B. UNE TELLE HAUSSE NE DOIT PAS EMPÊCHER LE SECTEUR DE MENER LES INVESTISSEMENTS NÉCESSAIRES À SA DÉCARBONATION
La hausse de la pression fiscale sur le secteur aérien se heurte au « mur d'investissements » qui se dresse devant la filière en matière de décarbonation. Outre la modération du trafic, deux vecteurs principaux pour la mener à bien d'ici 2050 ont été identifiés :
- l'utilisation d'aéronefs plus frugaux en énergie ;
- l'utilisation de carburants d'aviation durables (CAD) à la place du kérosène, conformément aux objectifs fixés par le règlement européen ReFuelEU Aviation du 18 octobre 2023.
La filière aéronautique française s'est fixé pour objectif de produire à partir de 2035 un avion ultrafrugal, qui utilisera 20 % à 25 % d'énergie en moins que la génération actuelle d'aéronefs. Le Président de la République s'est engagé en juin 2023 à ce que l'État abonde le Conseil pour la Recherche aéronautique civile (CORAC) de 300 millions d'euros par an d'ici 2027. Cependant, le projet de budget actuel prévoit d'abonder le CORAC de 230 millions d'euros seulement en 2025. Comme Airbus l'a indiqué au rapporteur pour avis, la filière subit « un effet ciseau avec une hausse des taxes (TSBA et IS notamment) et une baisse des crédits (baisse du budget CORAC et risque de baisse voire de suppression du CIR) qui ne nous permettrait pas de poursuivre nos objectifs de décarbonation ». Selon les représentants de la filière, il y aurait ainsi un risque de retard dans la mise en oeuvre des étapes du programme et d'impréparation des acteurs fournisseurs à répondre aux besoins des donneurs d'ordre, alors que les entreprises françaises et européennes font face à une concurrence mondiale particulièrement intense.
La commission a donc fait sienne la proposition du rapporteur pour avis de prévoir 70 millions d'euros supplémentaires de soutien public au CORAC (amendement n° II-252).
Les aéronefs de nouvelle génération, également moins bruyants, permettent de réduire les nuisances sonores aériennes, qui fragilisent l'acceptabilité sociale du transport aérien. La commission accueille donc favorablement la hausse du plafond de prise en charge des travaux d'insonorisation des logements situés à proximité des aéroports entreprise en décembre 2023 par le Gouvernement. Elle sera vigilante sur les effets de cette augmentation sur l'attractivité des dispositifs de prise en charge. Le reste à charge consécutif au niveau insuffisant du précédent plafond était en effet si élevé que les riverains des aéroports n'avaient pas les moyens de lancer les travaux d'insonorisation de leur logement.
Enfin, pour la commission, inciter les compagnies aériennes à acheter des carburants d'aviation durables (CAD) est un impératif. Leur usage est en effet la seule solution pour décarboner les vols de long-courrier. C'est pourquoi le règlement européen ReFuel EU aviation prévoit un usage croissant des CAD entre 2025 et 2050, échéance au-delà de laquelle ils devront représenter 70 % du carburant utilisé par les aéronefs.
Pour répondre à cet objectif ambitieux, la filière des CAD doit se structurer. Ces carburants sont, en outre, actuellement particulièrement onéreux. Ils coûtent en effet entre trois et quatre fois le prix du kérosène. Or, les efforts financiers demandés au secteur pourraient ralentir la trajectoire d'achats de CAD des compagnies alors que la filière de production peine encore à se constituer et a besoin de s'appuyer sur des perspectives garanties.
La commission a adopté un amendement du rapporteur pour avis proposant de créer un crédit d'impôt incitatif à l'achat de CAD.