B. L'EXEMPLE DE LA BIBLIOTHÈQUE NATIONALE DE FRANCE
La Bibliothèque nationale de France, héritière de la bibliothèque nationale, illustre avec éclat le poids des contraintes budgétaires qui pèsent sur le budget de l'administration de la culture.
1. Une institution dont les conditions de réalisation expliquent pour une large part les dysfonctionnements
•
Un projet qui a souffert de ses conditions de réalisation
Le projet annoncé le 14 juillet 1988 par le président
François Mitterrand "
d'une très grande
bibliothèque d'un type entièrement nouveau
",
justifié par les difficultés croissantes rencontrées par
la Bibliothèque nationale en raison de l'augmentation de la production
imprimée et de la demande culturelle, reposait sur des objectifs
ambitieux qui dépassaient la seule mission patrimoniale qui était
jusque là dévolue à cette institution.
Précisée par une lettre du Premier ministre, la nouvelle
bibliothèque avait, en effet, pour vocation de "
couvrir tous
les champs de la connaissance, être à la disposition de tous,
utiliser les technologies les plus modernes de transmission de données,
pouvoir être consultée à distance et entrer en relation
avec d'autres bibliothèques européennes
".
Cette institution d'un genre nouveau qui devait permettre, grâce aux
développements scientifiques et technologiques, d'élargir la
vocation de la Bibliothèque nationale, a été
inaugurée par le Président François Mitterrand en mars
1995, soit dans le délai fixé lors du lancement du projet.
Cependant, en raison des retards accumulés, elle ne fut ouverte au grand
public (haut-de-jardin) qu'en décembre 1996 et aux chercheurs (salles du
rez-de-jardin) qu'en octobre 1998.
Dans les mois qui suivirent l'ouverture de la BNF, de sérieuses
difficultés de fonctionnement apparurent.
Les déficiences du système informatique aggravées par les
conditions de travail pénibles qui lui étaient imposées
par les caractéristiques mêmes des bâtiments,
suscitèrent parmi le personnel un mécontentement alimenté
également par des revendications sur les jours d'ouverture et la
précarité de l'emploi. Au terme d'un mouvement de grève
qui perturba gravement le fonctionnement du site Tolbiac, la direction fut
conduite à modifier les conditions d'ouverture de la BNF.
Les usagers quant à eux rencontrèrent de nombreuses
difficultés. Celles-ci ont affecté plus particulièrement
les chercheurs dont certains, parmi les plus éminents,
n'hésitèrent pas à y voir "
un désastre qui
(allait) durablement obérer les possibilités de la
recherche
"
7(
*
)
.
Soucieuse de faire la part des inévitables problèmes liés
au rodage d'une institution de cette dimension et des handicaps structurels
dont elle est affligée, votre commission a entendu le 7 avril dernier M.
Jean-Pierre Angrémy, président de la Bibliothèque
nationale, puis s'est rendu sur le site Tolbiac le 16 juin.
Au terme de ses premières analyses vérifiées à la
suite d'un entretien avec M. Jean-Pierre Angrémy le 8 novembre dernier,
il apparaît à votre rapporteur que
les
dysfonctionnements de l'ouvrage, s'ils sont bien réels,
résultent pour une large part de ses conditions de
réalisation.
Comme l'a souligné devant votre commission son président,
le
site Tolbiac n'a pas été conçu pour les missions qui lui
incombent aujourd'hui et ne le sera qu'au prix de nombreux aménagements
qui pour certains restent encore à faire
.
L'inadaptation du bâtiment est pour l'essentiel imputable à la
précipitation dans laquelle a dû être conduit le projet
architectural alors que le programme scientifique connaissait, sous l'effet de
controverses, de profonds changements. Ce " décalage " a
été accentué par les conditions dans lesquelles s'est
exercée la tutelle de l'Etat et par les difficultés
rencontrées par l'établissement public constructeur dans la
maîtrise d'ouvrage du contenu de la future bibliothèque.
