Avis n° 81 (1995-1996) de M. Charles DESCOURS , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 30 novembre 1995

Disponible au format Acrobat (3 Moctets)

N° 81

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996

Annexe au procès-verbal de la séance du 21 novembre 1995.

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le projet de loi de finances pour 1996, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME I

PROTECTION SOCIALE

(Problèmes généraux et équilibres financiers)

Par M. Charles DESCOURS,

Sénateur.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (10ème législ.) : 2222. 2270 à 2275 et T.A. 413.

Sénat : 76 et 77 (annexe n°32) (1995-1996).

Lois de finances.

(1) C ette commission est composée de MM. Jean-Pierre Fourcade, président ; Jacques Bimbenet, Claude Huriet, Charles Metzinger, Louis Souvet, vice-présidents ; Mme Michelle Demessine, M. Charles Descours. Mme Marie-Madeleine Dieulangard, MM Jacques Machet, secrétaires ; José Balarello, Henri Belcour, Jacques Bialski, Paul Blanc, Mme Annick Bocandé, MM. Eric Boyer, Louis Boyer, Jean-Pierre Cantegrit, Francis Cavalier-Benezet, Gilbert Chabroux, Jean Chérioux, Georges Dessaigne, Mme Joëlle Dusseau, MM. Guy Fischer, Alfred Foy, Serge Franchis, Mme Jacqueline Fraysse-Cazalis, MM. Alain Gournac, Roland Huguet, André Jourdain, Pierre Lagourgue, Dominique Larifla, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Jean-Louis Lorrain, Simon Loueckhote, Jean Madelain. Michel Manet, René Marques, Serge Mathieu, Georges Mazars, Georges Mouly, Lucien Neuwirth, Mme Nelly Olin, MM. Louis Philibert, André Pourny, Henri de Raincourt, Gérard Roujas, Bernard Seillier, Martial Taugourdeau, Alain Vasselle, André Vézinhet, Jean-Pierre Vial.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. AUDITION DE MME COLETTE CODACCIONI, MINISTRE DE LA SOLIDARITÉ ENTRE LES GÉNÉRATIONS

Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi du mercredi 25 octobre 1995, sous la présidence de M. Jean-Pierre Fourcade, président, l a commission a procédé à l'audition de Mme Colette Codaccioni, sur les crédits de son département ministériel pour 1996.

Mme Colette Codaccioni, ministre de la solidarité entre les générations, a d'abord indiqué que la solidarité entre les générations était une priorité pour la politique de notre pays ; c'est pourquoi ce budget était en Progression de 9,6 % malgré un contexte budgétaire difficile.

Evoquant la politique en faveur des personnes âgées, Mme Colette Codaccioni a souligné que ce budget permettait de consolider l'effort sans Précédent que traduit l'institution d'une prestation autonomie : il aidera au développement de la vie sociale des retraités et à l'amélioration de la qualité de la vie dans les établissements.

En ce qui concerne les personnes handicapées, elle a rappelé que le Président de la République, qui avait fait voter, lorsqu'il était Premier ministre, les grandes lois de 1975 et 1987 qui ont posé l'essentiel des bases de la politique en faveur des personnes handicapées, a décidé qu'un « nouvel élan » devait être donné.

Dans ce sens, le Premier ministre a nommé un délégué interministériel aux personnes handicapées, M. Patrick Segal, afin de coordonner l'action de tous les ministères concernés.

Le nombre de places en centres d'aide par le travail (CAT) sera fortement augmenté afin de mieux répondre à la demande ; cette plus grande offre permettra de résorber les problèmes dus aux « amendements Creton ».

Mme Colette Codaccioni a affirmé que la politique en faveur de la famille et de l'enfance était également une priorité.

Aussi, des crédits nouveaux financeront des actions de médiation familiale et l'institution de « points rencontre ». Ces deux types d'action permettront de développer les lieux de conciliation, de conseil et de rencontre entre parents dont la famille se décompose, ou entre parents et enfants lorsque les liens les plus stables tendent à disparaître.

Enfin, Mme Colette Codaccioni, ministre de la solidarité entre les générations, a indiqué que la création de l'Observatoire de la parité entre les femmes et les hommes voulue par le Président de la République et le Premier ministre était la marque d'une volonté d'assurer l'égalité réelle entre les hommes et les femmes.

Le budget va aussi tout à fait dans ce sens puisqu'il privilégiera la promotion des droits des femmes notamment en développant les moyens consacrés aux centres d'information sur les droits des femmes, en permettant des actions de communication sur la violence conjugale et en assurant le lancement de l'Observatoire de la parité.

Mme Colette Codaccioni a ensuite détaillé les crédits de son ministère qui s'élèvent à près de 30 milliards de francs.

Elle a précisé qu'à structure constante, ce budget progressait de 9,6 % par rapport à celui de 1995, en fait de 4,2 % si l'on tenait compte de la loi de finances rectificative votée au printemps.

Concernant la politique en faveur des personnes handicapées et des personnes âgées, Mme Colette Codaccioni a évoqué les programmes d'action sociale en faveur des personnes handicapées, qui progressent de 8 millions de francs, puis la prise en charge, partagée avec la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM), des dépenses de fonctionnement et d'équipement des instituts nationaux pour les jeunes sourds et les jeunes aveugles.

Elle a indiqué que les subventions aux CAT s'éleveraient à 5.590,2 millions de francs en 1996, soit 5,6 % de plus que dans la loi de finances initiale pour 1995.

La mesure essentielle, à cet égard, concerne la création de 2.750 places nouvelles de CAT, pour laquelle 151,21 millions de francs sont inscrits en loi de finances.

En outre, les crédits affectés à l'allocation aux adultes handicapés se montent à 20,8 milliards de francs, soit une augmentation de 10,81 % par rapport à la dotation de la loi de finances initiale pour 1995.

S'agissant des personnes âgées, Mme Colette Codaccioni, ministre de la solidarité entre les générations, a rappelé que l'Etat finançait également des programmes d'action sociale dont l'un des axes essentiels était le maintien à domicile. Le programme est maintenu, étant souligné que l'effort principal viendra de la création de la prestation d'autonomie.

Par ailleurs, l'Etat poursuit, conformément aux engagements contractualisés dans le XIe Plan, son effort de financement du programme de rénovation des établissements d'hébergement des personnes âgées. A ce Programme seront consacrés, en 1996, 400 millions de francs d'autorisations de programme et 428 millions de francs de crédits de paiement.

Avec un montant de 85 millions de francs, les crédits consacrés à la Promotion des droits des femmes, à la formation et à l'information des femmes sur leurs droits seront maintenus au niveau de 1995.

Enfin, les crédits consacrés à l'enfance et à la famille s'élèveront à 62,35 millions de francs.

M. Jean Chérioux, rapporteur pour avis des crédits de la famille, a interrogé le ministre sur la situation financière de la branche famille du régime général et sur les raisons qui expliquent son déficit. Il lui a aussi demandé quel était l'état de la réflexion gouvernementale sur la réforme des Prestations familiales. A cet égard, il a souhaité que le ministre précise les principes directeurs de cette réforme et indique si l'instauration d'une allocation parentale de libre choix faisait toujours partie des priorités du Gouvernement.

Enfin, M. Jean Chérioux, rapporteur pour avis, a évoqué la perspective d'une redéfinition du cadre juridique régissant l'Union nationale des associations familiales (UNAF) pour lui offrir de plus grandes possibilités d'action, notamment en matière audiovisuelle.

Mme Colette Codaccioni a indiqué que la branche famille serait, en 1995, déficitaire d'environ 13,5 milliards de francs. Elle a expliqué ce déficit, à la fois par une perte de recettes et par la montée en charge de la loi dite « famille ».

Elle a estimé que, plus vite des économies seraient réalisées, plus vite des mesures nouvelles pourraient être prises.

Mme Colette Codaccioni, ministre de la solidarité entre les générations, a indiqué que la réforme des prestations familiales avait été évoquée à de nombreuses reprises au sein des forums régionaux sur la sécurité sociale organisés par le Gouvernement. Elle a indiqué qu'une telle réforme devrait poursuivre un objectif de simplification des prestations et satisfaire quatre priorités : les familles nombreuses, les familles modestes, les familles comprenant des jeunes enfants ou des jeunes adultes.

Mme Colette Codaccioni a déclaré qu'elle n'était pas opposée à l'idée de mener une réflexion sur le cadre juridique s'appliquant à l'UNAF, à condition que l'évolution de celui-ci soit réalisée au bénéfice des familles.

Répondant à M. Jean-Pierre Fourcade, président, elle a indiqué que les décisions du Gouvernement en matière de réforme de la sécurité sociale seraient présentées au Parlement à l'occasion du débat annuel sur la sécurité sociale, soit à la mi-novembre.

M. Charles Descours, rapporteur pour avis (protection sociale, problèmes généraux et équilibre financier) a interrogé le ministre sur un éventuel renouvellement de l'opération, réalisée en 1993, de reprise par le fonds de solidarité vieillesse (FSV) de la dette du régime général de sécurité sociale, sur les conditions en 1996 de l'équilibre financier du FSV, sur les enseignements des premiers forums régionaux de la protection sociale et sur l'éventuelle subordination des prestations familiales à une condition de ressources.

En réponse, Mme Colette Codaccioni a tout d'abord fait observer que malgré la reprise de dette de 1993, de nouvelles dettes s'étaient accumulées. Elles s'élèveront, fin 1995, à 120 milliards, l'Etat étant en outre obligé d'avancer les besoins de trésorerie.

Elle a souligné l'importance du débat national en cours qui devrait permettre de dégager les conditions d'un retour à l'équilibre du système. Elle a admis que de nouvelles modalités d'apurement de la dette étaient en cours d'élaboration.

Concernant la situation financière du FSV, elle a fait observer que le solde cumulé s'élevait à plus de deux milliards de francs, annonçant par ailleurs qu'elle en préciserait prochainement les perspectives d'évolution. C'est en raison de ces excédents que le projet de loi de finances met à la charge du FSV un versement de deux milliards au budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA) au titre des majorations pour enfants à charge et de la création de la prestation dépendance.

Elle a observé que le régime agricole était le dernier à ne pas bénéficier de la prise en charge par le FSV des majorations non contributives de ses prestations.

Enfin, pour ne pas risquer une nouvelle invalidation du Conseil constitutionnel, le dispositif retenu sera mis en place en deux temps, suppression des crédits de la Mutualité sociale agricole et création d'une ligne spécifique au sein du FSV.

A propos des forums régionaux, le ministre a constaté que l'objectif de sensibiliser les Français avait été atteint. En outre, de nombreuses propositions concrètes ont pu être recueillies. Elle a observé que les Français se déclaraient majoritairement favorables à une réforme allant dans le sens de la maîtrise médicalisée des dépenses.

Répondant sur la politique familiale, le ministre a indiqué qu'un consensus s'était dégagé pour que les prestations ne soient pas soumises à des conditions de ressources. Il conviendra donc de trouver d'autres types d'économies. En revanche, pour ce qui concerne une éventuelle fiscalisation ou la simplification des prestations, le débat reste ouvert.

M. Jacques Machet, rapporteur pour avis (politique en faveur des handicapés), a interrogé le ministre sur ses projets concernant les établissements de travail protégé, les maisons d'accueil spécialisées et la prise en charge des handicapés vieillissants. Il s'est également interrogé sur les projets du Gouvernement en matière d'indexation des prestations.

Mme Colette Codaccioni, ministre de la solidarité entre les générations, après avoir constaté que le nombre des personnes handicapées augmentait régulièrement, a souligné les efforts exceptionnels du Gouvernement entrepris pour y répondre, notamment en vue de l'accueil des handicapés en établissement et en centres d'aide par le travail (CAT). Elle a Cependant regretté qu'il ne soit pas possible d'organiser les ouvertures de Places sur une base pluriannuelle.

Elle a observé que les maisons d'accueil spécialisées (MSA) étaient financées par les caisses d'assurance maladie, qui subissaient les mêmes contraintes budgétaires que l'Etat. A propos du vieillissement des handicapés, elle a souhaité l'ouverture d'une concertation afin que des solutions appropriées y soient apportées. Elle a également défini les priorités du Gouvernement relatives à l'intégration des enfants handicapés dans le milieu scolaire et en application de « l'annexe 24 » (projet individualisé). Elle a regretté que certains besoins nouveaux, concernant notamment les autistes et tes polyhandicapés, ne soient pas encore complètement satisfaits. Enfin, elle a Précisé que le mode d'indexation des prestations ne serait pas revu.

A propos du mécanisme mis en place par l'article 95 de la loi de finances pour 1994, elle a précisé que, dans la mesure où les commissions techniques d'orientation et de reclassement professionnel (COTOREP) n'avaient pu l'appliquer qu'après la parution du décret du 16 mai 1994, il était difficile d'en mesurer l'impact exact. Néanmoins, il semblerait que l'on observe une stabilité du taux des demandes concernées par cet article autour de 36 %.

Un débat s'est engagé au cours duquel sont intervenus, outre le ministre, MM. Jean-Pierre Fourcade, président, Jacques Machet, rapporteur pour avis, Jean Madelain, Henri de Raincourt, Mmes Joëlle Dusseau et Annick Bocandé à propos des difficultés de connaître le nombre exact de personnes concernées par département, de la lenteur de la mise en oeuvre des réformes et de la reconnaissance par l'Etat des formules intermédiaires entre les centres d'aide par le travail et les maisons spécialisées. Sur ce dernier point, le ministre a annoncé la parution imminente d'un décret, tout en soulignant le rôle primordial du département.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis (politique en faveur des personnes âgées) s'est interrogé sur la constitutionnalité du dispositif alternatif visant à mettre à la charge du FSV les majorations pour enfants à charge actuellement inscrites au BAPSA. Au cas où ce dispositif serait effectivement mis en oeuvre, il s'est inquiété du risque de déficit du FSV, ce qui poserait le problème du financement de la prestation autonomie. Il a donc souhaité savoir comment le Gouvernement entendait préserver l'équilibre du fonds.

Il a également interrogé le ministre sur les intentions du Gouvernement en matière de fonds de pension, sur la situation de la branche vieillesse du régime général, sur la revalorisation des retraites, sur les taux de cotisations d'assurance maladie à la charge des retraités et sur les intentions du Gouvernement en matière de politique de maintien à domicile et de création de lits de cure médicale.

