III. LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES : LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Pour instaurer des fonds de retraite, une multiplicité de solutions techniques est envisageable par le législateur : système obligatoire ou facultatif, régime à cotisations ou prestations définies 23 ( * ) , sortie en rente ou en capital, financement par le salarié ou l'employeur, dispositions fiscales spécifiques, gestion interne ou externe, etc.

Votre Commission des finances a eu l'occasion à de nombreuses reprises 24 ( * ) d'affirmer son souci d'instaurer dans notre pays des fonds de pension.

Ses préférences vont vers les systèmes alliant souplesse et, surtout, protection de l'adhérent.

Les conclusions de la Commission des affaires sociales répondent de façon très satisfaisante à ces principes.

A. LA SOUPLESSE DU DISPOSITIF PROPOSÉ

La Commission des finances est favorable à l'instauration d'un dispositif souple, laissant un maximum de liberté aux acteurs afin de favoriser la négociation collective .

La loi ne fait ici que poser les grandes lignes, et renvoie bien souvent aux accords collectifs institutifs le soin de donner un contenu précis aux règles générales qu'elle pose.

1. Souplesse et liberté dans la mise en place d'un plan de retraite

Une grande liberté accordée au salarié et à l'employeur, assortie d'incitations, est capitale pour assurer le succès de cette nouvelle formule d'épargne retraite. La réussite de ce nouveau dispositif reposera en effet sur l'implication des uns comme des autres.

a) Liberté d'adhésion pour le salarié (articles 1, 3 et 6)

Votre Commission est très attachée au caractère facultatif et universel du dispositif qui nous est présenté.

Il est en effet prévu que les salariés peuvent librement adhérer aux plans de retraite. Pour donner un sens à cette faculté, le système est universel : il s'adresse à tous les salariés du secteur privé et un mécanisme de " filet de sécurité " est prévu afin de ne laisser personne au bord du chemin ; tout salarié du secteur privé pourra demander une adhésion individuelle à un plan de retraite s'il ne s'en voit proposer aucun dans le cadre de son entreprise ou de sa branche. Ce dispositif est également conforme au principe d'équité entre salariés qui ne seraient pas dans la même situation selon les branches ou la taille de leur entreprise si un tel mécanisme d'adhésion individuelle n'était pas prévu.

Cette liberté est assortie d 'incitations pour le salarié (constitution d'un complément de retraite, abondements facultatifs, déductions fiscales, possibilité de sortie en capital, portabilité des droits, protection des droits des adhérents, etc.).

b) Liberté de souscription pour l'employeur (article 5)

L'initiative de la souscription d'un plan de retraite peut résulter de deux types de décisions : la conclusion d'un accord collectif en ce sens et, de façon subsidiaire, l'engagement unilatéral de l'employeur.

L'employeur n'est donc jamais contraint de souscrire un plan de retraite. Toutefois, il pourra y trouver de nombreux avantages (déductions fiscales et exonérations sociales, reprise du dialogue social, renforcement du lien entre le salarié et l'entreprise, etc.).

En outre, l'employeur peut souscrire à tout moment (à l'exception de la souscription par décision unilatérale qui ne peut intervenir qu'un an après le début des négociations).

2. Souplesse et liberté dans le fonctionnement

a) Rente ou capital (article 4)

Le texte proposé privilégie la sortie en rente viagère. Néanmoins, il ménage une possibilité de sortie en capital, limitée à 30 % de la provision mathématique représentative des droits de l'adhérent.

Cette possibilité est indispensable pour assurer le succès des plans de retraite, la sortie obligatoire étant souvent considérée comme trop rigide. En outre, l'arrivée à l'âge de la retraite peut coïncider avec de nouvelles dépenses importantes, comme par exemple l'achat de la résidence de retraite.

b) Déductibilité du revenu imposable (article 8)

S'agissant de la déductibilité des cotisations du revenu imposable (sous plafond), votre commission vous propose d'autoriser le report en avant de la partie de l'enveloppe fiscale non consommée sur une période de trois ans afin de prendre en compte le cas de salariés qui en raison d'événements exceptionnels (notamment chômage, accident, achat d'une habitation, etc.) ne seraient pas en mesure d'effectuer leurs versements de façon aussi régulière qu'ils l'avaient projeté.

c) Les types de contrats

De nombreuses caractéristiques des plans seront choisies au moment de la souscription de ces contrats.

