EXAMEN DES ARTICLES
Article 9
Habilitation à légiférer par ordonnance pour
transposer une directive relative aux opérations
transfrontalières des sociétés commerciales
Cet article vise à habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnance en vue de transposer une directive qui réforme les régimes des fusions, scissions, apports partiels d'actifs et transferts de siège des sociétés commerciales.
Compte tenu des échanges avec le Gouvernement sur ses intentions quant aux modalités de transposition de la directive, qui vont dans le sens d'un renforcement des droits des parties prenantes à une opération transfrontalière, la commission a accepté le principe de la transposition par ordonnance et n'a, en conséquence, adopté que deux amendements dont le premier vise à raccourcir le délai d'habilitation afin de mieux se conformer au délai de transposition prévu par la directive et le second à limiter la marge de transposition du Gouvernement concernant deux aspects techniques.
Elle a adopté l'article 9 ainsi modifié.
La concrétisation du marché unique de l'Union européenne nécessite, au sein des États membres, une libre circulation des biens, des personnes, des services et des capitaux. L'article 54 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne précise que les sociétés, personnes morales, bénéficient également de la liberté d'établissement prévue à l'article 49 dudit traité, à l'instar des personnes physiques.
S'inscrivant dans la mise en oeuvre de cette liberté d'établissement, la directive (UE) 2019/2121 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2019 modifiant la directive (UE) 2017/1132 en ce qui concerne les transformations, fusions et scissions transfrontalières (ci-après « la directive ») vise à harmoniser le droit des États membres en matière de mobilité des sociétés au sein de l'Union européenne.
Cet instrument juridique n'est, toutefois, pas totalement novateur puisqu'il vient compléter un corpus juridique préexistant en droit interne depuis plusieurs années en matière de mobilité transfrontalière.
1. Le droit interne comprend déjà deux régimes de mobilité des sociétés au sein de l'Union européenne
1.1. La fusion transfrontalière prévue aux articles L. 236-25 et suivants du code de commerce
La directive 2005/56/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 2005 sur les fusions transfrontalières des sociétés de capitaux a été transposée en droit interne par la loi n° 2008-649 du 3 juillet 2008 portant diverses dispositions d'adaptation du droit des sociétés au droit communautaire et codifiée aux articles L. 236-25 du code de commerce.
La fusion de sociétés peut prendre plusieurs modalités. La première est l'opération par « laquelle une ou plusieurs sociétés transfèrent, par suite et au moment de leur dissolution sans liquidation, l'ensemble de leur patrimoine, activement et passivement, à une autre société préexistante - la société absorbante - moyennant l'attribution à leurs associés de titres ou de parts représentatifs du capital social de l'autre société et éventuellement d'une soulte en espèces » 18 ( * ) .
La deuxième hypothèse concerne l'opération de fusion dite « simplifiée » « réalisée par absorption d'une autre société dont les titres représentatifs du capital social sont détenus en totalité par la société absorbante, qui a pour effet de transférer [...] l'ensemble du patrimoine de la filiale à sa société mère » 19 ( * ) .
La troisième possibilité de fusion vise à la création d'une nouvelle société, deux ou plusieurs sociétés transférant l'ensemble de leur patrimoine à cette nouvelle entité.
Le régime de la fusion transfrontalière s'appuie, pour partie, sur le régime de la fusion entre sociétés françaises dont les règles sont prévues aux articles L. 236-1 et suivants du code de commerce puisque la directive du 2005/56/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 2005 renvoie abondamment vers la législation des États membres.
1.2. Le régime de la société européenne prévu aux articles L. 229-1 et suivants du code de commerce
La société européenne a été créée par le règlement (CE) n° 2157/2001 du Conseil du 8 octobre 2001 relatif au statut de la société européenne (SE). Il a été complété par la directive 2001/86 du 8 octobre 2001 visant à impliquer les salariés de la société européenne dans les décisions concernant la vie sociale. Ces instruments ont été intégrés en droit interne par la loi n° 2005-842 du 26 juillet 2005 pour la confiance et la modernisation de l'économie. La société européenne est également régie par certaines règles applicables aux sociétés anonymes 20 ( * ) .
La société européenne ne possède pas la nationalité de l'État dans lequel elle a son siège statutaire . Ce dernier peut être transféré à l'intérieur de l'Union européenne sans nécessiter une dissolution ou changement de nationalité 21 ( * ) .
Vingt ans après l'adoption du règlement n° 2157/2001 du 8 octobre 2001, l'Union européennes compte plus de 3 300 sociétés européennes 22 ( * ) . Cette structure juridique a notamment intéressé des grands groupes. Le capital social minimum pour créer une société européenne est de 120 000 euros 23 ( * ) , soit trois fois le montant du capital social minimum prévu pour la création d'une société anonyme.
En outre, la création d'une SE nécessite, d'une part, que le siège social et l'administration soient dans le même pays de l'Union européenne et, d'autre part, que la société candidate soit présente dans d'autres pays de l'Union européenne ou que les sociétés concernées par ce projet de SE soient régies par la législation d'au moins deux États membres 24 ( * ) .
Le régime de la société européenne est donc destiné, a priori , à des entreprises disposant déjà d'un minimum de ressources financières et d'une activité économique dans plusieurs pays de l'Union européenne, ce qui n'est pas nécessairement le cas des sociétés pouvant bénéficier de la directive (UE) 2019/2121 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2019 modifiant la directive (UE) 2017/1132 en ce qui concerne les transformations, fusions et scissions transfrontalière.
En ce sens, il est vraisemblable que cette directive facilitera davantage la mobilité des sociétés, et notamment celles de taille plus modeste, sous cette réserve que cette opération peut également s'avérer longue et coûteuse, à l'instar de la création d'une société européenne.
2. La directive (UE) 2019/2121 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2019 modifiant la directive (UE) 2017/1132 en ce qui concerne les transformations, fusions et scissions transfrontalière renforce la mobilité transfrontalière des sociétés tout en assurant la protection des acteurs de ces opérations
La directive comprend six articles mais son article 1 er crée deux chapitres (l'un portant sur les transformations et l'autre sur les scissions) au sein de la directive (UE) 2017/1132 du 14 juin 2017 relative à certains aspects du droit des sociétés. Au sein de ces nouveaux chapitres, l'article 1 er crée 45 nouveaux articles. Il remplace également quatre autres articles (123, 124, 127 et 130) du chapitre II de la directive (UE) 2017/1132 sur les fusions transfrontalières.
Compte tenu de l'ampleur de la directive et des délais d'examen contraints devant le Parlement, le rapporteur a fait le choix de traiter les dispositions les plus innovantes par rapport au droit interne ou qui appellent des observations particulières en vue de la transposition.
2.1. L'instauration de deux nouvelles modalités de mobilité transfrontalière des sociétés
La première nouveauté est la transformation transfrontalière . Selon le paragraphe 2 de l'article 86 ter de la directive , il s'agit d'une « une opération par laquelle une société, sans être dissoute ou liquidée ou mise en liquidation, transforme la forme juridique sous laquelle elle est immatriculée dans un État membre de départ en une des formes juridiques de l'État membre de destination, figurant à l'annexe II, et transfère au moins son siège statutaire dans l'État membre de destination, tout en conservant sa personnalité juridique ».
Ce mécanisme est encore inconnu en droit interne au sens strict . Toutefois, il se rapproche du régime de la société européenne, qui permet un transfert du siège social dans un autre État membre, à cette différence près que la transformation transfrontalière, sans dissolution ou liquidation, nécessite un changement de la forme juridique initiale de la société pour s'adapter à la législation de l'État membre de destination, alors que dans le cadre d'un changement d'État membre par une SE, sa forme juridique ne connait aucune modification.
Ainsi, l'opération de la transformation transfrontalière semble a priori plus complexe que le statut de la société européenne , mais elle permet de dépasser les exigences lourdes tenant à la création d'une SE, à savoir un capital social d'au moins 120 000 euros et une présence préalable dans plusieurs pays de l'Union européenne. De fait, une SARL ou une SAS (pour lesquelles aucun capital social minimal n'est requis à la création) pourrait effectivement procéder à une opération de transformation.
La seconde nouveauté instaurée par la directive est la scission partielle. Le paragraphe 4) b) de l'article 160 ter de la directive la définit comme l'opération par laquelle « une société scindée transfère une partie de ses éléments d'actif et de passif à une ou plusieurs sociétés bénéficiaires moyennant l'attribution aux associés de la société de titres ou d'actions dans les sociétés bénéficiaires, dans la société scindée, ou à la fois dans les sociétés bénéficiaires et dans la société scindée et, éventuellement, d'une soulte en espèces ne dépassant pas 10 % de la valeur nominale ou, à défaut de valeur nominale, d'une soulte en espèces ne dépassant pas 10 % de la paire comptable de ces titres ou actions » .
Cette scission partielle est effectivement nouvelle dans la mesure où la scission dite « totale » ou « complète » est déjà connue du droit interne. Le second alinéa de l'article L. 236-1 du code de commerce dispose en effet qu' « une société peut aussi, par voie de scission, transmettre son patrimoine à plusieurs sociétés existantes ou à plusieurs sociétés nouvelles ». Le dernier alinéa de cet article précise que « l es associés des sociétés qui transmettent leur patrimoine dans le cadre des opérations mentionnées aux trois alinéas précédents reçoivent des parts ou des actions de la ou des sociétés bénéficiaires et, éventuellement, une soulte en espèces dont le montant ne peut dépasser 10 % de la valeur nominale des parts ou des actions attribuées. »
Selon les informations transmises au rapporteur, la direction des affaires civiles et du Sceau (DACS) précise que le Gouvernement entend étendre ces dispositions internes aux scissions totales transfrontalières. De la même manière, il est envisagé de consacrer les scissions partielles dans le cadre des opérations nationales et transfrontalières. La DACS propose d'appliquer le régime de l'apport partiel d'actif (APA) au régime de la scission partielle transfrontalière.
L'apport partiel d'actif peut être défini comme « l'opération par laquelle une société fait apport à une autre (nouvelle ou déjà créée) d'une partie de ses éléments d'actifs et reçoit en échange, des titres émis par la société bénéficiaire des apports » 25 ( * ) . L'apport peut porter sur un ou plusieurs éléments isolés. Cette opération peut être soumise aux règles relatives aux fusions et scissions 26 ( * ) .
Schémas présentant deux hypothèses de scission partielle 27 ( * )
Source : direction des affaires civiles et du Sceau
2.2. Le renforcement de la protection des actionnaires
a) Une opération transfrontalière décidée par au moins deux tiers des actionnaires
Concernant le vote des associés sur l'opération transfrontalière, la directive prévoit une fourchette comprise entre deux tiers et 90 % des voix exprimées lors du vote, laissant ainsi une marge de manoeuvre importante aux États membres28 ( * ) . Par ailleurs, la directive n'harmonise pas le régime applicable aux fusions transfrontalières, pour lesquelles la majorité requise reste à la décision des États membres 29 ( * ) .
Selon les informations transmises au rapporteur par la DACS, il ressort des options de transposition envisagées que :
- pour la transformation, une majorité de 90 % des voix serait retenue pour la société anonyme (SA), la société en commandite par actions (SCA) et la société à responsabilité limitée (SARL) ;
- pour la fusion et la scission, serait retenue la majorité requise pour la modification des statuts, soit les deux tiers des voix exprimées par les actionnaires. La DACS précise que dans un souci d'harmonisation, la fusion se verrait appliquer la même règle que la scission et la transformation.
