Avis n° 82 (1995-1996) de M. André BOHL , fait au nom de la commission des lois, déposé le 29 novembre 1995
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I. L'ADMINISTRATION TERRITORIALE : LE CHANTIER
DE LA REFORME DE L'ÉTAT
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II. LES FINANCES LOCALES : LA
DÉFINITION D'UN PACTE DE STABILITÉ DES RELATIONS
FINANCIÈRES ENTRE L'ÉTAT ET LES COLLECTIVITÉS
LOCALES
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III. LA NÉCESSAIRE CLARIFICATION DES
CONDITIONS D'EXERCICE COMPÉTENCES LOCALES
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A. LES RELATIONS FINANCIÈRES ENTRE
L'ÉTAT ET LES COLLECTIVITÉS LOCALES
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B. LA RÉFLEXION SUR LA RÉPARTITION
DES COMPÉTENCES
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C. LA SIMPLIFICATION DU RÉGIME JURIDIQUE DE
LA COOPÉRATION INTERCOMMUNALE ET LA MISE EN OEUVRE DE LA NOTION DE
PAYS
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D. L'APPLICATION DES NOUVELLES DISPOSITIONS
RELATIVES À LA FONCTION PUBLIQUE TERRITORIALE
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A. LES RELATIONS FINANCIÈRES ENTRE
L'ÉTAT ET LES COLLECTIVITÉS LOCALES
N° 82
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996
Annexe au procès-verbal de la séance du 21 novembre 1995.
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale(1) sur le projet de loi de finances pour 1996, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,
TOME I
INTÉRIEUR, RÉFORME DE L'État, DÉCENTRALISATION ET CITOYENNETÉ :
DÉCENTRALISATION
Par M. André BOHL,
Sénateur.
Voir les numéros :
Assemblée nationale (l0ème législ.) : 2222, 2270 à 2275 et T.A. 413
Sénat : 76 et 77 (annexe n°25) (1995-1996)
Lois de finances.
(1) Cette commission est composée de : MM. Jacques Larché. Président ; René-Georges Laurin, Germain Authié, Pierre Fauchon, François Giacobbi, vice-présidents ; Robert Pagès, Michel Rufin, Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest, secrétaires ; Guy Allouche, Jean-Paul Amoudry, Robert Badinter, Pierre Biarnès, François Blaizot, André Bohl, Christian Bonnet, Mme Nicole Borvo, MM. Philippe de Bourgoing, Charles Ceccaldi-Raynaud, Claude Cornac, Raymond Courrière, Jean-Patrick Courtois, Charles de Cuttoli, Luc Dejoie, Jean-Paul Delevoye, Christian Demuynck. Michel Dreyfus-Schmidt, Patrice Gélard, Jean-Marie Girault, Paul Girod, Daniel Hoeffel, Charles Jolibois, Lucien Lanier, Paul Masson, Daniel Millaud, Georges Othily, Jean-Claude Peyronnet, Claude Pradille, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Jean-Pierre Schosteck, Jean-Pierre Tizon, Alex Türk, Maurice Ulrich.
Mesdames, Messieurs,
L'effort financier de l'État en faveur des collectivités locales - tel qu'il ressort de l'état récapitulatif annexé au fascicule budgétaire « Intérieur, réforme de l'État, décentralisation et citoyenneté » s'élèvera en 1996, à 283 milliards de francs, fiscalité transférée incluse, en moyens d'engagement (dépenses ordinaires et autorisations de programme). Hors fiscalité transférée, il atteindra 239,1 milliards de francs.
Les crédits inscrits dans le même fascicule budgétaire qui sont spécifiquement consacrés aux collectivités locales et à la décentralisation s'élèvent, pour leur part, à 27,4 milliards de francs en dépenses ordinaires et crédits de paiement, soit environ 35 % du budget total qui atteint 78,1 milliards de francs.
La progression des concours de l'État s'inscrit dans un nouveau cadre dit « pacte de stabilité » qui devra régir les relations financières entre l'État et les collectivités locales au cours des trois prochaines années. Dans ce cadre ainsi défini, les concours de l'État connaissent des évolutions différenciées qu'il convient de prendre en compte.
En outre, la situation des budgets locaux apparaît, cette année encore, difficile. L'augmentation des dépenses de gestion sera, en effet, plus élevée que celles des recettes courantes.
Dans ce contexte, l'objectif de clarification des conditions d'exercice des compétences locales - sur lequel votre commission des Lois avait appelé l'attention du Sénat l'an passé et qui devrait connaître certains développements en 1996- constitue assurément une priorité.
I. L'ADMINISTRATION TERRITORIALE : LE CHANTIER DE LA REFORME DE L'ÉTAT
L'effort consacré, en 1996, à l'administration territoriale représentera 6,077 milliards de francs en dépenses ordinaires et crédits de paiement, soit une progression de + 2,6 % par rapport à 1995.
Les dépenses des personnels du corps préfectoral et des préfectures représentent les deux tiers des crédits consacrés à l'administration territoriale.
On relèvera, en particulier, la poursuite de l'application du protocole d'accord sur la rénovation de la grille de la fonction publique sous la forme de revalorisations de rémunérations et de la transformation de certains emplois.
Dans le cadre du grand chantier de la réforme de l'État lancé par le Gouvernement, la déconcentration des services doit, plus que jamais, constituer une priorité majeure. En outre, la modernisation des préfectures doit permettre de mieux répondre aux attentes légitimes des usagers.
A. LA DÉCONCENTRATION : UN OBJECTIF PRIORITAIRE POUR LA REFORME DE L'ÉTAT
La politique de déconcentration a été relancée à la suite du comité interministériel d'aménagement du territoire qui s'est tenu à Mende, le 12 juillet 1993, et du comité interministériel de l'administration territoriale (CIATER) du 23 juillet 1993. A cette occasion, environ trois cents mesures ont été prises afin de traduire le principe issu de la loi d'orientation du 6 février 1992 qui fait des services déconcentrés l'échelon de droit commun de l'action administrative.
Le CIATER s'est de nouveau réuni au troisième trimestre 1994, afin de dresser un bilan de ces mesures et d'examiner des schémas directeurs ministériels de réorganisation et de déconcentration.
Soucieux d'affirmer le rôle de la déconcentration dans l'aménagement du territoire, le législateur a, par la suite, arrêté une série de dispositions dans le cadre de la loi du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire.
L'article 25 de la loi du 4 février 1995 prévoit, en premier lieu, que les transferts d'attribution des administrations centrales aux services déconcentrés des administrations civiles de l'État devront être réalisés dans un délai de dix-huit mois.
En second lieu, il fixe le principe -qui devra être mis en oeuvre dans le même délai- de regroupements fonctionnels des services déconcentrés de l'État dont la finalité sera de favoriser leur efficacité, leur polyvalence et leur présence sur le territoire. Ces regroupements devront être opérés dans le cadre d'un schéma de réorganisation des services de l'État qui précisera les niveaux d'exercice des compétences de l'État et les adaptations de leurs implantations territoriales.
Enfin, l'article 25 précité a précisé les compétences des sous-préfets qui, dans le cadre de l'arrondissement, sont chargés, par délégation du préfet, d'animer et de coordonner l'action des services de l'État.
La circulaire du Premier ministre du 26 juillet 1995 relative à la préparation et à la mise en oeuvre de la réforme de l'État et des services publics a donné une nouvelle impulsion à l'action de l'État dans ce domaine en définissant cinq objectifs prioritaires :
- clarifier les missions de l'État et le champ des services publics ;
- mieux prendre en compte les besoins et les attentes des citoyens ;
- changer l'État central ;
- déléguer les responsabilités ;
- rénover la gestion publique.
Afin de changer l'État central, la circulaire fixe le principe selon lequel « les tâches de gestion aujourd'hui encore prises en charge par les administrations centrales devront être résolument transférées vers les services déconcentrés ».
Corrélativement, les effectifs réels des administrations centrales devront être sensiblement réduits. Le Premier ministre a fixé un premier objectif de 10 % de réduction de ces effectifs pour l'ensemble de l'État, d'ici la fin de l'année 1996.
Pour déléguer les responsabilités, trois actions principales sont prévues.
D'une part, le schéma de réorganisation des services de l'État prévu par la loi du 4 février 1995 devra être établi.
Le principe qui devra guider l'élaboration de ce schéma est le suivant :
« Les fonctions qui visent à mettre en oeuvre les politiques publiques, les législations et, plus généralement, les prestations de service public, doivent être, par principe, déléguées soit à des services déconcentrés à compétence territoriale ou nationale, soit à des établissements publics, en ayant le souci d'éviter tout recouvrement de compétences entre les uns et les autres ».
D'autre part, le regroupement fonctionnel des services de l'État devra être réalisé d'ici la fin 1996.
Le comité pour la réorganisation et la déconcentration des administrations centrales (CRDA) a réalisé une étude sur ce sujet qui a notamment formulé des propositions de regroupement de services.
La circulaire du 26 juillet 1995 prévoit, en particulier, le rapprochement entre les directions départementales de l'équipement et celles de l'agriculture et de la forêt.
Plus profondément, une rénovations des relations entre l'État central et ses opérateurs est prévue. Dans le cadre des centres de responsabilité, de nouveaux modes de gestion des crédits de fonctionnement ont été définis : globalisation des crédits, établissement de budgets de service, suivi mensuel, élaboration et restitution aux services de ratios comparatifs, établissement de comptes rendus de gestion. Il est proposé de généraliser ces règles de gestion à l'ensemble des administrations d'ici la fin de 1996.
En outre, des contrats de services seront expérimentés, dès le 1er janvier 1996, dans plusieurs ministères. Ces contrats permettront notamment de déterminer les objectifs assignés aux services opérateurs, les marges de manoeuvre qui leur seront garanties dans la négociation d'un budget global incluant le personnel, les modalités d'évaluation de leurs coûts et de leurs résultats ainsi que les conditions dans lesquelles les services et les agents pourront bénéficier d'un intéressement aux gains de productivité. Des comparaisons de performance entre services seront effectuées. Parallèlement, de nouveaux contrats d'établissements seront passés, au cours de l'année 1996, entre l'État et ses établissements publics.
Afin de mettre en oeuvre ces objectifs, le décret n° 95-1007 du 13 septembre 1995 a créé, pour une durée de trois ans, un comité interministériel pour la réforme de l'État ainsi qu'un commissariat à la réforme de l'État, placé auprès du Premier ministre.