En réponse, Mme Colette Codaccioni, ministre de la solidarité entre les générations, a précisé que le problème de l'équilibre du FSV avait été examiné par le Gouvernement qui annoncera bientôt de nouvelles modalités de financement.

M. Jean-Pierre Fourcade, président, a observé qu'il était difficile de se prononcer sur l'institution de l'allocation dépendance sans connaître d'abord les moyens de la financer.

Le ministre s'est déclaré confiant sur la constitutionnalité du mécanisme visant à transférer certaines prestations à la charge du BAPSA au FSV.

A propos de la création des fonds de pension, elle a souligné l'attachement des Français au régime de retraite par répartition, ce qui ne peut que laisser une place restreinte à d'autres mécanismes. Elle a souhaité que l'on aborde ce dossier sous l'angle du financement des retraites complémentaires, le financement des entreprises devant passer au second plan.

Elle a en outre rappelé que toute création de cotisation avait une incidence sur l'équilibre des comptes de la sécurité sociale, ce qui nécessitait de procéder avec une prudence extrême.

M. Jean Madelain a indiqué que le Conseil national de la participation, auquel il a été nommé, avait créé un groupe de travail spécialisé afin d'étudier la mise en place des fonds de pension.

Mme Colette Codaccioni a indiqué que le déficit de la branche vieillesse s'élevait à 13,3 milliards en 1995, mais a observé une certaine stabilisation.

Elle a rappelé que la revalorisation des pensions de 0,5 % de juillet 1995 avait été effectuée par anticipation sur ce qui devait être fait au 1er janvier 1996. Néanmoins, cette question pourrait être revue à la fin de l'année.

A propos de la cotisation d'assurance maladie des retraités, actuellement fixée à 1,4 % contre 6,8 % pour les salariés, elle a reconnu que la question se posait du rattrapage du taux, rappelant à ce propos que 18 000 lits de cure médicale n'étaient pas financés, pour un montant de 9 milliards.

Elle a ensuite exposé la répartition des places supplémentaires dans les maisons de cure, soulignant qu'il convenait de réduire progressivement le nombre de lits non financés par manque de crédits.

Enfin, elle a indiqué que 20.000 lits d'hospices resteraient à « humaniser » à la fin du XIe Plan. Cela se ferait grâce à une participation financière de l'Etat, des établissements hospitaliers, des régions départements. 200.000 lits auront ainsi été transformes à la fin de 1998.

Mme Marie-Madeleine Dieulangard a interrogé le ministre sur les effets du versement de l'allocation parentale d'éducation des le deuxième enfant, sur la concurrence entre crèches et allocation de garde d'enfants sur l'absence de garanties concernant la compétence des gardiennes d'enfants sur le financement des centres d'information des droits des femmes, sur les disparités existant entre les conventions des personnels s occupant des adultes handicapés et des personnels s'occupant d'enfants handicapés ainsi que sur les conditions du maintien des personnes âgées invalides en résidence.

M. André Jourdain s'est interrogé sur les conditions de la compensation par le budget de l'Etat de la suppression progressive des cotisations d'allocations familiales et a conteste l'application aux deux retraités d'un même couple, de la majoration pour enfant.

M. Claude Huriet a interrogé le ministre sur le financement de l'allocation de rentrée scolaire, sur les intentions du gouvernement en matière d'allocation parentale de libre choix et sur les conditions de la reforme, jugée prioritaire, des prestations familiales.

Mme Nelly Ollin a interrogé le ministre sur une éventuelle réforme du régime de l'adoption.

M. Paul Blanc a suggéré une simplification du régime de versement de la prestation autonomie de telle sorte que ce versement soit exclu pour les personnes en établissement déjà bénéficiaires de l'assurance maladie. Il a considéré que cette simplification dégageait des ressources permettant de créer davantage d'emplois.

M. José Balarello est revenu sur les difficultés de placement des handicapés âgés et a suggéré d'utiliser à cette fin les lits vides des maisons de retraite.

M. Jacques Machet est intervenu sur les difficultés des veuves.

En réponse aux différents intervenants, Mme Colette Codaccioni, ministre de la solidarité entre les générations a précisé les dotations dont bénéficieront les principales aides en matière familiale.

Elle a rappelé l'initiative du Sénat ouvrant aux hommes le bénéfice de l'allocation parentale d'éducation. Elle a indiqué ne pas avoir de données nationales concernant la concurrence éventuelle entre crèches et versements d'allocations de garde à domicile. Elle a indiqué que plusieurs instances de concertation travaillaient à formuler des propositions en vue de l'amélioration des conditions de travail des femmes.

Le ministre est revenu sur l'hébergement, sur le versement des aides aux personnes moyennement dépendantes en foyer, précisant que le forfait soins concernait les besoins liés à la maladie et la prestation autonomie les besoins d'aide à la vie quotidienne. Elle a indiqué qu'elle veillait à ce que la compensation de la budgétisation des cotisations d'allocations familiales soit intégrale et a précisé que l'allègement s'était élevé à 11,6 milliards de francs en 1994. Elle a indiqué que la compensation d'allocation de rentrée scolaire était financée à hauteur de 5 milliards par l'Etat et de 1,5 milliard par la Caisse nationale d'assurances familiales (CNAF).

Concernant les délais de mise en oeuvre de l'allocation parentale de libre choix qui constituait une priorité de la loi « famille », Mme Colette Codaccioni, ministre de la solidarité entre les générations a rappelé que l'Etat consacrait déjà 80 milliards pour la petite enfance, à quoi s'ajoutaient les dépenses des collectivités territoriales. Dans ces conditions, l'amélioration des aides ne pouvait passer que par une simplification du dispositif.

Elle a rappelé les principales orientations du rapport Mattéi sur l'adoption, agrément des couples, lutte contre le trafic d'enfant droit d'accès aux origines et sort des enfants délaissés, qui pourraient faire l'objet d'un débat en janvier prochain.

Elle a encore rappelé que la prestation autonomie n'avait pas de fonction médicale et que les personnes seules moyennement dépendantes n'allaient pas nécessairement en maison de cure médicalisée, ce qui justifiait pleinement le versement de l'allocation dépendance lorsqu'elles étaient en établissements non médicalisés. Elle a aussi précisé que le taux des pensions de réversion passerait de 52 à 54 % à la fin de l'année pour, à terme, lorsque l'équilibre de la branche « famille » serait rétabli, atteindre 60 %.

Concernant la proposition de placer les personnes âgées handicapées en maison de retraite, elle s'est interrogée sur le nombre de lits vides susceptibles d'être ainsi reconvertis, souhaitant qu'une réflexion préalable soit menée à ce sujet.

En réponse à M. Jean-Pierre Fourcade, président le ministre a précisé que 4.000 personnes âgées étaient hébergées chez des couples plus jeunes, comme le permet la loi.

Elle a indiqué que les taux d'occupation des établissements pour jeunes handicapés étaient très variables et que les surcapacités ne concernaient que quelques établissements spécialisés, notamment pour les jeunes sourds en région parisienne. Elle a indiqué, en outre, que les naissances d'enfants handicapés restaient stables.

Enfin, elle a précisé que l'accueil de jour des personnes âgées en maison de retraite se développait mais que, ce dispositif relevant du département, elle n'avait pas eu à définir de politique d'aide.

II. EXAMEN DE L'AVIS

Réunie le jeudi 23 novembre 1995, sous la présidence de M. Jean-Pierre Fourcade, président, la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Charles Descours, sur les crédits de la protection sociale inscrits dans le projet de loi de finances pour 1996.

M. Charles Descours, rapporteur pour avis, a observé que les crédits de la protection sociale avaient été ventilés entre les trois ministères sociaux issus de la scission du ministère des affaires sociales, de la santé et de la ville qui avaient été créés sous le premier Gouvernement d'Alain Juppé. Il a rappelé que, depuis le 7 novembre 1995, la structure ministérielle avait été resserrée et que cette répartition n'était plus pertinente.

Il a estimé que le plan de réforme annoncé le 15 novembre dernier par le Premier ministre constituait un événement majeur dans le domaine de la protection sociale et justifiait une étude à part entière.

Il a ensuite fait deux observations sur les crédits budgétaires.

D'abord, le chapitre consacré aux subventions aux régimes de protection sociale enregistre une progression de ses crédits de 17 % qui correspond essentiellement à l'augmentation de la subvention de l'Etat à la caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines. A cet égard, il a souligné le fait que les recettes de ce régime provenaient aux trois quarts de transferts inter-régimes et à hauteur de plus de 10 % de contributions publiques.

Les crédits relatifs aux moyens de fonctionnement des services communs aux trois ministères s'élèvent à 5 milliards de francs en 1996, en progression de 2 % par rapport à 1995, soit une stabilisation en francs constants. Les moyens de ces ministères ne sont donc pas en rapport avec l'ampleur des réformes annoncées par le Premier ministre et ils risquent d'être un frein à leur réalisation.

Evoquant le plan de réforme de la protection sociale, M. Charles Descours, rapporteur pour avis, a indiqué qu'il était nécessaire, courageux et cohérent et qu'il correspondait à une réforme d'ensemble et en profondeur.

Il a estimé que ce plan devrait recueillir un large accord de la part de la commission, d'un triple point de vue : sur le constat dressé, sur les objectifs assignés ainsi que sur la méthode retenue.

Ce constat est le suivant : notre système de sécurité sociale est en crise ; une crise financière, bien sûr, mais plus fondamentalement une crise d'identité et d'efficacité.

M. Charles Descours, rapporteur pour avis, a indiqué que malgré l'apurement de la dette du régime général fin 1993 à hauteur de 110 milliards, les déficits du régime général ont continué à se creuser, avec - 54 milliards en 1994 et - 64 milliards en 1995.

Pour la maladie, le déficit est passé de 31 milliards en 1994 à 36,6 milliards en 1995. Les augmentations de dépenses les plus élevées ont concerné la pharmacie (+ 8,5 %), les honoraires médicaux (+ 5,5 %), les analyses (+ 4,8 %) et les auxiliaires médicaux (+ 3,9 %). Les dépenses d'hospitalisation publique ont progressé de 4,7 % en 1995 ; celles de l'hospitalisation privée ont augmenté de 4,9 %.

Pour la vieillesse, M. Charles Descours, rapporteur pour avis, a rappelé que le déficit devrait atteindre 14,7 milliards en 1995, malgré la montée en charge de la réforme du 22 juillet 1993 et la suppression de la remise forfaitaire de 42 francs.

Il a indiqué que, pour la famille, le déficit devrait s'établir à 13,2 milliards.

En terme de dépenses, il a remarqué que les charges d'allocations familiales régressaient de façon constante sous l'effet du recul démographique. En revanche, les prestations liées à la petite enfance Progressaient très fortement, notamment en 1995.

Compte tenu de ces déficits, les dettes à long terme du régime général devraient atteindre, au 31 novembre 1995, près de 230 milliards.

Une importante fraction, soit 110 milliards de francs de déficits cumulés au 31 décembre 1993, a été mise à la charge du fonds de solidarité vieillesse (FSV).

M. Charles Descours, rapporteur pour avis, a indiqué qu'en trésorerie, l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) avait dû mobiliser, dès le 5 janvier 1995 et sans interruption depuis, les facilités de trésorerie normales et exceptionnelles de la Caisse des dépôts et consignations et dû faire appel aux avances du Trésor pour un montant quotidien moyen de 34,3 milliards.

M. Charles Descours, rapporteur pour avis, a rappelé que les autres régimes, et notamment les régimes spéciaux, n'étaient pas épargnés par cette crise, et que l'on constatait même une dégradation de la situation des régimes

de retraite complémentaire « Association générale des institutions de retraite des cadres » (AGIRC) et « Association des régimes de retraites complémentaires » (ARRCO).

M. Charles Descours, rapporteur pour avis, a ensuite analysé la crise d'identité et d'efficacité de la sécurité sociale.

Il a indiqué que la sécurité sociale avait été créée à une époque où le chômage n'existait pas. Or, son système de financement, pour environ 85 %, restait encore fondé sur des cotisations assises sur les salaires, ce qui pénalisait l'emploi, et le poids des cotisations sociales singularisait la France en Europe : elles représentent en effet 19,6 % du produit intérieur brut (PIB) contre 17,5 % en Allemagne. Les performances du système ne sont pourtant pas exemplaires : alors que la France occupe la troisième place mondiale et la première en Europe pour les dépenses de santé, l'état sanitaire de notre population n'est pas significativement meilleur que celui des autres pays européens.

M. Charles Descours, rapporteur pour avis, a ensuite évoqué les objectifs et la méthode de la réforme.

S'agissant des objectifs, à savoir la recherche de plus de justice et la clarification des responsabilités, il a estimé qu'ils apparaissaient indispensables pour recueillir l'adhésion de nos concitoyens.

La méthode est dictée par l'urgence. Il s'agit de mesures limitées dans leur nombre (quatre), pour certaines impopulaires, pour d'autres qui heurtent les corporatismes. M. Charles Descours, rapporteur pour avis, a estimé que le Parlement pourrait néanmoins remplir ses missions d'initiative et de contrôle.

Sur le contenu lui-même du plan, M. Charles Descours, rapporteur pour avis, a distingué deux séries de mesures : les mesures immédiates à caractère financier et les mesures structurelles.

Les mesures de sauvegarde correspondent à l'apurement de la dette sociale et à la réduction du déficit du régime général de 60 à 17 milliards en 1996, déficit qui devrait laisser place à un solde excédentaire en 1997.

Pour l'apurement de la dette sociale, une caisse d'amortissement serait créée dès 1996 : elle serait principalement alimentée par un nouveau prélèvement, le remboursement de la dette sociale (RDS).

Ainsi cantonnée, la dette devrait être amortie sur treize ans comme la dette initialement prise en charge par le fonds de solidarité vieillesse.

M. Charles Descours, rapporteur pour avis, s'est félicité que le rééquilibrage soit également opéré branche par branche.

Pour la branche vieillesse, le FSV prendrait en charge 11 milliards de dépenses non contributives au titre de la validation des périodes de chômage, somme correspondant à l'excédent libéré par l'externalisation de la dette ; 2,5 milliards seraient également prélevés sur les entreprises au titre de la contribution patronale à la prévoyance collective.

