- L'ESSENTIEL
- I. RETOUR SUR 2024 : UN EXERCICE MARQUÉ
PAR DES CONTRAINTES OPÉRATIONNELLES ET BUDGÉTAIRES MAJEURES
- II. POUR 2025, UN BUDGET DES FORCES DE
SÉCURITÉ RELATIVEMENT
« PRÉSERVÉ » DANS UN CONTEXTE
BUDGÉTAIRE TENDU
- III. DES EFFORTS INDISPENSABLES QUI RESTENT
À MENER, HÉLAS REMIS À PLUS TARD
- A. UN EFFORT EN FAVEUR DE LA POLICE ET DE LA
GENDARMERIE RENDU INDISPENSABLE DANS LE CONTEXTE SÉCURITAIRE
ACTUEL
- B. DES SCHÉMAS D'EMPLOIS NULS EN 2025, QUI
ENTRENT EN CONTRADICTION AVEC LES MISSIONS SUPPLÉMENTAIRES
DEMANDÉES AUX FORCES POUR LES ANNÉES À VENIR
- C. UN DYNAMISME DES DÉPENSES DE PERSONNEL DE
LA POLICE NATIONALE QUI « CANNIBALISE » LE FONCTIONNEMENT
ET L'INVESTISSEMENT, EN DÉPIT DE BESOINS IMPORTANTS
- D. LA SITUATION PRÉOCCUPANTE DU PARC
IMMOBILIER DE LA GENDARMERIE NATIONALE
- A. UN EFFORT EN FAVEUR DE LA POLICE ET DE LA
GENDARMERIE RENDU INDISPENSABLE DANS LE CONTEXTE SÉCURITAIRE
ACTUEL
- I. RETOUR SUR 2024 : UN EXERCICE MARQUÉ
PAR DES CONTRAINTES OPÉRATIONNELLES ET BUDGÉTAIRES MAJEURES
- EXAMEN EN COMMISSION
- COMPTE RENDU DE L'AUDITION
DE M. BRUNO RETAILLEAU, MINISTRE DE L'INTÉRIEUR
- LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
N° 150 SÉNAT SESSION ORDINAIRE DE 2024-2025 |
Enregistré à la Présidence du Sénat le 21 novembre 2024 |
AVIS PRÉSENTÉ au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi de finances, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale, pour 2025, |
TOME XII SÉCURITÉS |
Par M. Henri LEROY, Sénateur |
(1) Cette commission est composée de : Mme Muriel Jourda, présidente ; M. Christophe-André Frassa, Mme Marie-Pierre de La Gontrie, MM. Marc-Philippe Daubresse, Jérôme Durain, Mmes Isabelle Florennes, Patricia Schillinger, Cécile Cukierman, MM. Dany Wattebled, Guy Benarroche, Michel Masset, vice-présidents ; M. André Reichardt, Mmes Marie Mercier, Jacqueline Eustache-Brinio, M. Olivier Bitz, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Philippe Bas, Mme Nadine Bellurot, MM. François Bonhomme, Hussein Bourgi, Mme Sophie Briante Guillemont, MM. Ian Brossat, Christophe Chaillou, Mathieu Darnaud, Mmes Catherine Di Folco, Françoise Dumont, Laurence Harribey, Lauriane Josende, MM. Éric Kerrouche, Henri Leroy, Stéphane Le Rudulier, Mme Audrey Linkenheld, MM. Alain Marc, Hervé Marseille, Mme Corinne Narassiguin, MM. Georges Naturel, Paul Toussaint Parigi, Mmes Anne-Sophie Patru, Salama Ramia, M. Hervé Reynaud, Mme Olivia Richard, MM. Teva Rohfritsch, Pierre-Alain Roiron, Mme Elsa Schalck, M. Francis Szpiner, Mmes Lana Tetuanui, Dominique Vérien, M. Louis Vogel, Mme Mélanie Vogel. |
Voir les numéros : Assemblée nationale (17ème législ.) : 324, 459, 462, 468, 471, 472, 486, 524, 527, 540 et T.A. 8 Sénat : 143 et 144 à 150 (2024-2025) |
L'ESSENTIEL
Le projet de loi de finances pour 2025 prévoit une hausse des crédits alloués à la police et à la gendarmerie nationales. Les crédits cumulés des programmes 176 « Police nationale » et 152 « Gendarmerie nationale » s'élèveraient à 23,4 milliards d'euros en autorisations d'engagement (soit une hausse de 0,7 milliard d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2024) et à 24,3 milliards d'euros en crédits de paiement (soit une hausse de 1 milliard d'euros).
Ce budget s'inscrit en effet dans la dynamique impulsée par la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (LOPMI) du 24 janvier 2023. L'analyse de la dynamique des dépenses de personnel met cependant en évidence, en particulier pour la police nationale, un effet d'éviction au détriment des dépenses de fonctionnement et d'investissement, qui étaient pourtant au coeur des objectifs de la LOPMI. En outre, en prévoyant un schéma d'emplois nul pour les deux forces, ce budget marque un renoncement par rapport aux cibles de création d'emplois fixées.
Malgré l'augmentation consentie, ce budget ne permet pas d'apporter de solution à certains problèmes structurels pourtant majeurs, à l'instar de ceux posés par la situation très dégradée du parc immobilier de la gendarmerie nationale. En cette matière comme en d'autres, les indispensables efforts à mener sont donc renvoyés à plus tard.
Pour autant, les forces de sécurité apparaissent relativement « préservées » eu égard à l'économie générale du projet de loi de finances pour 2025, qui prévoit une contraction des dépenses de l'État, dans un contexte de finances publiques extrêmement tendu. Au vu de l'ampleur et de la multiplicité des enjeux sécuritaires qui pèsent sur notre pays, la sanctuarisation de cet effort budgétaire était indispensable.
Aussi, sur la proposition de son rapporteur, Henri Leroy, la commission des lois a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Sécurités » (hors programme « Sécurité civile »).
I. RETOUR SUR 2024 : UN EXERCICE MARQUÉ PAR DES CONTRAINTES OPÉRATIONNELLES ET BUDGÉTAIRES MAJEURES
A. LES JEUX OLYMPIQUES ET PARALYMPIQUES : UN INVESTISSEMENT MATÉRIEL ET HUMAIN EXCEPTIONNEL
L'année qui s'achève a été marquée par l'organisation en France des jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de 2024.
Ces évènements, sur lesquels pesaient d'importants risques sécuritaires et notamment terroristes, ont représenté un défi majeur. La mobilisation des forces et la manoeuvre logistique qu'elle a demandées, d'ampleur inédites, a néanmoins supposé un investissement matériel et humain exceptionnel de la police et de la gendarmerie nationales.
Au bilan, on peut estimer le coût de cet effort à 1,1 milliard d'euros sur l'ensemble de la période de préparation des jeux.
Pour la police nationale, le coût d'organisation des jeux est estimé à 814 millions d'euros sur la période 2020-2024. Ce total se décompose en :
- 329 millions d'euros de dépenses de personnel (titre 2 - T2), liées principalement au versement d'une prime spéciale JOP (203 millions d'euros) et à l'indemnisation de près de 5 millions d'heures supplémentaires (81 millions d'euros) ;
- 485 millions d'euros de dépenses (hors T2) de fonctionnement et d'investissement, caractérisés par l'acquisition de véhicules, d'armements et d'équipements spécialisés, d'une salle de commandement, de systèmes d'information et de communication etc.
Pour la gendarmerie nationale, ce coût est estimé à 327 millions d'euros sur la période 2022-2025, représentant :
- 201 millions d'euros de dépenses de T2, notamment au titre du versement d'une prime spéciale JOP (130 millions d'euros) et d'indemnité d'absence missionnelle (28 millions d'euros) ainsi que d'une mobilisation exceptionnelle de la réserve opérationnelle (26 millions d'euros), rendue indispensable compte tenu des besoins importants de la gendarmerie pour faire face, en parallèle, à la crise en Nouvelle-Calédonie (voir infra) ;
- 126 millions d'euros de dépenses (hors T2), principalement liées aux frais d'hébergement, de déplacement et d'alimentation des gendarmes (95 millions d'euros).
Estimation des surcoûts supportés par
la police et de la gendarmerie nationales
au titre de la
sécurisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024
(en millions d'euros, AE=CP)
Police |
Gendarmerie |
Total |
|
Crédits T2 |
329 |
201 |
530 |
Crédits hors T2 |
485 |
126 |
611 |
814 |
327 |
1 141 |
Source : commission des lois du Sénat, d'après les données du ministère de l'intérieur
Le bilan de la sécurisation des JOP appelle deux observations principales.
En premier lieu, force est de constater que le défi a bien été relevé, mais au prix d'un engagement d'une intensité rare, qui a durement éprouvé les femmes et les hommes de la police et de la gendarmerie. En contrepartie de cette mobilisation, il était indispensable que le ministère tienne ses promesses, en mettant en paiement, dès la fin de l'année, les primes et indemnités sur lesquelles il s'était engagé. À ce titre, on ne peut que se féliciter de l'ouverture de 489 millions d'euros de crédits de T2 proposée par le Gouvernement dans le cadre du projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024, en cours d'examen au Parlement.
En second lieu, ce succès a démontré un résultat simple : il est possible de sécuriser efficacement l'espace public, dès lors qu'on s'en donne les moyens.
B. DE MULTIPLES CRISES, CULMINANT AVEC LES ÉMEUTES EN NOUVELLE-CALÉDONIE
Tout comme l'année 2023, marquée par les émeutes urbaines de l'été, l'année 2024 a également été émaillée de crises impliquant une forte mobilisation des forces de sécurité pour rétablir l'ordre.
Il a notamment pu s'agir, d'une part, de troubles
liés à des mouvements d'inspiration
écologiste - actions contre le projet
d'autoroute A69 ou contre les
« méga-bassines » - et d'autre part,
d'évènements dans les outre-mer : vagues de
manifestations et de blocages à Mayotte, en Guadeloupe, en
Martinique et, surtout, émeutes
en Nouvelle-Calédonie.
La crise en Nouvelle-Calédonie a représenté à elle seule un surcoût important estimé à 125 millions d'euros pour la gendarmerie et 30 millions d'euros pour la police nationale.
Le rapporteur considère que la récurrence des crises et les surcoûts qu'elles entraînent pour la mission « Sécurités » pourraient être mieux pris en considération au stade de la budgétisation, dans une logique de sincérisation. La mise en place d'un système de provision budgétaire, sur le modèle de la provision pour surcoûts liés aux opérations extérieures (Opex) dans le cadre de la mission « Défense », pourrait par exemple être mise à l'étude.
C. UN BUDGET « AMPUTÉ » DÈS LE DÉBUT DE L'EXÉCUTION
Dès le début de l'exécution budgétaire de l'année 2024, le budget des forces de sécurité a été « amputé » par une annulation importante en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP), respectivement à hauteur de 134 millions d'euros sur le programme 176 « Police nationale » et de 20 millions d'euros sur le programme 152 « Gendarmerie nationale ».
En effet, face à un dérapage du déficit lié à une forte surestimation des recettes par la loi de finances initiale, le décret n° 2024-124 du 21 février 2024 a porté des annulations de crédits à hauteur de 10 milliards d'euros pour l'ensemble du budget de l'État.
Représentant 7 % des crédits hors T2 inscrits au budget de la police nationale, elles ont « tué dans l'oeuf » d'importants projets d'investissement prévus au titre de cette année, notamment au titre des plans de renouvellement automobile (PRA) et de l'immobilier. Ces arbitrages douloureux étaient inévitables, eu égard à la rigidité particulière de la gestion 2024 due aux surcoûts liés aux JOP.
Le rapporteur constate néanmoins que ces renoncements, hélas, n'ont rien d'un phénomène ponctuel. Ils sont plutôt les symptômes d'un problème structurel et les annonciateurs de la nouvelle donne budgétaire, extrêmement tendue, à laquelle la France doit désormais faire face.
II. POUR 2025, UN BUDGET DES FORCES DE SÉCURITÉ RELATIVEMENT « PRÉSERVÉ » DANS UN CONTEXTE BUDGÉTAIRE TENDU
A. DES CRÉDITS DE LA POLICE ET DE LA GENDARMERIE PROGRESSENT DE PRÈS DE 1 MILLARD D'EUROS, TANDIS QUE LE BUDGET DE L'ÉTAT SE CONTRACTE
Pour 2025, les crédits demandés au titre des forces de sécurité intérieure sont en légère hausse :
- s'agissant du programme 176 « Police nationale », ils s'élèvent à 13,7 milliards d'euros en AE, soit une hausse de 2,9 % de 383 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2024 (+ 383 millions d'euros) et à 13,4 milliards d'euros en CP, soit une hausse de 3,4 % (+ 437 millions d'euros) ;
- s'agissant du programme 152 « Gendarmerie nationale », ils s'élèvent à 11,4 milliards d'euros en AE, soit une hausse de 3 % (+ 335 millions d'euros) et à 10,9 milliards d'euros en CP, soit une hausse de 5,2 % (+ 538 millions d'euros).
Ainsi, au total, ces deux missions connaîtraient une hausse en de près de 1 milliard d'euros en CP et à périmètre constant, soit une progression de 4,2 % par rapport à la LFI 2024.
Évolution des crédits de
paiement
des programmes 176 « Police nationale » et
152 « Gendarmerie nationale » à
périmètre courant entre la LFI 2024 et le PLF 2025
(en millions euros)
Source : commission des lois du Sénat, d'après les documents budgétaires
Cette hausse est à replacer dans le contexte financier actuel et du budget de rigueur qui s'impose désormais à la France, dont le déficit public a continué de se dégrader jusqu'à atteindre aujourd'hui des niveaux extrêmement préoccupants (6,1 % du produit intérieur brut en 2024). Dans le même temps, en effet, les dépenses nettes du budget de l'État, hors charge de la dette et à périmètre constant, se contracteraient de 2,5 milliards d'euros selon la commission des finances du Sénat1(*), soit une nette rupture avec la période 2020-2024 marquée par une forte hausse des dépenses, y compris après la fin de la crise sanitaire.
Ainsi, à cette aune, les budgets de la police et de la gendarmerie font figure de budgets relativement « préservés ». Sur les 32 missions du budget général de l'État2(*), seules neuf autres missions connaitraient en 2025 une hausse des crédits de plus de 100 millions d'euros, tandis que seules trois autres missions connaîtraient une hausse de plus de 500 millions d'euros.