Ayant initialement vocation à être une bibliothèque
universelle, ouverte à tous et entièrement informatisée,
le bâtiment a été à l'origine conçu pour
n'abriter que les ouvrages postérieurs à 1945. Cette
" césure ", qui fit l'objet de polémiques, fut
finalement abandonnée ce qui eut pour conséquence de faire de la
BNF l'héritière modernisée de la BN et, accessoirement, de
transférer à Tolbiac 10 à 11 millions d'imprimés et
périodiques au lieu des 4 millions initialement prévus. De la
même manière, le principe de l'ouverture à tous les
publics, vivement critiqué, a été finalement
abandonné, ce qui contraignit à modifier très sensiblement
la répartition et la vocation des espaces afin de distinguer ceux
réservés aux chercheurs et ceux ouverts au grand public.
Les conséquences de ces atermoiements ont été d'autant
plus préjudiciables que la
conduite du projet a manqué
d'ensemble
, alors même que la construction de l'ouvrage et la
conception de son contenu étaient confiées à une structure
unique, l'établissement public de la Bibliothèque de France
(EPBF), ce qui aurait dû théoriquement faciliter la coordination
indispensable au bon avancement de l'ensemble
Les analyses de la Cour des comptes qui a consacré en 1998 un chapitre
de son rapport public à la BNF relèvent trois raisons principales
pour expliquer cette dissymétrie qui a conduit à
privilégier le contenant sur le contenu.
En premier lieu, la tutelle de l'établissement constructeur a
été confiée au ministère chargé des grands
travaux, qui n'était pas le mieux placé pour arbitrer entre les
différentes positions exprimées sur le contenu de la future
bibliothèque.
En second lieu, les responsables de la BN n'ont été que peu
associés à l'administration de l'EPBF, bien que celle-ci soit au
coeur du nouvel établissement.
Enfin, alors que la construction du bâtiment "
s'effectua avec
fermeté et sans relâche
", la conduite du projet
scientifique, confiée à la délégation scientifique
de l'établissement, est qualifiée par la Cour des comptes de
"
cahotante, soumise aux contrordres, incertitudes et
hésitations qui caractérisaient l'avancement du programme, lequel
prit du retard sur celui du bâtiment, au risque soit de choix
architecturaux prématurés et irréversibles, soit de
modifications de programmes génératrices de gaspillages et de
surcoûts
".
Les difficultés rencontrées dans la mise en place du
système informatique qui se sont traduites par une dérive des
coûts mais également par d'importants retards apparaissent comme
une des illustrations les plus fâcheuses de ces défaillances.
Selon la Cour des comptes, le coût définitif du projet
informatique estimé en 1992 à 700 millions de francs
s'élèverait à 862 millions de francs, soit un
dépassement de 23 %.
Cette estimation doit être prise avec précaution. En effet, toute
comparaison entre le coût du projet évalué en 1992 et son
coût définitif est fort difficile à établir dans la
mesure où son contenu a été modifié au cours de sa
mise en oeuvre, certaines fonctionnalités ayant été
abandonnées afin de le simplifier, et où les retards pris dans sa
réalisation ont conduit à des dépenses
supplémentaires liées au maintien de systèmes qui auraient
normalement dû être abandonnés plus tôt.
D'après les informations communiquées à votre rapporteur,
ce n'est qu'à la fin de l'année 2000 qu'une estimation
précise du coût définitif du projet pourrait être
établie.
En ce qui concerne le respect des délais, le bilan n'est guère
plus satisfaisant.
La réalisation du système informatique n'est pas encore
achevée. En effet, les versions V2 et V3 ne seront
opérationnelles selon les précisions fournies par la direction de
la BNF qu'en 2002 selon le calendrier suivant : les modules de catalogage
et de gestion du dépôt légal et des acquisitions seront
mises en oeuvre entre mai et novembre 2001 et ceux relatifs à la
conservation et au bulletinage des périodiques, entre mars et août
2002. On relèvera toutefois que, compte tenu de la rupture du
marché passé avec l'entreprise CAP GEMINI, à l'initiative
de la BNF, la mise en oeuvre de ces versions du système informatique
nécessitera la passation de nouveaux marchés, source possible de
nouveaux retards.
