CONCLUSION

. Les deux premières années de la professionnalisation appellent donc, s'agissant de l'armée de terre, un bilan globalement positif. Il convient, à cet égard, de rendre hommage aux personnels de l'armée de terre , qui abordent les mutations en cours avec un dévouement et une compétence dignes d'éloges.

. On ne saurait toutefois accueillir avec satisfaction les économies réalisées sur les crédits d'équipement des armées, du fait de la "revue des programmes", par rapport aux prévisions de la loi de programmation. Même si le titre V de la Défense pour 1999 paraît caractérisé par une certaine stabilisation, par rapport à "l'encoche" déplorée en 1998, il n'en demeure pas moins en retrait des annuités auxquelles avait souscrit le législateur pour la période 1997-2002. Les crédits d'équipement de l'armée de terre prévus pour 1999 n'échappent pas à cette critique.

. Quant aux crédits de fonctionnement, leur équilibre est altéré par les tensions liées au financement de la professionnalisation à titre III constant, sans tenir compte de la nécessité de faire face aux diverses dépenses induites par la période de transition.

La baisse sensible -et symbolique- de l'activité des forces terrestres prévue pour 1999 invite à douter de la possibilité de financer la professionnalisation sans actualiser, au moins de manière transitoire, les dépenses de fonctionnement.

Il est en effet clair que les tensions qui pèsent aujourd'hui sur le titre III de l'armée de terre pourraient, si elles s'aggravaient, devenir problématiques pour une armée professionnelle.

.
En dépit de ces différentes réserves, votre rapporteur estime possible de donner acte au gouvernement de la relative stabilisation des crédits d'équipement de la défense en concluant favorablement à l'adoption du projet de budget de la défense pour 1999.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a consacré deux réunions à l'examen du projet de budget de la défense pour 1999.

Elle a examiné le présent avis au cours de sa séance du mercredi 4 novembre 1998.

A l'issue de l'exposé de M. Serge Vinçon, un débat s'est instauré entre les commissaires.

M. Christian de La Malène a souligné la difficulté de financer simultanément la professionnalisation et des besoins qui demeureront, à beaucoup d'égards, ceux d'une armée mixte jusqu'en 2002. Il a constaté que les déflations d'effectifs mises en oeuvre depuis 1997 ne permettaient pas d'atteindre l'objectif d'une meilleure disponibilité des forces terrestres. M. Christian de La Malène a également relevé, avec M. Serge Vinçon, que la "revue des programmes" revenait à mettre en cause les prévisions établies par la loi de programmation sans requérir l'approbation du Parlement.

M. Christian de La Malène a, par ailleurs, contesté la logique tendant à effectuer sur certains postes du titre V des économies que la réduction du format de l'armée de terre ne suffit pas à justifier.

M. Emmanuel Hamel a alors estimé que la situation internationale ne justifie aucunement une diminution des crédits militaires, alors même que le produit national permet, selon lui, un effort plus substantiel en faveur de notre outil de défense. Il a indiqué qu'il ne saurait, en conscience, approuver un budget aussi insuffisant malgré ses réticences à ne pas voter les crédits militaires.

A cet égard, M. Serge Vinçon, rapporteur pour avis, a rappelé que la majorité sénatoriale avait rejeté le budget de la défense dans le cadre du projet de loi de finances pour 1998 en raison de la forte réduction des crédits d'équipement alors constatée. Il a observé que la reprise du titre V du budget de la défense, même si celle-ci ne traduit qu'un rattrapage incomplet, pourrait justifier le vote du budget de la défense, assorti toutefois de vives réserves. M. Serge Vinçon a rappelé que les armées avaient été associées à la "revue des programmes" et que les économies qui en résultaient ne leur avaient pas été imposées dans les mêmes conditions que l'"encoche" de 1998.

M. Xavier de Villepin, président, a estimé nécessaire d'assurer la cohérence des positions de la majorité sénatoriale à l'égard du budget de la défense.

MM. Paul Masson et Serge Vinçon sont alors revenus sur les conséquences opérationnelles de la nouvelle baisse des objectifs d'activité des forces prévue en 1999, en contradiction avec les besoins d'une armée professionnelle.

M. Philippe de Gaulle a ensuite commenté, avec le rapporteur pour avis, les insuffisantes ouvertures de postes civils pour la professionnalisation de l'armée de terre et les conditions de recrutement des volontaires.

M. Serge Vinçon a alors rappelé les difficultés auxquelles l'armée de terre est confrontée du fait de l'augmentation du nombre de bénéficiaires de reports d'incorporation, conséquence des modifications intervenues dans le code du service national.

M. Xavier de Villepin, président, est revenu sur les conséquences opérationnelles susceptibles de résulter des économies réalisées sur les activités des forces. Il a jugé contestable l'assimilation faite entre les "emplois-jeunes" et les volontariats dans les armées, en contradiction, selon lui, avec l'esprit du lien armées-Nation.