B. UNE ÉVOLUTION DES CRÉDITS QUI S'INSCRIT DANS LA DYNAMIQUE IMPULSÉE PAR LA LOPMI
La loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (LOPMI) du 24 janvier 2023 formalise les ambitions programmatiques et budgétaires fortes pour la sécurité pour les années 2023 à 2027. Elle prévoit notamment une augmentation des crédits alloués à la police et à la gendarmerie nationales qui passeraient de 20,8 milliards d'euros en CP en 2022 à 25,3 milliards d'euros en 2027. Pour les programmes 176 et 152, cette programmation se décline en deux trajectoires : l'une relative aux CP totaux du programme hors contribution au compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions », et l'autre relative aux CP hors T2. Cette seconde trajectoire vise à interrompre « l'effet de ciseau » observé à la fin des années 2010 entre la masse salariale et les moyens des forces en matière de fonctionnement et d'investissement (équipements, immobilier...).
Ces crédits doivent permettre de financer les trois priorités stratégiques définies par le rapport annexé au à la LOPMI : opérer une révolution numérique profonde ; garantir plus de proximité, de transparence et d'exemplarité, notamment en doublant la présence des forces de l'ordre sur le terrain d'ici 2030 ; mieux prévenir les menaces et les crises futures.
Lors de l'examen des lois de finances pour 2023 et 2024, le rapporteur s'était félicité du respect affiché de la trajectoire prévue par la LOPMI. Cependant, la gestion 2024 a démenti ce constat, avec l'annulation de 154 millions de crédits hors T2, affectant donc spécifiquement les lignes budgétaires les plus directement liées aux objectifs de la LOPMI. À cet égard, le rapporteur ne peut que regretter le véhicule réglementaire choisi pour ces annulations, là où une loi de finances rectificative aurait permis au Parlement de se prononcer explicitement sur telle une atteinte à la programmation budgétaire votée à peine un an plus tôt.
La hausse globale des crédits prévue pour 2025 par rapport à la LFI 2024 s'inscrit incontestablement dans la dynamique impulsée par la LOPMI. Cependant, les situations respectives de la police et de la gendarmerie nationales diffèrent :
- s'agissant de la police nationale, le PLF 2025 ne permet pas d'assurer le rattrapage des crédits hors T2 visé par la LOPMI. Si les CP totaux du programme hors CAS « Pensions » s'établiraient à hauteur du niveau programmé, soit 9,5 milliards d'euros, il en va différemment des CP hors T2. Ceux-ci s'établiraient en effet à 1 761 millions d'euros en 2025, soit une progression de 34 millions d'euros par rapport à la LFI 2024, insuffisante pour atteindre la cible prévue par la LOPMI (1 826 millions d'euros). Hors effets de périmètre, les crédits hors T2 prévus pour 2025 seraient même pratiquement stables par rapport à la LFI 2024, ce qui traduit un renoncement total à gravir la « marche » de plus de 100 millions d'euros qu'imposait le respect de la cible ;
- s'agissant en revanche de la gendarmerie nationale, les cibles de la LOPMI seraient nettement dépassées, tant pour les CP totaux du programme hors CAS « Pensions » qui s'élèveraient à 6,9 milliards d'euros (+ 428 millions d'euros par rapport à la cible), que pour les CP hors T2 (+ 328 millions d'euros).
Comparaison des crédits de paiement
prévus en PLF 2025
avec la LFI 2024 et la cible LOPMI pour
2025
(en milliers euros)
CP totaux |
CP hors titre 2 |
|||||||
PLF 2025 |
Écart |
Cible LOPMI |
Écart LOPMI |
PLF 2025 |
Écart |
Cible LOPMI |
Écart LOPMI |
|
Police nationale |
9 513,9 |
+ 166,1 |
9 538 |
- 24,1 |
1 761,8 |
+ 34,4* |
1 826 |
- 64,2 |
Gendarmerie nationale |
6 931,4 |
+ 520,4 |
6 503 |
+ 428,4 |
1 924,1 |
+ 438,0* |
1 596 |
+ 328,1 |
L'écart entre la LFI 2024 et le PLF 2025 est exprimé à périmètre courant. Il ne tient notamment pas compte donc de mesures de périmètre entrantes à hauteur de 33,3 millions d'euros s'agissant de la police nationale (dont 17,3 millions d'euros au titre du transfert de crédits numériques et 16 millions d'euros au titre du transfert des crédits relatifs à la protection fonctionnelle) et de 2 millions d'euros s'agissant de la gendarmerie nationale (au titre du transfert des crédits relatifs à la protection fonctionnelle).
Source : commission des lois du Sénat, d'après les documents budgétaires et les données du ministère de l'intérieur
Quand bien même le respect de la LOPMI ne serait pas intégral, le simple fait que le ministère soit en mesure de conserver les trajectoires qu'elle prévoit comme cibles de référence constitue un élément de satisfaction dans le contexte budgétaire actuel.
III. DES EFFORTS INDISPENSABLES QUI RESTENT À MENER, HÉLAS REMIS À PLUS TARD
A. UN EFFORT EN FAVEUR DE LA POLICE ET DE LA GENDARMERIE RENDU INDISPENSABLE DANS LE CONTEXTE SÉCURITAIRE ACTUEL
L'effort budgétaire mené en faveur de la police et de la gendarmerie nationales est pleinement justifié au regard du contexte sécuritaire auquel notre pays fait face, et que le succès de l'organisation des JOP ne saurait occulter.
L'expérience des années récentes montre que les tensions qui traversent notre pays, qu'elles soient de nature politique, sociale ou économique, présentent désormais un risque élevé de dérives violentes, jusqu'à produire des crises pour la sécurité et l'ordre publics.
En outre, la France continue de faire face à des menaces importantes liées au terrorisme et à la criminalité organisée. En particulier, notre pays semble aujourd'hui pris au « piège du narcotrafic », comme l'a souligné la commission d'enquête sénatoriale qui a rendu ses conclusions en mai 20243(*).
Enfin, la criminalité et la délinquance continuent de s'établir à des niveaux élevés. Le nombre de victimes de violences physiques non crapuleuses et sexuelles s'élevait en 2023 à 356 316 personnes, soit une hausse par rapport à l'année précédente (+ 15 286), qui touche particulièrement les femmes (+ 10 044). Le nombre de cambriolages, stable par rapport à 2022, s'établissait quant à lui à 125 0444(*).
B. DES SCHÉMAS D'EMPLOIS NULS EN 2025, QUI ENTRENT EN CONTRADICTION AVEC LES MISSIONS SUPPLÉMENTAIRES DEMANDÉES AUX FORCES POUR LES ANNÉES À VENIR
1. Pour la gendarmerie nationale, un renoncement susceptible de compromettre les objectifs de la LOPMI
S'agissant de la gendarmerie nationale, le PLF 2025 prévoit un schéma d'emplois nul. Il traduit ainsi un renoncement important par rapport à la programmation de la LOPMI, qui prévoyait une cible de + 500 équivalents temps plein (ETP) cette même année. En d'autres termes, la gendarmerie ne sera autorisée à recruter qu'à hauteur des besoins de compensation des sorties d'effectifs (estimées à 12 972 ETP, dont 3 135 départs en retraite), sans possibilité de créer de nouveaux emplois.
Ce renoncement interroge d'autant plus que les objectifs opérationnels fixés par la LOPMI restent inchangés, au premier rang desquels l'armement de 7 nouveaux escadrons de gendarmerie mobile ainsi que de 239 nouvelles brigades (dont 94 brigades fixes et 145 brigades mobiles), dans le but de renforcer l'empreinte au sol et le maillage des unités de la gendarmerie nationale.
Les 7 escadrons prévus ont bien été créés entre la fin de l'année 2023 et le printemps 2024. Composés de 115 ETP chacun, dont environ 40 % de militaires expérimentés, ils ont ainsi été en mesure de contribuer à soutenir le rythme d'emploi soutenu des forces dans le cadre des JOP et de la crise en Nouvelle-Calédonie.
S'agissant des brigades, les 80 premières créations devront avoir été créées au 31 décembre 2024, dont 52 brigades mobiles et 28 brigades fixes - 72 dans l'hexagone et 8 dans les outre-mer. Elles supposent d'ores et déjà la mobilisation de près de 600 militaires5(*), ainsi que des moyens financiers hors T2 à hauteur de 13,3 millions d'euros (loyers, acquisitions de véhicules, etc.).
57 brigades supplémentaires sont appelées à être créées au cours de l'année 2025. Lors de son audition par la commission des lois, le 12 novembre 2024, le ministre de l'intérieur, Bruno Retailleau, a indiqué qu'il entendait établir très prochainement un calendrier de créations précis, de façon à pouvoir envoyer aux maires un engagement écrit sur la date de création de chaque brigade.
L'atteinte de la cible, ramenée à 238 brigades selon le ministre, supposerait d'en créer 101 supplémentaires au cours des deux prochaines années. La préservation de cet objectif suppose inévitablement un rattrapage conséquent des créations d'emplois au cours des exercices 2026 et 2027 pour atteindre les 3 540 créations d'emplois prévues par la LOPMI : là où la trajectoire initiale imposait sur ces deux années une croissance des effectifs de 41,9 %, une trajectoire de « rattrapage » demanderait une croissance de 77,4 % : un véritable « combat », selon les mots du ministre.
Trajectoire des créations d'emplois dans la
gendarmerie nationale
prévue par la LOPMI
(en ETP)
Source : commission des lois du Sénat, d'après les données du ministère de l'intérieur
En l'absence de ces créations d'emplois, l'atteinte de l'objectif sera inévitablement compromise, sauf à « désarmer » partiellement certaines brigades fixes existantes, ce qui paraît difficilement acceptable compte tenu des besoins actuels.
2. L'ampleur des enjeux auxquels la police nationale fait face supposera également d'importantes créations d'emplois pour les prochains exercices
Comme pour la gendarmerie nationale, le PLF 2025 comporte un schéma d'emplois nul pour la police nationale, soit un renoncement par rapport aux 356 créations d'emplois prévues pour 2025 dans le cadre de la programmation LOPMI.
Le problème se pose toutefois différemment pour les deux forces, car la police nationale avait déjà bénéficié d'importantes augmentations d'effectifs en 2023 et en 2024, avec respectivement 1 947 et 1 139 ETP supplémentaires, permettant d'atteindre environ 80 % de la cible de créations d'emplois prévue par la LOPMI sur la période 2023-2027.
Ces effectifs supplémentaires ont déjà permis la création des quatre nouvelles unités de force mobiles prévues par la LOPMI au cours des années 2023 et 2024.
Pour autant, le schéma d'emplois nul prévu pour 2025 suscite d'importantes interrogations, eu égard aux enjeux auxquels fait face la police nationale. Peuvent notamment être relevées :
- la mise en oeuvre prévue des nouveaux systèmes « entrées-sorties Schengen » (ESS) - systèmes informatiques automatisés d'enregistrement et de contrôle des données personnelles des ressortissants de pays dits tiers aux frontières de l'Union européenne - qui suppose la création de 462 ETP supplémentaires selon la direction générale de la police nationale (DGPN), dont 229 policiers actifs déjà recrutés, et 233 assistants contrôle frontière (ACF), dont le plan de recrutement reste à définir ;
- la mise en oeuvre du plan « CRA 3 000 » lancé en 2023, prévoyant la création de 3 000 places supplémentaires dans les centres de rétention administrative (CRA) pour les étrangers faisant l'objet d'une décision d'éloignement, qui supposeront des besoins de policiers importants pour en assurer la sécurité. On peut relever à cet égard que les CRA de l'hexagone connaissent déjà des besoins en effectifs importants, estimés à 170 ETP par la DGPN.
Quoique cela soit effectivement justifié par la situation actuelle des finances publiques, le rapporteur souligne qu'à nouveau, des efforts, indispensables, sont remis à plus tard.
C. UN DYNAMISME DES DÉPENSES DE PERSONNEL DE LA POLICE NATIONALE QUI « CANNIBALISE » LE FONCTIONNEMENT ET L'INVESTISSEMENT, EN DÉPIT DE BESOINS IMPORTANTS
L'un des objectifs principaux de la LOPMI était de permettre un rééquilibrage des budgets de la police et de la gendarmerie nationales au profit du fonctionnement et de l'investissement.
Force est cependant de constater que la gestion des deux programmes a été fortement affectée par des mesures salariales soutenant, en parallèle, la dynamique des dépenses de personnel. Il peut s'agir aussi de mesures générales, telles que la revalorisation du point d'indice de la fonction publique intervenue au 1er juillet 2023 ainsi que les revalorisations du Smic en fonction de l'inflation, dont l'impact est estimé pour 2025 à 169,3 millions d'euros pour la police nationale. Il peut également s'agir de mesures catégorielles notamment liées, pour la police nationale, au Protocole pour la modernisation des ressources humaines du 2 mars 2022 et ayant un impact budgétaire de 61,2 millions d'euros en 2025 ou, pour la gendarmerie nationale, au protocole social signé le 9 mars 2022, ayant un impact de 55,1 millions d'euros en 2025.
Le dynamisme incompressible des dépenses de personnel, devant être financé sur l'enveloppe prévue par la LOPMI, provoque un effet d'éviction préoccupant sur les autres dépenses, se traduisant par une véritable inversion des équilibres qu'elle avait entendu instituer. Sur l'enveloppe prévue de 4,8 milliards d'euros pour 2023-2027, 70 % des crédits devaient être consacrés aux dépenses hors T2. En l'état des projections de la dynamique des dépenses de personnels, les dépenses hors T2 ne devraient in fine représenter que 22 % (voir graphiques infra).
Le « coup d'arrêt » qui en résulte pour les investissements est d'autant plus problématique que les besoins sont croissants. Les enjeux liés à la dégradation du parc automobile6(*) sont à cet égard particulièrement importants en ce qu'elle affecte les conditions de travail des agents, pour qui la voiture est un outil quotidien, mais peut aussi s'avérer préjudiciable à la bonne conduite des opérations. S'ils se sont améliorés au cours des années récentes, l'âge et le kilométrage moyens des véhicules légers restent à un niveau élevé, soit respectivement 5,2 ans et 72 600 km. L'ambition portée par la LFI 2024 en matière de plans de renouvellement automobiles (PRA), avec une enveloppe de 142,6 millions d'euros en AE prévue pour une commande de 1 989 véhicules, a été abandonnée suite au décret d'annulation précité du 21 février 2024. Le PLF 2025 ne permet pas de rattrapage en la matière, avec une enveloppe de seulement 65 millions d'euros en AE, qui devrait permettre la commande d'environ 1 600 véhicules.