Le comité interministériel sera, en particulier, chargé de fixer les orientations de la politique gouvernementale afin de déléguer les responsabilités au sein de l'État et de moderniser la gestion publique.
Il devra arrêter un plan triennal de réforme de l'État et délibérera sur le schéma de réorganisation des services de l'État prévu par la loi du 4 février 1995, notamment sur les projets de réorganisation des services déconcentrés de l'État.
Le commissariat à la réforme de l'État sera, pour sa part, chargé, dans le cadre des orientations fixées par le comité interministériel, d'une mission de proposition, de coordination et d'animation de la politique de réforme des administrations. Il établira un rapport annuel qui sera rendu public. Le commissariat constitue une structure souple (27 personnes) dont le coût de fonctionnement n'excédera pas 9.2 millions de francs.
Les réformes ainsi envisagées devraient se traduire par des redéploiements d'effectifs vers l'administration départementale de l'État : cinq à six mille emplois de fonctionnaires seraient ainsi déplacés en 1996, après une étude des moyens de chaque ministère.
Pour le ministère de l'intérieur, 19 emplois d'adjoint administratif ont été transférés, au 1er janvier 1994, de l'administration centrale vers le cadre national des préfectures. Au 1er janvier 1995, 19 emplois d'agent administratif de deuxième classe ont fait l'objet d'un tel transfert. Le projet de loi de finances pour 1996 prévoit le transfert de 25 emplois supplémentaires.
Votre rapporteur pour avis rappelle, par ailleurs, la volonté du législateur de confier aux sous-préfets une mission d'animation et de coordination de l'action des services de l'État dans l'arrondissement. Encore faut-il que les postes soient effectivement pourvus. Au 1er janvier 1995, pour des effectifs budgétaires de 491 sous-préfets, 461 étaient effectivement en activité. Pour la métropole, les mêmes chiffres étaient respectivement de 469 et 421 à la même date.
B. LA MODERNISATION DES PRÉFECTURES
Dans un État déconcentré, les préfectures doivent constituer le pivot de l'administration territoriale de l'État.
Le plan de modernisation mis en oeuvre depuis plusieurs années a tendu à permettre aux préfectures de s'adapter à leurs missions.
Parmi les actions mises en oeuvre, il convient de souligner l'informatisation des services notamment pour la délivrance des titres, la sécurisation des locaux ainsi que la « dés imbrication » des locaux des préfectures avec ceux des départements.
En 1995, 10 millions de francs ont été consommés au titre du fonds de modernisation des préfectures. L'effort a plus particulièrement porté sur l'amélioration des conditions de travail : 8 millions de francs ont ainsi été consacrés aux préfectures qui ont vu leur surface augmenter, à la suite des dés imbrications immobilières avec les locaux des conseils généraux.
L'entretien du patrimoine et l'acquisition d'outils de gestion informatique ont également justifié un effort financier (2 milliards de francs).
En 1996, les dépenses de fonctionnement et d'entretien des préfectures et des sous-préfectures seront maintenues en valeur à un niveau légèrement supérieur à celui de la loi de finances initiale pour 1995 : 1,537 milliard de francs contre 1,525 milliard de francs votés en 1995.
Les crédits d'équipement progresseront sensiblement en autorisations de programme (+ 12,8 %) pour s'établir à 165,3 millions de francs. En revanche, les crédits de paiement passeront de 215,9 à 205,2 millions de francs.
L'effort portera, en particulier, sur la poursuite de la politique de rénovation des halls d'accueil, condition essentielle pour un meilleur accueil des usagers.
Comme l'a souligné le Premier ministre, dans sa circulaire du 26 juillet 1995, la réforme de l'État n'a, en effet, pas d'autres raisons d'être que de mieux prendre en compte les besoins et les attentes des citoyens.
Les services des préfectures et sous-préfectures sont, à l'évidence, parmi les premiers concernés par cette exigence.
Votre rapporteur pour avis soulignera, en particulier, la nécessité de rechercher une meilleure information des usagers sur les décisions prises par les services de l'État et, plus généralement, sur les réglementations en vigueur. Cette préoccupation vaut également pour les élus locaux trop souvent confrontés à la prolifération et à la complexité de réglementations ou de décisions administratives intéressant au premier chef la gestion locale.
Pour ce qui est, enfin, de l'informatique, la généralisation de la carte nationale d'identité informatisée permettra de faire porter l'effort sur la réduction des délais de fabrication de cette carte et sur la sécurisation des systèmes d'exploitation.
L'effort financier de l'État en faveur des collectivités locales en 1996
II. LES FINANCES LOCALES : LA DÉFINITION D'UN PACTE DE STABILITÉ DES RELATIONS FINANCIÈRES ENTRE L'ÉTAT ET LES COLLECTIVITÉS LOCALES
A. LA NOUVELLE MÉTHODE RETENUE POUR L'ÉVOLUTION DES CONCOURS DE L'ÉTAT
Dans un contexte budgétaire difficile dans lequel la réduction des déficits doit constituer une priorité nationale, le Gouvernement continue à associer les collectivités locales à l'effort de redressement des finances publiques.
Cependant, une nouvelle méthode est proposée qui contraste avec les aménagements « brutaux » des règles d'évolution des concours de l'État, opérés ces dernières années, qui empêchaient les collectivités locales d'avoir une vision à moyen terme de l'évolution d'une partie importante de leurs ressources.
Le projet de loi de finances propose, en effet, un pacte de stabilité des relations financières entre l'État et les collectivités locales qui doit permettre de prévoir sur une période de trois ans l'évolution d'un certain nombre de concours de l'État. Le pacte -qui a certes fait l'objet d'une concertation avec des représentants des élus locaux mais qui constitue en réalité un simple engagement politique du Gouvernement- doit permettre de concilier, d'une part, l'objectif de maîtrise de la dépense publique et, d'autre part, le souci légitime des collectivités locales de pouvoir compter sur une stabilité des règles du jeu leur permettant de prévoir l'évolution d'une partie significative de leurs recettes.
En pratique, le pacte de stabilité revient à identifier un certain nombre de concours de l'État au sein d'une enveloppe globale pour laquelle sera garantie, pendant la durée du pacte, c'est-à-dire trois ans, une progression égale à celle de l'indice des prix hors tabac, soit, en l'état actuel des hypothèses économiques, 2,1 % en 1996 et 2,2 % en 1997 et 1998.
La définition de cette enveloppe ainsi garantie s'accompagne de l'engagement de l'État de ne pas modifier les règles d'indexation pendant la période triennale.
Telle que définie par l'article 18 du projet de loi de finances, l'« enveloppe » comprendrait les dotations suivantes : la dotation globale de fonctionnement (DGF), la dotation spéciale instituteurs (DSI), les dotations de l'État au fonds national de péréquation de la taxe professionnelle et au fonds national de péréquation, la dotation élu local, la dotation globale d'équipement, la dotation générale de décentralisation, la dotation générale de décentralisation pour la Corse, la dotation départementale d'équipement des collèges (DDEC), la dotation régionale d'équipement scolaire (DRES) et la dotation de compensation de la taxe professionnelle (hors réduction pour embauche ou investissement).
En revanche, le fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée, le produit des amendes de police ainsi que les compensations d'exonérations et dégrèvements fiscaux ne font pas partie du pacte de stabilité.
1. L'évolution des dotations incluses dans l'enveloppe du pacte de stabilité
Pour ces dotations, la règle d'évolution résulte de l'article 18-1 du projet de loi de finances qui dispose que :
« Pour chacune des années 1996, 1997 et 1998, la dotation globale de fonctionnement, la dotation spéciale pour le logement des instituteurs, les dotations de l'État au fonds national de péréquation de la taxe professionnelle et au fonds national de péréquation, la dotation élu local, la dotation globale d'équipement, la dotation générale de décentralisation, la dotation de décentralisation pour la formation professionnelle, la dotation générale de décentralisation pour la Corse, la dotation départementale d'équipement des collèges, la dotation régionale d'équipement scolaire et la dotation de compensation de la taxe professionnelle (hors réduction pour embauche ou investissement) forment un ensemble dont l'évolution globale, à structure constante, de loi de finances initiale à loi de finances initiale, est égale à l'évolution prévisionnelle des prix à la consommation hors tabac associée au projet de loi de finances. »
Ces concours progressent donc globalement de 2,1 % en 1996. Cependant, ils connaîtront des évolutions différenciées conformes -sauf pour la dotation globale d'équipement et la dotation de compensation de la taxe professionnelle- aux règles d'indexation prévues par les précédentes lois de finances.
a) La dotation globale de fonctionnement (DGF)
La DGF s'établit à 103,524 milliards de francs en 1996, soit une progression de 3,72 % par rapport à 1995 (99,812 milliards de francs).
Cette progression résulte, d'une part, des règles d'indexation prévues par l'article 52 de la loi de finances pour 1994 qui induisent une hausse de 3,55 % et, d'autre part, des dispositions de l'article 21 du projet de loi de finances qui institue une compensation de la suppression de la franchise postale des maires en tant que représentants de l'État.
L'article 52 de la loi de finances pour 1994 a prévu, qu'à compter de 1996, la DGF doit évoluer en fonction d'un indice égal à la somme du taux prévisionnel d'évolution de la moyenne annuelle du prix de la consommation des ménages hors tabac de l'année de versement de la DGF (soit 1996) et de la moitié du taux d'évolution du produit intérieur brut de l'année en cours (soit 1995), sous réserve que celui-ci soit positif.
Cet indice prévisionnel doit être appliqué au montant de la DGF de l'année en cours, révisé pour tenir compte des derniers taux d'évolution connus. Le taux d'évolution des prix constaté en 1995 ayant été de 1,8 % contre 1,7 % prévu en loi de finances initiale pour 1995, c'est donc un montant révisé de près de 100 milliards de francs (99,910 milliards de francs contre 99,810 milliards de francs) qui a servi de base pour le calcul de la DGF de 1996. Au total, l'indice d'évolution pour 1996 est de + 3,55 %. La DGF devrait donc normalement s'établir à 103,456 milliards de francs.
Cependant, la DGF bénéficiera, en outre, de la mesure nouvelle décidée au titre de la franchise postale qui était accordée aux maires dans l'exercice de leurs compétences d'agents de l'État.
En effet, selon le cahier des charges de la Poste, la franchise postale dont bénéficiaient les services de l'État pour l'affranchissement du courrier administratif doit cesser le 31 décembre 1995.