Pour la branche famille, les mesures de rationalisation et de transfert de la gestion des prestations familiales versées par l'Etat et les grandes entreprises publiques seraient importantes. Si l'effort demandé aux familles Pouvait être diversement apprécié, notamment au regard de ses effets sur la consommation, M. Charles Descours, rapporteur pour avis, a noté ''engagement très ferme du Gouvernement concernant l'attribution de nouvelles recettes de la contribution sociale généralisée (CSG), à partir de 1997, à travers l'élargissement de l'assiette.

Pour la branche maladie, il s'est félicité de l'absence de mesures d'accroissement de la participation des assurés actifs et de la priorité donnée à la maîtrise des dépenses. Il a estimé que la contribution demandée à l'industrie pharmaceutique n'apparaissait pas exorbitante par rapport à la croissance de 12 % de son chiffre d'affaires en 1994. Quant à l'augmentation des cotisations maladie des retraités, il a admis que leur taux, très faible, n'était plus justifié.

M. Charles Descours, rapporteur pour avis, a ensuite présenté deux grandes mesures institutionnelles : le renforcement du rôle du Parlement et la réforme de l'organisation et du fonctionnement des caisses.

Il a estimé que la commission ne pourrait que se féliciter de l'élargissement de la compétence du Parlement réclamée par le président Jean-Pierre Fourcade lors du premier débat sur la protection sociale en décembre 1994 et par lui-même dans un rapport et une proposition de loi qui y était annexée.

M. Charles Descours, rapporteur pour avis, a indiqué qu'il faudrait être très attentif aux moyens à mettre en place pour faire face à ces nouvelles responsabilités : les moyens du ministère des affaires sociales sont, en effet, assez faibles. Il s'est interrogé sur les structures ou études sur lesquelles le Parlement pourrait s'appuyer pour apprécier les propositions qui lui seraient faites par le Gouvernement.

Evoquant la réforme de l'organisation des caisses, il a attiré l'attention de la commission sur la création d'un conseil de surveillance composé notamment de parlementaires, qui soulevait beaucoup d'interrogations parmi les partenaires sociaux : il pourrait probablement fonctionner sur le modèle de ce qui avait été créé, à l'initiative de la commission des affaires sociales, pour le fonds de solidarité vieillesse.

M. Charles Descours, rapporteur pour avis, a formulé quelques observations sur les mesures sectorielles.

Sur les régimes de retraite, deux grands « chantiers » vont être ouverts : la mise en place d'un système d'épargne-retraite et une réforme des régimes spéciaux.

Le Gouvernement s'est engagé, pour le premier, -et il faut le souligner- à organiser une discussion commune des propositions de loi déjà déposées en ce sens sur le Bureau des Assemblées et du projet en cours d'élaboration. M. Charles Descours, rapporteur pour avis, a rappelé que M. Philippe Marini, lorsqu'il était encore membre de la commission, avait déposé une proposition sur ce sujet à laquelle la majorité de ses collègues de la commission avait apporté son soutien.

Quant au second, le rapporteur pour avis a estimé que la commission ne pouvait qu'approuver, par souci d'équité, les mesures qui allaient toucher les modalités de calcul des retraites des régimes spéciaux et, par souci de transparence, la création de la caisse des fonctionnaires. Il a toutefois jugé souhaitable que la commission qui allait être mise en place pour proposer des réformes sous quatre mois s'attache également au problème des compensations inter-régimes.

Pour la famille, il a indiqué que le principal « chantier » serait l'assujettissement des allocations familiales à l'impôt sur le revenu à partir de 1997. Il a souhaité, à l'instar du président Jean-Pierre Fourcade, qu'un tel chantier, sur l'opportunité duquel il conviendra encore de s'interroger, soit engagé dans le cadre plus large de la réforme des prélèvements obligatoires. Il a observé qu'il semblait que la moitié seulement des recettes supplémentaires serait réaffectée à la branche famille alors qu'il serait légitime de procéder à une réaffectation totale.

Pour la maladie, M. Charles Descours, rapporteur pour avis, a fait part des interrogations des personnes auditionnées sur « l'harmonisation de l'effort contributif de tous les assurés » annoncée par le Premier ministre. Il existe, en effet, de nombreuses catégories pour lesquelles ne sont prélevées que des cotisations forfaitaires, voire pas de cotisations, et qui font peser de lourdes charges sur le régime général ou sur les autres régimes par la voie des compensations inter-régimes. Il s'est interrogé sur les modalités de financement de ces dépenses de solidarité. Il a aussi indiqué que beaucoup de personnes se demandaient quelles seraient les relations entre les agences

regionales, les unions régionales de caisses d'assurance maladie et les directions régionales de l'action sanitaire et sociale (DRASS).

Enfin, sur le financement, il a rappelé que l'élargissement de l'assiette de la CSG et le basculement progressif d'une partie des cotisations maladie des salariés correspondant à des orientations souvent souhaitées par la commission.

Sous le bénéfice de ces observations, M. Charles Descours, rapporteur pour avis, a proposé à la commission d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés à la protection sociale pour 1996.

M . Jean Chérioux a remercié le rapporteur pour avis pour la clarté de son exposé qui contrastait avec la situation actuelle de la sécurité sociale.

Il l'a interrogé sur la possibilité d'isoler les contributions publiques aux régimes spéciaux ainsi que le montant des transferts inter-régimes. Il a estimé que le Parlement ne pouvait s'opposer à la réforme proposée par le Gouvernement, car c'était une réforme de clarification.

Mme Marie-Madeleine Dieulangard a observé que, si le plan annoncé par le Premier ministre prévoyait des mesures d'application immédiate en ce qui concernait les recettes, les réformes de maîtrise des dépenses ne seraient que d'application progressive. Elle a estimé qu'il n'était Pas juste d'opérer une même ponction de 0,5 % du revenu sur les hauts et bas salaires et jugé que celle-ci pèserait sur la consommation. Elle a enfin remarqué que le délai de quatre mois que demandait le Premier ministre pour prendre des ordonnances aurait été suffisant pour organiser un débat au Parlement.

M. Jean Madelain a observé que les dépenses de la sécurité sociale au titre des médicaments progresseraient cette année encore de 8,5 %. Il a estimé que, pour ce secteur, les taux de progression des dépenses étaient très élevés depuis plusieurs années.

Il s'est interrogé sur les raisons de la hausse des dépenses de biologie, qui contrastait avec le coup d'arrêt constaté l'an dernier.

M. Jean-Pierre Fourcade, président, a fait part de son souhait que l'évolution des dépenses de transport sanitaire soit également analysée.

M. Bernard Seillier a jugé qu'avant de remettre en cause un système d'allocations et de prestations familiales qui datait de 1945, il faudrait en effectuer un bilan circonstancié. Il a également exprimé des réserves sur la fiscalisation des allocations familiales.

En matière d'assurance maladie, il s'est interrogé sur la possibilité de taxer les comportements à risque.

M. Jean-Pierre Fourcade, président, a fait siens les propos du rapporteur pour avis sur l'insuffisance des moyens humains des ministères sociaux. Il a estimé que celle-ci était qualitative au niveau central, qualitative et quantitative au niveau déconcentré. Il a indiqué qu'une réflexion entreprise avec M. le Président du Sénat devrait permettre à la Haute Assemblée de disposer de moyens suffisants pour assumer les nouvelles responsabilités confiées au Parlement.

Répondant aux orateurs, M. Charles Descours, rapporteur pour avis, a approuvé les propos de M. Jean Chérioux sur l'absence de clarté de certains comptes sociaux et sur la nécessité d'évaluer précisément ce que coûtaient à la collectivité, à travers les contributions publiques ou les transferts inter-régimes, certains petits régimes qui voulaient pourtant continuer à exister.

Il a indiqué que la mise en place des nouvelles méthodes de maîtrise médicalisée des dépenses de santé serait rapide.

Il a estimé que les ménages à bas salaires, contrairement à ce que semblait penser Mme Marie-Madeleine Dieulangard, n'affectaient pas tous leurs revenus à la consommation. Il a indiqué à M. Jean Madelain que les dépenses remboursables de pharmacie auraient progressé de 25 % en cinq ans. Répondant à M. Bernard Seillier, il a estimé que notre système de prestations familiales, avec 24 prestations différentes, était devenu trop lourd et complexe à gérer.

M. Jean-Pierre Fourcade, président, a estimé que la fiscalisation des allocations familiales était inadmissible à législation constante.

M. Charles Descours, rapporteur pour avis, répondant à une de ses questions précédentes, lui a indiqué que les dépenses liées aux transports par ambulance semblaient stabilisées depuis 1992.

Sur proposition de son rapporteur, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la protection sociale inscrits dans le projet de loi de finances pour 1996.

Mesdames, Messieurs,

Les observations relatives aux crédits budgétaires relevant de la Protection sociale pour 1996 présentées dans le cadre du présent rapport sont brèves.

En effet, ces crédits ont été ventilés entre les trois ministères sociaux, issus de la scission du ministère des Affaires sociales, de la santé et de la ville qui avaient été créés sous le premier Gouvernement d'Alain Juppé, recouvrant respectivement la solidarité entre les générations, la santé et l'assurance maladie, et l'intégration et la lutte contre l'exclusion sociale. Or depuis le 7 novembre dernier, la structure ministérielle a été resserrée et cette répartition n'est plus pertinente.

De plus, sur les deux derniers sujets, votre commission vous renvoie aux excellents avis présentés par nos collègues Louis Boyer et Jacques Blanc. Quant aux crédits regroupés au sein du « bleu budgétaire » correspondant à la solidarité entre les générations, ils ne sont plus constitués, à hauteur de 90 %, que par les dotations en faveur des personnes handicapées et des personnes âgées. Or, la politique en faveur de ces deux catégories fait l'objet d'avis remarquables présentés par nos collègues Jacques Machel et Alain Vasselle.

Par ailleurs, le plan de réforme annoncé le 15 novembre dernier par le Premier ministre constitue, sans conteste, l'événement récent majeur dans le domaine de la protection sociale et justifie une étude à part entière.

Votre commission n'a souhaité faire que deux remarques particulières sur les crédits budgétaires car elles illustrent certains problèmes auxquels l'Etat est confronté :

Le chapitre consacré aux subventions aux régimes de protection sociale enregistre une progression de ses crédits de 17 % passant de 2 à 2,449 milliards. Celle-ci correspond essentiellement à l'augmentation de la subvention de l'Etat à la Caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines, qui représente à elle seule 2,441 milliards. Ce régime, dont le rapport démographique est de un pour dix, fait apparaître, selon les données fournies par la Commission des comptes de la sécurité sociale d'octobre 1995, des recettes provenant, pour les trois quarts, de transferts inter-régimes et, à hauteur de plus de 10 %, de contributions publiques.

Les crédits relatifs aux moyens de fonctionnement des services communs aux trois ministères s'élèvent à 5 milliards de francs en 1996, en progression de 2 % par rapport à 1995, soit une stabilisation en francs constants. On constate donc que les moyens de ces ministères ne sont pas en rapport avec l'ampleur des réformes annoncées par le Premier ministre et qu'ils risquent d'être un frein à leur réalisation. Or, c'est précisément sur le plan de la réalisation des objectifs annoncés que se jouera l'avenir de notre système de sécurité sociale et l'appréciation du plan Juppé.

L'an dernier déjà, votre commission avait appelé l'attention sur la faiblesse des moyens des services de ce ministère eu égard à la politique ambitieuse menée depuis 1993. Elle relevait notamment un déficit important de postes dans l'administration centrale, estimé, en 1994, à environ 60 postes dont une vingtaine au niveau des administrateurs civils.

Elle avait estimé que la simple remise à niveau de ces moyens de fonctionnement supposait pour les années à venir une progression des crédits d'au moins 3 %. Ce ministère souffre, en effet, depuis longtemps d'un manque d'attractivité lié tant à la nature des emplois offerts qu'à l'absence de débouchés comparables à ceux d'autres ministères. Cette hémorragie d'effectifs se retrouve au niveau des directions déconcentrées comme des directions régionales des affaires sanitaires et sociales.

Dans le cadre du présent avis, votre rapporteur s'est particulièrement attaché, dans une première partie, à examiner l'ampleur des transferts financiers entre l'Etat et la sécurité sociale qui caractérise l'évolution de notre système de protection sociale. Dans une seconde partie, il vous présente diverses observations de portée générale sur le plan de réforme du système de protection sociale présenté le 15 novembre dernier. Le fait que votre commission des Affaires sociales sera très prochainement saisie au fond du projet de loi d'habilitation sur les ordonnances permettra de mener, dans le cadre du rapport correspondant, une analyse plus approfondie.

I. LES TRANSFERTS BÉNÉFICIANT AUX RÉGIMES DE PROTECTION SOCIALE

Partant du constat des transferts importants inscrits dans le budget pour 1996 en direction du régime des mines, votre rapporteur a souhaité examiner cette année plus précisément les transferts bénéficiant aux régimes de protection sociale.

L'analyse présentée ci-après ne peut être considérée que comme une première approche compte tenu notamment de la complexité des mécanismes sur lesquels se fondent ces transferts et le manque de transparence qui prévaut.

Néanmoins, ce travail lui est apparu important dans la perspective du renforcement du contrôle du Parlement sur les moyens financiers affectés à notre protection sociale.

A. L'EXEMPLE DU RÉGIME DES MINES

Au sein du budget relevant de la solidarité entre les générations, le chapitre consacré aux subventions aux régimes de protection sociale ne donne qu'un faible aperçu des transferts réalisés entre l'Etat et les différents régimes de notre système de protection sociale. Ces subventions sont, en effet, inscrites dans les différents « bleus » budgétaires correspondant, le plus souvent, aux ministères de tutelle des professions ou secteurs concernés.

En ce qui concerne les ministères sociaux, seul le chapitre budgétaire 47-23 relevant de la solidarité entre les générations retrace le volume de transferts en direction de certains régimes. Celui-ci ne précise plus d'ailleurs que les versements effectués au profit de la Caisse autonome et nationale de sécurité sociale dans les mines et du régime d'assurance vieillesse de Saint-Pierre-et-Miquelon. Les crédits inscrits à ce chapitre passeront de 2,084 milliards de francs en 1995 à 2,448 milliards en 1996, soit une augmentation de 17 %, la quasi-totalité de cette augmentation (99,7 %) étant affectée au régime des mines, soit 2,441 milliards.

Bien que cet exemple soit limité puisqu'il ne concerne presque, dans les faits, qu'un seul régime de protection sociale, il est significatif des problèmes soulevés par les subventions d'équilibre versées à divers régimes spéciaux et mérite d'être analysé, même brièvement.

La Caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines gère le risque invalidité, vieillesse et décès des travailleurs exerçant leurs activités professionnelles dans les mines, les ardoisières et un certain nombre d'entreprises assimilées, définies par arrêté ministériel.

Le montant des prestations de vieillesse et d'invalidité dépend uniquement de la durée de service et non du salaire des intéressés, avec des avantages supplémentaires pour le personnel ayant travaillé au fond de la mine. ( ( * )2) . Son rapport démographique, c'est-à-dire le nombre d'actifs par pensionné, a franchi le cap d'un cotisant pour dix pensionnés en 1991

Pour le risque vieillesse et invalidité proprement dit, les chiffres publiés par le rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale pour les exercices 1994, 1995 et 1996 sont les suivants :

Financement du risque vieillesse et invalidité dans les mines

(1) : Source : Direction de la Sécurité Sociale.

On constate donc que ce régime est financé, pour plus des trois quarts, par des transferts inter-régimes et, pour un sixième, par des subventions de l'Etat.

Depuis 1995, on note même une forte progression des transferts inter-régimes et plus particulièrement des transferts entre régimes spéciaux. Ceux-ci traduisent, en effet, les modifications introduites dans le système dit « de surcompensation » dont le mécanisme a été particulièrement bien étudié dans le premier rapport annuel sur la sécurité sociale, présenté par la Cour des Comptes en septembre 1995.

Le régime des mines fournit donc l'exemple d'un régime qui « survit » à travers des apports extérieurs résultant, d'une part, de versements en provenance d'autres régimes sociaux, donc financés par les assurés desdits régimes, d'autre part, de dotations budgétaires de l'Etat, donc de l'ensemble des contribuables nationaux.

Dans le cadre du présent avis, votre rapporteur a jugé opportun de rappeler l'ampleur de ces flux financiers qui s'effectuent dans des conditions de complexité et d'opacité regrettables.

B. LES CONTRIBUTIONS PUBLIQUES

Les contributions publiques reçues par les régimes de base de sécurité sociale recouvrent, pour l'essentiel, deux types d'opérations :

- le remboursement par l'Etat de prestations non contributives ;

- les subventions d'équilibre versées à divers régimes spéciaux.

L'évolution contrastée de ces contributions au cours des trois dernières années appelle quelques remarques.

En 1994, la diminution des contributions publiques aux régimes de base (- 13 %) provient principalement de la prise en charge, par le Fonds de solidarité vieillesse nouvellement créé, de prestations antérieurement remboursées par l'Etat ou financées par le Fonds spécial d'allocation vieillesse. Toutefois, pour financer ces charges, le FSV a reçu, en contrepartie, un montant du même ordre de grandeur de taxes sur les alcools.

Elle résulte, en outre, de la débudgétisation des prestations familiales agricoles, désormais financées exclusivement par des cotisations assises sur le revenu fiscal des exploitants agricoles et une contribution d'équilibre de la CNAF.

En 1995, on constate un nouveau fléchissement des contributions publiques à hauteur de 12,6 %. Il est cependant moindre que celui prévu initialement par la Commission des Comptes de la sécurité sociale, la reconduction pour 1995 de la majoration de l'allocation de rentrée scolaire s'accompagnant d'un remboursement par l'Etat à hauteur des trois quarts environ des sommes engagées.

La diminution des contributions publiques affectées aux régimes de base est liée, pour l'essentiel, à un important redéploiement du financement du BAPSA. En 1995, plus de 10 milliards de recettes de TVA supplémentaires viennent abonder ce budget annexe.

On notera que, à l'exception du régime général, l'écart entre la prévision actuelle et celle d'octobre 1994 est très réduit (+ 172 millions de francs). La subvention au régime des exploitants agricoles est quasiment maintenue à son niveau initial, malgré le non-remboursement par le FSV des majorations pour enfants versées aux retraités de ce régime en 1995. Le régime a, en effet, bénéficié d'un surcroît de recettes (taxes et compensation démographique).

En 1996, la réduction des contributions provient pour l'essentiel de la non-reconduction de la majoration de l'allocation de rentrée scolaire. Abstraction faite des montants en cause, les contributions publiques diminuent de 2 %, mais s'élèvent au total à près de 60 milliards.

Contributions publiques aux régimes de base de sécurité sociale

Sur la période, on note ainsi un fort fléchissement des contributions publiques aux régimes de base entre 1993 et 1996, passant de 83,9 milliards de francs à 57,7 milliards, soit une baisse d'environ un tiers (- 26 milliards).

Encore faut-il souligner que les contributions publiques décrites ici au sens strict, sont loin de donner une vue exhaustive de l'ensemble des concours de l'Etat à la sécurité sociale. Il est intéressant de mettre, par exemple en parallèle cette diminution avec l'accroissement des exonérations de cotisations prises en charge par l'Etat afin de favoriser l'emploi sous forme de compensation au régime général. Leur montant est passé sur la même période, c'est-à-dire 1993-1996, de 11,3 milliards à 40,7 milliards, soit environ + 29 milliards !

De là à penser que les diminutions constatées d'une part permettent la couverture des augmentations observées d'autre part, serait néanmoins hasardeux.

D'un point de vue général, votre commission estime que les relations financées entre l'Etat et la sécurité sociale restent insuffisamment transparentes.

Elle renouvelle son souhait de disposer d'informations plus précises concernant l'ensemble de ses flux conformément aux engagements pris notamment à l'occasion du vote de la loi du 25 juillet 1994 relative à la sécurité sociale.

Cet effort de clarification et de transparence doit également concerner les transferts inter-régimes dont on peut aisément présumer que les évolutions ne sont pas dépourvues de liens avec celles des dotations de l'Etat, les unes interférant sur les besoins de financement des autres.

C. LES COMPENSATIONS INTER-RÉGIMES

Les transferts de compensations entre régimes connaissent une progression constante au cours des dernières années. Pourtant, leur impact financier global est mal perçu par la représentation nationale en raison de la complexité croissante des mécanismes afférents.

Comme le rappelle le rapport de la Cour des comptes précité, « on ne dénombre pas moins de douze mécanismes de compensations et sept dispositions de transferts qui, obéissant à des règles souvent disparates, font l'objet de modifications fréquentes et dont la base juridique est parfois incertaine ».

Extrait du rapport de la Cour des comptes au Parlement sur la sécurité sociale (septembre 1995)

TABLEAU DES COMPENSATIONS

- Des mouvements multiples

a) La compensation dite généralisée met en jeu des mécanismes complexes. Ceux-ci sont au nombre de sept :

- en maladie : la compensation généralisée entre régimes de salariés comporte trois formes de compensations bilatérales entre le régime général et d'autres régimes de salariés (ceux des militaires de carrière, des employés et clercs de notaires et de la Banque de France).Entre les régimes de salariés et les régimes de non salariés, une compensation démographique concerne l'ensemble des régimes ;

- en vieillesse : il existe trois formes de compensation démographique, entre salariés, entre salariés et non salariés, enfin entre salariés des régimes spéciaux, dite« surcompensation ».

b) Les compensations bilatérales :

Cinq compensations bilatérales instaurent une solidarité à la charge du régime général des travailleurs salariés, et au bénéfice :

- du régime des mines et du régime des salariés agricoles, en ce qui concerne le risque accidents de travail ;

- des régimes des gens de la mer, de la SNCF et de la RATP, pour le risque maladie.

Des principes communs

Des principes analogues sont mis en oeuvre par ces différents mécanismes par-delà leur diversité apparente : c'est ainsi que les diverses compensations bilatérales, quel que soit leur fondement juridique, reposent sur le principe d'une mise en équivalence des régimes.

Les compensations généralisées nouvelles ou compensations « démographiques » sont quant à elles toutes fondées sur le principe du régime fictif. Celui-ci regroupe les effectifs de tous les régimes participant à la compensation. On suppose en général que le régime unique ainsi constitué verse à ses bénéficiaires la prestation moyenne la plus basse des régimes considérés. La définition de cette prestation de référence permet de calculer une cotisation d'équilibre (ou un taux pour les compensations entre salariés) au niveau du régime unique.

Prestation de référence et cotisation d'équilibre sont ensuite appliquées aux effectifs de cotisants et de bénéficiaires de chaque régime. Le solde obtenu détermine le sens et le montant du transfert. Un solde positif est la marque d'une situation démographique plus favorable que la moyenne : le régime concerné devra verser le montant de ce solde au titre de la compensation. C'est l'inverse en cas de solde négatif. L'ensemble des transferts s'équilibrent donc par construction.

La réglementation a appliqué ces principes en définissant les prestations de référence : prestation moyenne de la CANAM pour la « généralisée » maladie, celle des salariés agricoles pour la « généralisée » vieillesse entre salariés, celle de l'ORGANIC pour la « généralisée » vieillesse entre salariés et non salariés.

L'analyse à laquelle s'est livrée la Cour des comptes apporte des enseignements importants.

En premier lieu, il apparaît que ces transferts portent sur des sommes croissantes. Le montant total des transferts de compensation est passé de 66 milliards en 1991 à 83,6 milliards en 1994, comme le confirme le tableau suivant :

Transferts globaux de compensation

En second lieu, cette augmentation, de + 26,6 % entre 1991 et 1993, a été nettement supérieure à la croissance des prestations des régimes de base sur la période. La part des compensations dans le financement des régimes s'est ainsi nettement accrue.

Cette évolution s'est produite pour l'essentiel au sein des régimes spéciaux de vieillesse en raison de la montée en charge de la compensation spécifique. Elle s'est faite principalement au détriment du régime des fonctionnaires et de la CNRACL et au bénéfice du régime des Mines. En revanche, le régime général est resté à l'écart de cette augmentation : sa contribution relative aux transferts de compensation, tout en restant la plus importante, se stabilise sur la période.

Les transferts de compensation représentent une part très importante dans le financement de certains régimes : environ 75 % des prestations servies pour le régime des mines, 40 % pour le BAPSA, 30 % pour le régime des marins, 23% pour la SNCF. Inversement, ils constituent une charge considérable pour certains régimes débiteurs : les trois quarts du montant des prestations pour la CNAVPL et un peu plus de la moitié pour la CNRACL et la Caisse nationale des barreaux français.

Ces données sont en effet à rapprocher des structures de financement des régimes. Le rapport sur la sécurité sociale de la Cour des comptes apporte à cet égard des précisions très intéressantes pour l'année 1993 résumées dans le tableau ci-après.

Part dans les ressources du régime en %

On constate que les cotisations effectives (c'est-à-dire réellement encaissées par opposition aux cotisations « fictives » ou a celles qui sont remboursées par l'Etat) représentent des parts très différentes dans le financement des régimes. Elles sont prépondérantes sinon quasi exclusives dans les ressources du régime général, de la CNRACL, de la CRPCEN (clercs (c'est-à-dire réellement encaissées par opposition aux cotisations « fictives » ou a celles qui sont remboursées par l'Etat) représentent des parts très différentes dans le financement des régimes. Elles sont prépondérantes sinon quasi exclusives dans les ressources du régime général, de la CNRACL, de la CRPCEN (clercs et employés de notaires), de la CANAM et de la CNAVPL (plus de 85 %). Elles représentent à peu près la moitié des ressources pour trois régimes : salariés agricoles, ORGANIC, CANCAVA. Leur part est faible dans le financement des autres régimes : fonctionnaires de l'Etat, régimes spéciaux des salariés, régimes de retraite des commerçants et artisans, régime des exploitants agricoles.

D. LES VERSEMENTS DU FSV

Ce panorama serait incomplet s'il n'abordait pas les flux financiers en provenance du Fonds de solidarité vieillesse.

Ce Fonds, institué par la loi du 22 juillet 1993 relative aux pensions de retraite, est alimenté par le produit de la majoration de 1,3 point de la CSG instituée à compter du 1er juillet 1993 et de l'essentiel des droits sur les alcools et les boissons non alcoolisées.

En 1994, ces ressources se sont élevées à 63,7 milliards. Selon les prévisions faites par la Commission des comptes de la sécurité sociale, elles atteindraient 65,8 et 68,1 milliards en 1995 et 1996.

Le FSV verse sur ce total environ 60 % au régime général, soit 39 milliards en 1994, 42,6 milliards en 1995, 41,9 milliards en 1996. Le solde se répartit entre les régimes autonomes alignés (CANCAVA, ORGANIC, salariés agricoles), le régime d'assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL) et le régime des exploitants agricoles.

Cette prépondérance du régime général résulte notamment du poids de la prise en charge des périodes d'assurance chômage (18,6 milliards en 1994, soit près d'un tiers des dépenses) et des majorations pour enfants à charge (10,8 milliards en 1994).

Le compte du Fonds de solidarité vieillesse

(en droits constatés)

Le FSV est devenu un élément très important dans le financement de la sécurité sociale et sa part est appelée à s'accentuer au cours des prochains mois tant en raison du versement de 11 milliards de francs supplémentaires annoncés par le Premier ministre dans le cadre du plan de reforme de la protection sociale que de la mise en place de la nouvelle prestation autonomie dont le principe a été confirmé mais la date d'application reportée au 1er janvier 1997.

Ceci justifie que le contrôle du Parlement s'étende à l'avenir également aux dépenses du FSV. Il convient de souligner que celles-ci ne figurent actuellement qu'en annexe du rapport annuel présenté par le Gouvernement au Parlement sur la protection sociale.

Mais le débat budgétaire concernant les crédits de la protection sociale est incontestablement dominé par la présentation, le 15 novembre dernier, d'un plan de réformes d'une portée inégalée sous la V e République. Il était donc normal que le présent rapport s'y attarde.

II. LE PLAN DE RÉFORME DE LA PROTECTION SOCIALE

Le Premier ministre a dévoilé, le 15 novembre dernier à l'Assemblée nationale, son plan de réforme de la protection sociale en le qualifiant de global, ambitieux, novateur. « Il engage, a-t-il précisé, une vraie refonte, une véritable refondation de la sécurité sociale. »

Si votre commission relève que certaines orientations s'inscrivent dans le droit fil de décisions importantes prises depuis 1993, telles que la mise en place du Fonds de solidarité vieillesse, la réforme du mode de calcul des pensions de retraite ou la séparation financière des branches du régime général, l'examen des mesures annoncées confirme, en effet, que le Gouvernement s'est engagé dans une profonde réforme, sans précédent, depuis la fondation de cette institution.