Comparaison de la décomposition initiale de l'enveloppe LOPMI pour le programme 176 « Police nationale » (à gauche) et de son actualisation à date (à droite)
(en milliers d'euros, CP)
Source : commission des lois du Sénat, d'après les données du ministère de l'intérieur
D. LA SITUATION PRÉOCCUPANTE DU PARC IMMOBILIER DE LA GENDARMERIE NATIONALE
L'état de dégradation de son parc immobilier constitue une problématique structurelle et majeure de la gendarmerie nationale. Celle-ci est aujourd'hui propriétaire de 649 casernes, qui pâtissent d'un sous-investissement chronique, dont le montant cumulé représente une « dette grise » estimée à 2,2 milliards d'euros sur les dix dernières années par la commission des finances du Sénat7(*).
Écart entre le besoin d'investissements immobiliers et les investissements réalisés dans le parc domanial de la gendarmerie nationale
(en millions d'euros, CP)
Source : commission des finances du Sénat
La hausse des crédits d'investissement prévue par le PLF 2025 est bienvenue, mais est encore loin d'être à la hauteur des enjeux. En matière immobilière, l'enveloppe prévue de 295,5 millions d'euros d'AE, qui représente une hausse 62 millions d'euros par rapport à la LFI 2024, permet tout juste d'amorcer un redressement, sans être suffisante pour engager de grandes opérations. Selon la direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN), il faudrait en effet tendre vers une enveloppe annuelle de 400 millions d'euros pour faire aux besoins d'investissement. En la matière, la régularité de l'effort est préférable aux à-coups, qui se payent en accumulation de « dette grise ».
La situation est d'autant plus problématique que, face à l'état dégradé de son parc, la gendarmerie est de plus en plus contrainte de faire appel au parc locatif, appartenant pour l'essentiel à des organismes « HLM » et aux collectivités territoriales. Cette donnée pèse sur la soutenabilité budgétaire de programme au vu du poids croissant du coût des loyers, qui s'élèveraient à 628,2 millions d'euros en 2025, soit une hausse de 26,3 % par rapport à l'exercice 2019. Entre septembre et novembre 2024, la gendarmerie s'est d'ailleurs trouvée en incapacité de verser certains de ses loyers, pour un montant estimé à 90,1 millions d'euros. L'incompréhension légitime des collectivités territoriales, qui représentent près de la moitié des bailleurs concernés, appelle une action résolue de l'État pour y remédier au plus vite et veiller à ce que l'incident ne se reproduise plus.
Des solutions pérennes et innovantes doivent désormais être recherchées. Lors de son audition devant la commission des lois, le ministre de l'intérieur a indiqué ne « s'interdire aucune piste » en la matière. En particulier, le recours à des partenariats public-privés paraît constituer une solution intéressante pour lancer des opérations de grande envergure, telle que la rénovation du site de Satory, en optimisant la gestion de la trésorerie de l'État.
En tout état de cause, la remise à niveau du parc constitue une exigence incontournable : il y va de la bonne gestion des crédits du programme 152, et surtout de la dignité des conditions de travail des militaires qui servent dans les casernes de la gendarmerie nationale.
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La commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Sécurités », hors programme « Sécurité civile », inscrits au projet de loi de finances pour 2025.
EXAMEN EN COMMISSION
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Mme Muriel Jourda, présidente. - Nous examinons maintenant le rapport pour avis de la mission « Sécurités », à l'exception du programme « Sécurité civile », du projet de loi de finances (PLF) pour 2025 qui fait l'objet d'un avis qui sera présenté ultérieurement par Françoise Dumont.
M. Henri Leroy, rapporteur pour avis sur la mission « Sécurités » (hors programme « Sécurité civile »). - Avant de vous livrer mon analyse du budget prévu pour l'année prochaine, je souhaiterais formuler certaines observations sur l'exercice 2024, qui est riche de leçons pour l'avenir.
Première observation : le défi de la sécurisation des jeux Olympiques et Paralympiques a été relevé.
Le coût fut certes important pour les forces de l'ordre : il a été évalué à 1,1 milliard d'euros, en incluant l'ensemble de la période de préparation. Mais nous devons ce succès à un engagement sans faille, d'une rare intensité, des femmes et des hommes de la police et de la gendarmerie, qui ont été durement mis à l'épreuve.
Nos concitoyens en ont eu bien conscience et le climat dans lequel les jeux se sont déroulés a bien montré que, dans leur immense majorité, et en dépit de ce que l'on peut parfois entendre, ils aiment leur police et leur gendarmerie.
Il est impératif que le Gouvernement, de son côté, honore les engagements qu'il avait pris envers les policiers et les gendarmes, notamment en termes de primes et de versement des heures supplémentaires. Les ouvertures de crédits prévues dans le projet de loi de finances de fin de gestion doivent permettre leur mise en paiement dès cette année.
Une leçon, à la fois essentielle et simple, peut être tirée de l'organisation des jeux : il est possible de sécuriser efficacement l'espace public dès lors qu'on s'en donne les moyens.
Deuxième observation : la police et la
gendarmerie ont dû faire face à une succession de crises, qui ont
culminé avec les émeutes
en Nouvelle-Calédonie,
où une quarantaine d'escadrons sont actuellement engagés.
L'année qui s'achève a également été marquée par un certain nombre de mouvements sociaux violents : contre l'autoroute A69, contre les méga-bassines, contre la vie chère en Martinique et en Guadeloupe... L'année précédente, il y avait eu les émeutes urbaines de l'été.
La récurrence de ces menaces à l'ordre public, tout particulièrement dans les outre-mer, doit nous interpeller. Les conflits sociaux qui traversent la France présentent aujourd'hui davantage de risque de dégénérer en crise. C'est un fait dont nous devons prendre pleinement conscience, y compris lorsque nous nous intéressons au budget des forces de sécurité, car la gestion de ces crises représente toujours un surcoût.
À cet égard, je verse au débat la proposition suivante : nous pourrions engager une réflexion pour intégrer à ces budgets une forme de provision pour surcoûts liés aux crises, comme cela se fait déjà dans le budget de la défense au titre des surcoûts pour opérations extérieures (Opex), lesquels sont chroniques. Cela irait, me semble-t-il, dans le sens d'une sincérisation du budget de la sécurité intérieure.
Troisième et dernière observation sur l'exercice 2024 : le contexte budgétaire a radicalement changé. Alors même que la crise sanitaire est derrière nous, le déficit public a continué à se détériorer fortement en 2024, pour atteindre 6,1 % du PIB.
Pris au piège de ses erreurs de prévisions, le gouvernement précédent a tenté de rectifier le tir en février dernier avec un décret d'annulation de crédits à hauteur de 10 milliards d'euros, qui n'a pas épargné la mission « Sécurités ». La police a principalement été concernée, avec une annulation de 134 millions d'euros, soit 7 % de son budget de fonctionnement et d'investissement.
La situation dégradée de nos finances publiques est une donnée structurelle que nous devons malheureusement intégrer pour les années à venir.
J'en viens maintenant à mon analyse du budget pour 2025. Commençons par souligner que celui-ci est en augmentation.
En effet, le projet de loi de finances pour 2025 prévoit une enveloppe totale d'environ 24 milliards d'euros, dont environ 13 milliards d'euros pour la police et 11 milliards d'euros pour la gendarmerie. Cela représente une hausse en crédits de paiement d'environ 1 milliard d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2024, soit une progression de 4,2 %, ce qui n'est pas négligeable. La hausse concerne d'ailleurs les deux forces : elle est de 3,4 % pour la police nationale et de 5,2 % pour la gendarmerie nationale.
Pour autant, peut-on considérer que ce budget respecte la loi du 24 janvier 2023 d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi) ? Assurément, il s'inscrit dans la dynamique que nous avons souhaité impulser en votant ce texte il y a bientôt deux ans. Toutefois, si l'on regarde les choses dans le détail, la réalité est plus complexe.
De manière globale, les crédits prévus pour le programme 176 « Police nationale » et le programme 152 « Gendarmerie nationale » respectent la cible prévue. S'agissant de la gendarmerie, ils la dépassent même. Cependant, deux éléments doivent nous conduire à nuancer ce constat.
Premièrement, les dépenses de fonctionnement et d'investissement de la police ne sont pas à la hauteur escomptée. Il faut le rappeler, la Lopmi distinguait deux trajectoires : l'une pour les crédits totaux du programme, l'autre pour les seuls crédits de fonctionnement et d'investissement, dits hors titre 2. L'un des objectifs majeurs de la Lopmi était d'interrompre l'effet ciseau qui avait été observé à la fin des années 2010 entre la masse salariale et les moyens matériels des forces : immobilier, équipement, numérique...
Or, pour la police, les crédits hors titre 2 resteraient stables à périmètre constant par rapport à la loi de finances pour 2024, tandis qu'une progression de 100 millions d'euros était requise pour atteindre la cible de la Lopmi. En termes d'investissement, ce sont les plans de renouvellement automobile qui en font les frais, alors que les besoins en la matière demeurent importants.
S'agissant de la police, la Lopmi n'a, au fond, pas réussi à enrayer durablement l'effet ciseau que je viens d'évoquer. Les différentes mesures salariales générales et catégorielles qui ont été prises au cours des années récentes, comme la hausse du point de la fonction publique, ont entraîné une dynamique incompressible des dépenses de personnel, qui « cannibalisent » l'enveloppe de la Lopmi. Le constat est sans appel : sur les 4,8 milliards d'euros de crédits supplémentaires prévus pour la police, 70 % devaient être affectés à des dépenses hors titre 2. In fine, la proportion s'est plus qu'inversée, de telle sorte que les dépenses de personnel devraient consommer 78 % de l'enveloppe.
Deuxièmement, se pose la question des effectifs. La Lopmi prévoyait la création de 356 ETP (équivalents temps plein) dans la police et 500 ETP dans la gendarmerie en 2025. Au final, il n'en sera rien : le PLF prévoit un schéma d'emplois nul pour ces deux programmes. Le ministère sera uniquement autorisé à recruter pour compenser les départs, alors que les missions supplémentaires confiées aux forces de sécurité dans le cadre de la Lopmi resteraient, quant à elles, inchangées.
À court terme, ce schéma d'emplois nul pose avant tout problème pour la gendarmerie. La police a en effet bénéficié d'augmentations d'effectifs massives en 2023 et 2024, lui permettant d'atteindre environ 80 % de la cible totale prévue par la Lopmi.
En plus des sept escadrons déjà créés, la gendarmerie doit « armer » 238 nouvelles brigades. À la fin de 2024, 80 brigades auront été créées, qui mobilisent déjà environ 600 militaires ; 57 nouvelles créations sont prévues pour l'an prochain. La préservation de cet objectif suppose inévitablement un rattrapage important des créations d'emplois au cours des exercices 2026 et 2027, ce qui risque d'être difficile à atteindre dans le contexte budgétaire actuel. À défaut, l'atteinte de l'objectif sera inévitablement compromise, sauf à « désarmer » partiellement certaines brigades fixes existantes, ce qui paraît difficilement acceptable compte tenu des besoins.
Cela dit, et malgré ses défauts, nous devons replacer ce budget dans le contexte de la situation actuelle des finances publiques.
Le PLF 2025, dans son ensemble, doit enrayer la dynamique de la hausse de la dépense publique qui a marqué la période précédente. Il prévoit même, à périmètre constant, une contraction des dépenses nettes de l'État. Dans ce contexte, les budgets de la police et de la gendarmerie paraissent relativement préservés.
En effet, sur les trente-deux missions du budget général de l'État, si l'on exclut la charge de la dette, seules neuf autres missions connaîtraient en 2025 une hausse des crédits de plus de 100 millions d'euros, tandis que trois autres missions connaîtraient une hausse de plus de 500 millions d'euros. Les crédits de la police et de la gendarmerie progresseraient, je le rappelle, de 1 milliard d'euros.
Nous pouvons donc prendre acte d'une forme de sanctuarisation des budgets des forces de l'ordre. On peut donner crédit au Gouvernement d'avoir fait preuve de lucidité sur ce point, ce qui était indispensable au vu de l'ampleur et de la multiplicité des enjeux sécuritaires pesant sur notre pays, cela était indispensable.
Des efforts importants restent à mener, car la police comme la gendarmerie font encore face à certaines problématiques structurelles majeures. Ces efforts, pour l'essentiel, sont remis à plus tard.
Je pense aux nécessaires créations d'emplois restant à réaliser pour accomplir les missions, sans cesse plus larges, confiées à nos forces de l'ordre. J'en ai dit un mot s'agissant de la gendarmerie, mais le constat peut également s'appliquer à la police.
Je pense aussi à l'indispensable remise à niveau du parc immobilier de la gendarmerie. Cet important parc - environ 600 casernes - se trouve aujourd'hui dans un état fortement dégradé. Dans le cadre d'un récent contrôle budgétaire, notre collègue Bruno Belin, rapporteur spécial de la commission des finances, évaluait à 2,2 milliards d'euros le sous-investissement dont les emprises de la gendarmerie ont pâti au cours des dix dernières années : une véritable « dette grise ».
Le chantier qui est devant nous est donc colossal. Le budget 2025 permet d'amorcer un redressement, mais il est loin d'être suffisant pour engager des opérations de grande envergure. L'enjeu est pourtant essentiel. L'état dégradé du parc domanial conduit la gendarmerie à se reporter de façon accrue sur le parc locatif. Il en résulte une dynamique très importante des dépenses de loyers, qui s'élèvent aujourd'hui à près de 600 millions d'euros. Cet automne, la gendarmerie s'est même retrouvée en situation de ne pas pouvoir payer certains loyers, ce qui a suscité l'indignation bien légitime des collectivités territoriales bailleresses. Une telle situation ne doit pas se reproduire.