Cette mesure a des incidences financières pour les communes au titre des compétences exercées par le maire au nom de l'État, dans les domaines de l'état civil, de la justice, des élections, de la délivrance de documents et de l'organisation de concours d'accès aux administrations.
C'est pourquoi, l'article 21 du projet de loi de finances prévoit de compenser la charge nouvelle qui est imputée aux communes à compter du 1er janvier 1996. Cette charge a été évaluée à 67,5 millions de francs par un rapport conjoint de l'Inspection générale des Finances et de l'Inspection générale des Postes et Télécommunications. Ce montant global sera réparti entre les communes en fonction de leur nombre d'habitants et abondera la dotation forfaitaire de la DGF. Il évoluera donc, à compter de 1997, comme la dotation forfaitaire.
Au total, la DGF s'élèvera donc à 103,524 milliards de francs en 1996.
Cette progression de la DGF en 1996 contraste avec celle observée en 1994 (2 %) et en 1995 (1,7 %). Elle est obtenue grâce à la réintégration dans l'indice d'évolution d'une partie de la croissance du produit intérieur brut.
Le maintien de cette nouvelle indexation devrait faciliter la répartition de la DGF selon les nouvelles règles prévues par la loi du 31 décembre 1993 dont il est possible d'établir un premier bilan.
On rappellera que la réforme de 1993 a tendu à concilier la nécessaire stabilité des budgets locaux avec la situation financière, après les blocages observés en 1993.
Avant la réforme, en effet, la DGF n'assurait plus sa fonction péréquatrice en raison du poids croissant du mécanisme de garantie de progression minimale, des concours particuliers et de la dotation des groupements.
En 1993, 30 779 communes étaient bénéficiaires de la garantie de progression minimale, soit 73 % de plus qu'en 1992. Seulement 5 783 communes avaient bénéficié d'une progression de la DGF supérieure au taux minimum garanti de 2,38 %.
La forte croissance de la dotation des groupements depuis 1991 s'était accélérée à compter de 1993, en raison de l'apparition de nombreux districts puis de la création des communautés de communes et des communautés de villes.
En outre, de nombreux concours particuliers sont apparus : la dotation de solidarité urbaine en 1991 puis, en 1993, la majoration de la part voirie de la dotation de compensation au profit des communes rurales.
Dans ces conditions, les crédits disponibles pour la redistribution s'étaient sensiblement réduits : jamais supérieurs à 3,82 % de la masse totale de la DGF depuis 1985, ils étaient limités aux environs de 1,9 % en 1992 et 1993. Encore fallait-il déduire de cette proportion la redistribution opérée par la dotation de solidarité urbaine. Ainsi, la marge spécifique au seul tronc commun de la DGF des communes au sens strict était réduit à 0,3 % en 1993.
La loi du 31 décembre 1993 a modifié les règles de répartition de la DGF principalement pour les communes et les groupements à fiscalité propre.
La DGF des communes est désormais composée de deux composantes essentielles : la dotation forfaitaire et la dotation d'aménagement.
La dotation forfaitaire regroupe toutes les sous-dotations et les concours particuliers qui composaient l'ancienne DGF, à l'exception de la dotation de solidarité urbaine, soit : la dotation de base, la dotation de péréquation, la dotation de compensation, la garantie minimale de progression, les dotations supplémentaire et particulière versées aux communes touristiques et la dotation ville-centre.
En 1994, première année d'application de la réforme, la nouvelle dotation forfaitaire a préservé en francs courants, pour chaque commune, le montant des attributions perçues en 1993.
En 1995, elle a progressé de 0,85 % soit -conformément à l'article L 234-7 du code des communes - la moitié du taux d'évolution de la masse de la DGF (1,7%).
En 1994, la dotation forfaitaire versée aux communes d'outre-mer a été majorée de 30 millions, conformément à l'article 26 de la loi du 31 décembre 1993.
Par ailleurs, la prise en compte des recensements complémentaires, des rectifications individuelles intervenues au titre des exercices antérieurs et de la dotation touristique a entraîné une augmentation du montant de la dotation forfaitaire légèrement supérieure au minimum prévu par la loi. En 1995, elle a ainsi progressé de 0,95 % en métropole et de 1,19 % outre-mer.
La dotation d'aménagement, seconde composante de la DGF, a, pour sa part, été créée afin de mettre en oeuvre quatre priorités : soutenir l'intercommunalité de projet ; renforcer l'effort en faveur des communes urbaines confrontées à des charges sociales importantes ; renforcer l'effort en faveur des communes rurales défavorisées ou devant faire face à des charges de centralité par la création d'une dotation de solidarité rurale ; assurer une solidarité en faveur des communes d'outre-mer en apportant à ces communes une quote-part de la dotation d'aménagement, après prélèvement de la dotation d'intercommunalité.
La dotation d'aménagement regroupe ainsi la dotation des groupements, la dotation de solidarité urbaine (DSU) et la dotation de solidarité rurale (DSR).
Le montant des crédits qui lui sont affectés est égal à la différence entre l'ensemble des ressources de la DGF des communes et les crédits consacrés à la dotation forfaitaire.
La création d'une dotation forfaitaire et le « gel », en 1994, des montants perçus au titre du « tronc commun » et de certains concours particuliers ont permis d'abonder la nouvelle dotation d'aménagement de l'intégralité de la croissance de la DGF (+ 2 %) en 1994 et de la moitié environ de la progression de la DGF en 1995, soit 1,359 milliard de francs en 1994 et 685 millions de francs en 1995.
En 1994, le montant de la dotation d'aménagement s'est ainsi élevé à 5,862 milliards de francs et, en 1995, à 6,649 milliards de francs, soit une hausse de 13,4 %.
La répartition de cette dotation implique, en premier lieu, l'affectation des sommes dues au titre de la dotation des groupements de communes à fiscalité propre. Puis, est retiré le montant de la quote-part des communes d'outre-mer qui doit évoluer de façon telle que le total des attributions leur revenant au titre de la DGF progresse au moins comme l'ensemble des ressources affectées à cette dotation. Le solde est ensuite réparti entre la dotation de solidarité urbaine (DSU) et la dotation de solidarité rurale (DSR), la quote-part outre-mer étant prélevée sur ces deux dotations proportionnellement à leur montant respectif.
En 1994, conformément à la loi du 31 décembre 1993, le montant des crédits de la DSU ne pouvait être inférieure à 1,260 milliard de francs et le montant de la première part de la DSR- affectée aux bourgs centre - à 420 millions de francs.
A compter de 1995, le montant des crédits respectivement attribués à la DSU et à la DSR doit être fixé par le comité des finances locales de telle sorte qu'aucune de ces deux dotations n'excède 55 % ni ne soit inférieure à 45 % du solde de la dotation d'aménagement, constaté après répartition de la dotation des groupements.
En 1994, le comité des Finances locales a pris en compte deux considérations : d'une part, la nécessité de satisfaire le besoin de financement des groupements (+ 399 millions de francs) ; d'autre part, le souci de préserver un équilibre entre la DSU et la DSR, étant observé que la deuxième fraction de cette dernière, dite de péréquation, réservée en 1994 aux communes de moins de 3 500 habitants, devait être étendue en 1995 à toutes les communes de moins de 10 000 habitants.
Le comité des finances locales a ainsi fixé la DSU au niveau prévu par la loi, soit 1,260 milliard de francs. Le solde disponible pour la deuxième fraction de la DSR a, en conséquence, été de 990 millions de francs, soit près de 28 francs par habitant.
De cette manière, le comité des finances locales a pu, en 1995, rendre compatibles l'extension de la fraction de péréquation de la DSR à l'ensemble des communes de moins de 10 000 habitants et le maintien du montant par habitant attribué en 1994. Après avoir pris en compte la création de nouveaux groupements de communes (+ 300 millions de francs), il a ainsi réparti le solde à parts égales entre la DSU et la DSR.
En 1995. la DSU s'est ainsi élevée à 1,420 milliard de francs (+ 12.7 %) la DSR à 1,300 milliard de francs (+31.3 %).
Le rapport du Gouvernement au Parlement, établi au mois de juin 1995 conformément à la loi du 31 décembre 1993. sur le bilan de la réforme en 1994 et 1995 peut ainsi constater que dès, 1994. la part de la redistribution au sein de la DGF des communes a été supérieure à ce qu'elle aurait été en l'absence de réforme (2,89 % contre 2.34 % DSU comprise).
Le rapport met également l'accent sur le fait que la nouvelle structure de la DGF permet d'accroître systématiquement la part relative de la péréquation. Dès 1995. celle-ci atteint 3.45 %. soit le second meilleur résultat en une décennie.
Ce résultat est attribué au changement de nature apporté au mécanisme de garantie qui, appliqué à la seule dotation forfaitaire et non à la totalité de chaque DGF individuelle, n'a plus pour conséquence d'annuler les effets redistributifs opérés dans le passé.
Ainsi, les projections effectuées -sur la base d'une croissance de la DGF de 3.5 % pour les années à venir- font ressortir que la part de la péréquation représentera, en 1998. 8 % de la DGF des communes contre 2.98 % si la réforme n'était pas intervenue. En incluant la dotation des groupements, la même projection aboutit à une redistribution estimée à 16 % en 2000 contre moins de 6 % en 1993.
Le rapport souligne également que ce résultat a été obtenu sans mettre en cause l'effort financier consacré au développement de l'intercommunalité. Pour celle-ci, il est observé que la dispersion des attributions par habitant est conforme aux différences d'intégration fiscale constatées à partir du coefficient d'intégration fiscale.
Néanmoins, le degré d'intégration fiscale ne correspond pas nécessairement à l'exercice de compétences ni aux transferts de charges réellement opérés entre les communes et leurs groupements. Le rapport envisage donc des solutions alternatives telles que l'application d'un critère des charges effectivement assumées ou l'encadrement -difficile à mettre en oeuvre- des retours de ressources intercommunales aux communes.
Le bilan de la répartition de la DGF opérée en 1994 et 1995 fait apparaître, selon ce rapport, que les objectifs de la réforme ont été atteints : les blocages, inévitables en cas de maintien des anciennes règles, ont été évités. Il a été possible de financer à la fois le développement de l'intercommunalité et le renforcement de la solidarité, en dépit du taux d'évolution de la DGF à leur niveau le plus bas depuis 1979.