•
Un projet qui ne répond que partiellement aux ambitions
de ses concepteurs
* Au-delà des difficultés de fonctionnement, force est de
constater que les ambitions affichées lors du lancement du projet ne
sont que partiellement atteintes
, notamment en ce qui concerne
la mise
en réseau informatique des fonds
, qui constituait pourtant un
argument décisif pour le choix d'une implantation parisienne.
L'accès à l'ensemble des fonds numérisés -du moins
aux documents libres de droits- n'a été ouvert qu'à partir
de 1998 et ne sera consultable sur internet par le biais du serveur Gallica
qu'à compter de la fin de cette année.
Enfin, la création du catalogue collectif de France, qui devait
permettre la mise en réseau de la BNF avec les bibliothèques
municipales et universitaires, n'est encore qu'à l'état
d'ébauche. Sa deuxième étape, qui consiste dans la
possibilité d'interroger simultanément sur internet le catalogue
des imprimés et documents audiovisuels de la BNF, le système
universitaire de documentation et les notices d'une partie des fonds d'une
cinquantaine des plus importantes bibliothèques municipales, ne sera
achevée qu'en 2000. Quant au système de messagerie pour le
prêt entre bibliothèques et la fourniture à distance de
documents de substitution, qui constitue la troisième étape de ce
projet, il est encore à l'étude.
* Les objectifs de fréquentation ne sont pas remplis. Cependant,
votre rapporteur relève pour s'en féliciter que les chiffres
enregistrés depuis le début de l'année 1999 marquent une
nette tendance au redressement
. En 1999, les salles du haut-de-jardin sont
fréquentées en moyenne par 2000 lecteurs par jour ; et les
espaces du rez-de-jardin, qui offrent des capacités d'accueil environ
trois fois supérieures à la BNF, accueillent plus de 1000
lecteurs par jour (1 170 au mois d'août). On rappellera que les
estimations portaient respectivement sur 4 500 et 3 000 lecteurs par
jour
8(
*
)
.
Les mouvements sociaux de l'automne 1998 ont contraint la direction de
l'établissement à modifier les horaires d'ouverture de la BNF. Si
le " haut-de-jardin " est ouvert du mardi au dimanche, le
" rez-de-jardin " n'accueille les chercheurs que du mardi au samedi,
et non plus du lundi au samedi comme cela était le cas lors de
l'ouverture. Ces horaires s'ils sont contestés par une partie des
usagers sont plus restreints que ceux de la bibliothèque publique
d'information mais néanmoins plus amples que l'ancienne salle Labrouste.
D'après les informations recueillies par votre rapporteur, leur
assouplissement exigerait non seulement un fonctionnement optimal du
système informatique, qui n'est pas encore atteint, et des effectifs
supplémentaires mais également une réduction des
contraintes d'entretien du bâtiment. Pour l'heure, seule
l'hypothèse d'une ouverture des salles consacrées aux chercheurs
à partir de midi le lundi est étudiée.
*
Le programme ambitieux d'acquisition destiné à
accroître la vocation encyclopédique de la BNF n'est que
partiellement réalisé
.
Selon le rapport de la Cour des Comptes, en ce qui concerne les ouvrages et les
périodiques, il aura "
fallu près de quatre années
de plus que les délais prévus pour réaliser un programme
d'acquisitions d'imprimés pourtant réduit par rapport à
l'objectif initial
" et dont "
la part de l'enveloppe
réservée à cet effet ne suffit plus depuis 1995 à
financer ledit programme
".
Le budget destiné aux acquisitions s'élevait en 1999 à 53
millions de francs, contre 72 millions de francs en 1998. Il ne semble pas que
le niveau des dotations inscrites pour 2000 permette d'accroître
substantiellement le montant des crédits qui leur sont consacrés.
L'indispensable continuité du budget des périodiques conduit donc
à retenir pour la seconde année consécutive un budget
inférieur à celui de 1998, qui était conforme au projet
initial.