Devant le Sénat, le 16 novembre dernier, le Premier ministre a indiqué que ce plan s'articulerait autour de sept réformes-clés concernant respectivement :

- les institutions de la sécurité sociale et la chaîne des responsabilités à l'intérieur de son organisation ;

- la création d'un régime universel d'assurance maladie ;

- le développement d'un étage sur complémentaire de retraite faisant appel à l'épargne et la situation des retraites dans les régimes spéciaux ;

- l'assujettissement des allocations familiales à l'impôt sur le revenu ;

- le financement de notre protection sociale ;

- les structures et la gestion hospitalières ;

- le renforcement de la maîtrise médicalisée des dépenses.

Ce plan repose sur un constat d'évidence : notre système de protection sociale est en voie d'implosion et il convient d'entreprendre les réformes de structures trop longtemps différées.

A. LE CONSTAT : UN SYSTÈME EN VOIE D IMPLOSION

L'état des lieux de notre système de protection sociale est retracé de façon précise dans le dernier rapport du Gouvernement au Parlement déposé en octobre dernier en application de l'article 14 de la loi n° 94-637 du 25 juillet 1994 (article L. 111-3 du code de la sécurité sociale). Ce rapport s'articule autour des deux axes de réflexion suivants :

- le système de protection sociale se trouve à la croisée des chemins : en dépit de ses acquis incontestables, il présente certaines faiblesses et surtout se révèle fortement déséquilibré sur le plan financier ;

- face à de nouveaux enjeux, la sauvegarde de la sécurité sociale appelle des réformes profondes, garantissant son redressement durable et renforçant l'équité entre les Français.

A une crise financière majeure s'ajoute donc le constat d'une véritable crise d'identité.

1. Une crise financière majeure

Les régimes de sécurité sociale de base n'ont cessé d'être déficitaires depuis 1990. Mais surtout, un seuil quantitatif a été franchi à compter de 1993 puisque, inférieurs à 15 milliards de francs jusqu'en 1992 ces déficits son constamment restés supérieurs à 50 milliards depuis cette date. En 993 le solde de 55,6 milliards a correspondu à un recul de la masse salariale entraînant une baisse du produit des cotisations tandis que les dépenses continuaient leur progression à leur rythme tendanciel.

Bien que notre économie ait renoué avec la croissance, les besoins de financement des régimes de base sont restés à un niveau élevé. Plus grave, on constate que tous les régimes obligatoires, y compris les régimes complémentaires, sont désormais touchés.

a) Le régime général

S'agissant du régime général, malgré l'apurement de la dette intervenue fin 1993 à hauteur de 110 milliards, les déficits ont continué à se creuser : - 54,8 milliards en 1994 ; - 64,4 milliards en 1995. Pour 1996, le déficit prévisionnel, avant le plan gouvernemental, s'établissait à 60,4 milliards ( ( * )3) .

Toutes les branches de ce régime sont concernées, à part celles des accidents du travail structurellement équilibré.

Pour la maladie, le déficit est passé de 31,5 milliards en 1994 à 36,6 milliards en 1995. Après avoir progressé de 2,9 % en 1994, les dépenses de la CNAMTS ont augmenté de 4,9 % en 1995.

Les dépenses d'assurance maladie hors hospitalisation progressent en 1995 de 3,6 %. Les progressions les plus élevées concernent la pharmacie (+ 8,5 %), les honoraires médicaux (+ 5,5 %), les analyses (+ 4,8 %), les auxiliaires médicaux (+ 3,9 %).

Les dépenses d'hospitalisation progressent de 4,7 % dont 5,8 % pour les établissements sous budget global, celles de l'hospitalisation privée de 4,9 %.

Pour 1996, le déficit prévisionnel, avant réforme, s'établissait à 35 milliards.

Les causes de cette dérive ont été analysées par deux rapports importants : santé 2010 du commissariat général au Plan (juin 1993) et le Livre blanc sur le système de santé et d'assurance maladie (décembre 1994).

Les facteurs médicaux et démographiques n'expliquent qu'en partie l'augmentation des dépenses. L'incidence de l'avancée et de la diffusion des techniques thérapeutiques ou diagnostiques de pointe ainsi que du vieillissement de la population française est réelle mais modeste. Selon le rapport Santé 2010, l'impact direct du vieillissement démographique n'a représenté que 0,25 point sur les 3,3 % de croissance annuelle du volume des dépenses de santé dans les années 1980 ; il devrait atteindre 0,3 point dans les années 1990 et ne pas dépasser 0,5 point entre 2000 et 2040.

En revanche, les caractéristiques mêmes du système de soins jouent un rôle important dans la croissance des dépenses de santé et d'assurance maladie. Ainsi, le manque de coordination entre les acteurs du système de soins (généralistes, spécialistes, système hospitalier) figure parmi les facteurs identifiés de surconsommation médicale. Les lacunes du système d'information jouent également. Enfin, la croissance prononcée de l'offre (par exemple, le nombre de médecins est passé de 59.000 en 1967 à 160.000 en 1993) suscite un phénomène dit « d'induction de la demande ».

Pour la vieillesse, le déficit avoisine 14,7 milliards en 1995, après un découvert de 12,8 milliards en 1994.

Comme le précise le rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale d'octobre dernier, ces résultats sont décevants En effet, l'amélioration de la situation économique, les recettes supplémentaires résultant de la suppression au 1er septembre 1995 de la remise forfaitaire de 42 francs sur les cotisations vieillesse consentie lors de la création de la CSG et surtout la montée en charge de la loi du 22 juillet 1993 sur les pensions de retraite laissaient espérer un redressement durable de cette branche.

Le rapport de groupe de travail présidé par M. Raoul Briet sur les perspectives à long terme des retraités, récemment publié, a pourtant confirme que : « la réforme décidée en 1993 (allongement de la durée d'assistance, calcul sur les 25 meilleures années, indexation des pensions sur les prix, mise en place du Fonds de solidarité vieillesse) a permis de remettre la branche vieillesse dans une situation proche de l'équilibre à l'horizon 2005 contre un besoin de financement de plus de 3 points avant réforme, en supposant maintenue dans les faits l'indexation des pensions sur les prix et réduit de moitié le besoin de financement résiduel à l'horizon 2015 (un peu plus de 4 points contre près de 8 avant réforme) ».

Toutefois, toujours selon la Commission des comptes une partie de l'explication de cette déception peut être trouvée dans les règles régissant le financement de la branche en provenances du FSV, qui conduisent sur certains postes à de moindres recettes ( ( * )4) , ainsi que dans certains « avantage» accordes aux retraités (comme par exemple, la revalorisation exceptionnelle de 0,5 intervenue au 1er juillet).

Pour 1996, le déficit prévisionnel (avant réforme) s'établissait à 14,4 milliards.

Sur le long terme, on sait que la croissance des dépenses des régimes de retraite est liée à trois facteurs principaux : le mouvement continu de généralisation des retraites et d'amélioration de la législation les importantes revalorisations des pensions qui, jusqu'en 1993 surtout, ont été supérieures a l'évolution en prix et, enfin, l'allongement des durées de carrière.

Pour la famille, le déficit est passé de 10,4 milliards en 1994 à 13,2 milliards en 1995. Cette évolution résulte notamment de la montée en charge des dispositions de la loi famille du 25 juillet 1994 dont le coût est estimé à 3,7 milliards en 1996 et à 6,6 milliards en 1997.

Pourtant, les allocations familiales proprement dites reculent de façon constante du seul fait des facteurs démographiques (0,10 % en 1994, 0,37 % en 1995, - 0,4 % en 1996). En revanche, les prestations liées à la petite enfance progressent très fortement, en volume, notamment en 1995 : + 70,4 % pour l'allocation de garde d'enfant à domicile, + 36 % pour l'allocation parentale d'éducation, + 33 % pour l'allocation familiale pour l'emploi d'une assistante maternelle agréée.

Pour 1996, le découvert de cette branche (avant réforme) s'établissait à 11,9 milliards avec, cependant, une nette réduction de l'écart entre les dépenses et les recettes par rapport à 1995. Sur le long terme en effet, la détérioration de la situation démographique pèse lourdement sur l'équilibre de cette branche et ceci de trois manières différentes : la diminution du nombre total de naissances, la régression des familles nombreuses et l'espacement croissant entre les naissances.

En terme de trésorerie, pour faire face à ses besoins en disponibilités, l'ACOSS a dû mobiliser dès le début de janvier 1995 et sans interruption depuis, les avances de trésorerie normales (plafonnées à 15 milliards de francs) et exceptionnelles (5 milliards) de la Caisse des dépôts et consignations.

Celles-ci n'étaient pas suffisantes, l'ACOSS a dût solliciter dès le 5 janvier 1995 le concours du Trésor pour un montant quotidien moyen de 34,3 milliards. Or le taux de ces avances de Trésor est supérieur d'un point en taux du marché financier, soit un taux compris entre 6,5 et 7,3 %.

Compte tenu de ces observations, au 31 novembre 1995, les dettes à long terme du régime général devraient atteindre près de 230 milliards qui se décomposent ainsi :

- 110 milliards de francs de déficits cumulés au 31 décembre 1993, qui ont été mis à la charge du Fonds de solidarité vieillesse ;

- 120 milliards de francs de déficits pour 1994 et 1995. Les frais financiers engendrés par ce dernier agrégat s'élèvent à 8 milliards.

Au total, selon le rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale, le service de la dette en intérêts et en capital aurait dû représenter en 1996 un montant voisin des dépenses de la totalité des dépenses de la branche accidents du travail, soit 43 milliards.

b) Les autres régimes

Il convient de souligner que .es autres régimes ne sont pas épargnés par cette crise financière.

Les régimes spéciaux de retraite des salariés (fonctionnaires de l'Etat et des collectivités locales, agents des entreprises publiques) sont ceux qui connaissent les déséquilibres financiers les plus significatifs : solde nul pour le premier entre 1994 et 1996, découvert, variable pour le CNRACL (- 6,5 milliards en 1994, - 1,2 milliard en 1995, - 0,6 milliard en 1996).

Sur les moyens et longs terme, leurs perspectives financières sont même extrêmement préoccupantes, comme le montre notamment le tableau suivant extrait du rapport Briec :

S'agissant en particulier de la CNRACL, le constat de la Commission des comptes de la sécurité sociale est particulièrement alarmiste : « malgré l'importante hausse de la cotisation employeur dont elle a bénéficié en 1995 (+ 3,8 points), la situation de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales reste précaire. On a déjà fait observer que les ponctions inconsidérées effectuées entre 1992 et 1994 sur ses réserves au titre de la compensation spécifique entre régimes spéciaux vieillesse (dite « surcompensation ») l'ont rendue exsangue à un moment où les prestations qu'elle doit servir s'accroissent à un rythme soutenu. Tout laisse à craindre que dès 1997 le financement de la CNRACL nécessitera de nouvelles et vigoureuses mesures de redressement, le répit de 1996 n'étant qu'éphémère ».

Les trois grands régimes de non salariés non agricoles (ORGANIC, CANCAVA, et CANAM) connaissent également à leur tour des difficultés de trésorerie.

La Caisse nationale d'assurance maladie des professions indépendantes (CANAM) est chaque année en déficit depuis 1991 à hauteur d'un milliard environ. Pour 1996, les prévisions sont plus optimistes avec un déficit ramené à 434 millions en raison de l'évolution du produit de la contribution sociale de solidarité (4,7 milliards). Mais, il faut noter que ce sont les dépenses au titre de la compensation démographique qui enregistrent l'évolution le plus importante avec un doublement des transferts depuis 1990. Au total, les transferts versés à ce titre par la CANAM représentent près de 3 milliards de francs et plus de 10 % de ses ressources.

Les régimes de retraite des professions industrielles et commerciales (ORGANIC) enregistrent pour 1994, 1995 et 1996 des déficits supérieurs à 1 milliard en raison notamment de la très faible évolution de ses recettes. Le régime de retraite des artisans (CANCAVA) enregistre également une diminution des cotisations qui s'amplifie depuis 1993.

Même la situation des régimes de retraite complémentaire obligatoire ARRCO et AGIRC n'apparaît guère plus favorable que celle des autres régimes de retraite.

En comptabilité de droits constatés, le résultat technique (hors produits financiers) est, pour 1994, de - 2,8 milliards de francs pour l'ARRCO et de - 5,4 milliards de francs pour l'AGIRC. Après intégration des produits financiers, les résultats d'exploitation sont respectivement de + 0,3 milliard et -3,3 milliards de francs.

Pour 1995, les perspectives sont légèrement plus favorables puisque les résultats d'exploitation attendus devraient être de l'ordre de + 0,5 milliard pour l'ARRCO et - 1,8 milliard pour l'AGIRC. Pour l'ARRCO, cette évolution résulterait essentiellement d'un résultat financier un peu plus élevé qu'en 1994. Pour l'AGIRC, la progression des allocations, plus faible que celle des cotisations, notamment en raison du gel de la valeur du point de retraite, explique la résorption partielle du déficit.

Dans les deux régimes, la stabilisation des résultats, à un niveau qui demeure faible, n'a pu être obtenue qu'au prix de fortes mesures de redressement financier, notamment la hausse des taux de cotisations ainsi que des taux d'appel, le gel temporaire de la valeur du point et la diminution programmée des majorations pour enfants.

A plus long terme, on constate néanmoins des perspectives très préoccupantes résumées dans le tableau ci-après.

SITUATION DES PRINCIPAUX REGIMES COMPLEMENTAIRES OBLIGATOIRES A L'HORIZON 2015

Au-delà de ces aspects purement financiers et en dépit de ses acquis, notre système de protection sociale apparaît de plus en plus inadapté aux caractéristiques de notre économie et de la société française dans son ensemble, tant en ce qui concerne son mode de financement que ses modalités. Il soulève, de plus, des interrogations quant à son efficacité.

2. Une profonde crise d'identité

Cette crise d'identité peut être analysée sous trois angles différents.

a) Un mode de financement en question

La logique initiale d'un financement conçue initialement sur un principe d'assurance sociale au profit des travailleurs apparaît de plus en plus mal adaptée aux caractéristiques actuelles du système qui intègre de nombreuses prestations de solidarité nationale.

En effet, outre la généralisation des prestations familiales et la prise en charge par la protection sociale de l'assurance personnelle des plus démunis, la sécurité sociale a accompagné la crise économique à partir du choc pétrolier des années 1970, jouant ainsi un rôle d'amortisseur de la crise. L'extension des prestations familiales a été à cet égard un important facteur de lutte contre l'exclusion.