Sans écarter l'adoption de certains correctifs, le rapport suggère donc de conserver les principaux éléments d'une réforme qui, d'une part, a assuré une garantie de ressources aux collectivités locales, procuré aux communes éligibles à la DSU et à la DSR des évolutions significatives et resserré les écarts de dotation entre les strates ; d'autre part, a le mérite de la simplicité et de la lisibilité.
Sur le plan général de cette réforme, votre rapporteur pour avis ne peut que se féliciter des résultats obtenus en 1994 et 1995, conformes à la volonté du législateur de renforcer les moyens affectés à la péréquation et qui devrait s'amplifier grâce à une meilleure progression de la DGF.
Il convient néanmoins de rappeler que la loi du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire (article 68) a fait de la péréquation financière, une priorité qui devra être mise en oeuvre progressivement d'ici 2010.
Cette péréquation financière devra être obtenue prioritairement par une réforme conjointe des règles de répartition de la DGF et des concours budgétaires de l'État aux collectivités territoriales et à leurs groupements, y compris ceux attribués au titre des contrats de plan et de la dotation globale d'équipement, d'une part, des mécanismes de redistribution des ressources de la taxe professionnelle, d'autre part.
Le Gouvernement doit - en vertu des dispositions de la loi du 4 février 1995 - déposer un rapport devant le Parlement avant le 2 avril 1996. Ce rapport doit notamment comporter les résultats d'une étude sur les éventuelles corrélations entre le potentiel fiscal et l'effort fiscal, des propositions tendant à renforcer la contribution des différents concours de l'État et de la DGF à la réduction des écarts de ressources des collectivités, un bilan des effets des différents mécanismes de péréquation mis en oeuvre notamment par les différentes parts, de la DGF.
La réflexion engagée par le rapport du Gouvernement sur le bilan de la réforme de la DGF en 1994 et 1995 doit donc se poursuivre et connaître de nouveaux développements en 1996. Votre rapporteur pour avis rappelle que l'établissement de ce rapport devra être précédé d'une consultation d'élus (représentants du Parlement, des maires, des présidents de conseil général et de conseil régional) conformément à la loi du 4 février 1995.
Outre ces considérations d'ordre général, certaines évolutions seraient probablement nécessaires de manière plus spécifique, principalement en ce qui concerne la DSU.
Pour cette dotation, la loi du 31 décembre 1993 a prévu l'application du critère d'un indice synthétique des ressources et des charges. Cependant, la définition et les recensements des logements sociaux, qui constituent l'une des quatre composantes de l'indice posent des difficultés importantes qui ont été à l'origine de nombreux contentieux avec les communes.
Un rapport d'une mission conjointe à l'inspection générale de l'administration, à l'inspection générale des finances et au conseil supérieur des ponts et chaussées, remis en juillet 1994, après avoir constaté que la définition et le mode de recensement des logements sociaux ne pouvaient être améliorés de manière satisfaisante, a préconisé de retenir les aides personnelles au logement comme seul indicateur au titre de la charge constituée par le logement.
Le rapport sur le bilan de la réforme de la DGF note également que les règles d'éligibilité des communes de moins de 10 000 habitants, le profil de la répartition et l'absence d'une garantie de sortie du dispositif mériteraient probablement des modifications.
Enfin, on peut observer que le « gel » de la dotation touristique au sein de la dotation forfaitaire a pu poser un problème aux communes, nouvellement éligibles en 1993, qui continuent à subir l'effet de l'abattement de 50 % prévu la première année par l'ancien dispositif.
Pour ce qui est de la DGF des départements, le rapport met en évidence deux interrogations : la substitution éventuelle du critère des impôts-ménage à celui de l'effort fiscal, l'opportunité de corriger les règles d'éligibilité à la dotation de fonctionnement minimale.
b) La dotation spéciale instituteurs
Destinée à compenser les charges supportées par les communes résultant de l'obligation qui leur est faite de mettre un logement convenable à la disposition des instituteurs attachés aux écoles publiques ou, à défaut, de leur verser une indemnité représentative, la dotation spéciale instituteurs (DSI) évolue comme la DGF tout en restant indépendante de celle-ci.
Cependant, son montant dépend également du nombre d'instituteurs intégrés dans le corps des professeurs des écoles, ce corps ne bénéficiant pas du droit au logement ou de l'indemnité représentative.
C'est pourquoi, la DSI baisse de 3.024 milliards de francs à 2,947 milliards de francs entre 1995 et 1996 (-2,55 %).
c) Le fonds national de péréquation de la taxe professionnelle (FNPTP) et le fonds national de péréquation (FNP)
Le fonds national de péréquation de la taxe professionnelle (FNPTP) est alimenté par une subvention de l'État et par le produit de la cotisation nationale de péréquation de la taxe professionnelle acquittée par les entreprises.
Le projet de loi de finances soumis à l'Assemblée nationale avait prévu une hausse de près de 30 % de la subvention de l'État qui devait passer de 1,395 milliard de francs en 1995 à 1,798 milliard de francs en 1996.
Cette hausse résultait, d'une part, de l'indexation de cette subvention sur l'évolution des recettes fiscales nettes de l'État (soit + 8,33 %) et, d'autre part, d'un abondement de 298 millions de francs en application des dispositions de l'article 21 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications. Cette loi prévoit, en effet, que la différence entre le montant des impôts locaux dont sont redevables la Poste et France Telecom et la fraction de ces impôts revenant à l'État en contrepartie de la dotation de compensation de la taxe professionnelle, est reversée au FNPTP.
Toutefois, l'Assemblée nationale a adopté le principe d'un reversement au profit du FNPTP des ressources nouvelles dégagées sur l'institution d'une cotisation minimale de taxe professionnelle égale à 0,35 % de la valeur ajoutée produite par les entreprises. La subvention de l'État, réduite à due concurrence de cette affectation (soit environ 400 millions de francs), s'établira, en conséquence, à 1,398 milliard de francs.
Rappelons, par ailleurs, que la loi du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire (article 70) a institué un nouveau fonds national de péréquation (FNP) à partir du FNPTP.
Le FNPTP a néanmoins conservé, pour l'essentiel, sa structure antérieure : une première fraction qui constitue la dotation de développement rural ; une deuxième part de la deuxième fraction -désormais rebaptisée première part- destinée à compenser les pertes de bases de taxe professionnelle que connaissent certaines communes ; une part « résiduelle » attribuée aux communes qui connaissent des difficultés financières et dont le budget en déséquilibre a été transmis à la chambre régionale des comptes.
L'innovation de la loi du 4 février 1995 a consisté à renforcer les mécanismes de péréquation, assurés jusqu'alors par la première part de la deuxième fraction du FNPTP. Cette part devient la part principale du nouveau FNP. Son montant s'est élevé à 1,997 milliard de francs en 1995. Le FNP comprend. en outre, une seconde part dite majoration. Cette majoration, soit 569 millions de francs, a résulté, en 1995, du gel de la progression hors inflation de la dotation de compensation de la taxe professionnelle des communes. En 1996, la majoration progresse comme les recettes fiscales nettes de l'État, soit + 8,33 %. pour s'établir à 616 millions de francs.
On relèvera que les règles d'éligibilité à la part principale du FNP reprennent, sous réserve de conditions plus strictes de potentiel fiscal, celles de l'ancienne part principale du FNPTP. Pour le potentiel fiscal, est désormais exigé un potentiel fiscal par habitant non plus inférieur au potentiel fiscal moyen par habitant de la strate démographique mais inférieur de 5% à la moyenne de la strate démographique.
Le législateur a. par ailleurs, souhaité, à compter de 1995. maintenir à leur niveau de l'année précédente les attributions des villes de 200 000 habitants et plus, afin d'affecter toute la croissance des ressources aux autres communes.
Au total, 17 790 communes ont bénéficié de la part principale du FNP en 1995. soit une dotation par habitant de 57.38 francs.
La seconde part, dite majoration, bénéficie aux communes de moins de 200 000 habitants, éligibles à la part principale du FNP et ayant un potentiel fiscal « taxe professionnelle » par habitant inférieur de 20 % à la moyenne de la strate démographique.
Au total, 15 287 communes ont été éligibles à cette majoration en 1995 pour une dotation par habitant de 25,63 francs.
d) La dotation élu local
Instituée par l'article 42 de la loi n° 92-108 du 3 février 1992 relative aux conditions d'exercice des mandats locaux, cette dotation a pour objet d'aider les petites communes à faire face aux charges résultant de l'application de cette loi.
Après s'être élevé en 1993, 1994 et 1995 au niveau inchangé de 250 millions de francs, cette dotation sera indexée sur l'évolution de la DGF dans le cadre du pacte de stabilité et s'établira donc à 259 millions de francs en 1996.
e) Les dotations de compensation financière des transferts de compétences
La dotation générale de décentralisation (DGD) assure aux collectivités locales la couverture des charges résultant des compétences transférées et qui ne sont pas compensées par la fiscalité transférée. Inscrite au chapitre 41-56 du budget du ministère de l'Intérieur, elle évolue en principe comme la DGF (+ 3.55 %).
Elle progresse cependant en 1996 de 4.34 % pour s'établir à 14,16 milliards de francs sous l'effet d'une mesure nouvelle de 87.3 millions de francs correspondant à la contrepartie de la suppression, à compter du 1er janvier 1996. de la franchise postale dont bénéficient les départements et les régions.
La DGD spécifique à la collectivité territoriale de Corse atteindra, en 1996, 1,267 milliard de francs, soit une hausse de 4 % par rapport à 1994 qui correspond, d'une part, à l'indexation sur l'évolution de la DGF et. d'autre part, à divers ajustements de crédits liés à de nouvelles charges attribuées à la collectivité territoriale par la loi du 13 mai 1991 et à la gestion de personnels transférés.
La DGD formation professionnelle progressera de 4.7 % pour atteindre 4,95 milliards de francs. Cette hausse résulte à la fois de l'indexation sur la DGF, des effets du transfert aux régions de l'enveloppe de rééquilibrage au titre de l'aménagement du territoire qui est dorénavant rattachée au financement des formations qualifiantes et d'un complément des frais de gestion pour les actions de formation en alternance décentralisées.
La dotation régionale d'équipement scolaire (DRES) et la dotation départementale d'équipement des collèges (DDEC) - qui sont destinées à compenser les transferts de compétences de l'État aux collectivités locales en matière scolaire - progresseront en fonction du taux prévisionnel d'évolution de la formation brute de capital fixe (FBCF) des administrations publiques, soit 3,7% en 1996.