Le rapporteur pour avis a ensuite commenté, à la demande de M. Xavier de Villepin, président, les modifications intervenues en 1998 en matière de rémunération des personnels en opérations extérieures.

M. Xavier de Villepin, président, a alors rappelé que la commission ne voterait sur l'ensemble des crédits de la défense pour 1999 qu'après avoir entendu tous ses rapporteurs pour avis.

*

* *

La commission a examiné l'ensemble des crédits du ministère de la défense pour 1999, au cours de sa réunion du mercredi 18 novembre 1998.

M. Xavier de Villepin, président, a rappelé que tous les rapporteurs pour avis qui s'étaient exprimés devant la commission avaient relevé que le projet de budget pour 1999 marquait le retour à une orientation plus positive par rapport au budget voté de 1998, en raison de la hausse significative des crédits d'équipement, et qu'ils avaient conclu à l'approbation des crédits, tout en émettant de fortes réserves, particulièrement en ce qui concerne la réduction des crédits de fonctionnement courant.

M. Christian de La Malène a considéré que le projet de budget de la défense pour 1999 s'inscrivait dans une orientation générale déjà perceptible l'an passé et consistant à opérer des prélèvements sur les moyens dévolus à la défense nationale. Il a rappelé son attachement à la réforme des armées et à la loi de programmation militaire, qui définissait les moyens permettant de la mener à bien. Il a vivement déploré que les engagements pris lors de cette loi de programmation aient été remis en cause dès ses premières années d'application. Evoquant le niveau des commandes de Rafale, limité à un seul appareil dans le projet de budget pour 1999, et les conséquences de la limitation de nos capacités aéronavales à un seul porte-avions, il a estimé que notre pays n'assumait plus, comme il convenait, les exigences de sa défense nationale. Rappelant que jusqu'à l'an passé, il avait toujours voté les crédits militaires durant près de quarante années de vie parlementaire, il a indiqué qu'avec regret il n'approuverait pas le budget de la défense pour 1999, ne voulant pas s'associer à un déclin de notre effort militaire qui atteint désormais, à ses yeux, un niveau inacceptable.

M. Michel Caldaguès , tout en se félicitant de la hausse des crédits d'équipement après "l'encoche" de 1998, a indiqué qu'il ne pourrait approuver le budget de la défense pour 1999. Il a déploré les orientations générales dans lesquelles s'inscrit l'affectation des moyens dévolus à la défense qui, à ses yeux, privilégient des dépenses liées à des actions internationales aux retombées incertaines, aux dépens de programmes qui donnent sa spécificité à la défense française, tels que le nucléaire ou la capacité aéronavale.

M. Xavier de Villepin, président , a souligné l'importance du rôle de la France dans la résolution de conflits tels que ceux de l'Irak ou des Balkans, et s'est félicité de son action en faveur du maintien de la paix dans le monde.

M. Michel Caldaguès a alors précisé que sa critique ne visait pas de telles actions, mais plutôt une dispersion de l'effort de défense dans des directions qui ne conduisent pas à des bénéfices concrets pour notre pays.

M. Paul Masson , limitant son intervention aux problèmes de la gendarmerie, a rappelé l'importance qui s'attachait à l'organisation d'un débat au Sénat sur le problème du redéploiement des forces de gendarmerie et de police, dont l'écho dans le pays est particulièrement sensible.

M. Serge Vinçon a considéré que le projet de budget pour 1999 ne pouvait donner entièrement satisfaction puisqu'il s'écartait de la loi de programmation, qu'il entérinait la "revue de programmes" dont les conclusions n'avaient pas été avalisées par le Parlement et qu'il créait de fortes tensions sur le titre III. Il a toutefois estimé qu'il convenait de prendre acte d'évolutions positives, puisque "l'encoche" était en partie résorbée et que les économies décidées à l'issue de la "revue de programmes" avaient été définies en étroite liaison avec les états-majors. Estimant que le Gouvernement avait tenu compte des observations du Chef de l'Etat en relevant significativement les crédits d'équipement, il a indiqué qu'il approuverait le projet de budget proposé pour 1999, comme la grande majorité des membres de son groupe.

M. Jean-Luc Bécart a constaté qu'avec le projet de budget pour 1999, l'étau avait été desserré sur les crédits d'équipement. Il a fait part de ses interrogations sur certaines orientations de notre politique de défense, en particulier le programme nucléaire et les fortes réductions d'effectifs dans l'industrie d'armement. Il a relevé les contraintes pesant sur le titre III du fait d'un coût de la professionnalisation plus élevé que prévu. Il a déclaré qu'à ce stade, il s'abstiendrait sur ce projet de budget.

Après que M. Xavier de Villepin, président , eut rappelé les conclusions des différents rapporteurs pour avis, préconisant l'adoption des crédits proposés mais émettant de fortes réserves en particulier sur la réduction des dépenses de fonctionnement courant, la commission a émis un avis favorable à l'adoption de l'ensemble des crédits du ministère de la défense pour 1999.

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