Ces retards sont d'autant plus regrettable qu'ils ont essentiellement
affecté les programmes d'acquisition d'ouvrages scientifiques et
juridiques, domaine dans lesquels les collections de la BNF présentent
des lacunes.
Dans le domaine des acquisitions audiovisuelles, les résultats sont
également en deçà des prévisions. S'agissant de la
numérisation, les objectifs ont été revus à la
baisse en raison du coût de l'opération et 40 % seulement du
fonds est accessible dans la mesure où le reste fait l'objet de
négociations concernant le régime des droits d'auteur.
•
De nombreux dysfonctionnements qui, pour certains, sont en voie de
règlement.
Les dysfonctionnements constatés depuis l'ouverture au public de la BNF
sont de plusieurs ordres.
* Certains apparaissent irrémédiables. Il faudra en effet que les
usagers comme les personnels s'habituent aux nouveaux locaux. Il n'est
évidemment pas question de revoir l'aménagement des salles ou
encore de remplacer les marches en bois exotique conduisant à
l'esplanade. La BNF n'est pas la BN. Le nouveau bâtiment, par les
services qu'il pourra offrir aux usagers et par les aménagements qui
seront apportés aux conditions de travail des personnels, devra faire
oublier les habitudes prises sur le site Richelieu-Vivienne.
* Certains dysfonctionnements sont au contraire imputables à la
période de rodage que traverse depuis son ouverture la BNF.
Les problèmes les plus épineux rencontrés par les usagers
concernent, d'une part, le système de réservation de places et,
d'autre part, l'accès aux collections. Imputables à la mise en
oeuvre de la version dite V1 du système informatique portant sur les
services au public, ils ont été accentués par des
problèmes liés à la configuration des bâtiments et
à la mise en service d'équipements mécaniques
complémentaires du système informatique, notamment des rayonnages
mobiles (" compacteurs ", carrousels et meubles rotatifs) et du
système de transport automatique de documents.
Selon les informations communiquées à votre rapporteur, il semble
que ces difficultés puissent, dans le cadre des applications actuelles,
recevoir des réponses appropriées. D'après les
réponses fournies, "
la situation est maintenant
maîtrisée sur le plan de l'exploitation du système ;
il reste encore quelques " bogues " à corriger et des
améliorations à réaliser, mais dans le cadre des ratios
acceptables pour tout grand système informatique
", ratios qui
ne sont pas au demeurant précisés.
Ces améliorations, s'il est difficile d'en prendre la mesure exacte, ont
permis, en tout état de cause, à partir de juin 1999, de
reprendre de façon partielle la communication directe des documents,
c'est-à-dire le jour même, abandonnée en novembre 1998 au
profit de la communication en différé, c'est-à-dire un
jour au moins à l'avance. Il s'agit là d'un motif de satisfaction
bien que la mise en place du système informatique soit encore loin
d'être achevée En raison de la rupture du contrat qui liait la BNF
à son fournisseur, ce sont désormais les ingénieurs de
l'établissement qui procèdent à l'entretien et à
l'installation de la version V1 du système informatique, ce qui semble
de nature à réduire les délais d'intervention.
* Enfin, certaines difficultés pourront être résolues
par la modification ou le remplacement des installations existantes. Ainsi, le
rapport de l'inspecteur général des bibliothèques Albert
Poirot, remis à Mme Catherine Trautmann en mars 1999, avance
quelques solutions techniques de nature à améliorer le
fonctionnement de la BNF, notamment en ce qui concerne les installations de
stockage des documents ou de transport des ouvrages. Ces adaptations sont pour
certaines coûteuses et nécessitent des travaux
d'aménagement importants.
Ce constat conjugué aux contraintes inhérentes à la
maintenance d'équipements sophistiqués amène votre
rapporteur à s'interroger sur l'évolution du coût de
fonctionnement de la BNF dans les années à venir.
2. Les coûts de fonctionnement : une évolution encore mal maîtrisée
L'ouverture du site Tolbiac au public a
révélé
les faiblesses d'un bâtiment dont les options architecturales et
technologiques ne sont pas à l'évidence les plus économes
des deniers publics.