Face à cela, il est donc impératif de
rechercher des solutions pérennes. Le ministre de l'intérieur
nous a indiqué, lors de son audition la semaine dernière, qu'il
ne s'interdisait aucune piste, quitte à innover et faire appel au
privé. S'agissant d'opérations de grande envergure, le recours
à des partenariats public-privé pourrait constituer une piste
intéressante pour l'État en termes de trésorerie. Lors de
cette même audition, notre
collègue Marc-Philippe Daubresse a suggéré
la création d'une « foncière logement »
pour la gendarmerie. Une telle solution, innovante, mérite
assurément d'être expertisée.
En tout état de cause, nous ne pouvons laisser la situation telle quelle. Il y va de la bonne gestion de l'argent public et, surtout, de la dignité des conditions de travail que nous offrons aux militaires engagés dans les casernes de la gendarmerie.
Pour autant, je vous propose de donner un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Sécurités », hors programme « Sécurité civile ». Le fait que ce budget, malgré ses limites et ses lacunes, continue d'augmenter alors que les dépenses de l'État sont soumises à une baisse générale constitue, indéniablement, un motif de satisfaction.
M. Hussein Bourgi. - Je remercie le rapporteur, dont tout le monde connaît l'expertise et l'attachement à ces corps de métier. Je souscris à l'essentiel de ses propos, mais je veux relever trois points qui suscitent notre inquiétude.
Il s'agit, d'abord, de l'objectif, voté dans la Lopmi, de la création de 8 500 postes d'ici à la fin du quinquennat. Pour cela, il aurait fallu créer des postes dès cette année, ce qui n'est pas le cas. Cet objectif ne sera donc pas atteint.
Il s'agit, ensuite, de la diminution de 8 % du budget consacré à la police judiciaire (PJ), laquelle a été soumise à une réforme, imposée au forceps. Pourtant, au même moment, les ministres concernés ont indiqué, lors d'un déplacement à Marseille, que 25 enquêteurs seraient affectés à la lutte contre le narcotrafic dans cette ville...
Il s'agit, enfin, de la création, prévue également dans la Lopmi, de 200 brigades de gendarmerie d'ici à la fin du quinquennat. Or le budget immobilier n'est pas au rendez-vous ; il ne permet déjà pas de payer les loyers dus aux collectivités et aux bailleurs.
Sans budget suffisant, la Lopmi sera vidée de sa substance.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio. - Merci pour ce rapport détaillé.
Il faut regarder de près le budget consacré à la lutte contre le narcotrafic, en particulier dans les territoires ultramarins. Je veux évoquer le cas spécifique de la Polynésie française, où l'on constate une augmentation du trafic lié à une drogue de synthèse appelée « ice ». Les services compétents demandent les moyens dont ils ont besoin pour surveiller ce vaste territoire.
M. Georges Naturel. - Je remercie les gendarmes - 40 escadrons sont présents actuellement - qui permettent, depuis près de six mois, d'éviter qu'il y ait encore plus de drames en Nouvelle-Calédonie. Je rappelle qu'il y a eu treize morts, dont deux gendarmes. Les gendarmes ont notamment permis de rouvrir l'axe de Saint-Louis, longtemps bloqué, qu'ils surveillent et sur lequel il est maintenant possible de circuler de 6 heures à 18 heures.
Je veux évoquer le patrimoine immobilier. Les deux projets de construction de caserne, une à La Foa et l'autre à Bourail - la caserne avait été dévastée par un cyclone en 2003 -, sont pilotés par un opérateur social, la Société immobilière calédonienne (SIC).
Les collectivités et les opérateurs sociaux sont soumis à des contraintes budgétaires et financières. Ainsi, 55 % des locataires de la SIC, qui gère 11 000 logements, ne payent plus leurs loyers depuis trois ou quatre mois.
L'État ne pourrait-il pas accompagner cet opérateur social afin de permettre la construction des casernes ?
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Le coût de sécurité des jeux Olympiques et Paralympiques a été estimé, pour la période 2020-2024, à 1,1 milliard d'euros, dont 600 millions d'euros de dépenses non prévues pour 2024, incluant les primes. L'ancien ministre de l'intérieur avait indiqué avoir obtenu 400 millions d'euros de crédits supplémentaires de Bercy. Ces primes seront-elles bien versées en décembre ?
Les plus anciens d'entre nous se rappellent les 23 millions d'heures supplémentaires impayées des policiers, qui représentaient environ 270 millions d'euros. Christophe Castaner, alors ministre de l'intérieur, avait mis en place en 2018 un dispositif de résorption. Qu'en est-il aujourd'hui ?
M. Alain Marc. - Je félicite Henri Leroy pour son rapport exhaustif. Il a évoqué l'absence de recrutement de gendarmes supplémentaires, alors même que, en parallèle, des brigades sont créées. Je m'inquiète donc pour les petites brigades rurales. À effectifs constants et avec plus de missions, je ne vois pas comment elles vont y arriver ! Il est vrai qu'il faut souvent faire plus avec moins, mais lorsqu'il s'agit d'hommes et de femmes qui assurent la sécurité, cela est difficilement tenable.
Je voudrais être rassuré : pouvez-vous me confirmer qu'il n'y aura pas de fermeture de brigades ?
M. Olivier Bitz. - Je commencerai par une observation d'ordre général : la mission « Sécurités » ne reflète que très imparfaitement et de manière incomplète les efforts réalisés par la Nation pour sa sécurité. Au fil des années, nous nous sommes de plus en plus appuyés sur les polices municipales et le secteur privé de la sécurité. C'est également le cas au niveau technique : de nombreux investissements sont réalisés par les collectivités locales, avec le soutien de l'État, mais sur d'autres lignes que celles inscrites dans la mission « Sécurités ».
J'aimerais exprimer mon inquiétude quant au schéma d'emplois des policiers et des gendarmes. Je ne vois pas comment on peut donner la priorité à la lutte contre le narcotrafic en gardant les mêmes effectifs, ni comment nous allons porter à 3 000 le nombre de places en centres de rétention administrative (CRA) si l'on n'a pas les policiers pour surveiller les personnes retenues. Un schéma d'emplois nul ne permettra pas de réaliser ces objectifs.
Je suis également préoccupé par l'érosion des effectifs dans les brigades territoriales, d'autant que l'objectif est de créer 238 brigades. Des engagements ont été pris par l'État à l'égard des territoires, mais je ne vois pas de commencement d'exécution, ni sur le plan immobilier ni sur le plan des ressources humaines. Les engagements de l'État doivent être tenus.
Se pose aussi la question de l'attractivité des postes. Dans mon département, l'Orne, des postes ont été ouverts au commissariat de Flers, mais personne n'a postulé. Il faut attirer et fidéliser des policiers et des gendarmes, notamment dans les territoires ruraux.
Autre motif d'inquiétude, la réserve de la gendarmerie : la diminution préoccupante des crédits en fin d'année a conduit la gendarmerie à se débrouiller avec ses seuls moyens permanents. On sait que la réserve est une variable d'ajustement facile, car cela permet de ne pas toucher aux effectifs. Avec un schéma d'emplois nul, nous comprenons que des efforts doivent être faits. Cependant, il est essentiel d'augmenter concrètement les possibilités d'intervention de nos forces sur le terrain. Pour cela, il faut que les crédits d'intervention de la réserve soient maintenus tout au long de l'année, et qu'ils ne soient pas gelés après l'été.
Mme Patricia Schillinger. - Je reviendrai sur un point déjà abordé par mes collègues : les postes ouverts et non pourvus. En tant qu'élue d'un territoire frontalier, proche de la Suisse, j'ai constaté que des policiers et des gendarmes démissionnaient pour travailler en Suisse, où les salaires sont plus rémunérateurs. L'attractivité de notre territoire n'est pas à la hauteur. J'y insiste, dans les zones situées près de Genève et le long de la frontière suisse, les agents restent peu de temps en poste, ce qui entraîne un turnover incroyable, alors même que la délinquance et le trafic de stupéfiants ont beaucoup augmenté.
M. Michel Masset. - Je partage l'inquiétude exprimée quant au nombre de gendarmes en milieu rural. Il est indispensable de mettre en place une politique pour revaloriser et rendre attractive cette profession. La création de nouvelles casernes pose question, si elles restent vides...
Enfin, je déplore l'absence de modernisation, dans le cadre du Beauvau de la sécurité, des critères de répartition du montant de la taxe spéciale sur les conventions d'assurances (TSCA) versée aux services départementaux d'incendie et de secours (Sdis). Je le rappelle, les départements, déjà en difficulté et qui le seront encore plus demain, financent 60 % à 70 % de l'enveloppe du Sdis.
Mme Muriel Jourda, présidente. - J'entends vos inquiétudes, mes chers collègues : le rapporteur les a également évoquées, mais il a aussi tenu compte de la situation budgétaire - nous ne pouvons pas l'ignorer, sinon cela nous poserait in fine encore plus de difficultés. L'augmentation du budget est réelle, et plutôt inattendue dans ce contexte.
M. Henri Leroy, rapporteur pour avis. - Monsieur Bourgi, lorsque nous avons voté la Lopmi, nous avons décidé, dans un élan d'enthousiasme, de créer 8 500 postes. En réalité, cet objectif était utopique, et la situation budgétaire actuelle nous permet pas de l'atteindre. J'y insiste, le budget des forces de sécurité est tout de même en hausse de 1 milliard d'euros.
Sur la police judiciaire, il faut rappeler que les gendarmes qui ont passé le diplôme d'officier de police judiciaire (OPJ), les commissaires, les officiers et les gradés sont des OPJ. Mais plus personne ne veut faire de la police judiciaire, car les primes sont insuffisantes et le volume de travail plus lourd. Alors, effectivement, la police judiciaire est en crise.
Sans revalorisation des primes, les agents se tournent vers d'autres missions. L'ancien directeur général de la police nationale (DGPN) a voulu rassembler localement tous les services opérationnels de la police. Voilà la philosophie qui a animé la réflexion au sein du Beauvau de la sécurité.
Dans le cadre de la Lopmi, nous avions décidé de créer 239 brigades - 80 d'entre elles ont été mises en place. Le ministre de l'intérieur a évoqué ce sujet lors de son audition : il va demander au nouveau directeur général de la gendarmerie nationale (DGGN) d'établir un calendrier pour atteindre l'objectif et prévoir le budget nécessaire, au moins pour 2025. Les maires et les services concernés seront informés.
Madame Eustache-Brinio, vous avez raison de souligner l'importance de la lutte contre le narcotrafic. Le ministre de l'intérieur a d'ailleurs fixé cet objectif comme l'une de ses priorités. Nous avons constaté en Guyane, en Martinique et en Guadeloupe que les territoires ultramarins sont particulièrement touchés. Nos outre-mer sont en voie de devenir l'une des principales voies de passage pour le narcotrafic vers l'Europe.
Monsieur Naturel, je connais bien la situation à La Foa et à Bourail. Les locaux à La Foa sont notamment dans un état catastrophique. Je le redis, le ministère de l'intérieur avertira les élus locaux, notamment les maires, ainsi que les parlementaires, dès que le calendrier sera établi par le DGGN.
Madame de La Gontrie, la sécurité des jeux Olympiques a effectivement coûté 1,1 milliard d'euros sur le périmètre de la mission. Les primes et les heures supplémentaires devraient être payées d'ici à la fin de l'année, comme cela m'a été confirmé lors des auditions que j'ai conduites.
Monsieur Marc, la création d'une brigade mobile nécessite six effectifs, contre dix pour une brigade territoriale. Les chiffres annoncés ne correspondent pas à ce qui a été concrètement fait : certains territoires, dont le vôtre, sont confrontés à de vrais problèmes d'effectifs. Le calendrier demandé par le ministre de l'intérieur sera communiqué aux maires concernés. La mise en place de l'ensemble des nouvelles brigades pourra-t-elle se faire en 2025 ? Certainement pas ! Car armer une brigade nécessite non seulement du personnel, mais également du matériel et des moyens. Pour répondre à votre question, a priori, aucune fermeture de brigade n'est envisagée.
Monsieur Bitz, le schéma d'emplois des forces est en effet problématique eu égard à l'augmentation des places en CRA. Le ministre essaie d'obtenir des « rallonges » pour mettre en oeuvre l'ensemble des engagements pris.
Madame Schillinger, il faut améliorer l'attractivité des métiers de gendarme ou de policier. Les gendarmes sont soumis à une rotation. Les agents affectés dans une brigade en zone défavorisée, dans laquelle l'exercice de leurs missions est difficile, y restent trois à quatre ans : ils vivent dans l'espoir d'être mutés pour améliorer leurs conditions de vie. Le « turnover » est donc, en effet, important.
Le volume de recrutement, quant à lui, est toujours satisfaisant.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Pouvez-vous apporter des précisions sur les heures supplémentaires ?
M. Henri Leroy, rapporteur pour avis. - Auparavant, on favorisait les départs anticipés : aujourd'hui, la situation s'est inversée. Alors que certains, principalement dans la police, acceptaient de partir en retraite plus tôt, ils sont de plus en plus nombreux à souhaiter bénéficier des versements dus au titre de leurs heures supplémentaires.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Il est plus sain que les heures supplémentaires soient payées. En effet, l'agrégation des heures à récupérer faisait que les postes étaient maintenus, mais non pourvus, car les personnes quittaient leurs fonctions.
Même si cela ne relève pas de ce budget, je veux évoquer un autre problème, que l'on observe aussi à Paris. Les agents qui habitent à 50 kilomètres de leur lieu de travail préfèrent travailler près de chez eux : cet effet d'éviction touche même les polices municipales.
M. Henri Leroy, rapporteur pour avis. - On constate un transfert des gendarmes et des policiers nationaux vers la police municipale. Les maires qui ont une police municipale sont susceptibles d'augmenter les primes de ces agents, qui rendent des services importants dans leur commune : ils assurent la police administrative, la police routière et exécutent les arrêtés du maire. Les policiers municipaux sont ainsi « choyés » par les maires, ce qui les incite à se rapprocher de leur domicile d'origine pour intégrer une police municipale proche de chez eux. Ce sujet a vocation à être abordée dans le cadre du « Beauvau » des polices municipales.
La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Sécurités » (hors programme « Sécurité civile »).