Au-delà, la sécurité sociale a introduit des mécanismes de redistribution des revenus en créant ou en développant des prestations sous conditions de ressources. Même dans les branches où était maintenu le lien travail-cotisation-prestation, elle a multiplié les prestations acquises sans contrepartie, de cotisations ou avec des cotisations allégées (assurance-maladie des retraités).

Or, le financement est resté assis pour l'essentiel sur les revenus professionnels sous forme de cotisations sociales. En 1990, la part des cotisations dans le total des recettes de régime général s'élevant à 90 %, elle était, au cours de cette même année, de 80 % pour l'ensemble des régimes de sécurité sociale. En 1995, ces proportions ont légèrement décru avec un niveau respectif de 86 % et 75 % en raison de l'introduction de la contribution sociale généralisée ( ( * )1) .

Comme l'a souligné le rapport sur le financement de la protection sociale du Commissariat général du plan de juillet 1995, ce mode de financement a un effet défavorable sur l'emploi des non-qualifiés. Tous régimes confondus (régime général, retraites complémentaires, UNEDIC), le taux de cotisations patronales et salariales au niveau du SMIC est passé de 57,8 % en 1980 à 61,4 % en 1992. Or, c'est précisément sur ce type d'emplois que le taux de chômage en France apparaît le plus important par rapport aux pays étrangers.

C'est justement pour en atténuer la portée que de nombreux dispositifs d'exonération de cotisations sociales ont été mis en place pour les plus bas revenus. Mais on constate un « effet de ciseaux » croissant entre l'évolution des dépenses et celle des recettes ainsi calculées.

b) Une complexité croissante

La Cour des comptes a particulièrement relevé dans son rapport sur la protection sociale de 1995 le degré de complexité atteint par ce système.

La conclusion de celui-ci est particulièrement éloquente : « Les observations présentées dans les chapitres précédents, fondées sur ses travaux ou ceux des CODEC, conduisent la Cour à formuler explicitement certaines propositions.

L'examen de ces propositions montre qu'au-delà de leur caractère technique, ponctuel, et souvent limité, elles se rattachent presque toutes à un des aspects majeurs de la réforme de la sécurité sociale : la nécessité d'apporter davantage de clarté dans ses comptes, les modalités de son financement et son fonctionnement.

La crise économique et, ses conséquences sociales ou financières de tous ordres, on, intensifié et diversifié les relations entre l'Etat et la sécurité sociale, qu'il s'agisse de nouvelles prestations que celle-ci assure compte de l'Etat, d'exonérations de cotisations en vue d'encourager l'emploi de concours ou d'interventions pour rétablir l'équilibre de tel ou tel De ce fait, le manque de clarté, de logique et de continuité des interventions de l'Etat dans le domaine de la sécurité sociale s'est aggrave. Le présent rapport en donne de nombreux exemples.

Les relations financières entre les régimes, analysées dans le présent rapport au travers des compensations et des répartitions de charges, doivent elles aussi faire l'objet d'un effort considérable de clarification. De même les systèmes d'évaluation des performances des organismes doivent produire des informations plus significatives sur le coût du fonctionnement et la qualité du service rendu.

Ainsi des progrès réels dans la clarification des comptes et la simplification du fonctionnement des régimes, même s'ils sont difficiles à mettre en oeuvre et souvent long à produire leurs fruits, apparaissent à la Cour inséparables de l'indispensable réforme du financement de la sécurité sociale ».

c) Des inégalités et des dysfonctionnements injustifiables

Contrastant avec les objectifs de solidarité et de justice sociale définis en 1945, notre système de protection sociale comporte des inégalités et fait apparaître des dysfonctionnements préoccupants. Deux exemples l'illustrent en particulier.

S'agissant des mécanismes de retraite, on note une grande disparité des modalités, encore accentuée par la réforme de 1993 sur les pensions de retraite. En effet, la mise en oeuvre de celle-ci va avoir, au fil du temps, deux effets conjugués rappelés par le rapport du Gouvernement sur la protection sociale :

- elle va faire apparaître, au détriment du régime général, des écarts entre niveaux de pensions au-delà des différences de profil démographique et socioprofessionnel. Ainsi, la progression de la pension unitaire moyenne de droit direct servie par le régime général (+ 15 % en francs constants en 2015) sera inférieure à celle servie par les régimes spéciaux (+ 22 % pour les fonctionnaires civils et + 27 % pour les agents de la SNCF à la même date) ;

- elle va également susciter, au profit des salariés relevant par exemple des régimes spéciaux, une distorsion sensible des taux de remplacement, la réforme de 1993 entraînant une diminution d'environ sept points du taux de remplacement global pour les salariés hommes du régime général.

Le Livre blanc sur les retraites de 1991 avait montré que les différences subsistant à cette date, entre le régime général et les régimes spéciaux, portaient surtout sur les conditions d'âge ainsi que sur les avantages annexes, notamment les pensions de réversion. Ce diagnostic est plus fondé encore après la réforme de 1993.

Une nouvelle source de disparités croissantes réside désormais notamment dans la durée d'assurance requise pour bénéficier d'une retraite à taux plein. Fixée à 153 trimestres au 1er janvier 1996 dans les régimes du secteur privé qui ont fait l'objet de la réforme de 1993 (régime général, régime des artisans, des industriels et des commerçants), cette durée sera portée progressivement à 160 trimestres (40 annuités). Dans les régimes spéciaux écartés de cette mesure, la durée d'assurance requise demeure fixée à 150 trimestres.

En outre, des inégalités importantes d'âge de départ à la retraite persistent. Ainsi, les régimes spéciaux prévoient la possibilité d'un départ en retraite avant soixante ans au bénéfice de nombreuses catégories d'assurés, comme cela est rappelé ci-après.

EXEMPLES D'ÂGE MINIMUM D'ATTRIBUTION DES DROITS À LA RETRAITE À TAUX PLEIN

Par ailleurs, en dépit du relèvement du taux appliqué aux pensions de réversion du régime général qui est passé de 52 % à 54 %, le régime général demeure moins favorable que les régimes spéciaux sur ce point.

Les règles applicables pour la réversion sont, en effet, souvent plus avantageuses dans ces régimes. Il n'y existe, en effet, ni condition d'âge minimum, fixé à 55 ans dans le régime général, ni condition de non-cumul avec des ressources personnelles (SMIC dans le régime général) ou avec ces droits propres. Le régime général ne comporte pas, en outre, de pensions d'orphelin.

S'agissant du système de santé, on relève des inégalités non moins choquantes telles que des prises en charge variant de 100 % (systèmes médicaux intégrés à l'entreprise) à 50 % pour certaines prestations (soins courants, petit appareillage) dans le régime des non salaries.

Les difficultés pour accéder aux soins sont notables au bas de l'échelle des revenus et certains experts considèrent même qu'elles se sont accrues au cours des années 1980. Selon le Haut comité de la santé publique, en 1991, les personnes ayant les revenus les plus faibles réalisaient 20 %. de recours aux médecins en moins que l'ensemble de la population alors que ce pourcentage n'était que de 15 % en 1980.

Le Premier ministre a donné lui-même un aperçu des dysfonctionnements qui frappent notre système de santé le 13 novembre dernier devant les députés :

« Qu'y a-t-il en fait, derrière ces statistiques ? L'insuffisance de la prévention, si souvent dénoncée, l'existence de gaspillages incontestables et incontestés et l'absence d'évaluation et de contrôle des coûts dans notre système de soins. Le coût d'une même opération chirurgicale peut varier de 50 % selon l'établissement où elle a lieu. Le nombre d'analyses de biologie par hospitalisé peut varier du simple au triple selon les régions. Sans parler bien sûr de la surconsommation de médicaments qui singularise notre pays. On consomme ainsi en France quatre fois plus de neuroleptiques qu'en Allemagne ou au Royaume-Uni. »

B. UN PROJET DE REFONDATION COMPLÈTE DU SYSTÈME DE PROTECTION SOCIALE

La réforme du système de protection sociale est un sujet qui a donné lieu depuis 1945 à une trentaine de rapports officiels et à un nombre considérable de « plans de redressement ».

Pour la première fois, l'actuel Gouvernement propose un plan d'ensemble, à la fois global et ambitieux.

Ce plan de réforme de la protection sociale repose comme le Premier ministre l'a rappelé sur une exigence à laquelle votre commission est très sensible : la justice. Cet objectif sera poursuivi tant au niveau des recettes (recours accru à une CSG élargie notamment) que des dépenses (régime universel d'assurance maladie, réforme des régimes spéciaux, prise en compte des allocations familiales dans l'impôt).

Cet objectif est, de plus, cohérent avec l'état des lieux dressé précédemment. Il impose logiquement et au préalable que les nouvelles fondations du système reposent sur une base saine. L'assainissement de la situation présente passe par un préalable indiscutable : l'apurement de la dette sociale et le retour à l'équilibre des comptes.

Les mesures immédiates à caractère financier seront donc examinées dans une première partie avant d'aborder les mesures structurelles correspondant aux fondations du nouvel édifice.

1. Des mesures financières courageuses

Elles s'articulent autour de deux axes : le traitement de la dette sociale et le rééquilibrage branche par branche du système.

a) Le traitement de la dette sociale

S'agissant de l'apurement de la dette sociale, évaluée à 250 milliards, en 1996, une caisse d'amortissement sera créée pour regrouper l'ensemble des découverts du régime général et l'amortir sur une période de 13 ans. Elle prendra la forme d'un établissement public national à caractère administratif

et se substituera notamment au FSV pour le remboursement des 110 milliards de francs de dette du régime général constaté au 31 décembre 1993.

Comme l'a souligné le Premier ministre « l'argent du FSV doit aller à de vraies dépenses de solidarité, pas à l'apurement du passé ».

Votre commission tient à relever les éléments positifs de cette démarche :

1°) La reprise de dette ainsi opérée s'effectue dans des conditions de clarté plus satisfaisantes que la précédente opération mise à la charge du FSV.

Sur le plan des principes, la commission avait souligné dès l'origine le risque de confusion qu'entraînait la reprise de dette par le FSV par rapport à sa vocation « naturelle » : la prise en charge du non-contributif vieillesse. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle, elle a prévu par amendement de préciser que le FSV a une mission à titre permanent correspondant à sa vocation fondamentale et une mission à caractère temporaire, celle de rembourser les avances faites à l'ACOSS par l'Etat jusqu'au 31 décembre 1993. Il faut préciser que les dépenses du FSV font également, à la suite d'un amendement de votre commission, l'objet de deux sections distinctes correspondant à ces deux missions.

De plus, l'opération de reprise de dette ne s'est pas effectuée dans des conditions de grande transparence. Comme l'a souligné le rapport de la Cour des comptes sur la sécurité sociale déjà cité, la dette réelle a été surévaluée, pour des raisons techniques, d'environ 16,7 milliards, les déficits cumulés finalement constatés ayant représenté moins de 94 milliards. Ce reliquat a été un moment considéré dans son ensemble comme un fonds de roulement utile pour les différentes branches, une fois apurés les comptes des organismes. Mais de cette somme a été retranché le montant nécessaire au financement de la majoration exceptionnelle de l'allocation de rentrée scolaire pour l'année 1993. En définitive, seuls 10,9 milliards ont été réservés à ce fonds de roulement, soit 3,6 milliards à chaque branche.

2°) Il s'agit d'une opération globale qui se présente comme « solde de tout compte ».

En effet, non seulement elle concerne la dette constatée fin 1993 déjà en cours d'amortissement mais elle intègre par anticipation le déficit prévisionnel pour 1996 estimé à 17 milliards.

Cette modalité est cohérente avec le projet de « refondation du système », selon l'expression du Premier ministre, qui se traduit donc ainsi par l'apurement de la situation passée pour reconstruire sur des bases nouvelles.

Votre commission mesure l'importance et le courage de l'engagement ainsi pris par le Gouvernement.

3°) Le financement sera assuré dans des conditions d'équité.

En effet, il sera essentiellement constitué par un nouveau prélèvement appelé RDS, remboursement de la dette sociale. Celui-ci aura une assiette très large à savoir tous les revenus, à l'exception des minima sociaux, des pensions militaires d'invalidité, des rentes d'accidents du travail et des revenus des livrets d'épargne exonérés (livret A et assimilés).

Au taux retenu, volontairement modéré, de 0,5 %, ce prélèvement devrait rapporter 25 milliards de recettes à cette caisse, par ailleurs alimentée par le produit des cessions immobilières des caisses et le remboursement de leurs dettes de sécurité sociale par les pays étrangers.

A cet égard, le dernier rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale comporte des développements très intéressants sur le patrimoine des régimes de base de sécurité sociale.

Comme l'indique ce rapport, il peut paraître étonnant, en effet, que des caisses en quasi état de cessation de paiement puissent conserver un important patrimoine de rapport, sous forme notamment de biens immobiliers. Le rapport précise que sont principalement concernées deux caisses du régime général (la CNAVTS et la CNAMTS) et la Caisse nationale de sécurité sociale dans les Mines (CANSSM).

La patrimoine de la CNAVTS provient des anciennes caisses de capitalisation et est évalué à environ 1,4 milliard de francs. Celui de la CNAMTS est estimé à environ 2,5 milliards. Celui de la CANSSM, enfin, avoisinerait environ 2,5 milliards. Au total, selon le rapport de la Commission des comptes, l'ensemble peut être estimé à 6,5 milliards dont environ 4 milliards au titre du régime général.

Ce patrimoine bénéficie d'une rentabilité assez faible que le rapport impute notamment aux retards constatés dans la mise en oeuvre d'une politique volontariste de revalorisation des loyers.

Toutefois, votre commission estime que l'état actuel du marché immobilier, notamment dans la région parisienne, n'est guère propice a la cession dans les meilleures conditions financières, d'importants actifs immobiliers et que la valeur réelle de ce patrimoine est peut-être surévaluées. Par ailleurs, elle relève que l'affectation de produit de la vente du patrimoine de la CANSSM soulève des problèmes juridiques puisqu'il est de nature prive.

b) Le rééquilibrage des comptes

Le Gouvernement souhaite ramener le découvert prévisionnel pour 1996 de 60 milliards à 17 milliards. Le cantonnement de la dette sociale à elle seule permet d'abaisser le déficit à 53,3 milliards. Le Gouvernement propose donc un effort supplémentaire de 36,7 milliards.

