MODIFICATIONS ADOPTÉES A L'ASSEMBLÉE NATIONALE
Seules des modifications en seconde délibération et à titre non-reconductible ont été adoptées à l'Assemblée nationale :
Titre IV :
Majoration des crédits de 1,356 million de francs sur le chapitre 46-60 " Interventions en faveur de la ville et du développement social urbain " (0,29 million de francs en faveur du Fonds d'intervention pour la ville - FIV, et 1,066 million de francs en faveur du développement social urbain en Ile-de-France).
ANNEXES
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En premier lieu, M. Yves Jego a remarqué que, en dépit des annonces spectaculaires, année après année, de progression du budget de la ville, la hausse des crédits n'était pas ressentie sur le terrain.
Cette constatation souligne les effets de saupoudrage, mais également les effets d'éviction, provoqués par les contrats de ville. La superposition des procédures contractuelles (jusqu'à 9 procédures contractuelles différentes pour un même quartier) conduit les mairies à devenir des machines à produire des rapports et des études administratives. De plus, cette situation entraîne des incohérences, compte tenu des discours et des procédures contradictoires des différentes administrations parties prenantes de ces contrats.
Enfin, les contrats exigent des études coûteuses pour les collectivités sans que leur mise en oeuvre conduise à leur faire bénéficier de moyens supplémentaires. A cet égard, le cas des contrats locaux de sécurité (CLS) est particulièrement significatif.
Concernant les opérations de renouvellement urbain, M. Yves Jego a souligné les effets pervers de certaines dispositions du projet de loi " solidarité et renouvellement urbain ", et, en particulier, de l'obligation de construction de 20 % de logements sociaux sur le territoire de chaque commune. Il a noté que les communes riches qui vont être contraintes de construire des logements HLM neufs allaient vraisemblablement attirer les locataires les plus solvables des HLM des communes voisines plus pauvres. Par conséquent, le risque de renforcement des effets de ghetto, que le projet de loi vise à combattre, est réel et inquiétant.
Il a remarqué que, si les " grands projets de ville " (GPV) amélioraient le précédent dispositif des " grands projets urbains " (GPU), les montants accordés par l'Etat aux différents projets demeuraient néanmoins insuffisants. A titre d'exemple, il a indiqué que la commune de Monterau, dont le coût du grand projet de ville est estimé à 100 millions de francs sur cinq ans, ne bénéficiera que de 25 millions de francs de dotations de l'Etat, ce qui va contraindre le maire à effectuer une " tournée des guichets " pour trouver les financements nécessaires au bouclage du projet. Il a souligné que les opérations de restructuration entraînaient une croissance des coûts de fonctionnement, qui ne sont pas suffisamment pris en compte par la procédure des " grands contrats de ville ". A titre d'exemple, il a indiqué que les demandes croissantes de services adressées aux structures HLM se heurtaient souvent à des contraintes financières, et à des demandes de redressement de la part des pouvoirs publics.
M. Yves Jego a considéré que le cloisonnement entre les administrations constituait une des causes majeures de blocage dans la mise en oeuvre des opérations de restructuration urbaine. Il a noté, en particulier, des résistances importantes de la part des directions départementales de l'équipement (DDE), auprès desquelles les pouvoirs des sous-préfets " ville " et de la Délégation Interministérielle à la Ville sont limités.
Concernant les opérations de reconstruction-démolition, M. Yves Jego a considéré que ces opérations devaient être prises en compte par le ministère de l'équipement comme un élément de restructuration des quartiers. Il a souligné que le rythme de mise en oeuvre de ces opérations était insuffisant, compte tenu notamment de son coût pour les bailleurs sociaux, lié à l'opération de démolition proprement dite d'une part, et au manque à gagner sur les logements HLM amortis qui sont détruits, d'autre part. Les nouveaux logements construits ne sont en effet rentables qu'au terme d'une période de 6 à 10 ans, et atteignent l'équilibre après 20 à 25 ans seulement.
Il a souligné que le problème de l'habitat était au coeur de la question de la sécurité.
Concernant les modalités d'intervention du ministère de la ville, il a souhaité que le pilotage des outils nationaux s'effectue dans le cadre d'un dialogue individualisé entre le Maire et le Préfet. Il a également souhaité que la DIV puisse demander aux différents ministères de réorienter leurs procédures lorsque cela était nécessaire. Enfin, il a insisté sur le fait que les collectivités souhaitaient des procédures " sur mesure ", et qu'il convenait de mettre en oeuvre une politique " des villes " plutôt qu'une politique " de la ville ".
S'agissant des zones franches urbaines (ZFU), il a rappelé qu'un rapport du cabinet de consultants " Ernst and Young " avait estimé que, en trois ans, elles avaient permis de multiplier par deux les entreprises et les emplois dans les quartiers concernés, et que le coût par emploi créé s'élevait, en moyenne, à 40.000 francs.
En revanche, l'effet des zones de redynamisation urbaine (ZRU), n'a pas été très important, compte tenu du manque de lisibilité du dispositif et de l'insuffisance des incitations fiscales.