COMPTE RENDU DE
L'AUDITION
DE M. BRUNO RETAILLEAU, MINISTRE DE L'INTÉRIEUR
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Mme Muriel Jourda, présidente. - Monsieur le ministre, nous sommes heureux de vous accueillir dans le cadre de nos travaux sur le projet de loi de finances (PLF) pour 2025, qui s'inscrit dans un contexte particulièrement difficile pour nos finances publiques.
Pour autant, nos politiques publiques, et singulièrement celles dont vous avez la responsabilité au sein du Gouvernement, nécessitent des moyens budgétaires adéquats pour atteindre les objectifs assignés. Nous aimerions vous entendre évoquer ce difficile équilibre et les trois missions budgétaires qui ressortissent de votre portefeuille : « Immigration, asile et intégration », « Sécurités » et « Administration générale et territoriale de l'État ».
M. Bruno Retailleau, ministre de l'intérieur. - Ce projet de budget a été préparé dans une période difficile. En quelques semaines, il a fallu l'établir dans un contexte de dérapage des finances publiques historiquement très élevé, dont il porte la marque.
Cependant, un budget ne résulte pas seulement de choix comptables ou techniques, mais aussi de choix politiques. Avec Michel Barnier, nous assumons de faire des économies, mais il ne s'agit pas de sacrifier l'urgence sécuritaire à l'urgence budgétaire. Procéder à un tel sacrifice aurait été démocratiquement discutable et économiquement préjudiciable.
D'abord, cela aurait été démocratiquement discutable puisque notre pays est confronté à une hyperviolence. Un refus d'obtempérer a lieu toutes les vingt minutes et une attaque avec arme toutes les heures. De plus, un millier d'agressions sont signalées chaque jour par nos compatriotes. Derrière ces chiffres, il y a des existences amputées, des corps brisés et parfois des vies volées.
Par ailleurs, chaque semaine, j'essaie d'appeler les gendarmes, les policiers et les sapeurs-pompiers qui ont été blessés pendant leur service. Ceux qui risquent leur vie pour protéger celles de nos compatriotes méritent le respect. Ils méritent aussi que l'on mette des moyens à leur disposition.
Ensuite, le sacrifice de l'urgence sécuritaire aurait aussi été économiquement préjudiciable. Si la sécurité des Français n'a pas de prix, les insécurités, elles, ont un coût. À ce titre, le Sénat avait estimé à 1 milliard d'euros au moins le coût collectif entraîné par les émeutes de l'été 2023. La Cour des comptes évalue à 1,8 milliard d'euros le coût de la lutte contre l'immigration illégale. Depuis 2017, l'indice d'attractivité de la France a baissé en raison de l'insécurité croissante, ce qui pèse aussi sur nos finances. Ainsi, pour remettre de l'ordre dans les comptes, il faut rétablir l'ordre, aussi bien dans la rue qu'à nos frontières ; c'est ce que demande l'immense majorité de nos concitoyens.
Le budget du ministère de l'intérieur servant cet objectif, il est préservé et renforcé. Avec 24,1 milliards d'euros, dont 15,06 milliards d'euros dédiés aux dépenses de personnel et 9,5 millions d'euros aux dépenses de fonctionnement et d'investissement, il respecte la trajectoire financière prévue dans le cadre de la loi du 24 janvier 2023 d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi).
Ce budget est renforcé puisqu'il augmente de 750 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale (LFI) de 2024. De plus, un amendement budgétaire visera à augmenter de 125 millions d'euros les crédits de paiement (CP) et de 150 millions d'euros les autorisations d'engagement (AE), notamment en ce qui concerne l'immigration et la police. Cette augmentation se répartit ainsi : 225 millions d'euros pour la masse salariale et 527 millions d'euros pour le fonctionnement et l'investissement, qui viseront notamment à renforcer le numérique.
En ce qui concerne la mission « Sécurités », qui englobe la police, la gendarmerie, la sécurité civile et la sécurité routière, l'augmentation s'élève à 587 millions d'euros, sans tenir compte de l'amendement budgétaire que je vais présenter.
Pour cette mission, j'ai retenu plusieurs orientations. D'abord, au titre de la masse salariale, je souhaite respecter tous les engagements pris en 2022 dans le cadre des protocoles de modernisation des ressources humaines de la police et de la gendarmerie nationales, qui avaient fait l'objet d'un accord unanime avec les organisations syndicales. Il s'agit d'un engagement de l'État vis-à-vis de ces dernières et de nos personnels.
En matière immobilière, l'objectif est d'abord de poursuivre la mise en oeuvre des grands projets structurants qui sont en cours, parmi lesquels la création d'hôtels des polices à Nice et Valenciennes. Nous reprendrons également l'entretien du parc domanial de la gendarmerie nationale grâce à de nouvelles opérations de réhabilitation, notamment pour les casernes de Babylone à Paris et de Chauny dans l'Aisne, ou pour le site de Saint-Astier.
Au-delà, il nous faut poursuivre la réflexion pour analyser les conditions de recours à des marchés de partenariat avec le privé, notamment dans le cadre de grandes opérations à venir, comme celle de la réhabilitation du site de Satory, qui coûtera plusieurs centaines de millions d'euros. Le modèle patrimonial de la gendarmerie est à bout de souffle ; on ne peut plus continuer ainsi.
En matière numérique, il est indispensable que policiers et gendarmes disposent des équipements nécessaires pour être efficaces au moment de leurs interventions. Ces équipements incluent des caméras-piétons, des drones, des moyens de lutte anti-drones, mais également des systèmes d'information adaptés à leur métier au quotidien. Ils croulent sous des procédures de plus en plus importantes et le recours à l'intelligence artificielle pourrait leur simplifier la tâche. L'expérience des usagers a déjà été améliorée grâce au numérique, puisque la plainte en ligne a été généralisée il y a quelques semaines, sur l'ensemble du territoire national, après avoir fait l'objet d'une expérimentation. Les travaux vont se poursuivre, par exemple sur la numérisation de la procédure pénale, qui permettra de gagner beaucoup de temps administratif et de soulager policiers et gendarmes.
Au titre de la sécurité civile, l'État maintiendra son engagement dans le cadre des pactes capacitaires, à hauteur de 45 millions d'euros. Il faut aussi conforter les colonnes de renfort, notamment pour la lutte contre les grands feux. Un effort significatif de 13 millions d'euros sera fourni en ce sens. Par ailleurs, nous devons entreprendre une réflexion sur le renouvellement de la flotte, composée d'appareils différents, notamment de types Canadair, Beechcraft ou Dash. Nous dépenserons 100 millions d'euros en 2025 et 500 millions en cinq ans, pour renouveler la flotte des hélicoptères EC 145. De plus, nous louons certains moyens aériens, ce dont nous ne pourrons sans doute pas nous passer ; il faut de l'agilité en la matière. La question de l'état de la flotte à l'horizon de quinze ou vingt ans est posée.
Enfin, les crédits alloués à la sécurité routière permettront de suivre les orientations fixées par le comité interministériel de la sécurité routière de juillet 2023 : éduquer, prévenir et sanctionner. La loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale (3DS) permet à des collectivités d'installer des radars automatiques et l'Agence nationale de traitement automatisé des infractions (Antai) bénéficiera de 13 millions d'euros supplémentaires. La question se posera de savoir ce qui reviendra à l'État et aux collectivités.
J'en viens à la mission « Administration générale et territoriale de l'État » et je tiens à l'idée que mon ministère n'est pas seulement celui des sécurités, mais aussi celui de l'administration territoriale de l'État.
En la matière, je plaide pour que l'État déconcentré s'organise autour des préfets de département, qui doivent assurer l'autorité d'une même voix pour l'ensemble des services de l'État. L'administration de l'État territorial est à l'os et, là encore, des questions patrimoniales se posent. Les crédits augmenteront de 300 millions d'euros et nous soutiendrons les moyens consacrés à l'immobilier, à hauteur de plus de 30 millions d'euros. Des créations de postes auront également lieu.
En matière d'immobilier, deux grands projets concernent le ministère. En premier lieu, la construction du siège de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) va commencer à Saint-Ouen, pour un coût de 1,2 milliard d'euros. En plus de dix ans, les effectifs de la DGSI ont doublé. Au moment des attaques terroristes, nous avons pris conscience de l'existence de trous dans la raquette en matière de renseignement. Un effort national a été fourni et la DGSI doit absorber plus de 5 000 collaborateurs.
En second lieu, l'administration centrale du ministère s'installera à Saint-Denis, dans l'ensemble immobilier Universeine, qui accueillera 2 700 agents. Cette opération aura un coût de presque 300 millions d'euros. Il s'agit d'un projet assez vertueux puisqu'un certain nombre de structures qui visaient à accueillir les athlètes pendant les Jeux Olympiques et Paralympiques seront réutilisées.
Enfin, la transformation numérique reste centrale, notamment avec l'ouverture du service du Réseau Radio du Futur. En matière d'hébergement numérique, il faudra privilégier des solutions souveraines autant que possible.
J'en viens à la mission « Immigration, asile et intégration », dont les crédits ont d'abord beaucoup diminué. J'ai donc indiqué au Premier ministre qu'il fallait aligner nos objectifs et nos moyens, même si aucune mission ne doit être à l'abri des économies.
Cette baisse a été envisagée en raison d'une décroissance prévisionnelle du nombre d'Ukrainiens accueillis. En effet, nous accueillions 96 000 Ukrainiens en 2022 et nous estimons que ce chiffre sera inférieur à 40 000 en 2025.
De plus, nous souhaitons rationaliser la gestion des places d'hébergement. Ces dernières sont largement occupées par des publics qui ne devraient pas y avoir accès, comme les déboutés du droit d'asile. En conséquence, le public que nous sommes censés accueillir ne peut pas l'être. De la même manière, l'hébergement d'urgence, qui relève de la compétence de ma collègue Valérie Létard, est désormais occupé à 70 % ou 80 % par des étrangers en situation irrégulière, ce qui pose d'énormes problèmes. Toute la chaîne d'hébergement rencontre des difficultés, qu'il faudra progressivement résoudre.
Je confirme que nous ouvrirons de nouvelles places dans les centres de rétention administrative (CRA), puisque nous visons l'objectif de 3 000 places en 2027. De plus, 29 nouveaux équivalents temps plein (ETP) seront attribués à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), permettant notamment de réduire les délais de traitement des demandes d'asile. Cela entraînera des économies s'agissant de l'allocation pour demandeurs d'asile (ADA). Enfin, le déploiement des espaces « France asile » permettra également de réaliser des économies, notamment en termes de transport.
Mme Muriel Jourda, présidente, rapporteur pour avis de la mission « Immigration, asile et intégration ». - Le projet de budget, tel qu'il nous est transmis, mentionne une baisse de 60 millions d'euros des crédits fléchés vers la lutte contre l'immigration irrégulière.
Vous venez d'indiquer, comme vous l'avez déjà fait à l'Assemblée nationale, que le budget de la mission serait sans doute revalorisé, ce dont on peut se réjouir. Pouvez-vous donner des précisions quant aux montants et à l'affectation de ces crédits supplémentaires ?
M. Olivier Bitz, rapporteur pour avis de la mission « Immigration, asile et intégration ». - L'efficacité d'une politique publique ne se mesure pas toujours au montant des budgets investis, tout le monde ici en a conscience. Néanmoins, la mission « Immigration, asile et intégration » connaît pour l'instant une baisse prévisionnelle et j'espère avoir une bonne nouvelle dans quelques minutes. Cette diminution s'élève à 35 millions d'euros en AE et à 110 millions d'euros en CP. Par ailleurs, nous avons réintégré à la mission les crédits consacrés aux Ukrainiens. Globalement, il s'agit d'un effort de 300 millions d'euros.
D'abord, le budget consacré à l'hébergement des demandeurs d'asile baisse de 71 millions d'euros ; 6 500 places ne seraient plus financées. Je m'interroge sur la soutenabilité d'une telle baisse. En effet, non seulement nous financerons 6 500 places en moins, mais les places réservées aux Ukrainiens seront également financées sur cette ligne. Avec une prévision de 5 % de demandeurs d'asile en plus pour l'année prochaine - certains experts évoquent même 6 % ou 7 % -, l'objectif n'est-il pas trop ambitieux ?
En ce qui concerne les crédits dédiés à l'ADA, le budget prévoit 47 millions d'euros en moins. Comme il s'agit d'une dépense obligatoire, les crédits seront certainement ajustés au cours de l'année. Cependant, je m'interroge là aussi sur la soutenabilité de l'effort demandé.
Enfin, j'en viens aux CRA. Avec la diminution de 47 millions d'euros des CP et de 115 millions d'euros des AE, l'objectif de créer 3 000 places en 2027 n'est-il pas compromis ? De façon plus générale, je m'interroge sur la gestion des CRA. En effet, le profil des personnes retenues change et il s'agit beaucoup plus qu'avant de personnes troublant l'ordre public. De même, la durée de rétention progresse puisque nous sommes passés en une année de 29 à 33,3 jours en moyenne. Je m'interroge donc sur les moyens octroyés aux policiers, dont ce n'est pas le métier d'intervenir dans les CRA, mais aussi sur la nature de la rétention en CRA et sur des vulnérabilités, en matière de bâtiment et de formation des agents.
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale de la commission des finances sur la mission « Immigration, asile et intégration ». - Vous l'avez dit, une partie des places d'hébergement existantes ne sont pas occupées par ceux qui devraient les occuper. Nous sommes aussi confrontés à une autre problématique puisque 2 000 logements posent question quant à leur état, si bien qu'ils n'entrent plus dans la comptabilisation des places. Ainsi, sur les 6 500 logements qui disparaîtraient, 4 000 ne sont pas occupés par les bonnes personnes ou sont dans un tel état qu'ils ne sont pas occupés ; le différentiel est faible. Des consignes ont été données aux préfets pour faire le point sur cette situation dans l'ensemble des départements. L'impact budgétaire ne serait pas aussi élevé qu'on le pense si les choses étaient faites dans les règles, avec la diligence souhaitée.