La SAS pouvant fixer librement la majorité dans ses statuts, elle devra être comprise entre deux tiers et 90 % des voix exprimées par les actionnaires.
Le rapporteur constate que les options envisagées par le Gouvernement sont proches, voire conformes, aux règles déjà applicables en droit interne pour des opérations similaires . En effet, par exemple, dès lors que la règle de l'unanimité s'applique pour le transfert de siège social hors de France 30 ( * ) , le seuil de 90 % des voix exprimées est proche de celui prévu par le droit interne.
b) Le droit de retrait comme garantie du droit des actionnaires
Le droit de retrait conféré aux associés fait partie des innovations apportées par la directive 31 ( * ) : ce mécanisme permet à un actionnaire de se retirer de la société à l'occasion d'une opération transfrontalière à laquelle il ne souhaite pas participer et il peut ainsi obtenir une soulte en espèces. Le montant de cette dernière, prévu dans le traité de fusion établi en vue du vote de l'assemblée générale, peut faire l'objet d'une contestation.
La directive donne aux États membres plusieurs options s'agissant des modalités et des conséquences de l'exercice du droit de retrait. À cet égard, les auditions menées par le rapporteur et les informations transmises par le Gouvernement sur ses intentions en vue de la transposition amènent le rapporteur à formuler les observations suivantes :
- en premier lieu, le rapporteur souligne que l'exercice effectif du droit de retrait par un actionnaire implique que celui-ci puisse disposer d'un délai de réflexion suffisant pour prendre une décision sur un éventuel retrait de la société . L'assemblée générale est également un moment important pour obtenir davantage d'informations sur le projet envisagé. Ainsi, obliger les actionnaires à exercer leur droit de retrait lors de l'assemblée générale qui statue sur l'opération transfrontalière, ou dans un temps subséquent très bref, ne permettrait pas d'atteindre cet objectif. En outre, et dans un souci d'harmonisation avec la règle en vigueur pour l'opposition d'un actionnaire au transfert du siège d'une SE 32 ( * ) , un délai d'un mois à compter de la tenue de l'assemblée générale semble pertinent ;
- en second lieu, à l'instar du choix envisagé par le Gouvernement concernant les actionnaires pouvant exercer un droit de retrait, le rapporteur est également favorable à ce que cette possibilité soit offerte aux actionnaires n'ayant pas de droit de vote . Autrement, il se verrait imposer une décision à laquelle ils n'ont aucune possibilité de s'opposer ;
- enfin, les personnes entendues par le rapporteur ont mis en avant l'utilité de confier le contentieux relatif à la contestation, par un actionnaire exerçant un droit de retrait, du montant de la soulte en espèces à la Cour d'appel de Paris compte tenu notamment de sa spécialisation en matière de droit des affaires à dimension internationale . Selon le rapporteur, ce choix se justifie également compte tenu du nombre, a priori , relativement faible d'opérations transfrontalières et de la nécessité de disposer d'une jurisprudence unifiée sur cette question.
2.3. La protection des salariés par l'information, la consultation et la participation
Deux articles de la directive se concentrent en particulier sur les droits des salariés dans le cadre des opérations transfrontalières. Ces dispositions consacrent, d'une part, un droit à l'information et à la consultation conformément à deux directives européennes anciennes 33 ( * ) .
D'autre part, la directive s'assure du droit à la participation des travailleurs au sein de l'organe de direction . Le principe est que la société issue de l'opération transfrontalière est soumise aux règles en vigueur dans l'État membre de destination 34 ( * ) . Cependant, plusieurs exceptions prévoient de maintenir le droit à la participation des travailleurs si, à l'issue de l'opération transfrontalière, ce droit n'était pas prévu par le droit de l'État de destination.
En matière de participation des travailleurs, la directive ne prévoit qu'une seule option de transposition pour les États membres. Il s'agit de l'hypothèse où un groupe spécial de négociation des salariés a été instauré et que l'issue mène à l'application des règles de participation des salariés en vigueur avant l'opération transfrontalière. Dans cette hypothèse, la directive laisse le choix aux États membres de limiter à un tiers la proportion de représentants des salariés au sein de l'organe de direction, s'ils représentent au moins un tiers de celui-ci .
La DACS n'envisage pas de lever cette option mais les discussions sur la transposition de la directive sont toujours en cours. Dès lors, dans la mesure où il s'agit d'une option défavorable au droit de participation des salariés, la commission a souhaité limiter la marge de manoeuvre du Gouvernement , en excluant, à l'initiative du rapporteur , cette option dans l'ordonnance ( amendement COM-33 ).
Au surplus, la protection de l'intérêt des salariés est également abordée dans le cadre du rapport de l'organe de direction35 ( * ) et au stade de la délivrance du certificat préalable (notamment à travers le spectre du contrôle de l'abus ou de la fraude, cf. 2.4 supra ) et lors du contrôle de légalité postérieur à l'opération 36 ( * ) .
Le rapport de l'organe de direction rédigé en vue de l'assemblée générale des actionnaires doit comprendre deux volets (l'un pour les associés et l'autre pour les salariés) 37 ( * ) . Ce rapport doit notamment mettre en avant « les aspects juridiques et économiques » de l'opération transfrontalière, tout en expliquant ses conséquences pour les salariés. Le paragraphe 5 des articles 86 sexies , 124 et 160 sexies de la directive prévoit plus spécifiquement que le rapport précise :
« a) les implications de la transformation transfrontalière sur les relations de travail ainsi que, le cas échéant, les mesures à prendre pour préserver ces relations;
« b) tout changement significatif dans les conditions d'emploi applicables ou dans les lieux d'implantation de la société;
« c) la manière dont les facteurs énoncés aux points a) et b) ont un effet sur des filiales de la société . »
Ce rapport doit être communiqué aux représentants des salariés ou, en leur absence, aux salariés eux-mêmes, au moins six semaines avant la tenue de l'assemblée générale. Ils peuvent procéder à des observations et ces dernières sont alors annexées au rapport. 38 ( * )
2.4. Le renforcement du contrôle de légalité des opérations transfrontalières
a) Le droit en vigueur pour les fusions transfrontalières
En droit interne, le régime des fusions transfrontalières prévoit déjà un contrôle de légalité . En premier lieu, il est prévu un contrôle préalable à la fusion. Les articles L. 236-6 et L. 236-29 du code de commerce demandent au greffier du tribunal de commerce dans le ressort duquel la société participant à l'opération est immatriculée de procéder un contrôle de légalité des actes et formalités préalables à la fusion. S'ils estiment qu'ils sont réguliers, il délivre une attestation de conformité .
En second lieu, l'article L. 236-30 du code de commerce prévoit un contrôle de légalité à l'issue de la fusion. Ce contrôle peut être exercé soit par un notaire soit par un greffier du tribunal de commerce dans le ressort duquel la société issue de la fusion est immatriculée. L'auteur du contrôle doit s'assurer de « la légalité de la réalisation de la fusion et de la constitution de la société nouvelle issue de la fusion ».
b) L'apport de la directive du 27 novembre 2019 : un contrôle focalisé sur les fraudes et abus éventuels
La directive du 27 novembre 2019 vise d'une part à étendre ces deux contrôles de légalité aux opérations de scission et de transformation transfrontalières 39 ( * ) . D'autre part, elle tend à renforcer l'étendue du contrôle de légalité réalisé préalablement à l'opération transfrontalière, y compris dans le cadre de la fusion transfrontalière 40 ( * ) .
Concrètement, l'autorité en charge du contrôle préalable de légalité doit s'assurer que l'opération transfrontalière n'est pas réalisée, conformément au droit national, « à des fins abusives ou frauduleuses menant ou visant à se soustraire au droit de l'Union ou au droit national ou à le contourner, ou à des fins criminelles ». L'auteur du contrôle peut solliciter les autorités compétentes en cas de soupçons pour obtenir davantage d'informations. En outre, alors que le délai pour la délivrance du certificat préalable à l'opération transfrontalière est de trois mois, ce délai peut être prolongé de trois mois supplémentaires lorsque des investigations complémentaires sont nécessaires. Le mécanisme de ce contrôle est identique aux trois opérations transfrontalières visées dans la présente directive.
Le rapporteur apporte une attention particulière au caractère potentiellement abusif ou frauduleux des opérations transfrontalières et ce d'autant plus que la directive du 27 novembre 2019 vise à faciliter la mobilité des sociétés au sein de l'Union européenne.
Les échanges avec le Gouvernement ont mis en exergue sa volonté de transposer fidèlement la directive s'agissant des dispositions relatives au contrôle préalable de légalité . Les autres personnes auditionnées n'ont pas émis de remarques particulières sur ce point.
Cependant, le rapporteur relève que la directive du 27 novembre 2019 ne définit pas les notions de « fraude » ou d' » abus ». Tout au plus, le considérant 35 de la directive évoque à titre d'exemples : « le contournement des droits des travailleurs, le paiement des cotisations de sécurité sociale ou les obligations fiscales », « la création de sociétés-écrans ou boîtes aux lettres visant à se soustraire au droit de l'Union ou au droit national ».
Comme cela a été rappelé par les personnes entendues lors des auditions, en droit interne, les notions de fraude ou d'abus sont communes aux différentes branches du droit et ne connaissent pas de définitions précises mais plutôt des précisions jurisprudentielles . Il s'agit toujours, pour chaque domaine du droit, d'une approche casuistique.
En outre, dans le cadre de l'adaptation du code de commerce au règlement (CE) n° 2157/2001 du 8 octobre 2001 instituant la SE 41 ( * ) , la notion d' « intérêt public » relative au droit d'opposition du procureur de la République au transfert d'une SE 42 ( * ) , le Sénat avait remplacé cette expression par des motifs clairement définis. Toutefois ce n'est pas l'option qui a été finalement retenue par le législateur qui a préféré conservé la notion d' « intérêt public » 43 ( * ) .
Toutefois, la Conférence nationale des greffiers des tribunaux de commerce (CNGTC) a fait part de la nécessité de disposer d'une définition précise des notions d'abus et de fraude dans l'objectif de pouvoir affiner leur contrôle de légalité tel qu'il est envisagé par la directive du 27 novembre 2019.
Selon les informations transmises par la DACS et la CNGTC, l'élaboration de lignes directrices est envisagée afin de permettre aux greffiers des tribunaux de commerce de disposer d'un référentiel commun pour la réalisation de leur contrôle de légalité . Dès lors, le rapporteur estime qu'il n'est pas nécessaire de prévoir une définition des notions d'abus et de fraude .
3. La position de la commission : un encadrement de la transposition de la directive dans un délai plus contraint et selon des modalités plus précises
3.1. Le principe de l'habilitation à légiférer par ordonnance accepté mais dans un délai plus respectueux du délai de transposition de la directive
Le Gouvernement demande à transposer la directive par la voie d'une habilitation à légiférer par ordonnance, conformément à l'article 38 de la Constitution. Dans son avis sur le projet de loi, le Conseil d'État relève que le Gouvernement justifie le recours à demande d'habilitation en raison, d'une part, de « la complexité et de la spécificité des mesures à prendre » et, d'autre part, « du retard pris dans la transposition de la directive » 44 ( * ) .