•
Un coût de construction encore controversé
Avant de tenter d'évaluer le coût de fonctionnement de cette
institution, votre rapporteur relèvera que subsiste une controverse sur
son coût de réalisation.
Si le ministère de la culture affirme que le coût
prévisionnel, soit 7 200 millions de francs, a été
respecté, la Cour des Comptes fait observer au contraire que certains
travaux pourtant initialement prévus ne sont pas encore achevés
et que d'autres, dont le coût demeure encore indéterminé,
s'imposent afin de réparer des installations fragiles ou
déficientes. Par ailleurs, elle révèle que le
" financement d'une partie des dépenses informatiques et des
dépenses d'acquisition d'ouvrages sont assurées hors enveloppe
d'investissement, sur le budget de l'établissement ".
En tout état de cause, il est incontestable que la " fin " de
l'enveloppe a impliqué un transfert de charges sur le budget courant. En
raison notamment des retards constatés dans la réalisation du
projet, de nombreuses dépenses qui jusque-là étaient
financées par l'enveloppe le sont désormais au titre du
fonctionnement et de l'investissement courant. C'est notamment le cas des
pièces détachées des installations techniques, du
catalogue collectif de France et de l'informatique. Ce transfert qui a
commencé pour de faibles montants en 1997 s'est poursuivi en 1998 pour
des sommes plus importantes, notamment pour l'informatique.
•
Un coût de fonctionnement qui devra être
réévalué
Ce débat sur le coût de fonctionnement ne présente donc pas
seulement un intérêt rétrospectif, mais conduit directement
à s'interroger sur la charge que représentera pour le budget du
ministère de la culture le coût de fonctionnement et d'entretien
de cette institution qui, à la différence d'autres
équipements issus des grands travaux, ne bénéficie pas ou
peu de ressources propres.
Depuis la création de la BNF en 1994, la subvention de fonctionnement du
nouvel établissement est passée de 303 millions de francs
à
602,22 millions de francs
en 1999
.
Elle est de loin la plus importante des subventions versées par le
ministère de la culture aux établissements relevant de sa
tutelle. La BNF reçoit une subvention deux fois supérieure
à celle du Centre Georges Pompidou et cinq fois supérieure
à celle du musée du Louvre.
En 2000
, la dotation de fonctionnement s'élèvera
à
620,02 millions de francs, en progression de 3 %.
La BNF
bénéficiera d'une
mesure nouvelle de 20 millions de francs
pour l'entretien courant et le fonctionnement du bâtiment de Tolbiac.
A ces subventions, il convient d'ajouter la rémunération des
personnels qui est inscrite sur le budget des ministères de la culture
et de l'éducation nationale, soit un effectif de 1 772 personnes
pour un montant estimé à environ
300 millions de francs
.
Pour ce qui concerne les subventions d'investissement, elles
s'établissent en 2000 en crédits de paiement à 59 millions
de francs (soit + 18 % par rapport à 1999).
Au total, la charge pour le budget de l'Etat s'élève à
plus de
980 millions de francs
.
Le coût de fonctionnement de la BNF, d'après les réponses
fournies par le ministère aux questions de votre rapporteur "
ne
devrait pas être sensiblement modifié après la
modernisation du site Richelieu et le redéploiement des collections
spécialisées ",
opération qui ne fait l'objet
d'aucune estimation en termes d'investissement comme de fonctionnement.
Cependant, tout porte à croire que ce coût puisse encore
être susceptible d'évoluer. On rappellera à cet
égard que le rapport d'enquête établi conjointement par
l'inspection générale des finances et l'inspection
générale de l'administration du ministère de la culture
estimait à 1,1 milliard de francs le coût global en régime
de croisière y compris les rémunérations des agents
payés directement sur le budget de l'Etat.
Les observations formulées par la Cour des comptes comme les conclusions
du rapport de l'Inspection générale des bibliothèques
soulignent que deux postes devraient subir dans les années à
venir de fortes augmentations par rapport à leurs dotations
actuelles :
- celui de la maintenance du système informatique. La charge liée
à la maintenance des équipements et applications existantes ne
fait pas pour l'heure l'objet d'évaluations définitives.