En ce qui concerne l'intégration, la loi du 26 janvier 2024 pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration prévoit une obligation de résultat. Il ne s'agira plus seulement, pour les étrangers en situation régulière, d'être assidus à leurs cours de français et d'accepter de participer à quatre journées consacrées à nos valeurs civiques, pour accéder à des titres de séjours longs, mais de bien de réussir des examens. Pour le moment, le travail nécessaire n'a pas été accompli. Or on constate un échec dans l'apprentissage du français comme dans l'enseignement de nos valeurs civiques. Il s'agit d'une question non pas de moyens, mais de volonté. Aujourd'hui, les documents faisant état de nos valeurs ressemblent à des catalogues de droits, mais n'évoquent pas les devoirs. Il faut rappeler l'importance de la laïcité et de l'égalité entre les hommes et les femmes. Cette question pèsera certainement davantage dans le budget suivant et j'y serai attentive.
Mme Françoise Dumont, rapporteure pour avis de la mission « Immigration, asile et intégration » sur le programme « Sécurité civile ». - Je souhaiterais évoquer deux points d'inquiétude quant aux moyens nationaux de la sécurité civile, présentés au sein du programme 161.
La semaine dernière, je me suis rendue sur la base aérienne de la sécurité civile à Nîmes pour échanger sur les enjeux liés à la flotte nationale. Aussi, je souhaiterais aujourd'hui compléter ces échanges en abordant la problématique de la disponibilité des moyens aériens pour la lutte contre les feux de forêt. En 2024, la saison des feux a été d'une intensité modérée, notamment grâce à la réactivité des acteurs de la sécurité civile et à l'efficacité de notre doctrine opérationnelle. Toutefois, au cours de l'été, des inquiétudes quant à la faible disponibilité des moyens aériens ont interrogé la capacité de notre flotte à assurer la même efficacité si, à l'avenir, des feux plus importants devaient survenir. Quelle est votre position sur ces enjeux de disponibilité de nos aéronefs, qui sont vieillissants ? Quelles conclusions tirez-vous des difficultés observées à assurer le maintien en condition opérationnelle ? Comment assurer la capacité de la flotte à faire face à une saison de feux de forêt dont l'intensité serait similaire à celle de 2022 ? Ces interrogations ne sont pas sans lien avec le projet de renouvellement de la flotte d'avions bombardiers d'eau, dont j'espère que vous direz un mot.
J'en viens aux inondations exceptionnelles survenues dans plusieurs départements au cours de l'année 2024 et aux drames subis ces derniers jours par nos voisins espagnols. Alors que la multiplication des épisodes de fortes pluies et des risques de crues est inévitable pour les années à venir, comment anticipez-vous les besoins accrus en matière d'investissement dans le matériel et la formation des acteurs de la sécurité civile ? Comment le ministère entend-il répondre en termes budgétaires à ces risques naturels qui vont croissants et qui préoccupent nombre de nos concitoyens ?
M. Henri Leroy, rapporteur pour avis de la mission « Sécurités ». - On peut se réjouir que les budgets de la police et de la gendarmerie soient en légère augmentation et que des crédits supplémentaires soient ouverts dès cette année pour tenir les promesses faites aux policiers et aux gendarmes en contrepartie de leur engagement pendant les jeux Olympiques.
Toutefois, le PLF prévoit un schéma d'emploi nul pour la gendarmerie, ce qui constitue un renoncement important par rapport aux 500 ETP supplémentaires prévus par la Lopmi pour 2025, tandis que les objectifs opérationnels, eux, sont maintenus inchangés, avec la création de 239 brigades et de 7 escadrons. Est-il réaliste de faire beaucoup plus avec moins de militaires que prévu - à moins qu'il y ait un rattrapage d'ici à 2027 ? Mais cela semble difficile à envisager au vu des besoins très importants constatés sur d'autres postes de dépenses, je pense notamment à l'indispensable rénovation du parc immobilier.
S'agissant de la police, ce PLF marque un coup d'arrêt concernant l'investissement, et en particulier le renouvellement du parc automobile. Il est vrai qu'il avait été arrêté avec l'annulation de crédits dès le début de l'année 2024. Or les voitures sont un outil de travail quotidien. Leur dégradation affecte les conditions de travail des policiers, mais aussi la conduite des opérations. Mais je sais que vous héritez de cette situation. Pouvez-vous nous assurer que les crédits prévus seront bien engagés, contrairement à 2024 ? Cela a-t-il été identifié comme une priorité pour les années à venir ? Car c'en est une.
Mme Cécile Cukierman, rapporteure pour avis de la mission « Administration générale et territoriale de l'État ». - Merci pour vos propos ; nous sommes nombreux à souhaiter un État déconcentré fort incarné par le préfet. Les deux dernières années ont été jalonnées par diverses annonces en faveur de l'administration territoriale de l'État.
Concrètement, ont été lancées en février dernier les rencontres de l'administration territoriale de l'État, mais la dissolution a eu raison de ces ateliers, pourtant essentiels. Le programme « Missions prioritaires des préfectures » arrive dans sa dernière année, envisagez-vous reprendre ces travaux ? Irez-vous au-delà de la simple préservation des effectifs ? Relancerez-vous ce dialogue ?
Je souhaite également aborder d'autres actions et projets portés par les crédits de la mission budgétaire « Administration générale et territoriale de l'État » que sont le programme France identité numérique et l'organisation des élections. Le projet d'identité numérique régalienne repose sur trois impératifs fondamentaux : le besoin de souveraineté face aux initiatives des acteurs privés, la garantie de sécurité et la lutte contre la fraude documentaire ainsi que la simplification des démarches pour les usagers. À cet égard, les premiers résultats des procurations de vote entièrement dématérialisées sont encourageants et témoignent de l'adhésion croissante de nos concitoyens, plus de 100 000 électeurs en ayant bénéficié lors des élections de juin 2024.
Néanmoins, le cadre légal de la procédure électorale apparaît encore insuffisamment adapté : le justificatif d'identité numérique n'est pas reconnu comme preuve d'identité le jour du scrutin. Alors que les communes font déjà état de difficultés dans la gestion des procurations reçues le jour même des élections, la généralisation des procurations dématérialisées ne fera qu'aggraver le problème. Seriez-vous favorable à une évolution réglementaire fixant une date limite pour l'établissement des procurations ?
Habituellement, la commission des lois rejette les crédits de cette mission non pas par principe, mais pour attirer l'attention du ministre sur la nécessité d'un État territorial fort, notamment les sous-préfectures. Il semblerait que la majorité évolue vers un vote favorable, lequel n'en attirera pas moins votre attention pour qu'aucun territoire ne soit oublié.
M. Bruno Retailleau, ministre. - L'amendement budgétaire décidé par le Premier ministre abondera la mission « Immigration, asile et intégration » de 56 millions d'euros en AE et de 34 millions d'euros en CP. Dans ce budget difficile, chacun est amené à réaliser des économies, mais ces crédits supplémentaires étaient nécessaires. Nous essayons par ailleurs d'optimiser au maximum, en nous ajustant à la décroissance du nombre d'Ukrainiens accueillis et en mettant en place un pilotage de l'hébergement beaucoup plus volontariste. Je constate que certaines préfectures de région y parviennent bien mieux que d'autres - il y a des marges de progression.
Pour faire baisser nos dépenses d'ADA, nous envisageons de recruter 29 ETP à l'Ofpra, qui devraient concourir à réduire la durée des procédures ; les premiers espaces France asile à Cergy-Pontoise, à Toulouse puis à Metz permettront également d'économiser trois semaines de délai de traitement et de nombreux frais de transport.
Il faut tenir sur l'objectif de 3 000 nouvelles places en CRA. Sur les 34 millions de nouveaux crédits de paiement, une bonne part y est consacrée. Mais c'est moins une question de crédits que de lourdeur des procédures. J'ai donc prévu une équipe dédiée au sein de mon ministère pour accélérer cette mise en oeuvre. Le CRA de Nice comporte une quarantaine de places qu'on pourrait étendre à 140, mais il nous faut négocier avec la ville de Nice.
La durée moyenne de placement a augmenté, pour atteindre 33 jours. Le problème principal pour augmenter le nombre de places sera le personnel. Ce ne sont pas des postes attractifs. À Lyon, ce sont des gendarmes mobiles, mais ce n'est pas leur métier. Souvent, ce sont des agents de la police aux frontières. Il importe de procéder à des externalisations sur les tâches non régaliennes, comme pour la restauration. Mais je n'ai pas de réponse définitive pour le moment concernant cette question.
Nous voulons être très volontaristes sur l'immigration, en articulant notre action autour de trois piliers.
D'abord, une action très en avant, au niveau international, via des accords bilatéraux. Mardi dernier, nous avons signé avec le Kazakhstan un accord conforme au droit européen - il n'a rien à voir avec l'accord italo-albanais - permettant d'y renvoyer des étrangers dès lors qu'on établit des preuves de transit ou de séjour. Cela pourrait concerner les plus de 83 000 Afghans présents en France. Un binôme formé par un ambassadeur et un représentant du ministère de l'intérieur sera chargé de développer ces accords.
Ensuite, nous défendons une réponse européenne, avec une application anticipée du pacte sur la migration et l'asile et la création des centres d'attente qu'il prévoit. Les demandes d'asile de ressortissants de pays ayant un taux de protection de moins de 20 % seront traitées plus rapidement. Je suis heureux de constater, lors des réunions européennes, un consensus pour la refonte de la directive « Retour », mal nommée, puisqu'elle empêche précisément les retours. Ursula von der Leyen nous a confirmé qu'elle considérait cette refonte comme une question urgente.
Enfin, nous déploierons une stratégie au niveau national, avec deux circulaires et un projet de loi qui reprendra les dispositions qui avaient été censurées par le Conseil Constitutionnel pour des raisons de forme.
Nous ne pouvons plus accepter le désordre migratoire. Nous devons mieux mobiliser les outils existants, par exemple la libération conditionnelle-expulsion, par laquelle la peine peut être réduite à condition d'un retour volontaire dans le pays d'origine. Nous ne pouvons pas compter uniquement sur les CRA pour gérer une politique de retour. D'où les politiques de réadmission que je mène, par exemple avec le Maroc.
Madame Ciuntu, effectivement, une partie des places d'hébergement ne sont pas disponibles ; plus de 4 000 places sont occupées par des publics qui ne devraient pas les occuper. Nous serons déterminés sur cette question aussi.
Effectivement, la loi de janvier dernier transforme l'obligation de moyens en obligation de résultat. Nous sommes en phase de préparation des marchés publics pour la réforme des dispositifs d'apprentissage de la langue et d'instruction civique. Pour la langue, nous étudions la possibilité d'un enseignement à distance. Je crois que la mise en concurrence de l'appel d'offres nous permettra de faire des économies.
Nîmes est une belle base d'entretien de notre flotte d'aéronefs de lutte contre l'incendie, malheureusement vieillissante. Il y a deux ans, la Président de la République avait pris l'engagement de renouveler quatre appareils. Deux commandes ont été passées avec un cofinancement européen. Nous aurons donc à payer moins en 2025 qu'en 2024.
Nous avons besoin de redimensionner la flotte : nos moyens sont insuffisants. Nous allons continuer à renouveler notre parc d'hélicoptères à hauteur de 100 millions d'euros.
Nous allons relancer, le 25 novembre, le Beauvau de la sécurité civile avec l'ensemble des partenaires. Je tiens à préserver le modèle français, qui présente le meilleur rapport entre le coût et la qualité, caractérisé par la mixité des statuts, la complémentarité et l'ajout de moyens nationaux si besoin. Mais cela implique qu'on ne nous demande pas d'appliquer aux volontaires la directive Travail. Les sapeurs-pompiers volontaires ne sont pas des salariés !
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Ce sont des collaborateurs occasionnels du service public.
M. Bruno Retailleau, ministre. - Eux-mêmes tiennent à ce statut de volontaire. Nous louons aussi en saison d'autres appareils, pour un coût de 30 millions d'euros : dix hélicoptères bombardiers d'eau et six avions légers de type Air Tractor.
Concernant mon retour d'expérience sur les inondations, cela n'a rien à voir avec les inondations qui ont eu lieu à Valence : nous avons une culture des risques. Après la tempête Xynthia, j'avais présidé au Sénat une commission d'enquête qui avait montré à l'époque que notre culture des risques était proche de zéro ; mais les progrès ont été immenses.
Cette culture repose sur la chaîne du risque depuis l'amont - la prévision, avec Météo France, puis FR-Alert - jusqu'à l'aval, que doivent préparer les plans communaux de sauvegarde. Les maires doivent se prêter à des exercices très concrets, tels que le repérage des personnes grabataires à secourir en priorité. J'incite les associations départementales d'élus à guider les maires dans ce domaine.
Madame Dumont, les pactes capacitaires avec les services départementaux d'incendie et de secours (Sdis) sont fondamentaux : les appels d'offres sur toute la France permettent d'obtenir une baisse des coûts de l'ordre de 30 % et un matériel interopérable : cela facilite le soutien entre départements lors des grands feux.
À ce propos, le jour même de la catastrophe à Valence, j'ai proposé à mon homologue espagnol l'envoi de 200 à 250 sapeurs-pompiers, mais il a refusé dans un premier temps. Il m'a ensuite demandé l'envoi d'une cinquantaine d'entre eux. Je compte réunir les autres ministres de l'intérieur européens pour créer un état-major capable de gérer les très grandes crises de manière coordonnée - aujourd'hui, les choses se font en bilatéral.
Monsieur Leroy, nous aurons bien 238 nouvelles brigades, soit une de moins que prévu, dont 57 restent à déployer. J'ai demandé au nouveau directeur général de la gendarmerie nationale (DGGN) un calendrier précis, afin de pouvoir envoyer aux maires un engagement écrit sur la date de création de chaque brigade.
Le calendrier de création nécessite, vous avez raison, des emplois supplémentaires, notamment l'an prochain. Ce sera mon combat. J'ai la masse salariale, mais Bercy bloque sur le schéma d'emploi. Je tiens à ce qu'on respecte les engagements pris.
S'agissant des investissements dans la police, monsieur Leroy, des crédits seront engagés pour acheter 1 600 voitures de police.
Le principal problème porte sur l'immobilier : en quinze ans, on est passé de loyers à hauteur de 300 millions d'euros à 600 millions d'euros ! Comme l'État n'avait pas assez de crédits pour investir, il a demandé aux collectivités et aux bailleurs sociaux de le faire à sa place. Mais le modèle a ses limites : les loyers cannibalisent les crédits. Nous ne sommes plus capables de remettre à niveau notre patrimoine immobilier. Les partenariats public-privé (PPP) ont du sens pour de grands projets comme Satory. J'ai demandé au DGGN de me proposer un plan de sortie.