Pour autant, les auditions menées par le rapporteur ont mis en exergue le fait qu'un avant-projet d'ordonnance était en cours de finalisation par la DACS et que la transposition de la directive a déjà fait l'objet d'amples discussions et d'un rapport publié par un organisme spécialisé en droit des affaires 45 ( * ) .
En outre, le Gouvernement a attendu près de trois ans pour entamer la transposition de la directive alors que les États membres de l'Union européenne doivent transposer la directive au plus tard le 31 janvier 2023 . Ainsi, le dépôt tardif de ce projet de loi, en première lecture, au Sénat et le délai pour légiférer par ordonnance n'est pas compatible avec le délai de transposition prévu par le législateur européen.
Le rapporteur regrette également que le Parlement soit amené à se prononcer, dans des délais particulièrement contraints 46 ( * ) , sur une simple demande d'habilitation à légiférer par la voie d'une ordonnance au lieu d'un projet de loi comprenant les dispositions substantielles de transposition d'une directive qui concerne la vie économique, et en particulier la mobilité des sociétés au sein de l'Union européenne.
Il rappelle également que le pouvoir de légiférer est une prérogative du Parlement, essentielle pour la vie démocratique . Les habilitations à légiférer par ordonnance devraient donc être utilisées de manière parcimonieuse afin de permettre au Parlement d'exercer pleinement son office malgré la technicité du texte qui lui est transmis.
Dès lors, compte tenu du délai butoir pour transposer la directive et du fait qu'un avant-projet d'ordonnance est en cours de finalisation, la commission a adopté, à l'initiative du rapporteur, l'amendement COM-32 visant à réduire de six à trois mois le délai d'habilitation demandé par le Gouvernement .
3.2. Un encadrement limité mais nécessaire de la marge de manoeuvre du Gouvernement dans la transposition de la directive
Outre les recommandations faites par le rapporteur sur les options à retenir par le Gouvernement dans la transposition de la directive, il apparait nécessaire d'encadrer les choix du Gouvernement sur deux points particuliers.
En premier lieu, une opération transfrontalière, a priori bénéfique pour une entreprise, ne doit pas se faire au détriment du droit des salariés . En particulier, la participation de ces derniers au sein de l'organe de direction ne doit pas être modifiée en raison d'une fusion, d'une scission ou d'une transformation. Dans l'hypothèse où les salariés représentent plus du tiers des membres de l'organe de direction avant l'opération transfrontalière, il n'apparait pas justifié de réduire cette participation . Aussi la commission a-t-elle adopté l' amendement COM-33 du rapporteur interdisant au Gouvernement de réduire le niveau de cette participation.
En second lieu, il ressort des différentes auditions menées par le rapporteur ainsi que des informations qui lui ont été transmises qu'il serait pertinent que le contrôle préalable à l'opération transfrontalière soit effectuée par un seul acteur. La directive laisse un choix au législateur entre le notaire, le greffier ou toute autre autorité de contrôle 47 ( * ) . Pour autant, en droit interne, ce contrôle est déjà confié au greffier du tribunal de commerce dans le ressort duquel est immatriculée la société participant à l'opération 48 ( * ) . En outre, les greffiers des tribunaux de commerce, en leur qualité d'officiers ministériels, assurent une police juridique et économique des actes des sociétés . Cette compétence semble particulièrement utile à l'aune du renforcement du contrôle de légalité des opérations transfrontalières prévu par la directive.
Dans ces conditions, par l'amendement COM-33 du rapporteur , la commission a souhaité que le greffier du tribunal de commerce soit désigné comme seule autorité en charge de ce contrôle.
Par ailleurs, le rapporteur souligne l'importance de disposer d'une jurisprudence unifiée à l'échelle nationale dans l'hypothèse d'un contentieux relatif au certificat préalable à l'opération transfrontalière. En droit interne, la contestation des actes du greffier des tribunaux de commerce incombe au président du tribunal de commerce ou du tribunal judiciaire 49 ( * ) .
Cependant, compte tenu de la spécialisation de la Cour d'appel de Paris en matière de droit des affaires à dimension internationale, de l'existence d'une compétence exclusive en matière de contentieux relatif à l'opposition du procureur de la République en cas de transfert de siège d'une société européenne 50 ( * ) et du caractère circonscrit de ce contentieux, il apparait utile et pertinent de confier une compétence exclusive à la Cour d'appel de Paris en cas de contentieux relatif au certificat préalable à l'opération transfrontalière. Cette attribution de compétence au sein de la juridiction judiciaire relève du pouvoir réglementaire.
La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article 9 ainsi modifié .
Article 10
Sanction en
cas de pertes ramenant les capitaux propres à moins de
la moitié du capital social
L'article 10 du projet de loi vise à modifier la nature de la sanction prévue aux articles L. 223-42 et L. 225-248 du code de commerce, en cas de perte de la moitié du capital d'une société par actions, en remplaçant la dissolution judiciaire par une obligation d'apurer les pertes par une réduction du capital social à un minimum fixé par décret en Conseil d'État.
Le texte proposé prévoit que si la société ne procède pas à une augmentation de ses fonds propres ou une baisse de son capital social dans un délai de quatre exercices comptables à l'issue du constat des pertes, elle risque alors une dissolution judiciaire demandée par tout intéressé.
La modification proposée par le Gouvernement apparait opportune, d'une part, en raison de la marge de manoeuvre offerte aux États membres par l'article 58 de la directive (UE) 2017/1132 du 14 juin 2017 relative à certains aspects du droit des sociétés et, d'autre part, de la situation financière fragile des entreprises françaises qui courent un risque accru de dissolution judiciaire, à l'inverse de leurs concurrentes européennes soumises à une règle plus souple en cas de pertes importantes de leurs fonds propres.
En conséquence, la commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article 10 sans modification.
1. Le droit en vigueur : la perte des fonds propres à hauteur de la moitié du capital sanctionnée par la dissolution judiciaire
1.1. Le mécanisme de sanction en cas d'une diminution importante des fonds propres correspondant à la moitié du capital social
Les articles L. 223-42 et L. 225-248 du code de commerce prévoient qu'en cas de pertes ramenant leurs capitaux propres à moins de la moitié de leur capital social, les sociétés par actions peuvent faire l'objet d'une dissolution judiciaire. Ils précisent que les pertes doivent être constatées dans les « documents comptables » , c'est-à-dire à la date de clôture de l'exercice les faisant apparaitre.
Les pertes doivent s'apprécier à l'aune des notions de « capitaux propres » et de « capital social » mentionnées au premier alinéa des articles L. 223-42 et L. 225-248 du code de commerce. La notion de capital social correspond à la somme des apports faits par les associés lors de la création de la société. Il s'agit d'un montant nominal.
La notion de capitaux propres est définie comme « la somme algébrique des apports, des écarts de réévaluation, des bénéfices autres que ceux pour lesquels une décision de distribution est intervenue, des pertes, des subventions d'investissement et des provisions réglementées », selon l'article R. 123-191 du code de commerce.
Les origines du mécanisme de la sanction en cas de pertes financières importantes
Ce dispositif a été introduit par la loi du 24 juillet 1867. Si une société perdait plus des trois-quarts de son capital social, les associés devaient soit prononcer la dissolution de la société soit opter pour la continuation de l'activité. Dans cette seconde hypothèse, tout intéressé pouvait demander la dissolution de la société 51 ( * ) .
Les articles 68 (applicable aux sociétés à responsabilité limitée) et 241 (applicable aux sociétés anonymes) de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales, ont maintenu la sanction tout en l'aménageant. L'article 68 disposait qu' « en cas de perte des trois quarts du capital social, les associés décident, dans les quatre mois qui suivent l'approbation des comptes ayant fait apparaître cette perte, s'il y a lieu à dissolution anticipée de la société. Si la dissolution n'est pas prononcée à la majorité exigée pour la modification des statuts, le capital doit être immédiatement réduit d'un montant égal à la perte constatée. Dans les deux cas, la résolution adoptée par les associés est publiée selon les modalités fixées par décret. A défaut par le gérant ou le commissaire aux comptes de provoquer une décision ou si les associés n'ont pu délibérer valablement, tout intéressé peut demander en justice la dissolution de la société. » Ces dispositions ont été modifiées marginalement en 1983, 1986, 1994 et 2000, notamment en vue de rabaisser le seuil des pertes. Toutefois, la règle établie par le législateur en 1966 demeure encore très proche du droit en vigueur.
Le mécanisme de sanction des pertes financières importantes trouve notamment son fondement dans le fait que le capital social est une information économique connue de tous, en particulier des créanciers, partenaires et clients de la société. Cela peut donc être une donnée prise en compte lors de la création d'une relation économique avec une société par actions. En outre le capital social d'une société ne peut être réparti librement entre les associés, sauf en cas de dissolution et après satisfaction des créanciers. C'est donc une forme de gage pour ces derniers. 52 ( * ) Enfin, une diminution importante des fonds propres d'une société ne doit pas être confondue avec un état de cessation des paiements 53 ( * ) , situation qui doit mener à l'ouverture d'une procédure collective régie par le livre VI du code de commerce (articles L. 610-1 et suivants). La perte importante des fonds propres n'est, à l'inverse, qu'un symptôme d'une situation financière dégradée.
1.2. Un dispositif applicable aux sociétés par actions
Les articles L. 223-42 et L. 225-248 du code de commerce s'appliquent, respectivement, aux sociétés à responsabilité limitée (SARL) et aux sociétés anonymes (SA) . Ces dispositions sont également applicables, par renvoi, aux sociétés en commandite par actions (SCA) 54 ( * ) et aux sociétés par actions simplifiées (SAS) 55 ( * ) .
Ce dispositif semble, en pratique, davantage concerner les SA et les SCA dont le capital social minimum est de 37 000 euros 56 ( * ) . À l'inverse il n'existe plus de minimum légal pour créer une SARL 57 ( * ) ou une SAS 58 ( * ) dont le capital social est fixé par les statuts même si en pratique il ne peut pas être inférieur à un euro.
Par ailleurs, les sociétés qui font l'objet d'une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire, ou qui bénéficient d'un plan de sauvegarde ou de redressement judiciaire, sont exclues de ce mécanisme de sanction.
1.3. Les conséquences immédiates d'une perte importante des capitaux propres sur l'avenir de la société
Une fois les pertes constatées dans les documents comptables et après l'approbation des comptes ayant fait apparaître cette perte, il est demandé aux dirigeants de réunir une assemble générale extraordinaire dans un délai de quatre mois afin de se prononcer sur la dissolution anticipée de la société.
Deux hypothèses sont immédiatement envisageables :
- Soit les associés prononcent la dissolution de leur société lors de l'assemblée générale tenue dans le délai imparti ;
- Soit les associés ne prononcent pas la dissolution de la société. Ils ont alors jusqu'à la clôture du deuxième exercice suivant celui au cours duquel la constatation des pertes est intervenue , pour alternativement :
o réduire le capital social d'un montant au moins égal à celui des pertes qui n'ont pu être imputées sur les réserves ;
o ou reconstituer les capitaux propres à concurrence d'une valeur au moins égale à la moitié du capital social .
Si les associés font le choix de la continuité de leur société, outre la réduction du capital d'un montant au moins égal à celui des pertes, ils disposent de plusieurs modalités pour résorber la baisse de leurs fonds propres. Ils peuvent par exemple :
- engendrer des bénéfices ;
- procéder à une augmentation de capital de la société en nature ou en numéraire ;
- imputer des réserves sur les pertes ;
- obtenir des remises de dette 59 ( * ) .