En particulier, les conclusions de la Commission des affaires sociales ne tranchent pas entre les systèmes à cotisations définies et ceux à prestations définies : le choix pourra être effectué dans l'accord collectif (ou par engagement de l'employeur). Il convient toutefois de remarquer qu'une nette tendance se dégage en faveur des contrats à cotisations définies qu'il conviendrait d'encourager car ils permettent en règle générale de servir de meilleures rentes.

d) La délégation de gestion (article 19)

Le texte ne prévoit pas d'obligation de délégation de la gestion des actifs du fonds à des professionnels de la gestion financière . Les fonds de retraite seront libres de choisir entre une gestion directe par leurs propres équipes et une délégation à une entreprise d'investissement dont c'est le métier. Votre Commission des finances est favorable à la délégation de gestion qui permet de mieux séparer les fonctions de garantie (métier de l'assureur) de celles de gestion (métier de l'entreprise de gestion) et d'assurer que les actifs sont gérés dans le seul intérêt des adhérents.

Il semble toutefois sage de laisser les acteurs du marché le choix du mode de gestion des actifs financiers qui leur semblera le plus efficace.

B. LA PROTECTION DE L'ADHÉRENT

1. La garantie du transfert des droits et du maintien des droits acquis

Diverses dispositions de portabilité des droits sont prévues afin d'assurer une grande souplesse à l'adhérent, qui ne doit pas se retrouver prisonnier de son plan.

Lorsque un plan de retraite est proposé dans l'entreprise, alors que le salarié a déjà adhéré sur une base individuelle à un autre plan, il a la possibilité de transférer ses droits sur le plan de son entreprise (article 6 alinéa 2).

En cas de rupture du contrat de travail, l'adhérent peut continuer à abonder son plan, demander le transfert de ses droits sur un autre plan ou demander le maintient des droits acquis sur son plan (article 12).

Tous les dix ans, l'adhérent peut demander le transfert de ses droits acquis sur un autre plan (article 13).

Il convient toutefois de s'assurer que la remise en cause du choix du plan est encadrée car dans le cas contraire, le fonds, incertain quant à l'horizon de ses engagements, serait tenté de modifier la composition de ses actifs pour les rendre plus liquides et donc moins rentables. C'est donc in fine le taux de rente qui serait affecté.

Le maintien des droits acquis par un salarié dans un plan est également expressément prévu en cas de rupture du contrat de travail (article 12).

2. L'externalisation de la gestion

Les conclusions de la Commission des affaires sociales excluent clairement un mode de financement interne à l'allemande, jugé insuffisamment protecteur des droits des adhérents. Le système choisi fait matériellement sortir du patrimoine de l'entreprise les actifs des plans de retraite : ils ne pourront donc pas être menacés en cas de disparition de l'entreprise et l'adhérent conservera ses droits même en cas de rupture de son contrat de travail avec l'entreprise dans laquelle il avait souscrit un plan.

Les incidence de ce choix sur les structures de notre économie ne sont pas anodines. Il marque une préférence pour une vison du monde économique et financier caractérisée notamment par un financement par les marchés financiers et une grande mobilité des travailleurs.

Concrètement, il a été choisi de conférer la personnalité morale aux fonds de pension et de les constituer sous forme assurantielle (article 14). Le régime de l'assurance a été jugé le plus sûr des régimes existants pour garantir le versement d'une rente.

Cette solution est tout à fait défendable, mais ce n'est pas l'unique possibilité. On peut rappeler à cet effet que la proposition de loi n° 222 de 1993 de votre rapporteur instituait des fonds de pension sans personnalité morale, résultant d'un simple contrat.

La " fiducie ", forme idéale des fonds de retraite ?