Le coût total annuel de la maintenance des équipements
informatiques s'élève à 22,3 millions de francs
auxquels il convient d'ajouter 37 millions de francs pour
l'infogérance. En revanche, le coût de la maintenance logicielle
devrait osciller entre 15 et 20 millions de francs selon les besoins qui
se révéleront une fois le système achevé.
- celui de l'amortissement des investissements. L'amortissement des
investissements consentis pour la réalisation et l'équipement du
bâtiment de Tolbiac représente un enjeu majeur. Une part
importante des investissements consiste en équipements techniques
hautement sophistiqués, dont la durée de vie est limitée
et l'obsolescence rapide. Une étude interne à la BNF citée
par le rapport de M. Albert Poirot fait apparaître la
nécessité de prévoir l'accroissement des crédits
d'amortissement par paliers successifs jusqu'en 2005 afin d'atteindre un
montant de 170 millions de francs. La Cour des comptes pour sa part
évoque en régime de croisière une dotation aux
amortissements d'un montant de 100 millions de francs, montant que relativise
le ministère des finances au motif -au demeurant peu convaincant- que la
BNF n'a pas totalement achevé l'installation de ses équipements.
Pour l'heure, la provision pour amortissement s'élevait dans le budget
pour 1999 à 28 millions de francs.
Si le montant souhaitable de la provision pour amortissement ne peut encore
être fixé avec précision, une montée en charge
progressive s'avère indispensable. A ce titre, votre rapporteur souligne
la nécessité de parvenir sur ce point à une planification
rigoureuse et réaliste. En effet, de ces dotations dépendront les
conditions dans lesquelles la BNF pourra, dans les années à
venir, assurer ses missions. L'expérience montre par ailleurs qu'il est
de mauvaise politique de sous-estimer ce poste de dépenses et
qu'à différer dans le temps un effort nécessaire on
s'impose de devoir à terme consentir des efforts budgétaires plus
lourds encore.
- en outre, en ce qui concerne les personnels, des réévaluations
apparaissent vraisemblables.
Au 1
er
septembre 1999, le personnel de la BNF comprenait
1 762 agents rémunérés sur le budget de l'Etat
et 505 personnels contractuels rémunérés sur le budget de
l'établissement, soit un effectif total de 2 267. A cet effectif
budgétaire s'ajoutent des personnels non permanents relevant de
régimes divers, payés sur les crédits de
l'établissement et dont l'effectif s'élève à 510,
soit plus que le nombre de postes permanents inscrits au budget de
l'établissement.
Les mesures prévues par le projet de budget devraient permettre
d'engager un mouvement de stabilisation de ces personnels qui pour beaucoup
d'entre eux assurent des besoins permanents de l'établissement. Les
295 créations d'emplois prévues au projet de loi de finances
pour 2000 bénéficieront pour partie à la BNF. Si le nombre
exact des personnels susceptibles de bénéficier de telles mesures
ne pourra être connu qu'à l'issue des concours qui seront
organisés au début de l'année 2000 et que
parallèlement une mobilisation accrue des emplois vacants sera
recherchée, cet effort devra à l'évidence être
poursuivi dans les années à venir compte tenu du nombre de
vacataires.
Il convient de relever que les mesures de déprécarisation ont
pour conséquence mécanique de réduire les crédits
de l'établissement affectés à la
rémunération des personnels non permanents.
Par ailleurs, au delà des mesures de création d'emplois
destinées à résorber la précarité, on
s'interrogera sur l'effectif nécessaire pour assurer un fonctionnement
satisfaisant de la BNF. Sans disposer des résultats de la
réflexion engagée sur cette question dans le cadre de la
préparation du projet d'établissement, on peut supposer que des
créations d'emplois s'imposeront notamment afin d'accroître
l'amplitude des horaires d'ouverture. On relèvera qu'en 2000, il est
seulement prévu la création de huit emplois de contractuels et de
techniciens supérieurs chargés de l'exploitation et de la
conduite des installations.
*
* *