Les articles L. 223-42 et L. 225-248 du code de commerce imposent de régulariser la situation financière dégradée « au plus tard à la clôture du deuxième exercice suivant celui au cours duquel la constatation des pertes est intervenue ». Autrement dit, la société dispose de l'exercice en cours et des deux exercices comptables suivants, soit deux ans après la constatation des pertes, comme en atteste une jurisprudence récente 60 ( * ) .
1.4. La dissolution judicaire en cas d'absence de vote des associés ou d'une incapacité à régulariser la situation financière de la société dans le délai imparti
a) L'obligation de prononcer la dissolution judiciaire
Le quatrième alinéa des articles L. 223-42 et L. 225-248 du code de commerce dispose que si les associés ne se sont pas prononcés sur la dissolution de la société dans un délai de quatre mois après la constatation des pertes importantes ou qu'ils n'ont pas régularisé la situation dans les deux exercices suivants la constatation des pertes ; « tout intéressé peut demander la dissolution en justice de la société ».
Une jurisprudence isolée a estimé que la règle prévue au quatrième alinéa des articles L. 223-42 et L. 225-248 du code de commerce est d'ordre public, de sorte que le juge n'a pas de pouvoir d'appréciation et doit donc prononcer la dissolution judiciaire si les conditions sont réunies 61 ( * ) .
Toutefois, le tribunal a la possibilité d'accorder un délai supplémentaire de six mois pour permettre à la société de régulariser la situation. Par ailleurs, si la société a régularisé la situation au jour où le tribunal statue, la dissolution judiciaire ne peut pas être prononcée.
b) Une dissolution judiciaire pouvant être demandé par « tout intéressé »
La dissolution judiciaire peut être sollicitée par « tout intéressé ». Cette notion, non définie par le législateur, fait peser un risque théorique de dissolution judiciaire sur la société . Selon l'acception de cette notion par la jurisprudence, le risque d'une action en justice est plus ou moins élevé.
En l'état des décisions rendues et citées par la doctrine, il apparaît que le demandeur de la dissolution peut, de manière assez évidente, être un actionnaire 62 ( * ) de la société. Une société concurrente 63 ( * ) peut également être considérée comme « tout intéressé » à la dissolution judiciaire d'une autre société, à condition qu'elle dispose d'un intérêt né et actuel au sens de l'article 31 du code de procédure civile 64 ( * ) . En revanche, la seule qualité de créancier 65 ( * ) d'une société ne semble pas suffisante à caractériser l'intérêt exigé par la loi pour demander sa dissolution.
2. Le dispositif proposé : la suppression d'une situation de « surtransposition » permettant d'assouplir la sanction en cas de pertes importantes des fonds propres d'une société
2.1. Une situation de « surtransposition » créant un risque économique pour les sociétés françaises
a) La « surtransposition » de la directive (UE) 2017/1132 du 14 juin 2017 relative à certains aspects du droit des sociétés
L'étude d'impact jointe au projet de loi justifie notamment la nécessité de modifier les articles L. 223-42 et L. 225-248 du code de commerce en raison d'une situation de « surtransposition » par rapport au droit de l'Union européenne.
La « surtransposition » peut être définie comme « l'adoption ou le maintien de mesures législatives ou réglementaires allant au-delà des exigences minimales d'une directive ». Cela peut concrètement se traduire de la manière suivante : « le fait d'exercer un choix entre plusieurs options ouvertes par la directive ou de décider d'utiliser ou non les possibilités de dérogation qu'elle autorise peut également conduire à une surtransposition, dans la mesure où ces choix peuvent créer des obligations plus strictes pour les destinataires de la norme » 66 ( * ) . Le sénateur, René Danesi ajoute, dans un rapport d'information relatif aux surtranspositions préjudiciables aux entreprises d'actes législatifs européens en droit interne, que « ce différentiel proprement national à la règle européenne [est] susceptible de créer une distorsion concurrentielle qui porte préjudice aux opérateurs économiques français ». 67 ( * )
Le Gouvernement soutient justement que la règle prévoyant la dissolution judiciaire en cas de pertes des fonds propres équivalent à la moitié de son capital social constitue une situation de « surtransposition » vis-à-vis de l'article 58 de la directive (UE) 2017/1132 du 14 juin 2017 relative à certains aspects du droit des sociétés.
Le texte européen impose la convocation d'une assemblée générale en cas de perte grave du capital social mais n'impose pas la dissolution de la société puisque le législateur national peut prévoir cette hypothèse ou « toute autre mesure » 68 ( * ) . Il dispose donc d'une marge de manoeuvre dans la transposition de cette règle.
Dès lors, en maintenant la dissolution judiciaire comme ultime sanction en cas de pertes graves des capitaux d'une société, le législateur national conserve une norme, plus sévère, que le droit européen n'impose pas.
b) Un risque de dissolution des sociétés françaises plus élevé que dans d'autres pays européens voisins
Les personnes entendues par le rapporteur ont fait valoir que la règle prévue aux articles L. 223-42 et L. 225-248 du code de commerce fait courir un risque certain de dissolution judiciaire aux sociétés françaises, à l'inverse de leurs homologues européennes qui seraient moins sujettes à un tel dispositif de leur droit national.
À titre d'exemple, l'Italie prévoit la dissolution de la société ou d'autres mesures (apurement du passif, transformation de la société) tandis que l'Allemagne, le Royaume-Uni (avant sa sortie de l'Union européenne) ou les Pays-Bas ne prévoient pas l'hypothèse d'une dissolution 69 ( * ) .
Ainsi, le droit interne placerait les sociétés françaises en situation de désavantage juridique par rapport à plusieurs États membres de l'Union européenne.
Le rapporteur relève que ce risque n'est pas seulement théorique puisqu'une société concurrente a pu être admise, par la jurisprudence, en qualité de demanderesse à la dissolution judiciaire d'une société n'ayant pas régularisé les pertes importantes de ses fonds propres 70 ( * ) .
2.2. Des facteurs conjoncturels affaiblissant la solvabilité des sociétés françaises
Tant l'étude d'impact du Gouvernement que les auditions menées par le rapporteur, ont mis en avant les difficultés financières rencontrées par les entreprises françaises en raison de la crise de la covid-19 et des conséquences de la guerre en Ukraine sur les prix de l'énergie et des matières premières.
Le Gouvernement s'appuie sur une étude de l'observatoire du financement des entreprises publiée en 2021 qui relève qu'il est « nécessaire de renforcer les fonds propres pour conforter la solvabilité des très petites entreprises (TPE) et petites et moyennes entreprises (PME) profitable sur le long terme mais fragilisées par une hausse de leur endettement [...] ». 71 ( * )
Les auditions du rapporteur ont également mis en avant que dans ce contexte économique dégradé, les grandes entreprises françaises, qui font face à des pertes importantes de leurs fonds propres, pourraient faire l'objet d'une demande de dissolution judiciaire par une société concurrente ou bien un actionnaire minoritaire.
Les personnes entendues ont pu souligner que le dispositif de dissolution en cas de pertes importantes des fonds propres est, dans une certaine mesure, en décalage avec la vie actuelle économique des entreprises . En effet, ces dernières sont financées en grande partie par des emprunts dont les échéances de remboursement s'étalent sur une période bien plus longue que deux ou quatre exercices comptables.
2.3. L'assouplissement de la sanction prévue en cas de perte des fonds propres
L'article 10 du projet de loi vise à assouplir le mécanisme de sanction prévu aux articles L. 223-42 et L. 225-248 du code de commerce dans l'hypothèse d'une perte de fonds propres à hauteur de la moitié du capital.
Sans supprimer la sanction d'une dissolution judiciaire, le dispositif proposé par le Gouvernement ajoute une nouvelle étape et un nouveau délai pour permettre à la société de régulariser sa situation financière.
En premier lieu et au plus tard à la clôture du deuxième exercice suivant celui au cours duquel la constatation des pertes est intervenue, la société doit :
- soit reconstituer ses capitaux propres à concurrence d'une valeur au moins égale à la moitié du capital social ;
- soit réduire son capital social du montant nécessaire pour que la valeur des capitaux propres soit au moins égale à la moitié de son montant.
En second lieu, avant la fin du quatrième exercice comptable suivant celui au cours duquel la constatation des pertes est intervenue, la société doit réduire son capital social jusqu'à un montant inférieur ou égal à un seuil fixé par décret en Conseil d'État, sauf si le capital est déjà en deçà de ce seuil.
En troisième et dernier lieu, si cette réduction du capital n'a pas été effectuée dans le délai imparti (soit environ quatre ans), alors tout intéressé pourra demander une dissolution judiciaire de la société. Néanmoins, si la réduction du capital a été effectuée mais que le niveau des fonds propres est toujours inférieur à la moitié du capital social par suite d'une augmentation du capital, l'action en dissolution ne pourra pas prospérer 72 ( * ) .
En définitive, ce projet de réforme maintient une sanction puisque les actionnaires se voient imposer, a minima, une réduction conséquente du capital social de leur société, l'objectif étant alors de les inciter à recapitaliser leur société . L'étude d'impact du Gouvernement souligne également que la réduction du capital social permet d'informer les tiers et les créanciers sur la réalité des capacités financières de la société avec laquelle ils contractent.
3. La position de la commission : une modification équilibrée tenant compte des difficultés financières des entreprises et de la souplesse offerte par le droit européen
Si le dispositif proposé par l'article 10 du projet de loi tend à remettre en cause une règle ancrée dans le droit des sociétés depuis plus d'un siècle, le rapporteur note toutefois que les conséquences économiques des crises récentes et les nouvelles modalités de financement des sociétés peuvent justifier d'apporter davantage de souplesse aux entreprises qui font face à une baisse importante de leurs fonds propres .
La modification proposée par le Gouvernement se justifie également - et surtout - à l'aune de l'article 58 de la directive (UE) 2017/1132 du 14 juin 2017 relative à certains aspects du droit des sociétés qui n'impose pas la dissolution judiciaire comme unique sanction d'une société éprouvant des pertes de capitaux. En effet, cette directive laisse une marge d'appréciation importante aux États membres de l'Union européenne dans cette situation . En maintenant le droit en vigueur, les entreprises françaises se trouveraient donc désavantagées vis-à-vis de leurs concurrentes européennes, qui pourraient d'ailleurs en profiter pour solliciter leur dissolution. Le rapporteur constate que la rédaction actuelle des articles les articles L. 223-42 et L. 225-248 du code de commerce peut constituer un cas de « surtransposition » qu'il est nécessaire de supprimer .
Enfin, les articles L. 223-42 et L. 225-248 du code de commerce, tels que modifiés par l'article 10 du projet de loi, apportent une réponse équilibrée à une situation de pertes économiques importantes d'une société tout en veillant à responsabiliser les actionnaires . En effet, s'ils ne reconstituent pas capitaux, ils se voient dans un premier temps dans l'obligation de réduire leur capital social à un minimum et dans l'hypothèse où il n'agirait pas, il risque alors de faire l'objet d'une de dissolution judiciaire.
La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article 10 sans modification .