Il a considéré que, pour certaines zones franches, il serait souhaitable de prolonger le dispositif pendant quelques années, car des procédures d'aménagement foncier était encore en cours, pour lesquelles des financements importants étaient engagés actuellement. Pour le reste, il s'est prononcé en faveur d'une refiscalisation progressive de ces zones en cinq ans, afin d'éviter des chocs brutaux pour les entreprises. Il a également noté que certaines ZRU pourraient utilement être transformées en ZFU.
Concernant les réformes de ce dispositif annoncées par le Gouvernement, il a indiqué que, pour être efficaces, les nouveaux outils devaient être suffisamment lisibles et incitatifs. Il a considéré que l'idée d'une défiscalisation des " start-up " dans les quartiers relevant de la politique de la ville serait intéressante à étudier.
Pour conclure, M. Yves Jego a estimé que la réussite des zones franches urbaines posait plus largement la question du niveau des charges fiscales et sociales dans notre pays.
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M. Gilles de Robien a indiqué que, selon lui, l'augmentation des crédits de la politique de la ville, était un faux semblant, car la ville ne dispose pas d'un véritable budget, mais pour l'essentiel, de morceaux de budgets pris sur d'autres ministères.
Il a considéré que, pour une politique de la ville forte, il faudrait une augmentation substantielle de la dotation de solidarité urbaine (DSU), accompagnée de contrôles de l'application de la politique de la ville en faveur des quartiers sensibles. Aujourd'hui, la politique de la ville ne dispose que de bouts de budgets. Or, il faudrait une politique budgétaire spécifique et autonome fondée sur la DSU, car celle-ci obéit à des critères qui sont les besoins des villes à quartiers sensibles.
M. Gilles de Robien a cité l'exemple de la DSU perçue par sa ville, qui est de l'ordre de 20 à 22 millions de francs : il a considéré qu'il était préférable de limiter les découpages et la multiplication des sigles de la politique de la ville et de doubler la DSU, dont l'effet beaucoup plus fort.
De plus, il a déploré le fait que la complexité des structures chargées de la politique de la ville ralentissait considérablement l'aboutissement des dossiers : à titre d'exemple, il a indiqué que 8 à 10 mois avaient été nécessaires pour l'instruction du grand projet de ville d'Amiens, qui aura mobilisé une dizaine de personnes. Il a également souligné les retards importants des délégations de crédits dans les préfectures pour procéder aux versements des subventions aux associations.
M. Gilles de Robien a considéré qu'une vraie politique du logement devait être mise en oeuvre. Il a noté que le logement, qui relève de la compétence de l'Etat était pris en charge de manière croissante par les collectivités locales. Alors que le gouvernement avait annoncé la création de 65.000 logements pour 2000, seulement 11.500 logements avaient été construits au mois de juin... S'agissant de la loi " solidarité et renouvellement urbain ", M. Gilles de Robien a indiqué qu'elle ne prenait pas suffisamment en compte l'ensemble de la chaîne de logement.
Il a souligné que, en dépit des mesures positives en faveur du renouvellement urbain, le grand projet de ville (GPV) d'Amiens ne devait toucher 90 millions de francs sur 6 ans. Or, pour avoir une action efficace sur la ville, il faudrait construire 1.000 logements, chaque logement coûtant à la commune 130.000 francs.
S'agissant de la police de proximité, M. Gilles de Robien a considéré qu'elle constituait un élément essentiel de la politique de la ville. Il a noté que cette réforme impliquait un aveu, celui que la police avait oublié la dimension de la proximité.
Cependant, dans ce cas encore, les moyens mis en oeuvre sont largement insuffisants : à Amiens, dans un quartier sensible de 30.000 habitants, seulement 25 policiers supplémentaires sont affectés sur le terrain. Il a souligné que les carences d'effectifs de police étaient par ailleurs souvent comblées par le recrutement d'adjoints de sécurité.
Dans la cadre des contrats locaux de sécurité, il a indiqué que la ville d'Amiens avait exigé que l'administration donne ses effectifs de police sur la ville tous les 6 mois. Il a déploré que trop souvent, les CLS ne fonctionnaient pas, car l'Etat veut conserver la maîtrise de la sécurité, et en faire prendre en charge la plus grande partie par la collectivité.
Il a noté que, en nationalisant les polices municipales, le régime de Vichy avait retiré une arme forte à la disposition des maires. Il a considéré que le Canada fournissait un bon exemple de réforme des services de police, car les polices municipales y exercent de nombreuses missions de proximité (contact, contrôle, médiation...).
S'agissant de la relance par l'économie, M. Gilles de Robien a considéré que le dispositif des Zones Franches Urbaines était une expérience largement positive, qu'il convient de pérenniser. Il a également insisté sur la nécessité de ne pas condamner l'ensemble du dispositif avant qu'il n'ait réellement pu apporter la preuve de son efficacité.
Il a noté que, à Amiens, le premier hôtel d'entreprises avait permis de créer 380 emplois dont 87 sont occupés par des habitants du quartier. Un second hôtel d'entreprises, plus petit, est actuellement en construction.
Pour conclure, M. Gilles de Robien a souligné que la politique de la ville avait considérablement évolué : l'époque des pionniers est révolue, et la politique mise en oeuvre est de plus en plus administrée.