Madame Cukierman, si les rencontres ont eu lieu, elles n'ont effectivement donné lieu à aucune restitution. J'ai souhaité une reprise des rencontres en décembre. C'est fondamental pour les services déconcentrés. J'ai également souhaité une augmentation des effectifs dans les préfectures et sous-préfectures : nous suivrons la trajectoire de cette année, avec une centaine de créations de postes.
Vous m'indiquez que le cadre normatif des procurations dématérialisées n'est pas satisfaisant. Mais cela relève de la loi : il faudra que le Sénat y pourvoie.
Concernant la date limite, cela relève du domaine réglementaire. Je vais y réfléchir. À quel délai pensiez-vous ?
Mme Cécile Cukierman, rapporteure pour avis. - Je ne demande pas une réponse tout de suite. De nombreuses communes nous disent qu'il est difficile de gérer un afflux de procurations après 18 heures le vendredi ...
M. Bruno Retailleau, ministre. - Je compte sur la commission des lois du Sénat pour me faire des propositions sur ce point, madame la présidente.
M. Marc-Philippe Daubresse. - Monsieur le ministre, ayant été le rapporteur de la Lopmi au Sénat, je me réjouis que vous soyez parvenu à en conserver les équilibres fondamentaux. Lors de sa première année d'exécution, une loi d'orientation est toujours formidable, mais, dès la deuxième année, il faut lutter pour que des crédits programmés ne soient pas supprimés. En l'occurrence, vous avez préservé l'essentiel, même si je souscris aux remarques formulées par Henri Leroy.
Par ailleurs, votre prédécesseur, Gérald Darmanin, m'avait demandé de me pencher sur le sujet de l'immobilier, dont vous avez dit quelques mots. Celui-ci s'était mué en père Noël, faisant la tournée des mairies pour annoncer que des casernes de gendarmerie seraient construites à toute allure, mais nous voyons bien que les choses ne se passent pas ainsi.
La gestion du patrimoine locatif est un vrai sujet, en particulier pour ce qui concerne la gendarmerie. Selon un diagnostic que j'ai réalisé, celle-ci compte 1,1 million de mètres carrés de locaux, dont environ la moitié sont domaniaux et l'autre moitié sont en location. Or, à l'évidence, la gendarmerie n'a pas la compétence pour gérer une telle masse locative. Il convient donc de s'interroger sur l'éventualité d'en confier la gestion à des professionnels, par exemple à Action Logement. De même, nous devons nous poser la question de la création d'une foncière logement pour plus d'efficience.
J'ai bien compris que vous étiez conscient du problème, qui, à terme, est explosif d'un point de vue budgétaire, en témoignent les disparités de loyer entre police, gendarmerie et préfectures. Aussi, qu'envisagez-vous pour le résoudre ?
M. Guy Benarroche. - Monsieur le ministre, de manière générale, j'ai noté que vos prévisions se fondaient sur l'application d'une politique volontariste, reposant notamment sur les préfets, en vue de réaliser des économies. Pourtant, une telle politique n'a toujours pas été mise en oeuvre et le budget à venir risque de compliquer la tâche à quiconque souhaite le faire.
Je vous rappelle que les préfectures souffrent déjà d'un manque criant de personnel pour traiter les dossiers, qui allonge les délais d'attente. Pourtant, 350 suppressions de postes dans les préfectures et les sous-préfectures sont prévues dans le budget pour 2025. Les conséquences seront lourdes - elles le sont même déjà - pour la justice administrative.
Je reviendrai sur les propos de certains de mes collègues sur l'asile et l'immigration. Voilà la photographie de ce qui est prévu concernant l'hébergement : 6 179 places d'accueil en moins ; une réduction de 71 millions d'euros par rapport à 2024. De nombreux demandeurs d'asile vont ainsi se retrouver dans des structures d'hébergement d'urgence de droit commun, dormir dans la rue ou payer des marchands de sommeil.
De plus, les crédits alloués à l'exercice du droit d'asile ont également diminué de 16 %, ce qui affectera essentiellement les cours de français. Cela semble totalement paradoxal, compte tenu des nouvelles exigences requises en matière linguistique pour obtenir un titre de séjour depuis l'adoption de la dernière loi relative à l'immigration.
Pour ce qui est de l'intégration par la formation professionnelle, l'Office français de l'immigration et de l'intégration (Ofii) perdra des effectifs en 2025, son budget s'élevant à 275 millions d'euros, contre 281 millions d'euros en 2023. Cette structure joue pourtant un rôle majeur pour que les primo-arrivants s'intègrent par l'emploi et veille à la bonne exécution du contrat d'intégration républicaine (CIR).
Par ailleurs, les demandeurs d'asile sont dans l'impossibilité de signer un contrat de travail, ils se voient refuser une régularisation et la dotation relative à l'ADA diminue de 16 % après avoir déjà diminué de 10 % en 2024. Dès lors, ils n'ont d'autre choix que de travailler au noir, sans protection salariale ni couverture santé, alors qu'ils aspirent à travailler ou le fond déjà.
L'Ofpra bénéficie certes de 29 postes supplémentaires, mais lors des auditions que nous avions menées pour préparer l'examen de la loi relative à l'immigration, les fonctionnaires de cette structure ainsi que ceux de l'Ofii nous avaient alerté sur le manque criant de personnel formé. Il est attendu des espaces « France asile » qu'ils résolvent les problèmes et diminuent les délais, mais des délais plus courts signifient également moins de temps pour monter un dossier. La diminution des délais n'est pas une fin en soi : il faut avant tout que les demandes soient traitées correctement. Pour l'heure, nous n'avons aucune garantie à cet égard.
Enfin, monsieur le ministre, j'ai visité quatre CRA rien qu'en 2024. Je suis tout à fait d'accord avec vous sur le fait que l'on ne peut pas compter que sur les CRA pour mener la politique de retour, car le profil des retenus a changé. Ces derniers sont désormais majoritairement des personnes qui sortent de prison et ont vocation à y retourner, faisant de ces structures des centres de détention, dont les bâtiments comme le personnel sont inadaptés à la situation. Dès lors, comment expliquer l'effort financier accordé à ces structures, qui sera inefficace faute d'avoir au préalable repensé leur rôle en matière de politique de retour ?
Monsieur le ministre, vous étiez à Marseille avec Didier Migaud vendredi dernier, le 8 novembre, pour aborder la question de la lutte contre le narcotrafic, que vous érigez en grande cause nationale. Pouvez-vous me donner des éléments chiffrés sur les efforts réels qui seront consacrés par l'État à cette grande cause nationale ?
Mme Corinne Narassiguin. - Je m'associe aux questions de Guy Benarroche.
Monsieur le ministre, vous insistez sur la nécessité de tenir l'objectif de 3 000 places dans les CRA à l'horizon 2027, mais je n'ai toujours pas compris comment vous comptiez vous y prendre d'un point de vue budgétaire. Il me semble pour le moins optimiste de compter uniquement sur une accélération des procédures, sachant que nous avons avant tout un problème d'exécution des obligations de quitter le territoire français (OQTF), qui n'est pas seulement dû aux laissez-passer consulaires.
Les frais d'éloignement sont en baisse de 11,6 %, ce qui signifie qu'il y aura plus de personnes en CRA et moins de moyens pour les éloigner. Je ne comprends pas la logique.
Tous types d'hébergements confondus, la réduction capacitaire concernerait ensuite 9 000 places, alors que nous comptons déjà 6 000 personnes sans domicile fixe en France.
Compte tenu de l'incertitude géopolitique, il semble hasardeux de miser sur une éventuelle résolution de la guerre en Ukraine occasionnant une baisse de réfugiés ukrainiens. Par ailleurs, vous avez mentionné l'éloignement des ressortissants afghans ; nous devrions plutôt nous préparer à accueillir massivement des femmes afghanes. Le sous-financement de l'accueil demeure un énorme problème.
En ce qui concerne l'intégration, l'article 20 de la dernière loi relative à l'immigration, que vous avez largement inspiré, fait l'objet d'un problème d'application. Celui-ci impose des obligations de résultat en matière d'apprentissage de la langue française. Or les crédits de l'action n° 12, Intégration des étrangers primo-arrivants, du programme 104 baissent de 45 %. Les moyens d'enseignement du français étaient déjà insuffisants avec le durcissement des exigences linguistiques pour l'obtention d'un titre de séjour. Nous ne voyons pas comment nous pourrons atteindre les objectifs de cette loi.
Par ailleurs, vous avez annoncé vouloir supprimer la circulaire Valls. J'aimerais obtenir des explications à ce sujet, d'autant que nous attendons toujours l'actualisation de la liste des métiers en tension, qui est nécessaire pour appliquer la loi du 26 janvier 2024.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Monsieur le ministre, depuis plusieurs semaines, vous dites vouloir allonger de manière très importante la durée maximale de rétention administrative, pour la porter à 210 jours. Comment comptez-vous procéder avec un budget en baisse ? Peut-être ne pensez-vous pas le faire dès l'année prochaine ?
En ce qui concerne les OQTF, je vous repose la question que j'ai posée la semaine dernière à Othman Nasrou en séance publique, qui n'a pas su me répondre : pourquoi les préfectures ne demandent-elles pas la délivrance des laissez-passer consulaires dès lors que la personne concernée est détenue et fait l'objet, comme c'était le cas du meurtrier présumé de la jeune Philippine, d'une interdiction du territoire français (ITF) prononcée par une juridiction ?
Par ailleurs, la loi du 19 mai 2023 relative aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et portant diverses autres dispositions a autorisé jusqu'au 31 mars 2025 l'expérimentation, dans des circonstances très spécifiques, d'une vidéosurveillance algorithmique, sans reconnaissance faciale. Avant une éventuelle pérennisation, un comité d'évaluation, présidé par Christian Vigouroux, doit émettre ses conclusions d'ici au 31 décembre 2024.
J'ai noté que le préfet de police, faisant preuve d'une forme de clairvoyance qui ne m'étonne pas de sa part, a annoncé dès le 25 septembre que le bilan était positif et qu'il était favorable à une pérennisation de l'expérimentation. Vous en avez fait de même le 2 octobre. Permettez-moi donc de m'assurer que vous avez bien l'intention de tenir compte des conclusions du comité d'évaluation...
Enfin, comme vous recherchez des crédits, vous pourriez réaliser des économies sur le logiciel d'analyse vidéo Briefcam, qui a fait l'objet d'une inspection conjointe de l'inspection générale de l'administration (IGA) et de l'inspection générale de la police nationale (IGPN). Celui-ci a coûté 1,287 million d'euros alors qu'il n'a été utilisé que 177 fois par la police et 386 fois par la gendarmerie en huit ans. Une rationalisation des achats réalisés par le ministère de l'intérieur serait opportune.
M. Hussein Bourgi. - Monsieur le ministre, je vous remercie des informations que vous avez bien voulu nous communiquer.
Lorsque nous avons adopté la Lopmi, l'annonce de la création de plus de 200 nouvelles brigades de gendarmerie avait suscité un grand enthousiasme chez les maires. Depuis lors, des informations contradictoires circulent : selon certaines, une crise des vocations nous empêcherait de trouver des volontaires pour s'engager dans la gendarmerie ; selon d'autres, plus plausibles, les délais de formation des nouveaux gendarmes retarderaient leur déploiement.
À l'aune des nouvelles orientations budgétaires, l'enthousiasme a fait place à la perplexité. Les maires comme les gradés de la gendarmerie sont dans l'expectative et se demandent si le foncier réservé par les premiers servira un jour aux seconds. Il serait utile que vous fixiez un cap pour déterminer ce qui sera fait d'ici à la fin du quinquennat pour restaurer la confiance des différents acteurs, que je sens s'étioler sur le terrain.
Par ailleurs, année après année, et en particulier à l'occasion des grands incendies survenus il y a deux ans, vos prédécesseurs se sont engagés à augmenter nos capacités dans le domaine du matériel aérien tout en nous indiquant que nous devions travailler en bonne intelligence avec nos partenaires européens pour passer des commandes groupées. Combien de pays se sont-ils engagés à passer commande ? Pour acquérir combien d'engins ? Avez-vous l'espoir, à court ou moyen terme, que ces avions soient effectivement commandés ?
M. Christophe Chaillou. - Tout d'abord, monsieur le ministre, en ce qui concerne les centres de rétention administrative, je ne peux que me joindre aux propos de plusieurs de mes collègues. Dans mon département du Loiret, un centre récemment ouvert compte vingt places vacantes, à cause du manque de personnel. Vous avez raison de souligner les difficultés à convaincre des agents de rejoindre ces centres pour accomplir des missions pas nécessairement enthousiasmantes. En conséquence, de jeunes policiers sont mobilisés alors qu'ils seraient plus utiles dans le domaine public. Nous devons collectivement nous interroger sur l'adéquation entre les moyens que nécessitent les CRA et leur efficacité.
Ensuite, de nombreuses promesses ont été faites en matière d'immobilier pour les gendarmeries. Des bailleurs ont d'ores et déjà engagé des fonds et attendent, comme les élus, que des décisions fermes soient prises. J'ai en tête des exemples précis sur lesquels je vous transmettrai des informations.
Enfin, les loyers dus au titre des gendarmeries seront-ils comme promis versés en décembre ? Pour la commune de Dampierre-en-Burly, dans mon département, ils représentent 200 000 euros.
M. Bruno Retailleau, ministre. - Monsieur Daubresse, la trajectoire de la Lopmi était ambitieuse et croyez-moi, c'est déjà un tour de force de la respecter en 2025.
Vous connaissez bien les questions de logement. Pour les gendarmeries, je ne vois que des avantages à ce que nous trouvions des solutions innovantes. Aussi, j'ai demandé au nouveau directeur général de la gendarmerie nationale, le général d'armée Hubert Bonneau, d'y réfléchir en ne s'interdisant aucune piste, y compris en questionnant le recours à des partenariats public-privé ou encore à des solutions privées.
Vos propositions méritent d'être expertisées. Je n'ai aucune doctrine, aucun préjugé sur la question. Il est problématique que des gendarmes et leur famille soient parfois logés dans des casernes au niveau de confort insuffisant. Nous devons y réfléchir en profondeur et n'écarter aucune solution. Je demanderai au général Bonneau de vous contacter.