Article 11
Création d'un mécanisme de
régularisation pour les opérateurs économiques sujets
à une exclusion de plein droit des procédures de passation des
marchés publics et des contrats de concession à la suite d'une
infraction pénale
L'article 11 du projet de loi complète la transposition, jugée partielle par une récente décision du Conseil d'État, des directives 2014/23/UE et 2014/24/UE relatives au droit de la commande publique, en étendant à certaines infractions pénales entraînant une exclusion de plein droit des procédures de passation des marchés publics et des contrats de concession le mécanisme de régularisation prévu par lesdites directives . Cette régularisation consiste à permettre aux opérateurs économiques condamnés pour ces infractions de ne plus être exclus des procédures de passation des marchés publics et des contrats de concession s'ils « démontrent » leur « fiabilité » en prenant des « mesures concrètes » de nature à prévenir toute nouvelle infraction ou faute.
La commission s'est prononcée en faveur de l'adoption de cet article 11 , modifié par l'amendement COM-30 présenté par son rapporteur, tendant à préserver l'effet dissuasif de ces sanctions. Conformément aux directives précitées, cet amendement vise à inscrire au sein des articles du code de la commande publique concernés le principe selon lequel les mesures de régularisation prises par l'opérateur économique afin de prévenir toute nouvelle infraction font l'objet, lorsqu'il est envisagé d'attribuer un nouveau marché public à cet opérateur économique, d'une évaluation tenant compte de la gravité de l'infraction commise .
1. L'exclusion des procédures de passation des marchés publics et des contrats de concession dans le droit de la commande publique
1.1. Le code de la commande publique prévoit des exclusions « de plein droit » des procédures de passation des marchés publics et des contrats de concession
Aussi bien pour les marchés publics que pour les contrats de concession, le code de la commande publique prévoit des motifs d'exclusion des procédures de passation des marchés publics et des contrats de concession pour certains candidats ayant précédemment commis des infractions ou des fautes avérées ou dont la candidature remettrait en cause la probité ou la bonne réalisation du marché, par exemple en risquant d'entraîner une situation de conflit d'intérêts.
Ces exclusions relèvent de deux catégories : elles s'imposent « de plein droit » 73 ( * ) ou sont « à l'appréciation de l'acheteur » 74 ( * ) .
La distinction entre ces deux catégories repose sur des considérations qui sont étrangères à la gravité des faits commis par les opérateurs économiques.
En effet, les exclusions de plein droit sont la conséquence de la commission d'une infraction ou de manquements qui ont été constatés par une personne autre que l'acheteur ou l'autorité concédante et qui sont intervenus en dehors de la procédure de passation du marché public. Cette personne extérieure peut être un juge, un service d'inspection ou encore une autre administration, notamment les administrations chargées du recouvrement des impôts, cotisations et contributions sociales.
À l'inverse, les exclusions à l'appréciation de l'acheteur reposent sur des faits qui sont constatés directement par l'acheteur ou l'autorité concédante au cours d'une procédure d'attribution ou qui ont été constatés par un acheteur ou une autorité concédante au cours de l'exécution d'un contrat de la commande publique.
Il résulte de cette catégorisation une divergence quant à la latitude des acheteurs . Dans le cas des exclusions de plein droit, l'acheteur ou l'autorité concédante ne fait que constater la présence d'une cause d'exclusion et l'absence de mesures de régularisation, lorsque celles-ci sont possibles. L'acheteur est donc tenu de se conformer à l'appréciation d'une autorité ou entité qui lui est extérieure.
En revanche, dans les cas d'exclusion à l'appréciation de l'acheteur, l'acheteur ou l'autorité concédante prend lui-même la décision de vérifier s'il y a lieu de prononcer une exclusion. C'est à lui d'apprécier, en le justifiant, si les éléments qui lui sont fournis peuvent entraîner une exclusion du candidat de la procédure de passation du marché.
1.2. Les articles L. 2141-1 et L. 3123-1 du code de la commande publique appliquent à une vingtaine d'infractions pénales une exclusion de plein droit des procédures de passation des marchés publics et des contrats de concession
Les articles L. 2141-1 et L. 3123-1 du code de la commande publique , que l'article 11 du présent projet de loi tend à modifier, sont respectivement relatifs aux marchés publics et aux contrats de concession.
Ces articles dressent une liste d'une vingtaine d'infractions donnant lieu , en sus des peines prononcées par le juge, à une exclusion des marchés publics et des contrats de concession.
Infractions listées aux articles L. 2141-1 et L. 3123-1 du code de la commande publique donnant lieu à une exclusion de plein droit des procédures de passation des marchés publics et des contrats de concession
Références |
Nature de l'infraction |
|
Articles 222-34 à 222-40 |
Code pénal |
Trafic de stupéfiants |
Articles 225-4-1 et 225-4-7 |
Traite des êtres humains |
|
Articles 313-1 et 313-3 |
Escroquerie |
|
Article 314-1 |
Abus de confiance |
|
Articles 324-1, 324-5 et 324-6 |
Blanchiment |
|
Articles 421-1 à 421-2-4 et article L. 421-5 |
Actes de terrorisme |
|
Article 432-10 |
Concussion |
|
Article 432-11 |
Corruption passive et trafic d'influence commis par des personnes exerçant une fonction publique |
|
Articles 432-12 à 432-13 |
Prise illégale d'intérêts par une personne exerçant une fonction publique |
|
Article 432-14 |
Atteintes à la liberté d'accès et à l'égalité des candidats dans les marchés publics et les concessions |
|
Articles 432-15 et 432-16 |
Soustraction et détournement de biens par une personne exerçant une fonction publique |
|
Articles 433-1 et 433-2 |
Corruption active et trafic d'influence commis par les particuliers |
|
Articles 434-9 et 434-9-1 |
Entraves à l'exercice de la justice (corruption et trafic d'influence) |
|
Articles 435-3, 435-4, 435-9 et 435-10 |
Corruption et trafic d'influence actifs à l'égard de l'administration publique et de la justice |
|
Articles 441-1 à 441-7 et article 441-9 |
Production, détention, délivrance et usage de faux |
|
Articles 445-1 à 445-2-1 |
Corruption passive et active de personnes n'exerçant pas une fonction publique |
|
Article 450-1 |
Participation à une association de malfaiteurs |
|
Articles 1741 à 1743 |
Code général des impôts |
Fraudes fiscales |
Article 1746 |
Entrave aux agents de l'administration fiscale |
|
Article 1747 |
Organisation d'un refus collectif de l'impôt |
Source : commission des lois du Sénat
Il s'agit exclusivement d' infractions de nature pénale , justifiant leur catégorisation parmi les exclusions de plein droit , l'administration contractante ne pouvant se substituer au juge pénal pour l'appréciation de ces peines d'une particulière gravité.
La commission d'une de ces infractions, une fois son auteur condamné définitivement par le juge pénal, entraîne par conséquent, et sans que le jugement ait besoin de le mentionner, l'interdiction, pour l'opérateur économique concerné, de soumissionner à toute procédure de passation des marchés publics et des contrats de concession pendant une durée de 5 ans à compter de la date du jugement définitif 75 ( * ) . En revanche, cette condamnation n'a pas d'implications sur les contrats en cours.
1.3. Les mesures d'exclusion de plein droit donnent lieu à des vérifications lors de la passation des marchés publics
Conformément à l'article R. 2143-3 du code de la commande publique, lors de la passation de tout marché public, les candidats sont tenus de fournir à l'administration contractante une attestation sur l'honneur disposant qu'ils ne se trouvent pas dans un des cas d'exclusion mentionnés par le code de la commande publique, incluant les infractions mentionnées aux articles L. 2141-1 et L. 3123-1 du même code.
Un candidat qui ferait une fausse déclaration pourrait encourir les peines prévues à l'article 441-1 du code pénal, pour faux ou usage de faux, ce qui, par voie de conséquence, entraînerait une exclusion de plein droit des procédures de passation des marchés publics et des contrats de concession.
Dans un second temps, l'acheteur s'assure de l'absence d'interdiction de soumissionner du ou des candidats auxquels il est envisagé d'attribuer le marché public par le biais de justificatifs que doivent lui transmettre l'attributaire pressenti.
Si un candidat ou un soumissionnaire se trouve dans un cas d'exclusion, s'il produit de faux renseignements ou documents, ou ne peut produire dans le délai imparti les documents justificatifs, les moyens de preuve, les compléments ou explications requis par l'acheteur, sa candidature est déclarée irrecevable et le candidat est éliminé , sur le fondement de l'article R. 2144-7 du code de la commande publique.
2. La transposition partielle des directives 2014/23/UE et 2014/24/UE relatives aux marchés publics et aux contrats de concession a entrainé un régime dual de régularisation pour les acteurs sanctionnés, sur lequel revient le présent projet de loi
2.1. La France n'a transposé que partiellement le mécanisme de régularisation prévu par les directives européennes afin de permettre aux opérateurs économiques sanctionnés de continuer à soumissionner
a) Les directives européennes prévoient que les opérateurs économiques exclus des marchés publics puissent démontrer leur « fiabilité » et soumissionner malgré leur condamnation
Les directives 2014/23/UE et 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil traitent respectivement du cadre européen régissant les contrats de concession et les marchés publics . À ce titre, elles orientent le code de la commande publique, qui a remplacé en 2019 le code des marchés publics.
Ces directives dressent, respectivement en leurs articles 38, paragraphes 4 et 5, et 57, paragraphes 1 et 2, une liste d'infractions devant obligatoirement entraîner, pour le contrevenant, une exclusion des procédures de passation des marchés publics et des contrats de concession dès lors que le jugement est définitif. Ces infractions, concordant en grande partie avec celles des articles L. 2141-1 et L. 3123-1 du code de la commande publique, sont les suivantes :
- la participation à une organisation criminelle ;
- la corruption ;
- la fraude ;
- les infractions terroristes ;
- l'incitation ou l'apologie du terrorisme ;
- le financement du terrorisme ;
- le blanchiment de capitaux ;
- le travail des enfants ;
- la traite des êtres humains ;
- les manquements aux obligations relatives au paiement d'impôts et taxes ou de cotisations de sécurité sociale établis par une décision judiciaire ayant force de chose jugée ou par une décision administrative ayant un effet contraignant.
Ces motifs d'exclusion obligatoire peuvent être complétés par les États membres d'autres motifs d'exclusion listés par les directives précitées, notamment relatifs aux « fautes professionnelles graves » remettant en cause « l'intégrité » de l'opérateur économique ou encore en cas de distorsion de concurrence ou de faillite de l'opérateur économique 76 ( * ) .
Ces directives prévoient parallèlement que si un opérateur économique exclu des procédures de passation des marchés publics et des contrats de concession fournit « des preuves afin d'attester que les mesures qu'il a prises suffisent à démontrer sa fiabilité malgré l'existence d'un motif d'exclusion pertinent » et que « ces preuves sont jugées suffisantes », il « n'est pas exclu de la procédure de passation des marchés » 77 ( * ) . Ce mécanisme de régularisation est également appelé « auto-apurement » dans le sens où il repose sur le volontarisme de l'opérateur économique sanctionné, les pouvoirs adjudicateurs n'intervenant que pour évaluer les mesures prises par celui-ci.
