B. LE SERVICE UNIVERSEL DES TÉLÉCOMMUNICATIONS : DEUX LACUNES REGRETTABLES
1. L'annuaire universel toujours aux abonnés absents !
La loi
de réglementation des télécommunications avait
prévu, en contrepartie de l'ouverture à la concurrence,
l'élaboration
d'un annuaire rassemblant les coordonnées de
tous les abonnés
, quel que soit le réseau de
télécommunications qu'ils ont choisi. Cet annuaire universel est
une composante essentielle du service universel des
télécommunications. Compte tenu du caractère
commercialement stratégique des informations qu'elle contient, la liste
de l'ensemble des abonnés servant à établir cet annuaire
devait être, en vertu de la loi, gérée par un organisme
indépendant. Un décret était prévu pour
déterminer, notamment, le statut de cet organisme et les
modalités de gestion de cette liste.
Il n'est toujours pas paru
.
L'actuelle difficulté, qui en découle, à obtenir, faute
d'annuaire exhaustif, les coordonnées des abonnés des autres
réseaux, est contraire aux principes de
simplicité et
d'accessibilité du service public
des
télécommunications, pourtant inscrits dans la loi. Les
abonnés des opérateurs de
téléphonie mobile
sont aujourd'hui les premiers concernés par la création d'un tel
annuaire.
Votre rapporteur pour avis a déjà exprimé son
désaccord face à cette situation et a interpellé le
Gouvernement sur ce sujet, notamment lors du débat sur le projet de loi
de finances pour 1999, ainsi qu'au moyen d'une question écrite. Aucun
calendrier précis d'élaboration du décret concerné
ne lui a toutefois été fourni à ces occasions, non plus
qu'en réponse à la question posée lors de la
préparation du présent rapport.
Les enjeux économiques
liés à la consolidation de la liste de tous les abonnés,
expliqueraient-ils, au-delà des seuls aspects techniques, le retard
pris ?
On ne peut que déplorer que la volonté du législateur ne
se soit toujours pas concrétisée, trois ans après le vote
de la loi. Or, tout se passe comme si le Gouvernement ignorait qu'il dispose de
moyens juridiques pour mettre fin à cette situation !
Le dispositif législatif actuel distingue deux fonctions : une
fonction de gestion de la liste universelle, sur la base des listes de leurs
abonnés fournies par les opérateurs, confiée à un
organisme indépendant ; une fonction d'édition de l'annuaire
universel sous forme imprimée et électronique, confiée
à France Télécom.
La loi de 1996 avait conçu cette première fonction de
constitution d'un fichier universel comme un monopole confié à un
organisme indépendant, charge à ce dernier de céder sa
liste aux éditeurs d'annuaires à un prix équilibrant ses
coûts.
Or, la directive n° 98/10
18(
*
)
a imposé aux
opérateurs l'obligation de céder leur liste d'abonnés
à un tarif fondé sur les coûts à toute personne qui
en fait la demande, aux fins d'édition d'annuaires universel, faisant du
même coup tomber le postulat monopolistique sur lequel reposait le
système français
. Dans ce contexte, il est avancé par
l'administration que l'organisme indépendant chargé de la
constitution de la liste universelle ne pourrait, dans des conditions
acceptables par tous les opérateurs, tirer suffisamment de revenus de
cette activité pour assurer son seul fonctionnement. Il ne serait donc
en mesure d'exercer convenablement cette activité qu'en recourant
à des fonds publics, hypothèse qui aurait pour effet de peser sur
l'équilibre du budget de l'Etat et qui semble donc écartée
par le Gouvernement. Cette situation expliquerait le retard pris dans la
progression de ce dossier, notamment pour ce qui concerne la première
étape, c'est-à-dire la publication du décret d'application
des dispositions législatives.
Soit ! Mais qu'attend-on pour mettre en place un mécanisme
alternatif permettant l'élaboration de l'annuaire universel ?
L'Autorité de régulation des télécommunications,
dans son dernier rapport annuel, a souligné
la
nécessité de parvenir rapidement à une solution
respectant les principes suivants :
- garantir, au nom du service public, la mise à disposition d'un
annuaire universel, regroupant l'ensemble des abonnés à
l'exception de ceux qui ne souhaitent pas y figurer ;
- assurer une concurrence loyale sur le marché des annuaires ;
- offrir une égalité de traitement aux abonnés de
tous les opérateurs ;
- constituer une solution aussi simple et efficace que possible ;
- définir clairement les modalités de valorisation de la
liste universelle et de son utilisation à des fins commerciales.
La Commission supérieure du service public des postes et
télécommunications a, quant à elle, rendu
, le
30 juin dernier, un avis sur différentes solutions envisageables
pour la mise en place de l'annuaire universel, dans lequel elle suggère
de résoudre cette question au moyen d'une modification de
l'article L.35-4 du code des postes et télécommunications,
à l'occasion de la transposition, par voie législative, de la
directive précitée 98/10/CE " ONP Téléphonie
vocale ", ce qui ne permet pas d'envisager la mise en place de l'annuaire
universel dans un délai rapproché, même si la CSSPPT
appelle de ses voeux cette transposition avant la fin de l'année 1999.
On ne peut que regretter que le Gouvernement n'ait encore pris aucune
initiative pour sortir de l'impasse actuelle, alors que c'est
l'accessibilité du service public des télécommunications
qui est en cause. La réponse écrite de l'administration à
votre rapporteur est on ne peut plus évasive :
" Cette
transposition "
(de la directive précitée)
" qui
requiert une modification législative, sera effectuée dès
que possible ".
2. Des tarifs " sociaux " qui n'existent qu'en théorie
La loi
précitée du 26 juillet 1996 a prévu la mise en
place de tarifs téléphoniques spécifiques pour certaines
catégories de personnes rencontrant des difficultés dans
l'accès au service téléphonique en raison notamment de
leur niveau de revenu de leur handicap.
Le décret nécessaire à leur mise en oeuvre est enfin paru,
en mars dernier
19(
*
)
.
Le dispositif proposé n'a cependant pas reçu d'application, le
ministre ayant indiqué que l'entrée en vigueur effective
dépendait dorénavant de la capacité des services de la
branche famille de la sécurité sociale à le mettre en
oeuvre.
Ce retard est lui aussi regrettable.