Monsieur Benarroche, la mission « Administration générale et territoriale de l'État » ne perd pas 300 agents ; nous allons même augmenter les effectifs au-delà d'une centaine de postes en 2025. Je me bats pour cela et je tiens absolument à obtenir gain de cause.
Sur la mission « Immigration, asile et intégration », la baisse des crédits de l'Ofii provient de la baisse des crédits européens, à hauteur de plus de 41 millions d'euros. Nous avons choisi de compenser cette baisse pour moitié en crédits de paiement pour 2025. Pour le reste, nous aiderons l'opérateur à trouver des solutions pour mener à bien ses missions. Je m'y suis engagé auprès de son directeur.
Sur la question de l'hébergement, je dois encore vous préciser que les occupations indues représentent 17 % des places disponibles. Il convient donc de les réduire.
Pour mieux intégrer, il faut lutter contre l'immigration irrégulière. Nous ne pouvons plus recevoir un demi-million d'étrangers par an - 327 000 primo-délivrances d'un titre de séjour, 137 000 demandeurs d'asile, 35 000 régularisations, auxquels s'ajoutent, selon les chiffres de mon ministère, 60 000 à 70 000 personnes en situation irrégulière -, soit l'équivalent d'une ville comme Lyon. Nous sommes dépassés par le nombre.
Lors de la réunion du dernier conseil Justice et Affaires intérieures, vingt-sept ministres de l'intérieur de gouvernements de tous bords, aussi bien conservateurs de droite que sociodémocrates de gauche, se sont tous exprimés et je n'ai senti aucune différence de perception sur l'immigration. En clair, la politique européenne en matière d'immigration fait désormais consensus, alors qu'elle provoquait jadis des divisions, en témoigne la lettre adressée aux États membres par Ursula Von der Leyen le 14 octobre dernier. Au reste, le consensus existe aussi en France, à en croire les enquêtes d'opinions et y compris parmi les électeurs de gauche.
Par ailleurs, nous avons abordé la question des contrats d'intégration républicaine. Nous allons produire un effort sans précédent sur le programme Agir - Accompagnement global et individualisé des réfugiés - pour accompagner individuellement 25 000 personnes vers l'emploi.
Sur l'intégration, 372 millions d'euros de crédits ont été consommés en 2024, et nous proposons 370 millions pour 2025. Comme moi, vous avez dirigé de grandes collectivités territoriales. Vous savez qu'il faut regarder ce qui est réellement dépensé pour comparer ce qui est comparable.
Les CRA sont bien sûr des centres fermés et il est hors de question d'assumer la politique des retours uniquement au travers de ces structures. Madame de La Gontrie, il convient d'anticiper davantage, ce qui n'est pas toujours simple. J'ai demandé un dialogue accru entre les procureurs et les juges des libertés.
Le délai de 210 jours ne s'appliquera pas à tout le monde. Je pense en particulier aux criminels sexuels en risque de récidive. Pour le cas du meurtrier de Philippine, la transmission du laissez-passer consulaire s'est jouée à un jour près, alors que le délai de 90 jours n'était pas écoulé. Voilà l'écueil que je veux éviter.
Pour ce qui concerne la lutte contre le narcotrafic, ceux qui connaissent la question savent qu'en matière de police judiciaire, un renfort de 25 enquêteurs est considérable. En outre, nous avons créé il y a quelques mois une unité d'investigation nationale pour tenir compte de l'aspect tentaculaire des enquêtes. La question des moyens est en quelque sorte subsidiaire : si les bonnes stratégies ne sont pas mises en oeuvre, tous les moyens du monde ne donneront aucun résultat. Et la stratégie que nous avons présentée avec mon collègue garde des sceaux permet de changer de cadre, d'avoir une véritable rupture. Face au narcobanditisme et à la criminalité organisée, nous voulons faire ce que nous avons fait contre le terrorisme, en modifiant un certain nombre de normes juridiques et en mobilisant de nouveaux outils. Certes, comme je l'ai indiqué à Marseille - la DZ Mafia est en train de polluer de nombreuses villes de France -, ce sera long : il faudra peut-être dix ans à quinze ans pour obtenir les résultats souhaités.
Madame Narassiguin, j'ai déjà évoqué les CRA. Souhaitez-vous que j'insiste sur un point en particulier ?
Mme Corinne Narassiguin. - Comment allez-vous financer les places supplémentaires et, surtout, traiter la question de l'éloignement avec des budgets en baisse ?
M. Bruno Retailleau, ministre. - Nous allons mobiliser Frontex. Récemment, deux vols groupés organisés par Frontex sont partis en Géorgie et en Albanie ; nous avions négocié les escortes avec les pays d'origine. Cette méthode change tout, et elle nous permettra de mieux contrôler le budget de l'éloignement.
Vous avez évoqué l'article 20 de loi du 26 janvier 2024. Sur le CIR, certains pays font de l'apprentissage en ligne. Othman Nasrou est en train de travailler sur le dossier.
Voilà quelques mois, nous nous sommes opposés sur le fait de savoir s'il fallait accorder un droit opposable à la régularisation. La majorité sénatoriale a très largement voté contre, de même que l'Assemblée nationale ensuite. Nous souhaitons donc remplacer la circulaire Valls, car le cadre législatif a changé.
D'une part, le champ d'application n'est plus le même : jadis, étaient concernés tous les métiers confondus ; aujourd'hui, il s'agit des métiers en tension. Des concertations sont menées dans chaque région ; les résultats nous en seront communiqués. La future circulaire devra prendre en compte cette nouvelle réalité.
D'autre part, le contrôle des conditions d'éligibilité diffère également. Auparavant, le préfet régularisait les personnes qui avaient un travail. Mais nous voulons démanteler des filières de travail clandestin. Il est trop facile de tirer les salaires vers le bas. Je rappelle qu'il y a pratiquement un demi-million d'étrangers en situation régulière au chômage. Je ne veux pas qu'il soit plus facile d'être régularisé en ayant trouvé un travail après être entré frauduleusement que de demander un titre de séjour parfaitement régulier. La circulaire Valls est donc obsolète. Le contrôle doit également porter sur l'intégration et le respect des principes républicains.
Madame de La Gontrie, les 210 jours en CRA ne concernent pas tous les publics. Il s'agit d'éviter les récidives en matière de crimes sexuels. Mais, en effet, lorsque nous gardons certaines personnes plus longtemps, cela bloque des places. C'est la raison pour laquelle il est nécessaire d'anticiper, notamment lorsqu'un juge des libertés et de la détention décide d'une libération. C'est le sens des accords bilatéraux que nous concluons avec les pays d'origine, en particulier des grandes plaques continentales d'où proviennent les flux migratoires - je pense à l'Afrique, à l'Asie, etc. -, ainsi qu'avec les pays de séjour ou de transit.
Je suis très favorable à la vidéosurveillance augmentée, en rappelant que la loi ne permet pas de l'utiliser pour procéder à de la reconnaissance faciale. Le droit prévoit sept ou huit critères d'utilisation. Je crois savoir que vous allez mettre en place une mission d'information sur le sujet.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Aux termes de la loi du 19 mai 2023 relative aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, il revient au Gouvernement de remettre un rapport avant le 31 décembre.
Mme Muriel Jourda, présidente. - Mais je vous confirme que nous avons décidé la mise en place une mission d'information, dont Marie-Pierre de La Gontrie et Françoise Dumont sont les rapporteurs. Elle rendra ses conclusions avant le mois de mars.
M. Bruno Retailleau, ministre. - Et, pour le Gouvernement, la commission Vigouroux rendra ses conclusions, je pense, d'ici à la fin de l'année.
J'ai participé voilà quelques semaines à un G7 des ministres de l'intérieur consacré aux outils numériques. D'autres pays démocratiques sont confrontés aux mêmes problèmes et font appel aux mêmes technologies que nous. Certes, nous avons un certain nombre de contraintes juridiques que d'autres n'ont pas. Essayons de voir comment tirer le meilleur parti de ces nouvelles technologies sans, évidemment, porter atteinte aux libertés publiques.
Monsieur Bourgi, sur les brigades de gendarmerie, il y a des informations contradictoires ; il faut un cap. J'ai demandé au général Bonneau de m'indiquer ce qui est tenable. Une fois que j'aurai ses conclusions, j'apporterai ma pierre à l'édifice, en informant par écrit les maires des engagements de l'État, des délais et du calendrier.
Sur les incendies, le problème est que l'Europe part, une fois de plus, en ordre dispersé. Les Canadairs sont hors de prix : plus de 50 millions d'euros. C'est une question de souveraineté en matière de sécurité civile. Dans les années 2000, Michel Barnier a été à l'initiative d'un embryon de travail communautaire en la matière. Je souhaite que la France fasse preuve de volontarisme et réunisse les ministres chargés de la sécurité civile, afin de pouvoir faire des commandes publiques groupées, par exemple en nous inspirant du pacte capacitaire.
Monsieur Chaillou, une somme de 1 milliard d'euros, dont 200 millions d'euros à 300 millions d'euros au titre des loyers de la gendarmerie, a été négociée et obtenue en loi de fin de gestion. N'hésitez pas à communiquer à mon cabinet le nom de la commune que vous avez évoquée. En tout état de cause, les loyers pourront être honorés. Je le rappelle, à l'origine, il y avait une sous-budgétisation ; puis, avec les jeux Olympiques et les événements survenus en Nouvelle-Calédonie, la cigale se trouva fort dépourvue quand la bise fut venue.
Mme Muriel Jourda, présidente. - Monsieur le ministre, nous vous remercions de vos réponses.
LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
Direction générale de la police nationale (DGPN)
M. Stéphane Aubert, adjoint au directeur des ressources humaines, des finances et des soutiens
M. Pierre-Ange Savelli, conseiller budgétaire et logistique
Mme Berbach Marie-Laure, sous-directrice à la sous-direction des finances et du soutien opérationnel (DRHFS)
Direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN)
M. le général de corps d'armée André Pétillot, major général de la gendarmerie nationale, adjoint au directeur général de la gendarmerie nationale
M. François Desmadryl, directeur des soutiens et des finances
Conseil supérieur de la fonction militaire de la gendarmerie nationale (CFMG) - Groupe de Liaison
Colonel Vincent Delamarre, secrétaire général adjoint du CFMG
Lieutenant-Colonel Ludovic Lainé, affecté au sein de l'état-major de la région Occitanie, membre à plein temps du CSFM
Capitaine Bertrand Loubette, commandant de l'unité opérationnelle Franco-Allemande à Metz, membre du CFMG
Major Érick Verfaillie, affecté au cabinet communication de la région Midi-Pyrénées à Toulouse, membre titulaire du CFMG, membre du CSFM
Major Vincent Charneau, affecté au cabinet communication de la région Pays de la Loire en qualité de conseiller concertation 3ème niveau, membre titulaire du CFMG
Major Sandrine Toulouze, affectée au cabinet communication de la région Bretagne à Rennes en qualité de conseiller concertation 3ème niveau, membre du CFMG
Major Olivier Dupin, affecté au sein de la région Auvergne-Rhône-Alpes en qualité de conseiller concertation 3ème niveau, membre du CFMG
Major Laurent Cappelaere, affecté au cabinet communication de la garde républicaine à Paris en qualité de conseiller concertation 3ème niveau, membre titulaire du CFMG
Major Fabienne Jeandot, affectée à la cellule prévention technique de la malveillance du groupement de gendarmerie des Vosges, membre du CFMG
Major David Duhayon, affecté au sein de la nouvelle agence du numériques des forces de sécurité intérieure, conseiller concertation 2° niveau de la filière des systèmes d'information et de communication (SIC), membre du CFMG
Adjudant-Chef Aline Rouy, affectée à la sous-direction de l'immobilier et du et du logement, membre CFMG
Adjudant-Chef Tony Malatia, affecté au cabinet de la région Hauts de France à Lille, en qualité de conseiller concertation 3ème niveau, membre CFMG
Alliance police nationale
M. Patrice Ribeiro, conseiller spécial
M. Éric Henry, conseiller spécial
Union nationale des syndicats autonomes - Fédération Autonome des Syndicats du Ministère de l'Intérieur (UNSA-FASMI)- UNSA-Police
M. Baaziz Chamsseddine délégué national responsable du secteur juridique
Mme Lecoq Ingrid, secrétaire nationale en charge de la province et des départements et régions d'outre-mer et collectivités d'outre-mer (Drom-Com)
Synergie-officiers
Mme Isabelle Trouslard, secrétaire générale adjointe
M. Yann-Henry Tiniere, conseiller technique
Fédération Syndicale du Ministère de l'Intérieur - Force Ouvrière
M. Franck Fievez, secrétaire national en charge des dossiers juridiques
M. Dominique Le Dourner, chargé du secteur des conditions de travail
Alternative police-CFDT
M. Benjamin Camboulives, délégué national
* 1 Source : commission des finances du Sénat, Rapport général provisoire relatif au PLF 2025, Tome I. Total hors charge de la dette et hors « Audiovisuel public » (La budgétisation des dépenses relatives au financement de l'audiovisuel public prévue à compter de 2025 correspond à un accroissement de périmètre)
* 2 Hors la mission « Engagements financiers de l'État », qui comporte essentiellement les crédits liés à la charge de la dette.
* 3 « Un nécessaire sursaut : sortir du piège du narcotrafic », rapport n° 588 (2023-2024) fait par Étienne Blanc au nom de la commission d'enquête du Sénat sur l'impact du narcotrafic en France et les mesures à prendre pour y remédier, présidée par Jérôme Durain, tome I, déposé le 7 mai 2024
* 4 Source : projet annuel de performances de la mission « Sécurité » annexé au projet de loi de finances pour 2025.
* 5 À raison de 6 militaires en moyenne par brigade mobile et 10 militaires en moyenne par brigade fixe.
* 6 À ce jour, le parc de la police nationale comporte 29 069 véhicules, dont 20 238 véhicules légers, 4 460 véhicules lourds et spécialisés et 4 821 véhicules deux roues.
* 7 L'immobilier de la gendarmerie nationale, rapport d'information n° 728 (2023-2024) fait par Bruno Belin au nom de la commission des finances du Sénat, déposé le 10 juillet 2024