Il faut noter que le Gouvernement a prévu, à juste titre, un rééquilibrage branche par branche, compte tenu du principe de gestion séparée des branches posé par la section I de la loi n° 94-637 du 25 juillet 1994 relative à la sécurité sociale.

* Branche vieillesse

Pour la branche vieillesse, le rééquilibrage est envisagé sans augmentation des cotisations vieillesse pesant sur les actifs et les entreprises et devrait ramener le déficit à un milliard en 1996 et à un excédent d'environ 300 millions en 1997.

Trois mesures principales sont annoncées pour alléger les charges pesant sur celle-ci :

- le report de l'application de la prestation d'autonomie au 1er janvier 1997 ;

- la prise en charge par le FSV de 11 milliards de dépenses de solidarité actuellement financées par la CNAVTS;

- une contribution des entreprises qui souscrivent pour leurs salariés des contrats de prévoyance et d'assurance maladie complémentaire a hauteur de 2,5 milliards.

Les deux premières mesures sont liées. Le report de la prestation d'autonomie, réclamé par de nombreux parlementaires qui jugeaient inopportune la création d'une nouvelle prestation, au coût potentiellement élevé, dans le contexte actuel de déficit des comptes sociaux, va permettre de réaffecter une partie des ressources libérées par l'externalisation de la dette et jusqu'ici prises en charge par le FSV en direction de la CNAVTS.

En 1996, 11 milliards lui seront ainsi affectés pour le financement des dépenses à caractère non contributif et relevant de la solidarité nationale. Il s'agit en l'occurrence de la validation gratuite des périodes de chômage qui est actuellement calculée sur une base forfaitaire. Le salaire de référence pris en compte pour déterminer le montant de cette prise en charge sera ainsi porté de 60 à 90 % du SMIC.

Votre commission constate qu'ainsi l'essentiel du déficit de cette branche du régime général sera « épongé ». On peut s'interroger toutefois sur l'utilisation du 1,5 milliard restant, libéré par la création de la caisse d'amortissement.

Par ailleurs, le report de la mise en place de la prestation d'autonomie du 1er janvier 1997 a surpris votre commission, le Sénat ayant déjà procédé à la discussion générale de ce texte le 9 novembre dernier. Elle constate qu'entre temps, les phénomènes de dépendance s'accroissent et les dérives de l'allocation compensatrice ne sont pas traitées.

Sur le prélèvement concernant les primes d'assurances de groupe, il convient de rappeler que les versements des entreprises au profit de leurs salariés, réalisés dans le cadre de contrats supplémentaires de prévoyance et maladie résultant d'accords collectifs, bénéficient d'une exonération totale des cotisations sociales, dans la limite de 85 % du plafond de la sécurité sociale.

Les primes versées annuellement au titre de ces contrats sont estimées à environ 52 milliards de francs, dont 25 milliards de francs pour l'assurance maladie complémentaire et 27 milliards de francs pour l'assurance complémentaire prévoyance. La part des primes à la charge des entreprises est estimée à environ 80 % de ces montants.

Cette exonération de prélèvements sociaux crée donc une inégalité de traitement en matière de protection sociale complémentaire au profit des salariés des entreprises qui souscrivent des contrats collectifs et au détriment des salariés ou non salariés qui ne peuvent souscrire qu'à des compléments de couverture sociale facultatifs, sans part patronale et donc assujettis à prélèvements fiscaux et sociaux.

De plus, les contrats collectifs d'assurance maladie complémentaire favorisent la consommation de biens médicaux sans que ceux-ci participent aucunement au financement de notre système de protection sociale.

Afin de remédier partiellement à cette situation, le Gouvernement propose d'instituer, au profit du Fonds de solidarité vieillesse, un prélèvement de 6 %, à la charge des entreprises, assis sur la part patronale des contrats complémentaires de prévoyance et de maladie souscrits auprès des sociétés d'assurance, mutuelles et institutions de prévoyance complémentaire.

Si elle approuve cette décision, votre commission sera également vigilante sur son application qui ne doit pas faire rejaillir sur les salaries le coût du prélèvement ainsi opéré.

* Branche famille

Pour la branche famille, les mesures envisagées visent à ramener son déficit à 4,8 milliards en 1996 et à dégager un excédent de 6.5 milliards en 1997. Elles s'appuient essentiellement sur des efforts d'économie en 1996 et sur des ressources nouvelles en 1997.

En 1996, les économies obtenues sur cette branche résulteront de :

- la non revalorisation de la base mensuelle BMAF (2,6 milliards) en janvier 1996 ;

- diverses mesures de rationalisation des prestations familiales et des aides au logement (pour 2,4 milliards) dont le recentrage de l'allocation pour jeune enfant au profit des familles dont les revenus n'excèdent pas 172.000 F par an et l'aménagement des aides au logement et des modalités d'attribution des prestations familiales sous conditions de ressources ;

- les transferts de la gestion des prestations familiales des régimes-spéciaux à la CNAF, ce qui rapportera 700 millions de francs en 1996 et 1,7 milliard en 1997.

Votre commission se félicite particulièrement de cette dernière mesure.

D'une part, elle permettra de réaliser effectivement l'universalité des modalités de gestion et de versement des prestations familiales. En effet, l'Etat et certaines entreprises publiques (EDF, SNCF, RATP, France Telecom, la Poste, etc.) assurent encore eux-mêmes le service des prestations familiales et, l'action sanitaire et sociale en faveur de leur personnel. Ces employeurs versent à la CNAF une contribution calculée par différence entre les prestations servies à ces personnels et les cotisations qu'ils auraient normalement versées à la CNAF, après déduction des dépenses d'action sanitaire et sociale et des frais de gestion supportés pour le service de ces prestations. A l'avenir, les taux de cotisation de l'Etat et de ces entreprises publiques seront alignés sur les taux applicables à l'ensemble des entreprises et la gestion des prestations familiales transférée progressivement à la CNAF.

D'autre part, cette procédure permettra d'accroître la sincérité des comptes puis qu'auparavant aucun contrôle n'existait sur les dépenses correspondantes de la part de la CNAF et la Commission des comptes de la sécurité sociale s'en alarmait depuis longtemps. Il faut noter toutefois que si cette mesure sera applicable dès 1996 pour les entreprises publiques, elle ne devrait être effective pour l'Etat qu'à partir de 1997.

Votre commission se félicite également de l'engagement pris pour 1997 de faire bénéficier cette branche de l'élargissement de la base de la CSG et relève que le montant ainsi évalué atteint 6,9 milliards.

Quant à la non-revalorisation de la BMAF, si elle s'est interrogée dans un premier temps sur ces effets notamment sur la consommation, le secrétaire d'Etat chargé de la sécurité sociale a bien voulu préciser que les familles ne supporteront pas en contrepartie le remboursement de la dette sociale (RDS) car celui-ci ne s'appliquera qu'« après reprise de l'indexation des prestations familiales ».

* Branche maladie

La branche maladie verra son déficit ramené à 12,3 milliards en 1996 et devrait enregistrer un excédent de 3 milliards dès 1997.

Ce redressement résulte de trois séries de mesures :

- la première (7,1 milliards) concerne les recettes. Les cotisations maladie des retraités imposables et des chômeurs indemnisés au-dessus du SMIC seront relevées de 1,2 point en 1996 et 1997 ;

- les deux autres portent sur les dépenses avec des mesures d'économies portant sur 4,3 milliards en 1996 et des mesures de gestion avoisinant 6,4 milliards. Parmi celles-ci figurent la fixation pour l'an prochain d'un objectif quantifié national strictement indexé sur les prix (+ 2,1 %) tant à l'hôpital qu'en médecine ambulatoire et des efforts de solidarité demandés aux médecins et aux laboratoires pharmaceutiques pour 5 milliards environ.

S'agissant du relèvement des cotisations d'assurance maladie des retraités, votre commission admet que le taux actuel très faible (1,4 % contre 6,8 % pour les salariés) n'est plus justifié et relève qu'il ne sera pas procédé à un alignement complet mais à une hausse limitée pour l'instant à 2,4 points sur deux ans.

Sur les autres mesures, elle constate la détermination du Gouvernement sur le freinage des dépenses avec la fixation d'objectifs quantifiés et la mise en place d'un dispositif de sanctions.

Il faut noter que les accords conventionnels pour 1995 prévoyaient une évolution des dépenses de médecine (honoraires, prescriptions, Pharmacie, biologie, indemnités journalières) de 3 % ; elles augmenteront en fait de près de 5,9 %.

Un tel niveau d'évolution, qui ne se traduit pas par une amélioration sensible de la qualité des soins, n'est pas compatible, comme cela est analysé dans le présent rapport, avec les perspectives d'évolution des recettes dont disposera en 1996 et 1997 notre système de protection sociale.

Votre commission sera particulièrement attentive aux conditions d'application de ce dispositif dont le Gouvernement a bien voulu préciser qu'il s'effectuera de la manière suivante : des accords conventionnels devront décliner l'objectif de 2,1 % pour chaque profession. En cas de carence le Gouvernement sera habilité par la loi à le fixer. En outre, des mécanismes visant à assurer le respect de ces objectifs seront mis en place.

De même, le Gouvernement a décidé que le taux d'évolution de la dotation globale hospitalière serait égal à celui des prix tant en 1996 qu' en 1997 Pour faire respecter ces objectifs, le Gouvernement assurera en 1996 un suivi en temps réel de l'évolution des dépenses hospitalières et engagera les contrôles nécessaires en cas de dérive constatée. Ainsi, des 1996, le système de suivi des dépenses hospitalières sera renforcé : une mission nationale d'appui examinera au cas par cas les difficultés rencontrées et proposera des solutions pour que les objectifs soient tenus par les hôpitaux concernes. En outre, aucun déficit 1996 ne sera repris en 1997.

Compte tenu de l'importance de ce dispositif, votre commission a décidé de procéder à de larges consultations et auditions sur le projet de loi d'habilitation sur les ordonnances afin d'approfondir sa réflexion sur ces orientations.

Sur la portée de ces mesures financières, votre commission sera attentive à ce que les efforts soient équitablement répartis comme s'y est engagé le Gouvernement. Elle relève ainsi que :

- les foyers les plus modestes ne seront pas touchés, en particulier ceux qui ont pour seules ressources les minima sociaux (RMI, AAH, API, etc.) ainsi que les retraités non imposables ;

- pour la reprise de dette, le RDS vise à ne pas faire porter sur les générations futures la charge des déficits d'aujourd'hui et il épargnera les prestations familiales.

2. Des mesures de refonte structurelles

Au-delà, le Gouvernement veut mettre en place des mécanismes qui assurent l'équilibre durable du système en prévoyant « une nouvelle architecture » et une « nouvelle chaîne des responsabilités ».

Les mesures institutionnelles et les mesures sectorielles relatives aux futures structures de notre système de protection sociale font l'objet des observations suivantes de la part de votre commission.

a) Les mesures institutionnelles

Présentée comme la « clé de voûte » de la réforme, l'introduction du Parlement au coeur du futur dispositif constitue une innovation d'une portée considérable. Le Gouvernement procédera donc dès janvier prochain à une révision constitutionnelle et à compter de l'exercice 1997, le Parlement pourra ainsi se prononcer, selon les précisions données par le Premier ministre, sur :

- les orientations générales et les objectifs des politiques de protection sociale ;

- les ressources financées par l'impôt ;

- le taux d'évolution de l'ensemble des dépenses qui permettra de garantir l'équilibre du système ;

- les critères de répartition des objectifs quantifiés nationaux ainsi arrêtés.

Ces orientations seront particulièrement importantes puisque c'est sur la base des délibérations de la représentation nationale, que le Gouvernement devra conclure, avec les caisses nationales, des conventions d'objectifs et de gestion.

Auteur d'un rapport et d'une proposition de loi sur ce sujet, votre rapporteur ne peut que se féliciter de cette place nouvelle accordée au Parlement.

Il était, en effet, devenu indispensable de renforcer son rôle pour plusieurs raisons :

- premièrement, la protection sociale est de plus en plus financée par les ressources de nature fiscale et il revient naturellement au Parlement de « voter l'impôt ». Votre commission relève que cette évolution sera encore accentuée avec le RDS (remboursement de la dette sociale) et l'élargissement de l'assiette de la CSG ;

- deuxièmement, le poids des prélèvements sociaux (environ 2.000 milliards, c'est-à-dire plus que le budget de l'Etat !) justifie un arbitrage de la représentation nationale car il réduit d'autant l'effort financier qui peut être engagé au profit d'autres fonctions collectives telles que l'éducation, la recherche, le logement, etc. ;

- troisièmement, le système a besoin d'une instance de régulation entre le Gouvernement et les gestionnaires des régimes en charge des Problèmes quotidiens de la protection sociale ;

- enfin, il est indispensable que le pays se fixe des objectifs à moyen ou long terme avec une vision d'ensemble pour sortir du pilotage « a vue » qui a été effectué jusqu'à présent.

Votre commission souhaite appeler toutefois l'attention sur deux Problèmes particuliers :

1°) Il ne serait pas souhaitable que le rôle du Parlement soit interprété de façon trop comptable et que celui-ci n'apparaisse que comme le « censeur » des autres acteurs du système notamment dans le domaine de la santé. Son contrôle devrait être particulièrement ciblé, parce qu'il est légitime, sur l'ensemble des concours financiers de l'Etat envers la protection sociale Dans ce but, votre commission souhaite que cet agrégat soit plus clairement identifié même s'il recouvre des réalités diverses : subventions aux régimes, prestations prises en charge directement, compensation d'exonérations, concours du FSV, impôts et taxes affectées...

2°) Par ailleurs, le Parlement devra, sans doute, bénéficier de moyens renforcés pour faire face à ses nouvelles responsabilités, sachant que les moyens du ministère des Affaires sociales sont faibles et que ses propres capacités d'expertise sont matériellement limitées.

Ainsi par exemple, le Parlement devrait bénéficier de l'accès aux mêmes « instruments » d'évaluation que le Gouvernement en amont de sa décision. En aval, un contrôle renforcé sur l'exécution de ces orientations serait souhaitable et les relations avec des organismes spécialisés dans ce domaine tels que la Cour des Comptes pourraient être utilement resserrées dans cette perspective.

Le second volet de ses réformes institutionnelles concerne l'organisation des caisses afin de les rendre « plus efficaces et plus resserrées ».