La DRES atteindra ainsi 3,157 milliards de francs en autorisations de programme et la DDEC 1,562 milliards de francs.
f) La dotation globale d'équipement (DGE)
Outre par une désindexation de la dotation de compensation de la taxe professionnelle qui sera présentée ci-dessous, la limitation à 2.1 % en 1996 de l'évolution globale des concours de l'État inclus dans l'enveloppe du pacte de stabilité est obtenue grâce à une réforme profonde de la dotation globale d'équipement (DGE) des communes.
On rappellera que la DGE des communes est composée de deux parts égales dont les montants respectifs sont déterminés, chaque année, par décret pris avis du comité des finances locales.
La première part est principalement destinée aux communes et groupements de plus de 2 000 habitants, sous la forme d'un taux de concours.
La seconde part est attribuée aux communes et groupements de moins de 2 000 habitants ainsi qu'aux communes entre 2 000 et 10 000 habitants qui peuvent opter pour elles, sous la forme de subventions.
L'article 19 du projet de loi de finances supprime la première part de la DGE des communes. Parallèlement, la seconde part devait être étendue à toutes les communes de 2 000 à 10 000 habitants en métropole et de 7 500 à 35 000 habitants outre-mer, selon les modalités de répartition en vigueur.
Les autorisations de programme correspondant à la DGE des communes et des départements étaient ainsi réduits de 6,089 milliards de francs à 5,689 milliards de francs, soit une économie de 400 millions de francs.
L'Assemblée nationale a choisi de fixer le seuil supérieur d'éligibilité à la nouvelle DGE des communes à 20 000 habitants pour les communes de métropole. Elle a, en outre, exclut du bénéfice de la dotation les communes dont le potentiel fiscal par habitant est égal ou supérieur à 1,5 fois le potentiel fiscal moyen par habitant de l'ensemble des communes de moins de 2 000 habitants. Tous les groupements de communes dont la population n'excède pas 35 000 habitants seraient, sans restriction, éligible à la DGE.
Cette modification profonde des règles d'attribution de la DGE des communes qui revient, en fait, à la suppression pure et simple, sans mesure transitoire, d'un concours de l'État est en contradiction avec l'idée même de stabilité qui a guidé l'élaboration des dispositions relatives aux concours de l'État aux collectivités locales.
Le taux de concours de la première part de la DGE était certes devenu très faible (2,04 % en 1995 après 1,54 % en 1994). Néanmoins, la suppression brutale de cette dotation pourra susciter des difficultés pour les investissements étalés sur plusieurs années des grandes villes et des villes moyennes. Pour celles-ci la recherche d'une stabilité des relations financières avec l'État subit donc une exception notable.
g) La dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP)
La dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP) constitue la variable d'ajustement qui permettra de respecter la norme d'évolution globale de 2,1 % des concours de l'État inclus dans l'enveloppe du pacte de stabilité.
Le II de l'article 18 du projet de loi de finances précise, en effet, que pour chacune des années 1996, 1997 et 1998, le taux d'évolution de la DCTP (hors remboursement pour embauche ou investissement) « est celui qui permet, compte tenu du montant total des autres dotations à structure constante, de respecter la norme d'évolution...) », c'est-à-dire l'évolution prévisionnelle des prix à la consommation hors tabac associée au projet de loi de finances.
En conséquence, la DCTP est fixée à 14,132 milliards de francs en 1996, soit une baisse de 7,48 % par rapport à 1995.
L'insertion de la DCTP -qui constitue une compensation fiscale- dans l'enveloppe normée ne se justifie que par le souci d'en faire une variable d'ajustement.
Rappelons que cette diminution fait suite aux ponctions déjà opérées sur cette dotation les années précédentes. Le principe même d'une compensation de l'abattement de 16 % appliqué aux bases de taxe professionnelle est donc en cause.
2. L'évolution des dotations exclues du pacte de stabilité
Les concours et subventions de l'État qui n'entrent pas dans le champ du pacte de stabilité, conservent une évolution autonome.
a) Le fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA)
Le fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) l'élèverait à 23,1 milliards de francs en 1996, soit une progression de 1,3 % par rapport à 1995.
L'augmentation du taux normal de TVA de 18,6 % à 20,6 % par la loi n° 95-858 du 28 juillet 1995 sera prise en compte.
Dès le 1er août 1995, et jusqu'au 31 décembre 1996, les communautés de communes et les communautés de villes - qui perçoivent le FCTVA l'année même de la réalisation de leurs investissements, bénéficieront d'un taux forfaitaire de remboursement élevé de 15,682 % à 17,081 %. A compter de 1997, ce taux subira une diminution de 0,905 % pour atteindre 16,176 %. L'article 53 de la loi de finances pour 1994 a. en effet, prévu qu'à compter de 1997 -c'est-à-dire pour les dépenses réalisées en 1995 pour l'ensemble des collectivités ou, en 1997, pour les seules communautés de communes et communautés de villes- le taux forfaitaire subirait une telle réfaction afin de tenir compte du remboursement effectué par la France au budget de l'Union européenne.
Pour les autres bénéficiaires du FCTVA, un relèvement similaire du taux de remboursement forfaitaire sera réalisé à compter de 1997, compte tenu du décalage de deux ans dans le remboursement. Le taux forfaitaire tiendra compte de l'application pendant sept mois aux investissements des collectivités locales d'un taux normal de TVA de 18,6 %. La réfaction déjà évoquée de 0,905 % sera ensuite opérée.
On rappellera, par ailleurs, que depuis la loi de finances rectificative pour 1988 (article 42-III). les biens mis à disposition de tiers sont exclus du bénéfice du fonds. Néanmoins, à l'initiative du Sénat, l'article 49 de la loi de finances rectificative pour 1993 a prévu une régularisation pour les collectivités qui, de bonne foi, avaient escompté un versement du FCTVA pour certains équipements réalisés en 1992 et 1993 et qu'elles ont mis à la disposition de tiers. Ce texte a été explicité par le décret n° 94-655 du 27 juillet 1994. Enfin une circulaire du 23 septembre 1994 -élaborée après une concertation avec le comité des finances locales- a précisé la notion de mise à disposition de tiers.
b) Le prélèvement au titre des amendes de police relatives à la circulation routière
Le produit des amendes de police est estimé à 1,7 milliard de francs en 1996, soit une hausse de plus de 30 % par rapport à l'année précédente.
Cette progression très forte s'explique par la forfaitisation des amendes de quatrième classe à compter du 1er septembre 1995, prévue par le décret n° 95-600 du 5 mai 1995, qui entraîne un transfert de cette catégorie d'amendes de l'État aux communes.
c) La compensation des exonérations relatives à la fiscalité locale
La compensation des exonérations relatives à la fiscalité locale est évaluée, pour 1996, à 12,9 milliards de francs, soit une hausse de 37,4 % qui s'explique en particulier par un abondement de 2,3 milliards de francs au titre de la compensation versée aux départements à la suite de la réduction des droits de mutation sur les immeubles d'habitation prévue par l'article 11 de la loi de finances rectificative du 4 août 1995.
d) La compensation de divers dégrèvements législatifs
Le coût des dégrèvements législatifs atteindrait 34,5 milliards de francs, en 1996, soit un montant quasi-identique à celui de la loi de finances initiale pour 1995.
On rappellera que ces compensations et dégrèvements sont constitués, pour plus des trois quarts, de la compensation versée aux collectivités locales au titre des pertes engendrées par le plafonnement des cotisations de taxe professionnelle par rapport à la valeur ajoutée. Sont, par ailleurs, compensés les dégrèvements de taxe d'habitation accordés aux contribuables, autres que les personnes âgées et les handicapés, peu ou pas imposés au titre de l'impôt sur le revenu.
Plusieurs mesures concernant la taxe professionnelle et la taxe d'habitation, prévues par la première partie du projet de loi de finances, expliquent la stabilité des dégrèvements législatifs : d'une part, la reconduction de la mesure de relèvement du taux de plafonnement des cotisations de taxe professionnelle par rapport à la valeur ajoutée, décidée par la loi de finances pour 1995 ; d'autre part, le maintien au niveau actuel du taux de taxe professionnelle pris en compte pour le calcul du dégrèvement, ce qui aura pour effet de neutraliser le coût pour l'État de l'augmentation de la pression fiscale décidée pour les collectivités locales ; l'aménagement du dispositif de plafonnement de la taxe d'habitation à 3,4 % du revenu pour les contribuables modestes.
Rappelons, par ailleurs, que l'article 11 du projet de loi de finances crée une cotisation minimale de taxe professionnelle par rapport à la valeur ajoutée.
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Votre commission des Lois observe que, dans un contexte budgétaire difficile, le Gouvernement a retenu un objectif de stabilisation des relations financières entre l'État et les collectivités locales, conformément à la volonté clairement affirmée par le Premier ministre dans son discours de politique générale du 23 mai dernier. Le Gouvernement prend ainsi en considération une demande ancienne des élus locaux, légitimement soucieux de pouvoir compter sur une stabilité à moyen terme d'une partie importante de leurs recettes. Votre rapporteur pour avis avait, l'an passé même, souligné à quel point des incertitudes trop nombreuses pesaient sur les budgets locaux, justifiant ainsi que l'objectif de clarification financière soit une vraie priorité.
Le respect strict des règles d'indexation des principaux concours de l'État, en tout premier lieu de la DGF, mérite d »être souligné. De même, il est heureux que le FCTVA -qui constitue un remboursement et non une subvention de l'État- ait été laissé à l'écart de l'enveloppe normée. Il continuera ainsi à évoluer selon ses règles propres.
Cependant, le contenu du pacte de stabilité appelle, pour le reste, de fortes réserves. La suppression pure et simple de la première part de la DGE des communes de même que le sort réservé à la DCTP sont en effet en contradiction avec l'idée même de stabilisation pourtant mise au premier plan.
En outre, le champ du pacte de stabilité suscite de réelles interrogations. Certaines charges pesant lourdement sur les collectivités locales mériteraient, en effet, d'être intégrées dans le pacte de stabilité. Ainsi en est-il de celles qui sont liées à la CNRACL même si le Gouvernement s'est fort heureusement engagé à ne pas augmenter les cotisations employeurs pour l'exercice 1996 et à mettre en oeuvre une concertation pour les exercices suivants. De même, certaines charges « rampantes » évoquées par le rapport de la Commission Delafosse, votre rapporteur pour avis y reviendra, devraient faire l'objet d'une remise en ordre.
