indiqué qu'il ne souscrivait pas au
raisonnement tenu par le président Jacques Larché. Il a, en
effet, estimé que la régularité d'un acte - en
l'espèce, la réunion de la commission mixte paritaire - ne
pouvait dépendre de l'existence de moyens de rétorsion - ici
la faculté pour le Gouvernement de recourir au vote bloqué pour
s'opposer aux amendements adoptés par le Sénat.
Tout en reconnaissant que, traditionnellement, la commission mixte paritaire ne
se réunissait pas lorsqu'un vote conforme des deux assemblées
était exigé,
M. Bernard Roman, rapporteur pour
l'Assemblée nationale,
s'est interrogé sur le fondement
constitutionnel de cette pratique. En tout état de cause, il a
considéré que la proposition de loi organique soumise à la
commission mixte paritaire ne relevait pas de cette catégorie. Par
ailleurs, il a estimé que l'on ne pouvait mettre sur le même plan
le droit d'initiative primaire en matière législative,
exercé par l'Assemblée nationale avec le dépôt de la
présente proposition de loi, et le vote par le Sénat
d'amendements n'ayant d'autre objet que de modifier la nature du texte en
discussion. Il a enfin souligné que les amendements votés par les
sénateurs sortaient, à l'évidence, du cadre du texte
initial et a observé, en conséquence, que s'ils étaient
définitivement adoptés, ils seraient, sans nul doute,
annulés par le Conseil constitutionnel sur le fondement qu'ils sont sans
lien avec la proposition de loi organique.
M. Jacques Larché, vice-président
, a indiqué
que, ayant constaté que l'Assemblée nationale ne se ralliait pas
à son analyse, la majorité des sénateurs, rejointe par les
députés présents issus de l'opposition, ne participerait
pas à une telle commission mixte paritaire.
M. Gérard Gouzes, président,
a
considéré que le moment semblait venu de constater l'échec
de la commission mixte paritaire.
M. Jacques Larché, vice-président,
a estimé
qu'il convenait de constater, non pas l'échec de la commission mixte
paritaire, mais l'existence d'un désaccord sur la procédure
suivie.
M. Dominique Bussereau
a exprimé son accord avec cette
interprétation, observant que la commission mixte paritaire
n'était pas passée au troisième point de son ordre du
jour, c'est-à-dire à l'examen des dispositions restant en
discussion de la proposition de loi organique.
M. Bernard Roman, rapporteur pour l'Assemblée nationale
, a
considéré qu'il n'était pas nécessaire de
procéder à l'examen des dispositions restant en discussion pour
constater l'échec évident de la commission mixte paritaire. Il a
estimé que le seul fait que la majorité sénatoriale
conteste la légitimité de sa réunion ne saurait faire
obstacle à l'exercice par le Gouvernement des prérogatives qu'il
tient de l'article 45 de la Constitution. La commission mixte paritaire
ayant été convoquée, à l'initiative de ce dernier,
il a jugé qu'il convenait de constater qu'elle ne pouvait parvenir
à l'adoption d'un texte sur les dispositions restant en discussion de la
proposition de loi organique. Il a ajouté que, en tout état de
cause, le rapport de la commission mixte paritaire rendrait compte des opinions
exprimées par chacun des intervenants.
Observant qu'au-delà des seules questions de forme et de
procédure, il existait un désaccord de fond sur les dispositions
de la proposition de loi organique,
M. Gérard Gouzes,
président,
a jugé que la commission mixte paritaire ne
pouvait qu'aboutir à un échec.
M. Jacques Larché, vice-président
, a indiqué,
à nouveau, qu'il n'y avait pas lieu de constater cet échec, mais
de prendre acte du refus des membres de la majorité sénatoriale
de participer à la présente réunion, qui, faute de
débat sur les dispositions restant en discussion, ne saurait tenir lieu
de commission mixte paritaire.
Prenant acte de la volonté des représentants de la
majorité sénatoriale de ne pas participer aux travaux de la
commission mixte paritaire,
M. Gérard Gouzes,
président,
a constaté que celle-ci ne pouvait, en
conséquence, parvenir à l'adoption d'un texte commun sur les
dispositions restant en discussion de la proposition de loi organique modifiant
la date d'expiration des pouvoirs de l'Assemblée nationale.