Qu'est-ce que la fiducie ? La fiducie n'existe pas en France actuellement. Selon les termes d'un projet de loi datant de 1992, c'est un " contrat par lequel un constituant transfère tout ou partie de ses biens et droits à un fiduciaire qui, tenant ces biens et droits séparés de son patrimoine personnel, agit dans un but déterminé au profit d'un ou plusieurs bénéficiaires conformément aux stipulations du contrat ".

La fiducie, le " trust " à la française. La fiducie est un concept juridique proche du " trust " anglo-saxon. Celui permet à une personne, désignée comme le constituant, de transférer la propriété d'une partie de ses biens à une autre personne, désignée comme le " trustee " ou " fiduciaire ". Ce dernier doit gérer ces biens dans l'intérêt de bénéficiaires désignés dans l'acte de constitution du trust . Les biens mis en trust constituent un patrimoine distinct et affecté, à l'abri des créanciers du fiduciaire et de ceux du constituant.

Pourquoi la fiducie serait-elle utile pour la mise en place de fonds de pension en France ? L'existence de la fiducie permettrait la constitution de fonds de pension sans personnalité juridique. Ainsi les adhérents du plan seraient des constituants qui transféreraient leurs cotisations périodiques à un fiduciaire chargé d'en assurer la gestion en vue de constituer une épargne retraite au bénéfice des adhérents ou de leurs ayant droits. Cette solution offrirait une souplesse et une protection des adhérents tout à fait remarquables. Par exemple, l'absence de fiducie impose de mettre en place une structure plus lourde avec une personnalité morale dédiée et des comités de surveillance pour assurer la surveillance de la gestion du plan par le fonds. Il peut en effet y avoir conflit d'intérêts entre ceux du fonds et ceux des adhérents. Avec la fiducie, ce comité aurait été superflu.

Ce texte n'est pas le véhicule législatif adapté à l'introduction de la fiducie en droit français. Néanmoins, il faut rappeler que l'instauration de cette nouvelle forme juridique est demandée de toutes parts et qu'elle peut être utile dans de nombreux autres cas de figure. Il est temps de faire preuve d'un peu de modernité juridique et d'introduire la fiducie en droit français.

3. La protection de l'adhérent par la mise en concurrence

a) La mise en concurrence est bénéfique à l'adhérent

La concurrence est ménagée entre fonds de retraite , notamment par leur mise en concurrence lors de la souscription d'un plan de retraite par l'employeur (article 17) et le réexamen périodique obligatoire du choix du fonds (article 18).

Une concurrence est également ménagée entre plans de retraite avec notamment la possibilité pour l'adhérent de transférer ses droits tous les dix ans sur un nouveau plan (article 13)

Cette mise en concurrence sera bénéfique aux adhérents en incitant les fonds de retraite à une meilleure gestion que dans le cas où les adhérents demeureraient prisonniers d'un premier choix malencontreux. Ces possibilités sont toutefois clairement encadrées afin de ne pas conduire à trop d'instabilité pour les fonds et de ne pas s'avérer contre-productives.

b) Le souci d'une concurrence loyale

Le souci d'une concurrence loyale entre fonds de retraite a également conduit à prévoir que, quelque soit leur forme juridique, ils sont assujettis à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun.

Il semble justifié à votre Commission de vous proposer dans le même ordre d'idées d'exonérer les fonds de retraite du paiement de la contribution des institutions financières (CIF) que seules les entreprises d'assurance acquittent, afin de rétablir une concurrence loyale entre fonds.

La contribution des institutions financières

La contribution des institutions financières (CIF) a été créée en 1982 25 ( * ) à titre exceptionnel . Mais elle est devenue permanente dès 1984 26 ( * ) et depuis, bien que continuellement dénoncée, n'a pas été remise en cause.

En vertu de l'article 235 ter Y du code général des impôts , elle est payée par " les établissements de crédit, les entreprises d'assurance, de capitalisation et de réassurance de toute nature, ainsi que les sociétés immobilières pour le financement du commerce et de l'industrie " 27 ( * ) .

L'assiette de cette contribution est constituée par des dépenses et charges comptabilisées au cours de l'année précédente, en particulier les charges de personnel , les frais de gestion et les dotations aux amortissements : il s'agit donc d'une " taxe sur les frais généraux " des institutions financières .