Enfin, la norme d'évolution prévue pour l'enveloppe globale -c'est-à-dire l'évolution prévisionnelle des prix hors tabac- ne prend pas en considération le rôle économique joué par les collectivités locales. La forte réduction de la DCTP (- 1,4 milliards de francs) revient ainsi à supprimer, pendant trois ans, l'effet de l'indexation de la DGF sur une partie de la croissance.
B. L'ÉVOLUTION DES BUDGETS LOCAUX
1. La situation d'ensemble
La note de conjoncture du Crédit local de France, établie au mois de juillet 1995, met en évidence que la situation financière locale se caractérise par un « effet de ciseaux » dû à la conjonction d'une réduction des marges financières des collectivités locales et d'une augmentation parallèle de leurs dépenses courantes.
Les recettes de fonctionnement ont progressé, en 1995, à un rythme légèrement inférieur à celui de 1994 (+ 4 % contre + 4.9 %).
La croissance des recettes fiscales a poursuivi son ralentissement (+ 4,7 % en 1995 ; + 6,3 % en 1994 ; + 6.9 % en 1993). La fiscalité directe votée a évolué plus modérément en 1995 (+ 5,2 % contre + 8,4 % en 1994), conformément à une situation qui prévaut généralement les années de renouvellement des conseils municipaux et qui a un effet global important compte tenu du poids prédominant des communes dans la fiscalité locale.
Parallèlement, la progression des bases fiscales a été nettement inférieure à celles de 1994. Ainsi, elle s'est établi entre 3.5 % et 4 % pour la taxe professionnelle, soit une augmentation en valeur inférieure à celle du PIB. La matière imposable - la masse salariale et les équipements - a, en effet, été directement affectée par le chômage et la baisse des investissements industriels.
Les compensations d'exonérations ne devraient pas, en 1995. freiner la progression du produit perçu par les collectivités locales, contrairement à 1994. Le produit perçu devrait ainsi évoluer à un rythme sensiblement identique à celui de la fiscalité votée (5,1 % contre 5.2 %).
La fiscalité indirecte a connu une évolution très favorable en 1994 (+ 8,9 %) qui a surtout profité aux départements et aux régions pour lesquels elle constitue le tiers des recettes fiscales. Les droits de mutation ont été stimulés par les transactions nombreuses effectuées dans l'immobilier ancien. Les taxes automobiles (vignette, carte grise) ont crû rapidement notamment grâce au dynamisme du marché dopé par les mesures gouvernementales. Selon le Crédit local de France, la fiscalité indirecte devrait connaître un léger repli en 1995.
Enfin, l'indexation de la DGF sur le seul indice des prix hors tabac a été nettement défavorable pour les collectivités locales (+ 2 % en 1995, + 1,7 % en 1994 contre + 4,3 % en 1993).
Dans ce contexte de ralentissement de la progression de leurs recettes de fonctionnement, les collectivités locales ont dû faire face à une forte progression de leurs dépenses de gestion en 1995.
Les dépenses de personnel ont connu une forte croissance (+ 8,4 %) après une progression plus lente en 1994 (+ 5,6 %) par rapport aux années précédentes. Cette évolution s'explique essentiellement par la hausse de la cotisation employeurs à la CNRACL qui a provoqué un surcoût de 3 milliards de francs et ainsi en partie annulé les efforts de maîtrise des dépenses de personnel. En outre, les collectivités locales doivent supporter les effets des accords salariaux dans la fonction publique (accords Durafour) ainsi que l'accroissement d'effectifs inhérents aux transferts de charge (formation professionnelle dans les régions).
Le coût des prestations d'aide sociale reste, par ailleurs, très élevé tant pour les départements que pour les communes. Ainsi le nombre de bénéficiaires du revenu minimum d'insertion est passé d'environ 790 000 personnes en 1993 à environ 910 000 en 1994.
Les collectivités locales subissent ainsi une baisse de leurs marges de manoeuvres financières. Après avoir progressé en 1994 (+ 3.6 %). l'épargne disponible régresse en 1995 (- 6,6 %). Elle représente néanmoins encore près de 90 milliards de francs.
Les ajustements nécessaires s'effectueraient par une réduction de l'effort d'investissement et par un moindre recours à l'emprunt. Selon le Crédit local de France, les dépenses d'équipement diminueraient globalement de 6,1 %. Le recours à l'emprunt pour le financement des investissements qui avait progressé en 1994 (+ 4,9 %) devrait fortement baisser en 1995 (entre - 10 et- 15%).
2. La situation par collectivité locale
a) les budgets communaux
L'« effet de ciseaux » entre recettes et dépenses est très marqué en 1995 : la progression des ressources courantes (+ 3,4 %) est, en effet, inférieure à celle des dépenses de gestion (+ 5,5 %).
Après une hausse déjà limitée en 1994, la fiscalité directe des communes progresse peu en 1995 (+ 0,5 % en moyenne pour les quatre taxes). Les bases d'imposition subissent un rempli (- 2 % pour les bases de taxe professionnelle), en particulier dans les grandes villes.
Les dotations de fonctionnement ont, pour leur part, progressé à un rythme (+ 1,4 %) nettement inférieur à la croissance économique. Les communes doivent parallèlement faire face à une hausse de leurs dépenses de personnel (+ 7,7 %) sous l'effet notamment du relèvement de la cotisation employeurs à la CNRACL.
L'épargne disponible subit la régression la plus forte depuis le début de la décentralisation (- 17,8 % en 1995). Elle demeure néanmoins à un niveau élevé.
Quant aux dépenses d'équipement qui ont progressé de 4 % en 1994. elles devraient diminuer de 6.7 % en 1995. Cette diminution est particulièrement marquée pour les communes de moins de 10 000 habitants (- 8,2 % après + 3.6 % en 1994) et celles de plus de 100 000 habitants (- 7 % après + 15,4 % en 1994). Elle est en revanche plus modérée pour les communes entre 10 000 et 100 000 habitants (- 4.3 %) mais fait suite à une baisse déjà enregistrée en 1994 (- 0.7 %).
Les communes ont également le souci de ne pas alourdir leur endettement, ce qui se traduit par une réduction très sensible du recours à l'emprunt (- 14, 3 % en 1995).
Votre rapporteur pour avis soulignera enfin que la réforme de la comptabilité des communes est progressivement mise en place. Elle a déjà fait l'objet de trois phases d'expérimentation en 1993, 1994 et 1995 sur un échantillon de communes de plus en plus étoffé. En 1996, cette expérimentation devrait concerner près de 6 000 collectivités volontaires. Elle sera suivie de la généralisation de la réforme au 1er janvier 1997.
Rappelons que la réforme des comptabilités communales, qui fera l'objet de l'instruction M 14. est une adaptation du plan comptable général de 1982, qui constitue la norme de référence comptable française.
b) les budgets des départements
Les départements sont également confrontés à un « effet de ciseaux » entre recettes courantes et dépenses de gestion.
Les recettes fiscales progresseraient de 4,9 % en 1995. Le produit voté des quatre taxes directes augmenterait de 6,2 % sous l'effet d'un maintien de la hausse des taux. Les compensations d'exonérations seraient également en progression sensible (+ 8,1 %) en raison de la suppression progressive de la part départementale du foncier non bâti agricole, décidée par la première loi de finances rectificative pour 1993. En conséquence, le produit perçu connaîtrait une évolution soutenue (+ 6, 4 %).
La fiscalité indirecte, en dépit de la stagnation prévisible des droits de mutation, progressera également en 1995 grâce à une croissance des ressources tirées de la vignette automobile (+ 5 % contre + 3,8 % en 1994).
Les dotations de fonctionnement, enfin, évolueront en 1995 plus lentement encore qu'en 1994 (+ 1,4 % contre + 2,2 %).
Face à cette progression de leurs recettes, les départements connaissent une hausse sensible de leurs dépenses de gestion, en particulier leurs dépenses de personnel (+ 8,7 %) qui subissent les effets de l'augmentation de la cotisation employeurs à la CNRACL. Les dépenses d'aide sociale continuent à évoluer à un rythme soutenu (+ 7 % en 1995 après + 8%en 1994).
L'épargne disponible, pour sa part, diminue sensiblement (- 7,2 %).
Dans ce contexte de réduction de leurs marges de manoeuvre financières, les départements sont amenés à ralentir leurs programmes d'investissement. Les dépenses d'équipement devraient ainsi légèrement baisser en 1995 (- 0,9 %) mais moins fortement qu'en 1994 (- 5,2 %). Parallèlement, le recours à l'emprunt est en baisse (- 10,5 %).
Soulignons néanmoins que ce recul de l'effort d'équipement des départements fait suite à plusieurs années de forte croissance due aux travaux de construction et de rénovation des collèges.
c) les budgets des régions
Les recettes de fonctionnement des régions connaissent une progression soutenue ( + 13,4 % en 1994 ; + 7,5 % en 1995).
Les recettes fiscales ont progressé rapidement en 1994 (+ 16,4 %) notamment sous l'effet d'une hausse élevée du produit voté (+ 16,4 %).
La fiscalité indirecte a pour sa part tirer profit, en 1994, d'une embellie du marché immobilier et de celui de l'automobile. Les droits de mutation ont ainsi augmenté de 13,7 % et les cartes grises de 11,5 %.
Par ailleurs, les régions ont bénéficié d'une forte croissance de leurs dotations de fonctionnement (+ 12,5 % en 1994) et en particulier de la DGD formation professionnelle sous l'effet des récents transferts de compétence en matière de formation professionnelle.
L'épargne disponible des régions a également sensiblement progressé en 1994 (19,2 %), grâce à la progression de leurs recettes de fonctionnement et aux opérations de réaménagement de la dette qui ont permis de limiter les frais financiers.
En 1995, l'épargne disponible progressera plus lentement (+ 2,3 %). Les recettes fiscales augmenteront, en effet, moins fortement en raison du ralentissement de la progression des bases d'imposition et d'un tassement de la croissance de la pression fiscale (+ 10,4 % pour le taux de taxe professionnelle en 1994 ; + 2,6 % en 1995).
Les dépenses de fonctionnement des régions connaîtront une hausse soutenue (+ 18,4 %). Néanmoins, hors crédits de formation professionnelle continue et d'apprentissage, la progression est plus limitée (+ 6,6 %). La croissance des frais de personnels restera forte en 1995 (+ 13,8 %).
