VI. LES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL
Votre rapporteur spécial est amené à formuler trois observations sur le budget des charges communes pour 2001.
A. UN BUDGET ENCORE TROP PEU LISIBLE
1. Un caractère paradoxal et hétéroclite
Votre rapporteur spécial avait souligné , l'année dernière, le caractère paradoxal du budget des charges communes : premier budget de l'Etat avec plus de 721 milliards de francs de crédits, dont 99% de dépenses ordinaires, il représente plus de 40 % des dépenses brutes du budget général, mais il est le plus méconnu, quoique le plus varié par les thèmes abordés.
Il avait également insisté sur son caractère hétéroclite puisqu'il comprend les crédits destinés à l'ensemble des services de l'Etat ou à plusieurs d'entre eux, et qui ne peuvent être inscrits dans le budget d'un ministère particulier.
2. L'évaluation non justifiée de certaines dépenses
En 2000, le budget des charges communes avait fait l'objet d'un effort indéniable de clarification, en raison de la suppression de 44 chapitres.
Il continue toutefois de souffrir d'un manque évident de lisibilité , accentué par les incertitudes pesant sur l'évaluation de certaines dotations.
Trois exemples au moins illustrent le caractère extrêmement vague de la budgétisation initiale de certains crédits :
- les dépenses éventuelles et accidentelles : il apparaît en effet que les dotations inscrites aux chapitres 37-94 et 37-95 constituent, en réalité, une réserve de crédits à l'utilisation aléatoire destinée à faire face aux besoins du moment , sans souci particulier pour les dispositions de l'ordonnance organique, comme l'a montré votre rapporteur spécial dans un rapport d'information publié en juillet dernier 74 ( * ) . Ainsi, en 2001, les crédits pour dépenses accidentelles diminueraient de 690 millions de francs, sans la moindre justification, alors qu'ils avaient crû de plus de 260 % l'année dernière ;
- les dépenses de garantie : elles sont, selon le gouvernement, " difficilement prévisibles ", ce qui lui permet de moduler ces crédits en fonction de ses propres contraintes. En effet, lorsque des événements " imprévus " surviennent, les estimations de dépenses sont rarement ajustées en conséquence. Dans son rapport relatif à l'exécution des lois de finances pour 1999, la Cour des comptes souligne " l'évolution erratique des dépenses de garantie observée depuis 1993 : à une forte baisse succède, l'année suivante, une non moins forte augmentation, en général non prévue dans les crédits initiaux, rectifiés du collectif de fin d'année ". Cette année-là, en effet, les crédits initiaux s'élevaient à 1,48 milliard de francs, alors qu'ils se sont établis à 14,6 milliards de francs en exécution, en raison de la mise en jeu de la garantie de l'Etat en faveur de l'UNEDIC, à hauteur de 10 milliards de francs, et du versement de 3 milliards de francs au profit de la Caisse centrale de réassurance, suite aux intempéries de l'hiver 1999 ;
- les mesures générales intéressant la fonction publique : le chapitre 31-94 est abondé, dans le projet de loi de finances pour 2001, de 3,02 milliards de francs au titre de l' " ajustement de provisions destinées à couvrir les prochaines évolutions de rémunérations publiques ". Il convient toutefois de s'interroger sur une telle dotation : en 1999, aucun crédit de ce type n'était inscrit, 230 millions de francs en 2000, puis 3,25 milliards de francs en 2001. 2000 étant la dernière année d'application de l'accord salarial de février 1998, faut-il voir dans cette dotation un moyen pour le gouvernement d'accroître les rémunérations des fonctionnaires 75 ( * ) , par un recours à des crédits à son entière discrétion ?
* 74 Rapport n° 444, Sénat, 1999-2000.
* 75 Le gouvernement a en effet annoncé l'ouverture prochaine de négociations salariales dans la fonction publique.