Les preuves demandées à l'opérateur économique ayant été sanctionné sont relatives au versement des indemnités en réparation du préjudice causé par l'infraction, à la clarification des faits et circonstances, à la collaboration active avec les autorités chargées de l'enquête et à la prise de mesures concrètes de nature technique et organisationnelle et en matière de personnel propres à prévenir une nouvelle faute. Les refus de prise en compte, par les autorités administratives, de ces mesures de régularisation font l'objet d'une décision motivée, tenant compte de la « gravité de l'infraction pénale ou de la faute ainsi que de ses circonstances particulières » 78 ( * ) .
b) En 2015 et 2016, les ordonnances de transposition de ces directives ont écarté le mécanisme de régularisation pour les infractions pénales mentionnées aux articles L. 2141-1 et L. 3123-1 du code de la commande publique
Les directives 2014/23/UE et 2014/24/UE précitées ont été transposées en droit interne par le biais des ordonnances n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics et n° 2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession.
Ces ordonnances de transposition ont inséré au sein du code de la commande publique 79 ( * ) le mécanisme de régularisation précédemment évoqué, mais pour une partie seulement des infractions et des fautes mentionnées par lesdites directives.
Ainsi, six articles du code de la commande publique prévoient, depuis l'entrée en vigueur de ces ordonnances, en 2016, la possibilité, pour les opérateurs économiques sujets à une exclusion des procédures de passation des marchés publics et des contrats de concession, de soumissionner malgré leur condamnation en démontrant leur fiabilité.
Il s'agit des articles L. 2141-2, L. 2141-4, L. 2141-5, L. 3123-2, L. 3123-4 et L. 3123-5 du code de la commande publique. Les infractions et fautes mentionnées par ces articles relèvent du non-acquittement des impôts, taxes, contributions ou cotisations sociales, de travail illégal 80 ( * ) tel que défini à l'article L. 8211-1 du code du travail, ou de méconnaissance de diverses dispositions du code du travail, telles que l'obligation quadriennale d'organiser une négociation sur l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
En revanche, dans une volonté de « moralisation » 81 ( * ) de la commande publique et afin de maintenir un effet dissuasif aux sanctions concernées, le Gouvernement de l'époque n'a pas intégré de dispositif de régularisation aux articles L. 2141-1 et L. 3123-1 du même code qui régissent les peines les plus graves , à l'instar de la traite des êtres humains ou de l'escroquerie ( cf . supra ), bien que celles-ci soient explicitement mentionnées par les directives précitées. Par conséquent, un régime dual de régularisation a de facto été créé , la possibilité de régulariser sa situation étant écartée pour les peines considérées comme les plus graves.
2.2. L'article 11 du présent projet de loi achève la transposition des directives 2014/23/UE et 2014/24/UE en généralisant le régime de régularisation des peines d'exclusion des procédures de passation des marchés publics et des contrats de concession
a) Le caractère incomplet de la transposition des directives européennes de 2014 a été reconnu par la justice administrative
Après avoir saisi la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) d'une question préjudicielle 82 ( * ) , le Conseil d'État a jugé, dans sa décision dite « Société Vert Marine » du 12 octobre 2020 83 ( * ) que la transposition de la directive 2014/23/UE relative aux contrats de concession et, par voie de conséquence, de la directive 2014/24/UE relative aux marchés publics « méconnaît » les objectifs fixés par lesdites directives. En effet, selon l'interprétation de la CJUE et du Conseil d'État, ces directives prévoient un dispositif général de régularisation qui s'applique indifféremment à l'ensemble des cas d'exclusion mentionnés par lesdites directives.
Ainsi, ces directives « s'oppose [nt] à une règlementation nationale qui n'accorde pas à un opérateur économique condamné de manière définitive pour l'une des infractions visées [par l'article 38 de la directive 2014/23/UE et l'article 57 de la directive 2014/24/UE] et faisant l'objet, pour cette raison, d'une interdiction de plein droit de participer aux procédures de passation de contrats de concession [et des marchés publics] la possibilité d'apporter la preuve qu'il a pris des mesures correctrices susceptibles de démontrer le rétablissement de sa fiabilité » .
Par conséquent, en l'état actuel du droit, la France fait face à un défaut de transposition du droit européen que l'article 11 du présent projet de loi tend à corriger.
b) L'article 11 du projet de loi généralise le mécanisme de régularisation à l'ensemble des cas d'exclusion prévus par les directives européennes
Afin de mettre en conformité le code de la commande publique avec le droit européen, l'article 11 du présent projet de loi complète les articles L. 2141-1 et L. 3123-1 du code de la commande publique en y insérant un dispositif de régularisation reprenant les termes des directives européennes et parfaitement identique à celui, en vigueur depuis 2016, des articles L. 2141-4 et L. 3123-4 du code de la commande publique.
Ainsi, pour toutes les peines mentionnées aux articles L. 2141-1 et L. 3123-1 du même code ( cf . supra ), l'exclusion de plein droit des procédures de passation des marchés publics et des contrats de concession ne serait plus applicable à tout opérateur économique qui démontre qu'il « a régularisé sa situation », qu'il « a réglé l'ensemble des amendes et indemnités dues », qu'il « a collaboré activement avec les autorités chargées de l'enquête » et qu'il « a pris des mesures concrètes de nature à prévenir la commission d'une nouvelle infraction pénale » . Ces conditions seraient cumulatives. Elles ne seraient néanmoins pas valables si le soumissionnaire a été explicitement condamné à une peine d'exclusion des marchés publics ou des contrats de concession inscrite au bulletin n° 2 de son casier judiciaire 84 ( * ) .
En outre, l'exclusion des procédures de passation des marchés publics et des contrats de concession ne serait pas applicable non plus en cas d'obtention d'un sursis, d'un ajournement du prononcé de la peine ou d'un relèvement de peine .
Ce faisant, à l'exception des articles L. 2141-3 et L. 3123-3 du code de la commande publique, relatifs aux opérateurs économiques en situation de liquidation judiciaire, de faillite personnelle ou de redressement judiciaire , le dispositif de régularisation prévu par les directives européennes précitées serait généralisé à l'ensemble des motifs d'exclusion de plein droit des procédures de passation des marchés publics et des contrats de concession.
Conformément aux 2° et 3° de l'article 11 du présent projet de loi, ces dispositions seraient applicables dans les territoires d'outre-mer régis par le principe de spécialité législative , en l'espèce Wallis-et-Futuna, la Polynésie française, la Nouvelle-Calédonie et les Terres australes et Antarctiques françaises.
3. La position de la commission : préserver l'effet dissuasif des peines d'exclusion de plein droit des procédures de passation des marchés publics et des contrats de concession
La commission a pris acte du caractère incomplet de la transposition des directives 2014/23/UE et 2014/24/UE précitées et de la nécessité d'étendre le mécanisme de régularisation aux infractions pénales mentionnées aux articles L. 2141-1 et L. 3123-1 du code de la commande publique.
Par l'adoption de l'amendement COM-30 de son rapporteur, elle a néanmoins souhaité maintenir autant que lesdites directives le permettent le caractère dissuasif des peines d'exclusion de plein droit des procédures de passation des marchés publics et des contrats de concession , en inscrivant au sein des articles du code de la commande publique concernés le principe selon lequel les mesures de régularisation prises par l'opérateur économique afin de prévenir toute nouvelle infraction font l'objet d' une évaluation, qui tient compte de la gravité de l'infraction commise. En lien avec l'article R. 2144-1 du même code, cette évaluation ne serait exigée que pour les seuls candidats auxquels il est envisagé d'attribuer le marché ou la concession.
Bien que reposant sur le volontarisme des opérateurs économiques condamnés à une peine entraînant l'exclusion de plein droit des procédures de passation des marchés publics et des contrats de concession, le mécanisme de régularisation prévu par le droit européen n'est en effet pas autonome pour autant puisqu'il est conditionné à une évaluation prenant en compte , comme le précisent lesdites directives tout comme l'amendement COM-30, « la gravité de l'infraction pénale ou de la faute » commise .
Selon les termes desdites directives, cette évaluation porte sur les « mesures concrètes » de nature à « prévenir » toute nouvelle infraction ou faute prises par l'opérateur économique souhaitant candidater à un marché public ou à un contrat de concession malgré sa condamnation. Cette évaluation peut aboutir au constat de « l'insuffisan[ce] » de ces mesures, à condition que celui-ci soit motivé et que la décision afférente soit transmise à l'opérateur économique concerné. Or, en droit interne, cette évaluation, dont le contour n'est pas défini, est considérée comme implicite. Dans les faits, sa systématisation par les acheteurs publics concernés n'est pas garantie, faute de lisibilité au sein du code de la commande publique .
En raison de la particulière gravité des infractions mentionnées aux articles L. 2141-1 et L. 3123-1 du code de la commande publique que l'article 11 du présent projet de loi complète, notamment la traite d'êtres humains, la commission a donc souhaité que soit davantage encadré le mécanisme de régularisation que ledit article 11 transpose en droit interne .
Elle appelle en outre le Gouvernement à préciser, dans la partie règlementaire du code de la commande publique, le contour, pour l'heure lacunaire, de cette évaluation qui participe à l'objectif de moralisation de l'accès à la commande publique.
La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article 11 ainsi modifié .
Article 17
Information des agents publics sur les
règles essentielles relatives à leurs fonctions
L'article 17 du projet de loi vise à introduire dans le code général de la fonction publique les dispositions de transposition de la directive (UE) 2019/1152 relative à des conditions de travail transparentes et prévisibles dans l'Union européenne . Il tend ainsi à créer un droit à l'information pour les agents publics entrant dans le champ d'application du code général de la fonction publique.
La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article sans modification .
1. Les dispositifs actuels d'information à l'attention des agents publics revêtent des formes multiples
En l'état du droit, les agents des trois versants de la fonction publique disposent d'informations relatives aux conditions d'exercice de leurs fonctions selon des modalités distinctes selon qu'ils aient le statut de fonctionnaire ou la qualité de contractuel.
1.1. Les fonctionnaires
La publicité des règles applicables à la situation individuelle des fonctionnaires est assurée par les trois moyens suivants :
- par leur publication au Journal officiel de la République française ;
- par leur publication dans des bulletins officiels ministériels ;
- par voie d'affichage, dans le respect des règles prévues par les articles L. 221-2 à L. 221-6 du code des relations entre le public et l'administration (CRPA) 85 ( * ) .
Sont ainsi concernées les informations relatives aux congés, au droit à la formation, au temps de travail ou aux modalités de cessation des fonctions.
En outre, les actes individuels affectant la carrière des fonctionnaires - c'est-à-dire, les actes de nomination, d'affectation et de prise en charge - sont notifiés par écrit aux intéressés . Conformément à l'article L. 221-8 du CRPA, les décisions individuelles expresses sont opposables aux agents concernés au moment où elles leur sont notifiées.
1.2. Les contractuels
Les décrets régissant les dispositions générales qui sont applicables aux agents contractuels énumèrent les mentions qui doivent obligatoirement figurer dans les contrats conclus .
Aux termes de l'article 4 du décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l'État, et de l'article 3 du décret n° 88-145 du 15 février 1988 relatif aux agents contractuels de la fonction publique territoriale, « le contrat précise l'identité des parties, sa date d'effet, sa durée, le poste occupé, le ou les lieux d'affectation ainsi que la catégorie hiérarchique, telle que définie à l'article L. 411-2 [du code général de la fonction publique], dont l'emploi relève », ainsi que « les conditions d'emploi et de rémunération et les droits et obligations de l'agent » ; conformément à l'article 4 du décret n° 91-155 du 6 février 1991 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de la fonction publique hospitalière, le contrat « détermine les conditions d'emploi de l'agent et notamment les modalités de sa rémunération. Il indique les droits et obligations de l'agent ».