Les principales innovations sont les suivantes :

- au niveau national, la composition des conseils d'administration sera revue de sorte que syndicats, patronat et personnalités qualifiées y trouvent leur place. Les administrateurs ne seront plus élus mais désignés. Les pouvoirs du directeur général seront renforcés de sorte qu'il puisse notamment nommer les directeurs des caisses locales. Un Conseil de surveillance comprenant en particulier sera institué auprès de chaque caisse nationale.

- au niveau local, le réseau des caisses du régime général sera réorganisé avec l'objectif de constituer un seul organisme par département et par branche sans pour autant diminuer le nombre de services de proximité.

Votre commission s'est interrogée sur la nouvelle composition de conseils d'administration des caisses nationales et sur les compétences du nouveau Conseil de surveillance. Aucune élection n'ayant pu être organisée depuis 1983, ce mode de désignation était de fait devenu caduc. De plus, elle note que les partenaires sociaux continueront à proposer leurs représentants au Gouvernement qui les nommera.

Quant à la création d'un Conseil de surveillance composé notamment de parlementaires, cette mesure semble s'inspirer d'un dispositif introduit (le comité de surveillance) par votre commission des Affaires sociales dans la loi du 22 juillet 1993 et qui a été institué auprès du Fonds de solidarité vieillesse. Celui-ci actuellement présidé par notre collègue Alain Vasselle exerce un rôle de contrôle et de proposition sur les activités du FSV en se réunissant au moins une fois par an.

Votre commission espère par ailleurs que cette création permettra d'assurer enfin la représentation des autres acteurs du système de protection sociale, absents du Conseil d'administration, comme par exemple les professions de santé et les associations d'usagers (associations familiales, retraités, etc.).

b) Les mesures sectorielles

Sur les mesures par secteur, votre rapporteur se limitera à quelques observations. Il vous propose de vous reporter notamment aux excellents avis de nos collègues Louis Boyer (santé et assurance maladie), Jean Chérioux (famille) et Alain Vasselle (personnes âgées).

La commission sera par ailleurs prochainement consultée sur le projet de loi d'habilitation relatif aux ordonnances et pourra alors analyser en profondeur des dispositions qui pour l'instant comportent encore certaines zones d'ombre.

* Sur la maladie

Sur la maladie, trois grands « chantiers » seront prochainement ouverts. Il s'agit du régime universel d'assurance maladie, de la réforme de l'hôpital et du renforcement de la maîtrise médicalisée des dépenses de santé.

Selon les premières informations fournies par les services du Premier ministre, cette généralisation effective de l'assurance maladie se traduira Par « une harmonisation des droits et des efforts contributifs », et par l'ouverture automatique d'un droit à l'assurance maladie pour toute personne âgée de plus de 18 ans, résidant régulièrement sur le territoire français, quelle que soit son activité. La gestion du système actuel par les différentes caisses existantes ne sera pas cependant remise en cause.

Cette mesure répond au diagnostic porté sur les disparités d'accès aux soins. Selon le CREDES (Centre de recherches, d'études et de documentation en économie de la santé), un Français sur cinq renonce à des soins pour des considérations financières, ce pourcentage étant plus élevé encore en ce qui concerne les soins dentaires (plus d'un sur quatre) et l'achat de lunettes. Malgré les mesures d'extension de la couverture maladie notamment sous l'impulsion du Gouvernement Balladur, on sait que certaines Personnes ne bénéficient pas d'une couverture satisfaisante tels certains bénéficiaires du RMI ou des jeunes qui ne sont pas insérés ni dans le système scolaire ni dans un cursus professionnel.

On peut, certes, s'interroger sur le coût de cette réforme en l'absence de statistiques précises sur les personnes ainsi concernées. Au-delà, l'annonce d'une harmonisation des droits et des efforts contributifs soulève des interrogations dans la mesure où beaucoup de catégories disposent a l'heure actuelle soit d'exonérations de cotisations (adultes handicapés, boursiers...), soit de cotisations forfaitaires (par exemple, les étudiants) au titre de la solidarité.

Par ailleurs, on peut se demander comment s'articulera cette généralisation avec le dispositif de l'assurance personnelle dont la complexité est dénoncée dans le dernier rapport de la Cour des Comptes sur la sécurité sociale : celle-ci fait apparaître un déficit de gestion important (de l'ordre de 3,6 milliards en 1994). Or, la Cour des Comptes fait précisément une proposition qui coïncide avec la réforme gouvernementale :

« Sans bouleverser l'économie générale de l'assurance maladie et sans désengager les collectivités de l'aide sociale du rôle traditionnel qui leur incombe, une simplification majeure pourrait être obtenue en confiant à la caisse primaire de la résidence, sans intervention des payeurs dans la gestion et sous réserve, au besoin, de compensations financières globales, la totalité des opérations d'affiliation et de délivrance des titres d'ouverture des droits (carte d'assuré social et éventuellement carte santé départementale) dans tous les cas où la situation sociale des intéressés entraîne de plein droit l'affiliation à l'assurance maladie et la couverture du ticket modérateur et du forfait journalier ».

Votre commission s'interroge donc sur la portée de cette réforme vis-à-vis des collectivités locales mais considère que, sur le principe, celle-ci va dans le sens de la justice et que les « trous » constatés dans la couverture maladie pour certains de nos concitoyens sont inacceptables.

Sur la réforme de l'hôpital, votre commission attend de disposer les propositions définitives du rapport que le Professeur Devulder, Président du Haut Conseil de la Réforme Hospitalière, s'apprête à remettre au Gouvernement.

Elle ne peut qu'approuver les orientations générales déjà présentées par le Gouvernement et qui reprennent largement des suggestions présentées notamment dans le Livre Blanc sur la réforme de l'assurance maladie.

Mais, elle sera très attentive aux modalités qui seront proposées. Beaucoup de questions restent en effet en suspens : quelle sera la composition des agences régionales, comment leurs actions seront-elles articulées avec les unions régionales des caisses d'assurance maladie et les directions régionales d'action sanitaire et sociale, par exemple ?

En ce qui concerne le renforcement de la maîtrise médicalisée des dépenses (RMO, codage des actes, incitations à la réorientation des médecins, formation continue obligatoire, généralisation du carnet médical, mise en place de la carte santé), les dispositions présentées constituent un « catalogue » très complet des mesures souhaitables dans ce domaine mais conduisent votre commission à s'interroger sur la manière dont le Gouvernement pourra rapidement faire « adhérer » les professions de santé, qui sont au coeur du dispositif, au coup de frein brutal ainsi opéré.

* Sur les retraites

S'agissant des retraites, deux grands chantiers vont être également mis en route : la mise en place d'un système d'épargne-retraite et une reforme des régimes spéciaux.

Le Gouvernement s'est engagé, pour le premier, il faut le souligner, à organiser une discussion commune des propositions de loi déjà déposées en ce sens sur le bureau des Assemblées et du projet qu'il élabore.

Votre commission des Affaires sociales rappelle que notre collègue Philippe Marini, lorsqu'il comptait parmi ses membres, avait déposé une Proposition sur ce sujet à laquelle la majorité d'entre elle avait apporte son soutien.

Elle a relevé, par ailleurs, l'engagement très ferme du Premier ministre afin que les régimes par répartition ne fassent l'objet d'aucune remise en question.

Par contre, elle note que les partenaires sociaux doivent à partir du 30 novembre rouvrir des négociations sur l'avenir des régimes paritaires de retraites complémentaires AGIRC-ARRCO et que les résultats de celles-ci devront certainement être pris en compte par le Gouvernement dans le dispositif de sa réforme.

Quant au second, votre commission comprend, par souci d'équité, les mesures qui vont toucher les modalités de calcul des retraites des régimes spéciaux et, par souci de transparence, la création de la caisse ces fonctionnaires.

Elle note que le Gouvernement a déjà procédé à la nomination du Président de la Commission de réforme des régimes spéciaux qui sera concrètement chargée dans les quatre mois suivant son installation :

- d'analyser très précisément la situation des régimes de retraite concernés ;

- de préciser les mesures nécessaires à l'équilibre de ces régimes et notamment les modalités d'allongement de 37,5 ans à 40 ans de la durée de cotisations requise pour bénéficier d'une retraite a taux plein ;

- de définir les modalités de création d'une Caisse de retraite des agents de la fonction publique de l'Etat, comme il existe une Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales.

Toutefois, il paraît souhaitable que cette Commission, qui va être mise en place pour proposer d'importantes réformes, s'attache également au problème des compensations inter-régimes (surtout au mécanisme dit « de surcompensation » qui ne concerne que les régimes spéciaux et qui est à l'origine des ponctions énormes sur la CNRACL). Le Ministre du Travail et des Affaires sociales. M. Jacques Barrot, a d'ailleurs indiqué que pour lui ces aspects étaient liés, le 16 novembre dernier au Sénat.

Par ailleurs, il est important de souligner, à la suite du rapport du Commissariat général du Plan consacré aux perspectives à long terme des retraites que la situation financière de ces régimes va connaître une très forte dégradation au cours des prochaines années.

Ainsi, le rapport démographique (nombre de cotisants par rapport au nombre de retraités) se dégradera entre 1995 et 2015 de 45 % pour les fonctionnaires de l'Etat et de 63 % pour les agents des collectivités locales.

La réflexion proposée par le Gouvernement est donc indispensable pour l'avenir même de ces régimes, d'autant que celui-ci s'est engagé à la mener en concertation avec les organisations représentant les personnels concernés.

* Sur la famille

Pour la famille, le principal « chantier » sera l'assujettissement des allocations familiales à l'impôt sur le revenu à partir de 1997 qui sera proposé non pas dans le cadre de cette réforme de la protection sociale mais, comme le Président Fourcade l'a demandé, dans le cadre de la réforme des prélèvements obligatoires.

Il convient de rappeler que les principales conséquences de cette mesure ont été analysées dans le rapport de Foucauld déjà mentionné dont les principales conclusions sont les suivantes :

- au plan macro-économique, son rendement est évalué à près de 6 milliards ;

- au plan micro-économique, une telle réforme rendrait imposable à l'impôt sur le revenu plus de 500.000 nouveaux ménages, surtout des familles de plus de deux enfants ;

- enfin, ses effets redistributifs sont calqués sur ceux de l'impôt sur le revenu et en reproduisent les inconvénients.

Votre commission considère donc qu'il faudra être très attentif aux effets du barème de l'IRPP et que cette mesure ne peut qu'être liée à une réforme de ce dernier.

Par ailleurs, elle regretterait que la moitié seulement, soit 3 milliards des recettes ainsi obtenues, soit réaffectée à la branche famille alors que dans son discours du 15 novembre dernier, le Premier ministre avait évoqué un réemploi intégral.

Enfin, elle s'interroge sur les modalités de la grande politique familiale annoncée pour 1998 par le Gouvernement.

* Sur le financement

Enfin, sur le financement, l'élargissement de l'assiette de la CSG et le basculement progressif d'une partie des cotisations maladie des salaries correspondent à des orientations souvent souhaitées par notre commission.

Il est clair toutefois, pour votre commission, que la CSG ne pourra pas couvrir l'ensemble des dépenses de santé du régime général qui s élèvent à environ 600 milliards. Un point de CSG équivaut en effet à environ 40 milliards actuellement. Même avec l'élargissement de l'assiette, il faudrait affecter 12 points de CSG à cette branche, ce qui paraît impensable.

Il convient de rappeler, par ailleurs, les principales observations du rapport de Foucauld sur ce point :

1°) La contribution sociale généralisée (CSG) est surtout un impôt sur les revenus du travail (à hauteur de 28,7 milliards de francs : par point en 1994) et, secondairement, un impôt sur les revenus du capital (2 7 milliards de francs par point en 1994) et les revenus de remplacement (6,8 milliards de francs par point en 1994).

2°) La CSG touche aussi les revenus du capital, mais, selon l'assiette actuelle, seuls ceux qui sont déjà soumis à l'impôt sur le revenu Une hausse de son taux augmente donc le taux marginal d'imposition des dividendes et loyers, déjà élevé, et donc le coût marginal du capital au détriment de l'investissement. Elle augmente aussi la taxation des intérêts susceptible d'entraîner des sorties de capitaux dans la mesure où le gain lié a un prélèvement plus faible à l'étranger surpasse le risque lié à la non-déclaration en France de ces revenus.

3°) L'avantage principal de la CSG par rapport à des cotisations sociales est cependant qu'elle augmente moins le coût relatif du travail par rapport au capital en raison d'une assiette plus large, et d'ailleurs susceptible d'être encore accrue.

4°) Le poids de CSG est plus largement réparti que celui des cotisations sociales puisqu'elle touche les épargnants, les retraités et les chômeurs imposés à l'impôt sur le revenu (les cotisations d'assurance maladie aussi, mais à un taux réduit). Elle a aussi une assiette beaucoup plus large que l'impôt sur le revenu pour ce qui concerne les salaires, qu'elle frappe en totalité. Mais la CSG comme les cotisations sociales et contrairement à l'impôt sur le revenu, ne tient pas compte des charges de famille.

5°) En tant qu'« impôt » prélevé aussi sur les revenus non professionnels, la CSG est peu adaptée au financement de prestations dont on souhaite conserver le lien avec les revenus professionnels tels que celles d'assurance-vieillesse. La CSG apparaît donc mieux appropriée au financement des dépenses dites de solidarité. Par rapport aux autres impôts, elle a toutefois pour avantage de figurer sur les bulletins de paye ce qui peut sensibiliser les salariés au problème de la maîtrise des dépenses sociales.

Votre commission estime que ce plan constitue par son ampleur, non pas un énième programme de sauvegarde financière dont l'expérience a montré la fragilité, mais une véritable refonte structurelle de notre système de protection sociale.

Elle considère comme absolument essentielle l'exigence placée au coeur de cette réforme à savoir la justice et c'est notamment dans cet objectif d'équité qu'elle compte au cours des prochains mois participer au travail législatif de mise en oeuvre de ce plan.

Sous le bénéfice de ces observations, votre commission des Affaires sociales vous propose d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits relevant de la protection sociale dans le projet de loi de finances pour 1996.

* (2) Précisions figurant notamment p. 54 du tome II du rapport de la commission des Cor la sécurité sociale d'octobre 1995.

* (3) Commission des comptes de la sécurité sociale

* (4) Imputables principalement a la prise en charge en charge de la validation des périodes de chômage

* (1) Chiffres cités par le rapport du gouvernement au Parlement sur la protection sociale d'octobre 1995

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page