Son taux est fixé à 1 % . Un abattement automatique de 20.000 francs est pratiqué mais elle n'est pas admise en déduction du bénéfice imposable de l'exercice au titre duquel elle est due.

Elle a rapporté en 1998 environ 2,85 milliards de francs au budget de l'Etat, 3 milliards en 1999 et devrait en rapporter 3 milliards en 2000.

(D'après le rapport de la Commission des finances du Sénat sur le projet de loi relatif à l'épargne et à la sécurité financière, article 52, n° 300, 1998-1999, M. Philippe Marini).

4. Un dispositif prudentiel renforcé

La réglementation prudentielle des fonds de retraite selon la Commission européenne

Dans une communication, les services de la Commission préconisent l'adoption d'une directive qui viserait les quatre objectifs suivants : 1- assurer la meilleure protection possible des bénéficiaires, 2- permettre aux fonds de retraite de profiter pleinement du Marché Unique et de l'euro, 3- garantir l'égalité de traitement entre les prestataires de retraites complémentaires liées à un emploi et 4- permettre la reconnaissance mutuelle des régimes prudentiels.

Trois ensembles de règles pourraient composer la directive et conduire à une harmonisation minimale (en raison de la forte disparité des fonds de retraite opérant dans l'Union européenne) :

D'une part des règles prudentielles fondamentales : il s'agit notamment de l'agrément des fonds de retraite par une autorité compétente, de la nécessité de subordonner cet agrément à de stricts critères de responsabilité, de compétence et d'honorabilité des gestionnaires, de la définition des pouvoirs d'intervention de l'autorité de contrôle, de la mise en place de mécanismes de déclarations périodiques à l'adresse des affiliés et des autorités de contrôle ;

D'autre part des règles relatives au placement des cotisations : il s'agit notamment de s'assurer que les placements sont adaptés à la nature et à la durée des engagements souscrits et qu'ils sont correctement diversifiés. Le cadre réglementaire devra être pleinement compatible avec la libre circulation des capitaux ;

Enfin, des règles relatives au passif du bilan des fonds de retraite et au lien actif-passif : il s'agit notamment de prévoir le calcul des provisions techniques selon une méthode actuarielle prudente et reconnue et la fixation d'un niveau de financement minimal destiné à garantir que les droits à prestation acquis sont totalement couverts.

a) L'agrément des fonds de retraite (article 15)

Il est prévu qu'avant de pouvoir commencer leurs activités, les fonds de retraite devront avoir obtenu un agrément administratif du ministre chargé de l'économie.

Votre Commission des finances vous propose de poser des conditions supplémentaires à l'octroi de cet agrément , en conformité avec les dispositions de la directive dite " post-BCCI ", transposée récemment à l'initiative du Sénat dans la loi relative à l'épargne et à la sécurité financière 28 ( * ) .

Votre Commission des finances vous propose également de prévoir également les conditions du retrait de cet agrément .

b) L'adhésion à un fonds de garantie

Votre Commission des finances vous propose de prévoir l'adhésion obligatoire des entreprises d'assurance au nouveau fonds de garantie des assurés institué par la loi n° 99-532 du 25 juin 1999 relative à l'épargne et à la sécurité financière, afin de prémunir les adhérents contre une éventuelle faillite de leur fonds de retraite.

Les mutuelles et les institutions de prévoyance ne peuvent pas aujourd'hui adhérer à un tel fonds de garantie. Un rapport du gouvernement est prévu dans la loi relative à l'épargne et à la sécurité financière précitée pour remédier à terme à cette lacune. Il devra être rendu au plus tard à la fin du mois de mars 2000.

c) Les obligations déontologiques du fonds

Le fonds de retraite devra toujours faire prévaloir les intérêts des adhérents sur leurs propres intérêts . Dans cette optique, ils seront obligés, sauf exception, d'exercer les droits de vote attachés aux titres de capital qu'ils ont à leur actif toujours dans l'intérêt exclusif des adhérents.