Ainsi, les agents publics ont déjà accès, par différents moyens et supports, à une quantité importante d'informations concernant les conditions d'exercice de leurs fonctions, sans qu'un « droit à l'information » soit prévu en tant que tel par les dispositions actuelles du code général de la fonction publique.
2. L'article 17 du projet de loi vise à consacrer un droit à l'information pour les agents publics afin de transposer la directive (UE) 2019/1152 relative à des conditions de travail transparentes et prévisibles dans l'Union européenne
2.1. La directive (UE) 2019/1152 relative à des conditions de travail transparentes et prévisibles dans l'Union européenne devait être transposée par les États membres avant le 1 er août 2022
Abrogeant la directive 91/533/CE du 14 octobre 1991 relative à l'obligation de l'employeur d'informer le travailleur des conditions applicables au contrat ou à la relation de travail, la directive (UE) 2019/1152 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 relative à des conditions de travail transparentes et prévisibles dans l'Union européenne est entrée en vigueur le 31 juillet 2019 . Les États membres devaient adopter les mesures de transposition en droit interne au plus tard le 1 er août 2022 86 ( * ) .
Visant à améliorer la protection des travailleurs, « y compris ceux exerçant des formes d'emploi nouvelles et atypiques » 87 ( * ) , cette directive est applicable à l'ensemble des travailleurs de l'Union européenne, au sens du droit, des conventions collectives ou de la pratique en vigueur dans chaque État membre, et en tenant compte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne 88 ( * ) . Par conséquent, elle s'applique également aux agents publics travaillant dans les trois versants de la fonction publique.
Le cas particulier des vacataires et des apprentis
Les vacataires et les apprentis de la fonction publique ne sont pas concernés par la transposition de la directive (UE) 2019/1152 au bénéfice des agents de la fonction publique.
L'agent vacataire est un agent recruté pour accomplir une tâche précise, ponctuelle et limitée à l'exécution d'actes déterminés et rémunéré à la vacation, c'est-à-dire à la tâche ; à la différence de l'agent contractuel, le vacataire n'est donc pas recruté pour assurer un besoin permanent de l'administration.
En droit national, la catégorie des agents vacataires est expressément exclue du champ d'application des textes relatifs aux agents contractuels de droit public de la fonction publique de l'État et de la fonction publique territoriale.
En droit européen, la CJUE a jugé que « la caractéristique essentielle de la relation de travail est la circonstance qu'une personne accomplit, pendant un certain temps, en faveur d'une autre et sous la direction de celle-ci, des prestations en contrepartie desquelles elle perçoit une rémunération » 89 ( * ) ; or, les vacataires n'entrent pas dans le périmètre de cette définition.
Le contrat d'apprentissage ainsi que la convention tripartite (signée le centre de formation, l'employeur) annexée au contrat relèvent quant à eux du droit du travail .
Source : direction générale de l'administration et de la fonction publique
La transposition de cette directive au bénéfice des agents de la fonction publique ne concerne toutefois pas l'intégralité de ses articles.
D'une part, la directive précitée prévoit des exceptions totales ou partielles pour certaines catégories de travailleurs ; le sixième paragraphe de l'article 1 er de la directive dispose que « les États membres peuvent prévoir, en s'appuyant sur des motifs objectifs, que les dispositions du chapitre III 90 ( * ) ne doivent pas s'appliquer aux fonctionnaires, aux services d'urgence publics, aux forces armées, aux services de police, aux juges, aux procureurs, aux enquêteurs ou aux autres services chargés de l'application de la loi ».
D'autre part, le droit français existant est déjà conforme à certaines dispositions de la directive.
Ainsi, pour dix-neuf articles de la directive, la transposition est sans objet s'agissant de leur application aux agents publics . Il s'agit des articles relatifs aux définitions des horaires de travail, des heures et des jours de référence, ainsi que du rythme de travail ; à la période d'essai ; aux cumuls d'emplois ; à la prévisibilité minimale du travail ; aux contrats à la demande ; à la transition vers une autre forme d'emploi ; à la formation professionnelle ; aux conventions collectives ; au droit de recours ; à la protection contre le traitement ou les conséquences défavorables ; à la protection contre le licenciement et à la charge de la preuve ; aux sanctions ; ou encore à la non-régression.
En revanche, sept articles de la directive doivent faire l'objet d'une transposition pour s'appliquer aux agents de la fonction publique. Pour six d'entre eux 91 ( * ) , cette transposition repose uniquement sur un acte réglementaire (décret en Conseil d'État et arrêté), tandis qu' un seul article de la directive nécessite une disposition législative afin d'être transposé : l'article 4 , qui pose l'obligation pour les employeurs « d'informer les travailleurs des éléments essentiels de la relation de travail ».
Afin de transposer cette obligation d'information dans le droit interne, l'article 17 vise à créer, dans le code général de la fonction publique, un droit pour les agents publics à être informés des informations essentielles relatives à l'exercice de leurs fonctions.
2.2. L'article 17 du projet de loi tend à intégrer dans le code général de la fonction publique un droit à l'information des agents publics
L'article 17 du projet de loi vise à créer un nouvel article L. 115-7 au sein du chapitre V du titre I er du livre I er du code général de la fonction publique, qui prévoirait que « l'agent public reçoit de son employeur communication des informations et règles essentielles relatives à l'exercice de ses fonctions ».
L'intitulé du chapitre V du titre I er du livre I er du code général de la fonction publique verrait également son intitulé modifié en conséquence, pour intégrer ce nouveau « droit à l'information ».
Conformément au deuxième paragraphe de l'article 4 de la directive (UE) 2019/1152, les informations évoquées dans ce nouvel article L. 115-7 devraient comprendre au moins : l'identité des parties à la relation de travail ; le lieu de travail ; le titre, le grade, la qualité ou la catégorie d'emploi pour lesquels le travailleur est employé, ou bien la caractérisation ou la description sommaires du travail ; la date de début de la relation de travail ; dans le cas d'une relation de travail à durée déterminée, la date de fin ou la durée prévue de celle-ci ; le droit à la formation ; le droit aux congés payés ; les modalités de cessation de fonctions ou de fin de contrat ; le temps de travail ; ainsi que le droit à la protection sociale.
En application de l'article L. 9 du code général de la fonction publique 92 ( * ) , la liste des éléments qui seraient communiqués aux agents publics ainsi que les modalités de cette communication seraient déterminées par un décret en Conseil d'État . Comme l'indique l'étude d'impact du projet de loi, ce décret « renverra lui-même à un arrêté le soin d'établir les modèles de documents » 93 ( * ) qui seront remis par les employeurs aux agents publics.
D'après les informations transmises au rapporteur, il est envisagé d'édicter des textes communs aux agents relevant du code général de la fonction publique et aux personnels mentionnés aux 1° à 4° de l'article L. 6152-1 du code de la santé publique 94 ( * ) . Ces textes devraient être publiés au cours du premier semestre de l'année 2023 .
Comme l'indique le Conseil d'État dans l'avis rendu sur le projet de loi, le décret prévu pourra préciser que les agents qui étaient en fonction avant l'entrée en vigueur de la directive (UE) 2019/1152 devront présenter une demande à leur employeur afin de faire valoir le droit à l'information sur les conditions d'exercice de leurs fonctions 95 ( * ) .
Par ailleurs, le décret en Conseil d'État devrait également préciser les modalités de l'exercice, par les agents publics, d'un droit de recours en cas de méconnaissance de l'obligation d'information créée à l'article L. 115-7 du code général de la fonction publique.
S'appliqueraient les règles relatives au recours administratif préalable obligatoire ; si un agent public n'obtient pas le document d'information dans les délais qui seront prévus par l'arrêté en conformité avec l'article 5 de la directive 96 ( * ) , il devrait lui être possible de formuler une demande auprès de son administration afin de l'obtenir. Comme indiqué au rapporteur, un délai court sera alors imparti à l'administration pour répondre à la demande de l'agent. En cas de refus, ou en l'absence de réponse de l'employeur dans le délai imparti 97 ( * ) , l'agent pourra former un recours contentieux selon les règles de droit commun du contentieux administratif .
L'agent devra alors former une requête contre une décision explicite ou implicite de l'administration lui refusant soit la délivrance du document d'information, soit une indemnisation en réparation du dommage causé par le manquement à cette obligation.
Si l'agent demande uniquement l'annulation de la décision de l'administration lui refusant la délivrance du document d'information, le recours sera qualifié de recours pour excès de pouvoir .
En revanche, si l'agent demande l'indemnisation d'un préjudice, le recours sera qualifié de recours de « plein contentieux » ou de « pleine juridiction ». Dans cette hypothèse, le juge administratif pourra mettre à la charge de l'administration le paiement d'une indemnité en réparation du dommage causé par le non-respect de cette obligation.
3. Soulignant le retard pris dans la transposition de la directive (UE) 2019/1152, la commission approuve les dispositions de l'article 17 du projet de loi, tout en invitant à prêter attention aux mesures d'application à venir
3.1. La transposition urgente d'une disposition dont les conséquences précises pour les agents comme pour les employeurs publics devront être évaluées
Alors que la France a déjà dépassé de quatre mois le délai laissé aux États membres par le Parlement européen et le Conseil pour transposer en droit interne la directive (UE) 2019/1152, la commission juge l'article 17 du projet de loi bienvenu pour éviter les risques de recours en manquement introduit par la Commission européenne auprès de la Cour de justice de l'Union européenne 98 ( * ) .
Dans le même temps, le rapporteur souligne que la valeur ajoutée de ce nouveau droit résidera probablement davantage dans la simplification qu'il opère pour les agents publics, en leur donnant un accès plus facile et direct à des informations individualisées, que dans la nature des informations transmises en elles-mêmes, auxquelles les agents publics ont, dans l'ensemble, déjà accès en l'état du droit - au travers, certes, d'un ensemble composite de moyens d'information.
Le rapporteur rappelle que, à l'occasion de la présentation au Conseil commun de la fonction publique 99 ( * ) , le 8 novembre 2022, des dispositions de l'article 17 du projet de loi, les organisations syndicales se sont, dans leur majorité, montrées favorables à la création d'un droit à l'information 100 ( * ) ; les représentants des employeurs des trois versants de la fonction publique ont également voté en faveur du texte. Par ailleurs, les dispositions de l'article 17 ont également été soumises 101 ( * ) au Conseil national d'évaluation des normes (CNEN), qui a un émis un avis favorable le 3 novembre 2022 102 ( * ) .
Comme l'indique l'étude d'impact, « il reviendra à chaque service de ressources humaines de communiquer aux agents publics les informations requises par la directive » ; le coût lié à la mise en oeuvre du droit à l'information est dans le même temps évalué comme « nul ou marginal » par le Gouvernement, qui estime que la charge supplémentaire sera « limitée » et qu'elle « ne devrait pas nécessiter d'équivalents temps plein supplémentaires » 103 ( * ) . Le rapporteur n'en estime pas moins nécessaire d' évaluer précisément le coût et la surcharge de travail induits par cette disposition pour les employeurs publics des trois versants de la fonction publique, une fois les décrets d'application publiés.