En revanche, on observe un tassement des intérêts de la dette (+ 3,1 %) en raison des conditions de prêt plus favorables obtenues à travers des opérations de réaménagement de la dette.
S'agissant des dépenses d'investissement, elles sont marquées par une forte baisse des remboursements de dette, après une tendance sensible à la renégociation de la dette observée en 1994.
Les dépenses consacrées aux équipements scolaires devraient connaître une évolution positive. L'ensemble des dépenses relatives à la formation absorbent ainsi 40 % du budget d'investissement des régions.
III. LA NÉCESSAIRE CLARIFICATION DES CONDITIONS D'EXERCICE COMPÉTENCES LOCALES
A. LES RELATIONS FINANCIÈRES ENTRE L'ÉTAT ET LES COLLECTIVITÉS LOCALES
Votre commission des Lois avait, l'an passé, tenu à souligner que, dans un contexte caractérisé par de fortes incertitudes pesant sur l'évolution des budgets locaux, la clarification des relations financières entre l'État et les collectivités locales devait constituer une priorité.
Une analyse approfondie de la situation actuelle a été réalisée par la commission instituée en 1993, sous la Présidence de M. François Delafosse, conseiller maître à la Cour des Comptes, et composée de représentants des associations d'élus.
Le rapport de cette commission, remis au Premier ministre le 1er juin 1994 et dont votre rapporteur pour avis vous avait présenté les principales conclusions l'an passé, a retenu quatre orientations principales :
la nécessaire clarification des flux financiers ;
le recentrage du partenariat entre l'État et les collectivités locales autour du contrat de plan État-régions ;
- la stabilisation indispensable des règles et des principes d'attribution des financements en provenance du budget de l'État ;
- la préparation d'une réforme de la fiscalité locale.
Au cours de l'année écoulée, plusieurs mesures - prises à l'initiative du Sénat - ont tendu à poursuivre cet objectif de clarification.
L'article 16 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire a tout d'abord confié à la commission consultative d'évaluation des charges une mission d'information tout à fait essentielle.
Cette commission doit, en effet, établir à l'intention du Parlement, à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances de l'année, un bilan de l'évolution des charges transférées aux collectivités locales.
Ce bilan doit retracer pour chaque catégorie de collectivités locales l'évolution du coût des compétences transférées au titre des lois de décentralisation. Il est effectué à partir du montant des dépenses engagées annuellement par les collectivités locales au titre des compétences transférées en distinguant les dépenses correspondant à l'exercice normal des compétences transférées de celles résultant de la libre initiative des collectivités locales.
Le bilan devra également retracer l'évolution des charges résultant des compétences transférées ou confiées aux collectivités locales depuis le 1er janvier 1983 dans les domaines autres que ceux visés par les lois de décentralisation même lorsque le législateur a expressément prévu en ces matières de déroger au principe de la compensation intégrale des charges transférées.
Il comprendra en annexe un état, pour le dernier exercice connu, de la participation des collectivités locales à des opérations relevant de la compétence de l'État et des concours de l'État à des programmes intéressant les collectivités locales.
Votre commission des Lois observe qu'à ce jour ce bilan n'a toujours pas été déposé sur le bureau des assemblées.
En second lieu, plusieurs dispositions de la loi du 4 février 1995 (articles 68, 70 et 74) ont prévu le dépôt devant le Parlement de rapports et d'études portant notamment sur le système de financement des collectivités locales, en particulier sur la taxe professionnelle, ainsi que sur les dotations de l'État.
Votre commission des Lois sera attentive aux résultats de ces travaux qui seront très utiles dans la perspective des réformes à venir.
Enfin, l'article 75 de la loi du 4 février 1995 a prévu la constitution, au sein du comité des finances locales, d'un observatoire des finances locales.
Cette nouvelle instance aura pour mission de fournir au Gouvernement et au Parlement les analyses nécessaires à l'élaboration des dispositions du projet de loi de finances intéressant les collectivités locales.
Elle établira chaque année sur la base des comptes administratifs un rapport sur la situation financière des collectivités locales.
Dans un cadre pluriannuel, elle sera chargée de la réalisation d'études sur les facteurs d'évolution de la dépense locale. Les résultats de ces études feront l'objet d'un rapport au Gouvernement.
Formation spécialisée du comité des Finances locales, l'observatoire des finances locales comportera des représentants de toutes les composantes de celui-ci qui seront désignés par le président du comité.
Il faut donc se féliciter de la mise en place de cet observatoire, qui doit être effective dans les prochains jours.
Votre commission des Lois observe, enfin, que la pérennisation par l'article 13 du projet de loi de finances de la majoration de 0,4% sur le prélèvement opéré par l'État au titre des frais d'assiette et de recouvrement des impôts directs locaux ne va pas dans le sens de la clarification souhaitée. Cette majoration, qui était motivée, lors de sa création par la loi n° 90-669 du 30 juillet 1990 (article 59), par le financement des frais entraînés par la révision des bases des impositions directes locales, n'a plus de justification désormais. Elle revient donc à faire abonder le budget de l'État par le contribuable local.
B. LA RÉFLEXION SUR LA RÉPARTITION DES COMPÉTENCES
La révision des lois de 1983 relatives à la répartition des compétences a été prévue par l'article 65 de la loi du 4 février 1995. Pour l'élaboration de cette nouvelle loi qui devait être adoptée dans un délai d'un an, quelques orientations ont été retenues par l'article 65 précité :
- une répartition des compétences opérées de manière à ce que chaque catégorie de collectivités locales dispose de compétences homogènes ;
- le transfert de personnels et de ressources correspondant pour tout transfert de compétences ;
- la définition des conditions dans lesquelles une collectivité pourra assumer le rôle de chef de file pour l'exercice d'une compétence ou d'un groupe de compétences relevant de plusieurs collectivités territoriales ;
- la définition des conditions dans lesquelles une collectivité territoriale pourra, à sa demande, se voir confier une compétence susceptible d'être exercée pour le compte d'une autre collectivité territoriale.
Le législateur de 1995 a ainsi pris acte de la multiplication des politiques partenariales, dans des domaines tels que l'emploi, la formation professionnelle, l'insertion ou encore l'aménagement du territoire, qui traduisent l'exigence d'associer plusieurs niveaux de collectivités à la mise en oeuvre d'une même politique ou d'équipements qui sinon ne pourraient être réalisés.
Suivant les précisions apportées à votre rapporteur pour avis, les réflexions en cours auraient pour finalité moins de déléguer de nouvelles compétences aux collectivités territoriales que de clarifier la situation actuelle en procédant aux ajustements nécessaires. Ces ajustements seraient guidés par une double préoccupation : d'une part, assurer une meilleure lisibilité des compétences de chaque niveau territorial et, d'autre part, fixer durablement un pacte de stabilité des relations entre l'État et les collectivités territoriales.
Ces ajustements pourraient être réalisés dans trois directions.
- En premier lieu, une extension de compétences pourrait concerner essentiellement les régions, dans des domaines tels que le patrimoine culturel, le tourisme et le transport de voyageurs. Une plus grande autonomie des régions pourraient également être envisagée pour l'enseignement supérieur. Enfin, la question des interventions économiques justifiera une réflexion.
- En second lieu, la recherche d'une clarification concernera essentiellement les relations entre l'État et les collectivités locales.
Le domaine prioritaire pour une telle clarification est celui de l'aide sociale : aide sociale à l'enfance, aux personnes âgées, aux adultes handicapés, aide médicale. L'objectif serait d'identifier les procédures actuelles de codécision et de cofinancement afin de mieux affirmer soit la responsabilité de l'État soit celle des collectivités territoriales, en particulier des départements.
Ces transferts et ajustements devront nécessairement faire l'objet d'une compensation financière intégrale.
- Enfin, la simplification aurait pour champ d'application privilégié -votre rapporteur pour avis y reviendra- la coopération intercommunale.
S'agissant des notions de collectivité « chef de file » et de 1' « appel à compétences » qui tendent à répondre au même souci de clarification et de coordination, plusieurs orientations pourraient être envisagées.
D'une part, la convention de mandat pourrait offrir une plus grande souplesse pour la réalisation de différents travaux d'infrastructures (voirie, équipements portuaires, équipements médico-sociaux, culturels ou de loisirs...).
Déjà prévue par la loi du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage public, cette technique juridique permet au maître d'ouvrage de confier à un tiers la réalisation matérielle d'un certain nombre de tâches tout en conservant la responsabilité juridique des actes.
D'autre part, la procédure budgétaire et comptable du fonds de concours permettrait de régler les rapports financiers. Rappelons que cette procédure, applicable aux dépenses d'investissement, permet à un contributeur de participer financièrement à une opération, généralement pluriannuelle, réalisée par le maître d'ouvrage.
L'appel à compétences pourrait, par ailleurs, être développé. Il existe d'ores et déjà sous des formes variées.
La loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 l'a, en effet, prévu dans trois domaines :
- l'aide sociale : une commune peut exercer directement des compétences confiées au département, par convention passée avec celui-ci (article 33) ;
- les transports scolaires : le conseil général peut confier par convention tout ou partie de l'organisation des transports scolaires à des communes ou groupements de communes, des syndicats mixtes, des associations de parents d'élèves ou des associations familiales (article 30) ;
- les constructions scolaires : la collectivité propriétaire (commune ou groupement de communes) d'un collège ou d'un lycée peut se voir confier,si elle le demande, par le département ou la région, la réalisation d'une opération concernant les constructions scolaires (article 14 VII),
De même, en matière d'enseignement supérieur, les collectivités locales peuvent, à leur demande, se voir confier par l'État la maîtrise d'ouvrage de constructions ou d'extensions d'établissements d'enseignement supérieur relevant de l'Education nationale ou de l'Agriculture (article 78 de la loi n° 90-587 du 4 juillet 1990).
Enfin, certaines formules de coopération entre niveaux de collectivités locales, telles que les syndicats mixtes ou les groupements d'intérêt public (par exemple, pour le développement social urbain), pourraient être utilisées afin d'identifier un chef de file.