L'obligation d'exercice des droits de vote

Aux Etats-Unis , en février 1988, le ministère du travail américain a envoyé au président de la caisse de retraite de la société Avon Products Inc. une lettre ( Avon letter ) lui indiquant que les droits de vote rattachés aux actions étaient dorénavant assimilés à des actifs financiers et donc susceptibles d'être protégés comme tels. Il a ainsi fait obligation aux fonds de pension de voter aux assemblées générales des sociétés dont ils sont actionnaires.

Par la suite, le ministère du travail est allé plus loin que la simple obligation de vote en contraignant les gérants de fonds à "utiliser tout le soin, toute l'expertise, toute la prudence et toute la diligence" requis dans l'exercice de leurs droits de vote.

Il est probable que la procédure classique du vote en blanc , sans aucune justification de la part des fonds de pension, constituerait une violation des recommandations du ministère du travail. Cela ne devrait pas empêcher les fonds de pension de voter avec la direction. Mais chaque pouvoir en blanc devra être justifié et présenté en cas d'inspection.

Enfin, le 24 février 1995, le ministère du travail a étendu l'obligation de voter aux assemblées générales des sociétés étrangères dans lesquelles les fonds de pension américains détiennent des participations. Les gérants ont néanmoins la possibilité de contourner cette recommandation en démontrant le coût prohibitif pour exercer leur droit de vote à l'étranger, ce qui semble être le cas dans de nombreux pays émergents ou dans les pays scandinaves. (...)

En France , l'Association des sociétés et fonds français d'investissement a édicté en avril 1996 un règlement de déontologie qui recommande aux établissements gestionnaires de voter dans les assemblées générales. Ces recommandations ont été étendues par la COB à l'ensemble des professionnels de la gestion collective.

Or, les OPCVM français sont encore très dépendants des établissements bancaires qui les contrôlent le plus souvent. Sous la pression du groupe auquel il appartiennent, les gérants d'OPCVM peuvent en effet se retrouver objectivement contraints de réaliser des opérations défavorables aux souscripteurs. Si certaines opérations auparavant pratiquées (le fait de "charger" le portefeuille géré en titres illiquides) sont devenues plus rares, d'autres peuvent toujours être redoutées. C'est, par exemple, le fait pour un OPCVM de ne pas apporter ses titres lors d'une OPA parce que la banque dont il dépend entretient des relations commerciales actives avec la société objet de cette prise de contrôle, quand bien même cette opération aurait dégagé de substantielles plus-values au profit des actionnaires de la SICAV.

On peut espérer que ces situations disparaîtront progressivement avec la prise de conscience des professionnels de l'autonomie indispensable des gestionnaires et le vote de la loi de modernisation des activités financières dont l'article 64 fait obligation aux actionnaires, sociétaires ou propriétaires d'une société pratiquant la gestion pour compte de tiers, de s'abstenir de toute initiative " qui aurait pour objet ou pour effet de privilégier leurs intérêts propres au détriment des intérêts des investisseurs qui sont les clients de l'entreprise".

Sur la base de ces expériences, il est souhaitable d'aller plus loin et d'imposer législativement l'obligation d'exercice du droit de vote , conformément aux intérêts des porteurs de parts, tant pour les OPCVM existants que pour d'éventuels fonds de pension lorsque ceux-ci seront créés . En outre, il serait utile que les gérants expriment publiquement leurs votes et donnent à ce sujet toutes les explications requises par leurs clients.

(D'après le rapport au Premier ministre, " La modernisation du droit des sociétés ", M. Philippe Marini, Collection des rapports officiels, La Documentation française, Paris, 1996.)

d) La définition de ratios prudentiels spécifiques

Les fonds de retraite sont soumis aux règles prudentielles de l'assurance. Néanmoins, il paraît à votre Commission des finances qu'un certain nombre de règles spécifiques doivent être édictées pour assurer une sécurité maximale de ces nouvelles institutions à la mission particulièrement importante qui sera la leur.

Votre Commission des finances vous propose donc de soumettre les fonds de retraite à des règles spécifiques d'évaluation de leurs actifs, de provisionnement de ces actifs et de participation aux excédents.

De façon plus précise, elle vous propose également de limiter à 5 % la part des titres d'un même société cotée émettrice dans les engagements réglementés du fonds de retraite. En outre, la part des titres de sociétés non cotées ne pourra excéder 1/10 ème des engagements du fonds, dans la limite de 0,5 % par émetteur.

