CHAPITRE III :
L'INSUFFISANTE ET HASARDEUSE GESTION DES CRISES
DANS LE SECTEUR AGRICOLE
I. CRISE DE LA " VACHE FOLLE " : UNE ACTION DANS L'URGENCE, DES RÉPONSES PEU CONVAINCANTES
La crise de l'encéphalite spongiforme bovine (ESB) a marqué l'actualité tout au long de cette année en raison, notamment, de l'augmentation continue du nombre de cas décelés en France. Début novembre, 84 animaux atteints avaient été recensés depuis le début de l'année 2000. L'augmentation de cas repérés doit cependant être mise en relation avec le lancement d'une campagne de dépistage de grande ampleur. Ainsi, sur 84 cas répertoriés pour l'année 2000, 29 ont été identifiés grâce au test utilisés à l'occasion de cette campagne, les 55 autres ayant été repérés par le réseau de surveillance vétérinaire.
Un débat scientifique portant sur les causes de l'ESB a été engagé. Si la contamination par des farines animales accidentellement infectées reste l'hypothèse privilégiée, celle d'une transmission de la vache au veau est également plausible. L'hypothèse d'une troisième voie de transmission, par l'intermédiaire de réservoirs naturels tels que les bouses ou le foin, a également été évoquée.
En outre, une étude britannique rendue publique fin août a montré que le prion responsable de l'ESB pouvait franchir la barrière des espèces sans que la maladie se déclare sur des animaux infectés. Ce résultat inquiétant a suscité des interrogations sur l'éventuelle contamination d'animaux (volaille ou porcs) ayant consommé des farines contaminées.
A. JUSQU'À PRÉSENT DES MESURES SANS GRANDE ENVERGURE
1. L'interdiction des tissus à risque
La Commission européenne avait proposé de rendre obligatoire le retrait des matériels à risque spécifiés (MRS) des bovins, caprins et ovins de la chaîne alimentaire à compter du 1 er juillet 2000.
Le Conseil agricole de l'Union européenne n'ayant pas adopté ce projet, en raison de la réticence des Etats membres prétendûment non touchés par l'ESB, la Commission européenne a décidé en juillet 2000 d'imposer elle-même ces mesures de retrait des MRS à compter du 1 er octobre 2000.
Par ailleurs, le ministre de l'agriculture a pris, le 10 octobre 2000, un arrêté ministériel interdisant l'utilisation alimentaire des boyaux des bovins, quel que soit l'âge de ces derniers. Il fait suite à un avis de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA).
2. L'étiquetage de la viande bovine
Au plan communautaire, les Quinze ont adopté le 17 juillet 2000, un nouveau règlement devant entrer en vigueur en deux étapes (au 1 er septembre 2000 et au 1 er janvier 2002).
Il convient de souligner ici que le Conseil européen a renoncé à rendre obligatoire la mention de la catégorie de l'animal abattu ce qui constitue un recul par rapport à la réglementation en vigueur en France. Les producteurs et les associations de consommateurs déplorent ce choix.
Au plan national, des initiatives concernant l'étiquetage de la viande bovine ont également été prises.
L'accord national interprofessionnel du 17 février 1997, sur l'étiquetage de la viande bovine, étant arrivé à échéance le 31 août 2000, les acteurs de la filière ont à charge d'élaborer un nouvel accord.
3. La question d'une éventuelle réforme de l'abattage
Sous la pression des éleveurs, un débat s'est engagé sur l'opportunité de maintenir le principe, adopté en 1994, de l'abattage total du troupeau dans lequel un animal atteint de l'ESB a été découvert.
Selon certains, la pratique de l'abattage sélectif, moins traumatisante, permettrait en outre d'étudier l'évolution de l'état sanitaire du reste du troupeau. Le choix de l'abattage total a été notamment critiqué par le comité scientifique directeur européen.
Le gouvernement a indiqué qu'il pourrait élaborer prochainement un nouveau protocole pour les animaux abattus à l'occasion de la mise en oeuvre du programme de tests rapides et des protocoles scientifiques qui lui sont rattachés.
4. Le dépistage de l'ESB
Le programme de dépistage de l'ESB par des tests rapides, qui avait été annoncé en début d'année, a été lancé en juin 2000, avec plusieurs mois de retard. Il se compose en fait de deux programmes complémentaires :
- un programme de 12.000 tests qui anticipe le dépistage communautaire obligatoire en 2001 ;
- un programme national ciblé de 40.000 tests, destiné à éprouver de nouveaux tests, plus rapides, et à évaluer la prévalence de la maladie. Ce programme de dépistage, dont le coût est évalué à 271 millions de francs, sera réalisé sur une période de huit mois au plus, un premier bilan des résultats ayant été annoncé pour l'automne 2000.