C. LA SIMPLIFICATION DU RÉGIME JURIDIQUE DE LA COOPÉRATION INTERCOMMUNALE ET LA MISE EN OEUVRE DE LA NOTION DE PAYS
1. La simplification du régime juridique de la coopération intercommunale
Au 31 décembre 1994, on dénombrait 17 981 groupements de communes sans fiscalité propre (essentiellement des syndicats à vocation unique mais aussi des syndicats à vocation multiple, des syndicats mixtes et des syndicats à la carte). Quant aux structures de coopération à fiscalité propre, on comptait 756 communautés de communes, 322 districts et seulement 4 communautés de villes.
L'article 78 de la loi d'orientation du 4 février 1995 a prévu que, d'ici le 4 août 1996, le Gouvernement devra remettre au Parlement un rapport contenant des propositions notamment sur la réduction du nombre de catégories d'établissements publics de coopération intercommunale et la simplification de leur régime juridique.
Des réflexions menées à ce jour -telles qu'elles ont été présentées à votre rapporteur pour avis- peuvent être tirées certaines conclusions qui demanderont à être précisées.
En premier lieu, le constat de l'extrême complexité des dispositions actuelles -à laquelle les élus locaux sont confrontés très directement - justifie la recherche d'une simplification qui permettrait de supprimer les incohérences actuelles résultant de la « sédimentation » des textes.
Les huit catégories actuelles d'établissements publics de coopération intercommunale peuvent, en effet, être classées en deux grands groupes.
Dans un premier groupe, il s'agit d'associations de communes qui assument les principaux services liés à la gestion locale (eau, assainissement, voirie communale, actions sociales, culturelles et sportives). Ces établissements publics de coopération intercommunale peuvent prendre la forme de syndicats à vocation unique, de syndicats à vocation multiple simple ou « à la carte », de syndicats mixtes.
Bien que constituant des catégories distinctes, ces établissements ont des caractéristiques communes notamment quant au faible niveau des contraintes et à l'existence d'une dépendance financière à l'égard des communes. Les communes adhèrent simultanément à plusieurs de ces structures.
Dans un second groupe, figurent des structures de coopération correspondant à une intercommunalité généraliste ou de projet. Au sein des structures intercommunales dotées d'une fiscalité propre, peuvent être distingués un premier niveau d'intégration fiscale correspondant à des structures (districts, communautés de communes) ayant une vocation généraliste et disposant d'une fiscalité additionnelle et un deuxième niveau de forte intégration fiscale et de compétences (communautés de villes, communautés urbaines, syndicats d'agglomérations nouvelles).
La simplification souhaitée devrait donc logiquement impliquer un regroupement de certaines catégories aujourd'hui distinctes et une harmonisation du contenu des compétences obligatoires. Les compétences exercées sont d'ailleurs en pratique souvent différentes des compétences légales, ce qui justifie le pragmatisme du législateur qui a souhaité que soit examinée une évolution progressive des compétences exercées par les structures intercommunales selon les besoins constatés par leurs responsables.
En outre, la réflexion devra porter sur le type de solidarité financière et fiscale souhaitable entre communes membres d'un établissement public de coopération intercommunale. Si la taxe professionnelle unique constitue la forme la plus achevée, elle n'est pas applicable à toutes les situations, notamment, au regard du produit fiscal attendu, en milieu rural.
2. La mise en oeuvre de la notion de pays
Consacré par le titre II de la loi d'orientation du 4 février 1995, le pays est un territoire dont la définition ne se confond pas avec celle de la coopération locale :
- d'une part, il s'agit d'un espace sans personnalité morale ni institution. Il n'est pas non plus une circonscription administrative nouvelle ;
- d'autre part, il répond à des critères de cohérence spatiale qui relèvent de l'histoire, de la géographie, de la culture ou encore de la sociologie ;
- par ailleurs, il tend notamment à développer la solidarité entre l'espace rural et le milieu urbain ;
- enfin, il associe outre les collectivités locales, les autres acteurs concernés par le développement local (représentants du monde socioprofessionnel, association...) dans le cadre d'un partenariat.
Compte tenu de ces caractéristiques, le pays se distingue donc de la coopération intercommunale même si son existence doit être constatée par la commission départementale de la coopération intercommunale.
Il n'est cependant pas inutile d'essayer de mesurer les effets de la notion de pays sur la coopération intercommunale.
Dans le cadre de 1 »« opération de préfiguration » en cours, 170 dossiers de candidatures ont été présentés et 42 projets de pays sélectionnés.
Il ressort de ces dossiers, plusieurs cas de figure :
- certains périmètres de pays recouvrent très exactement le périmètre d'une structure intercommunale ;
- certains pays englobent plusieurs structures intercommunales dans un périmètre commun. La fédération de ces structures couvrant le pays est parfois envisagé. Dans d'autres cas, les structures préexistantes sont considérées comme couvrant un « bassin de vie » au sens de la loi d'orientation du 4 février 1995. Ces bassins de vie constituent alors des sous-ensemble du pays qui les fédère ;
- enfin, certains pays n'englobent que partiellement plusieurs structures intercommunales. Dans certains cas, une réorganisation est prévue. Dans d'autres cas, les partenaires s'accommodent de cette diversité, le pays restant un espace de projet. Le pays peut être doté d'un comité de pilotage sous la forme, par exemple, d'un syndicat mixte, souvent avec un second collège dans lequel siègent des représentants socio professionnels et des associations.
Ces premières tendances donnent donc des indications sur la mise en oeuvre des pays. Il est cependant encore trop tôt pour tirer de véritables conclusions quant à l'impact de cette nouvelle notion sur la coopération intercommunale. La démarche pragmatique, souhaitée par le législateur, doit, par ailleurs, conduire à éviter les « modélisations » afin de faire confiance aux initiatives diverses des acteurs locaux.
Le rapport d'étape qui sera établi d'ici la fin de l'année permettra de mieux cerner les conditions de la mise en oeuvre des pays et les conséquences qui en résultent pour la coopération intercommunale.
D. L'APPLICATION DES NOUVELLES DISPOSITIONS RELATIVES À LA FONCTION PUBLIQUE TERRITORIALE
La loi n° 94-1135 du 27 décembre 1994 a cherché à remédier de manière pragmatique aux dysfonctionnements et rigidités qui affectaient le statut de la fonction publique territoriale. Elle a eu pour objet essentiel de faciliter le recrutement et la gestion des déroulements de carrière des fonctionnaires territoriaux, notamment grâce à une plus grande décentralisation de l'organisation institutionnelle et à une meilleure adéquation des procédures aux besoins réels des collectivités territoriales.
A cette fin, la loi du 27 décembre 1994 a mis en oeuvre quatre orientations principales : la modification des missions et des structures du centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) et des centres de gestion ; la réorganisation des conditions de recrutement ; l'assouplissement des modalités de la formation initiale d'application ; l'amélioration de la gestion des déroulements de carrière. L'application de cette loi implique la parution d'un certain nombre de décrets.
Pour les conditions générales de recrutement, le décret n° 95-1069 du 2 octobre 1995 a modifié le décret n° 95-1229 du 20 novembre 1985 afin de fixer les dispositions générales de nature à rapprocher des collectivités locales le niveau d'organisation de certains concours et examens professionnels de la fonction publique territoriale, adapter la composition et le fonctionnement des jurys de concours et d'examen, améliorer la gestion des listes d'aptitude établies après concours.
Pour permettre la déconcentration et la décentralisation de l'organisation de concours et examens professionnels, l'application de la loi du 27 décembre 1994 requiert la modification du dispositif réglementaire applicable aux concours et examens professionnels des cadres d'emplois concernés. Tel est l'objet du décret n° 95-116 du 19 octobre 1995 qui tend à opérer : une déconcentration, au profit des délégations régionales ou interdépartementales du Centre national de la fonction publique territoriale, de l'organisation des concours et examens professionnels de cadres d'emplois des catégories A et B des filières administrative, technique, culturelle et sportive ; une décentralisation, au profit des seuls centres de gestion de la fonction publique territoriale, des concours et examens professionnels des cadres d'emplois des conseillers territoriaux socio-éducatifs, des secrétaires de mairie et des rédacteurs territoriaux ; une décentralisation, au profit des centres de gestion et des collectivités locales non affiliées à ces centres, des concours et examens professionnels de douze cadres d'emplois de la filière médico-sociale.
Pour les institutions de la fonction publique territoriale, le décret n° 95-955 du 24 août 1995 modifie le décret n° 85-643 du 26 juin 1985 relatif aux centres de gestion afin de prendre en compte les nouvelles dispositions de la loi concernant les missions et le fonctionnement de ces établissements publics. Le décret n° 95-1017 du 14 septembre 1995 précise, quant à lui, les dispositions relatives aux comités techniques paritaires et commissions administratives paritaires.
La loi du 27 décembre 1994 a, par ailleurs, tendu à améliorer les conditions de fonctionnement du Centre national de la fonction publique territoriale. Un décret - en préparation actuellement - modifiera le décret n° 87-811 du 5 octobre 1987 afin de prendre en compte les nouvelles règles applicables au cadre institutionnel, au fonctionnement interne et au régime financier et comptable de l'établissement. Le décret n° 95-1062 du 22 septembre 1995 - pris pour l'application de l'article 22 de la loi du 27 décembre 1994 -a, par ailleurs, précisé la composition et les attributions de la commission qui doit donner son avis sur le montant des dépenses transférées du Centre national de la fonction publique territoriale aux centres de gestion.
Enfin, en matière de formation, les textes relatifs à la formation avant recrutement ont été élaborés mais ne sont pas encore publiés. Ils concernent le statut des élèves soumis à formation avant recrutement et modifient les statuts des cadres d'emplois concernés.
Votre commission des Lois note également la réflexion en cours qui pourrait conduire, l'année prochaine, à une clarification et à une simplification du droit des marchés publics.
A l'occasion de la présentation du présent avis devant la commission des Lois, votre rapporteur pour avis, a par ailleurs, rappelé que pour la première fois depuis sa création en 1990, la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques avaient eu à se pencher sur les comptes de candidats aux élections municipales. Il a rappelé que si le juge administratif était saisi de la contestation d'une élection dans une circonscription où le montant des dépenses électorales était plafonné, il devait surseoir à statuer jusqu'à réception des décisions de la commission qui, elle-même, disposait d'un délai de deux mois, à compter du dépôt de compte de campagne, pour se prononcer. Compte tenu de ces délais, les remboursements de frais ne seront effectués qu'en 1996.
La commission des Lois a décidé de réserver son avis jusqu'à l'examen des articles de la première partie du projet de loi de finances et de suivre la position qui sera adoptée par la commission des Finances.