5. Ne pas imposer des normes contraignantes de répartition des actifs entre titres de capital et titres de créances

Certaines propositions précédentes prévoyaient des règles d'investissement minimal en actions ou maximal en obligations dans le souci, louable, de favoriser les fonds propres de nos entreprises.

L'avis de votre Commission est qu'il vaut mieux laisser les gestionnaires gérer les actifs de la façon qu'ils jugeront la plus efficace dans l'objectif de constitution de retraites. Naturellement, ils se porteront en priorité sur les titres qui offrent la meilleure rentabilité de long terme et si le rendement à long terme des actions demeure supérieur à celui des obligations , leur choix se portera vers ces premières, pour le plus grand profit des retraités qui bénéficieront de meilleures retraites et de nos entreprises dont les fonds propres seront renforcés. Le rapport Charpin rappelle que depuis la guerre, le rendement des actions a été de 6,6 % par an en moyenne, alors que celui des obligations n'était que de 2,3 %.

En outre, imposer un pourcentage minimal ou maximal ne donnera pas la souplesse de gestion nécessaire : en phase de démarrage ou à maturité, le fonds ne peut pas avoir la même composition de ses actifs, dans un cas il privilégiera une composition majoritaire en titres de capital et dans l'autre, une composition majoritaire en titres de créances, dans l'objectif de servir les meilleures retraites possibles.

Il serait donc inefficace d'imposer de telles normes contraignantes de gestion : il faut avant tout laisser les fonds ou leurs gestionnaires gérer les actifs qui leur sont confiés de façon souple. L'objectif de ce texte est, rappelons-le, d'assurer des retraites sur-complémentaires à une partie des actifs d'aujourd'hui, ce n'est nullement de renforcer les fonds propres des entreprises ou de développer la place financière de Paris : tant mieux si c'est l'effet de l'essor des plans de retraite. Il faut se garder de courir deux lièvres à la fois.

6. La protection de l'adhérent par la transparence et le contrôle

a) L'information et la transparence (articles 22 et 23)

La protection de l'adhérent est également assurée par de nombreuses dispositions visant à son information par le souscripteur (l'employeur) et par le fonds lui-même. Des mesures réglementaires pourront prévoir des dispositions supplémentaires.

b) Les contrôles

Le contrôle sur les fonds est assuré par une commission ad hoc , la commission de contrôle des fonds de retraite (article 16).

Celui sur les plans est attribué au conseil de surveillance où siègent des représentants des adhérents (article 24). Il s'agit d'une surveillance partenariale.

Enfin, le contrôle du délégataire de la gestion financière, s'il existe, est assuré par la Commission des opérations de bourse (COB).

Il apparaît que tant la Commission des affaires sociales, que la Commission des finances dans son domaine, ont accordé une importance très grande à la protection des adhérents. Il est capital que ceux-ci aient confiance dans le nouvel instrument d'épargne-retraite qui leur est proposé : son succès en dépend.

* 23 On renverra au rapport n° 361 de la Commission des finances du Sénat (1992-1993) pour une présentation détaillée des différences entre ces deux régimes.

* 24 On pourra notamment se reporter utilement aux rapports suivants : Commission des finances du Sénat, n° 361, par M. Philippe Marini, 1992-1993 ; Commission des finances du Sénat, n° 124, par M. Philippe Marini, 1996-1997 ; Commission des finances du Sénat, n° 45, " Assurons l'avenir de l'assurance ", par M. Alain Lambert, 1998-1999 (page 103).

* 25 Article 4 de la loi de finances rectificative du 28 juin 1982.

* 26 Article 21 de la loi de finances pour 1985 (n° 84-1208 du 29 décembre 1984).

* 27 En revanche, les fonds d'épargne retraite prévus par la loi Thomas n° 97-277 du 25 mars 1997 créant les plans d'épargne retraite ne sont pas assujettis à cette contribution.

* 28 Loi n° 99-532 du 25 juin 1999. Rapport de la Commission des finances du Sénat, n° 300, par M. Philippe Marini, 1998-1999.

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