En outre, le rapporteur invite également à prêter attention tant à la date d'édiction qu'au contenu des mesures réglementaires annoncées (décret en Conseil d'État et arrêté) afin de s'assurer de la bonne application de l'article 17 du projet de loi.
Enfin, le rapporteur précise que la disposition proposée s'appliquerait sur l'ensemble du territoire de la République aux agents relevant du code général de la fonction publique, si bien que ne seraient pas concernés les agents publics affectés en outre-mer auxquels le code général de la fonction publique ne s'applique pas de plein droit , à savoir, les agents relevant des employeurs publics locaux en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, d'une part, et les agents non titulaires de l'État et des circonscriptions territoriales de Wallis-et-Futuna, d'autre part.
Consciente que la priorité immédiate est à la transposition rapide de la directive, la commission souligne que l'introduction d'un droit à l'information devra néanmoins être prévue pour les collectivités d'outre-mer concernées lorsque des projets ou propositions de loi relatifs à ces collectivités seront examinés.
La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article sans modification .
Article 18
Application aux praticiens hospitaliers du
code général de la fonction publique
L'article 18 du projet de loi vise à rendre applicables aux personnels médicaux des établissements publics de santé les dispositions de transposition de la directive (UE) 2019/1152 relative à des conditions de travail transparentes et prévisibles dans l'Union européenne introduites à l'article L. 115-7 du code général de la fonction publique par l'article 17 du projet de loi.
Sur proposition du rapporteur , la commission a souhaité compléter les coordinations opérées par l'article 18 s'agissant des renvois au code général de la fonction publique, entré en vigueur le 1 er mars 2022, par des coordinations supplémentaires, afin d'assurer la lisibilité du droit.
La commission propose à la commission des affaires sociales d' adopter l'article ainsi modifié.
1. Les régimes juridiques applicables aux membres du personnel des établissements publics de santé
1.1. Le personnel des établissements publics de santé comporte six catégories différentes, relevant de régimes juridiques différents
Aux termes de l'article L. 6152-1 du code de la santé publique , le personnel des établissements publics de santé 104 ( * ) se répartit selon les six catégories suivantes, auxquelles s'appliquent des régimes juridiques différents :
- les agents relevant de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière 105 ( * ) ;
- les personnels enseignants et hospitaliers mentionnés à l'article L. 952-21 du code de l'éducation, soit les membres du personnel enseignant et hospitalier des centres hospitaliers et universitaires ;
- les personnels mentionnés à l'article L. 6147-9 du code de la santé publique, à savoir, les personnels en fonction au sein du service de santé des armées ;
- « des médecins, des odontologistes et des pharmaciens dont le statut, qui peut prévoir des dispositions spécifiques selon que ces praticiens consacrent tout ou partie de leur activité à ces établissements, est établi par voie réglementaire » ; c'est-à-dire des praticiens hospitaliers titulaires, recrutés par un établissement de santé après la réussite au concours national de praticien hospitalier 106 ( * ) ;
- « des médecins, des odontologistes et des pharmaciens recrutés par contrat dans des conditions déterminées par voie réglementaire », c'est-à-dire des praticiens recrutés par contrat ainsi que les assistants des hôpitaux ;
- et « des praticiens associés, exerçant sous la responsabilité directe d'un médecin, d'un odontologiste ou d'un pharmacien et qui participent à l'activité de médecine, d'odontologie ou de pharmacie, dont le statut est établi par voie réglementaire » ; ces praticiens, qui ne disposent pas du plein exercice, exercent sous le statut de praticien associé.
De ces différences de régime juridique découlent actuellement des variations importantes s'agissant de la nature des informations relatives à l'exercice des fonctions qui leur sont transmises, et des modalités de communication de ces informations.
Ainsi, les règles applicables à la situation individuelle des fonctionnaires des deux premières catégories de personnel des établissements publics de santé font l'objet d'une publication au Journal officiel de la République française, ainsi que dans des bulletins officiels ministériels ; de plus, les actes individuels affectant la carrière de ces fonctionnaires leur sont notifiés par écrit.
Les informations relatives à l'exercice des fonctions dans le cas des trois dernières catégories de personnel des établissements publics de santé revêtent quant à elles des formes variables.
Modalités d'accès des personnels des établissements publics de santé aux informations relatives à l'exercice des fonctions
Catégorie de personnel |
Nature des informations |
Base légale à la communication des informations |
Praticiens hospitaliers titulaires |
Le profil de poste précise, pour chaque poste vacant : 1. Le nom et les caractéristiques de l'établissement en termes d'activités et de capacités ; 2. La spécialité du candidat recherchée ; 3. Les compétences souhaitées, y compris les compétences complémentaires éventuelles ;
4. La position qu'occupera le praticien dans la structure,
notamment le pôle d'affectation et ses interlocuteurs internes et
externes ;
6. Les caractéristiques des fonctions ; 7. Les objectifs de l'établissement public de santé et de la structure d'affectation ; 8. Les moyens disponibles pour réaliser ces actions et atteindre ces objectifs. |
Articles R. 6152-4 et R. 6152-6 du code de la santé publique Article 3 de l'arrêté du 5 février 2022 fixant les modalités de publication des vacances de postes et les caractéristiques du profil de poste de praticien hospitalier |
Praticiens recrutés par contrat |
Le contrat précise : 1° Les titres de formation et qualifications professionnelles ; 2° Le motif de recrutement, la nature des fonctions occupées ainsi que les obligations de service incombant au praticien exprimées en demi-journées ou en heures lorsque l'activité médicale est organisée en temps continu, notamment en ce qui concerne sa participation à la continuité des soins ou à la permanence sur place ; 3° Le pôle ou le service d'affectation ; 4° La date de prise de fonction du praticien, la durée du contrat ainsi que, le cas échéant, la date à laquelle celui-ci prend fin et la durée de la période d'essai ; 5° La durée du préavis en cas de démission, de licenciement, de rupture anticipée ou en cas de non-renouvellement du contrat ; 6° L'indication du régime de protection sociale (régime général de la sécurité sociale et régime complémentaire de retraite de l'Ircantec) ; 7° Le montant des émoluments ainsi que des indemnités qui peuvent s'y ajouter ; 8° Les règles relatives aux droits et obligations des praticiens en tant qu'agents publics et les règles de déontologie. |
Article R. 6152-343 du code de la santé publique |
Assistants des hôpitaux |
Les informations relatives à la relation de travail sont évoquées dans différents articles du code. |
Articles R. 6152-501 à R. 6152-552 du code de la santé publique |
Praticiens associés |
Les conditions d'exercice sont déterminées par le décret cité. |
Décret n°2021-365 du 29 mars 2021 portant création du statut des praticiens associés |
Source : commission des lois à partir d'éléments transmis par la direction générale de l'offre de soins
1.2. La consécration d'un droit à l'information pour les agents publics que tend à prévoir l'article 17 du projet de loi ne vaudrait pas automatiquement pour l'ensemble des personnels des établissements publics de santé
Tout d'abord, il convient de préciser que les personnels en fonction au sein du service de santé des armées , étant régis par le statut général des militaires, n'entrent pas dans le champ d'application de la directive (UE) 2019/1152 relative à des conditions de travail transparentes et prévisibles dans l'Union européenne.
Les agents relevant de l'ancienne loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière se voient quant à eux appliquer les dispositions générales du code général de la fonction publique ; les personnels enseignants et hospitaliers mentionnés à l'article L. 952-21 du code de l'éducation sont également concernés par l'application d'un certain nombre de dispositions du code général de la fonction publique, dont le livre I er107 ( * ) .
Pour ces deux catégories, l'article L. 115-7 que tend à créer l'article 17 du projet de loi, s'appliquerait de plein droit , leur garantissant donc le droit à l'information découlant de la transposition de la directive (UE) 2019/1152 108 ( * ) .
Les dispositions du code général de la fonction publique ne sont en revanche pas applicables de plein droit aux trois dernières catégories énoncées par l'article L. 6152-1 du code de la santé publique : seules certaines d'entre elles ont vocation à l'être, et uniquement en vertu des renvois exprès effectués par l'article L. 6152-4 du code de la santé publique aux dispositions du code général de la fonction publique.
Ainsi, les personnels médicaux des établissements publics de santé qui ne sont pas régis par le code général de la fonction publique ne pourraient pas bénéficier automatiquement du droit à l'information que tend à créer l'article 17 du projet de loi.
2. L'article 18 du projet de loi vise à rendre applicable aux personnels médicaux des établissements publics de santé le droit à l'information qui serait créé à l'article L. 115-7 du code général de la fonction publique
L'article 18 du projet de loi tend à rendre applicable aux personnels mentionnés aux 1° à 4° de l'article L. 6152-1 du code de la santé publique, c'est-à-dire aux personnels médicaux des établissements publics de santé qui ne sont pas régis par le code général de la fonction publique, l'article L. 115-7 du code général de la fonction publique que vise à créer l'article 17 du projet de loi.
En conséquence, le droit à l'information que prévoit de créer l'article 17 du projet de loi afin de transposer la directive (UE) 2019/1152 bénéficierait également à ces personnels-là.
Seraient également concernés les praticiens hospitaliers titulaires et les praticiens contractuels travaillant dans des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes , ainsi que les assistants des hôpitaux travaillant dans ces mêmes établissements 109 ( * ) .
Le contenu et les modalités de ce droit à l'information seraient précisés par un décret en Conseil d'État et un arrêté , qui pourraient être communs aux agents de la fonction publique et aux personnels mentionnés aux 1° à 4° de l'article L. 6152-1 du code de la santé publique 110 ( * ) ; par ailleurs, comme indiqué au rapporteur, le ministère de la santé prévoit d'élaborer une « fiche de communication » qui viendrait à l'appui du décret et de l'arrêté évoqués, afin d'accompagner les établissements employeurs dans la mise en oeuvre de cette nouvelle obligation.
En outre, l'article 18 actualise les renvois aux lois statutaires de la fonction publique présents à l'article L. 6152-4 du code de la santé publique, en remplaçant les références à la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et à la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière par les références aux dispositions codifiées dans le code général de la fonction publique , entré en vigueur le 1 er mars 2022.
3. Approuvant l'application expresse, aux personnels médicaux des établissements publics de santé, du droit à l'information, la commission a souhaité compléter l'actualisation des références aux dispositions codifiées dans le code général de la fonction publique
La commission juge pertinente la modification de l'article L. 6152-4 du code de la santé publique que propose l'article 18 du projet de loi afin de faire bénéficier les personnels médicaux des établissements de santé publique ne relevant pas de plein droit des dispositions du code général de la fonction publique, du droit à l'information que tend à créer l'article 17 du projet de loi.
Dans son avis rendu le 7 novembre 2022, le Conseil supérieur des personnels médicaux, odontologiques et pharmaceutiques 111 ( * ) s'est, du reste, prononcé en faveur de cette disposition.
Par ailleurs, la commission a estimé cohérent de poursuivre l'actualisation , dans le titre V du code de la santé publique, des références aux anciennes lois statutaires de la fonction publique du 13 juillet 1983 et du 9 janvier 1986 112 ( * ) ; aussi a-t-elle adopté l'amendement COM-31 rect. du rapporteur , qui procède aux actualisations complémentaires de ces références afin d'assurer l'objectif d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi 113 ( * ) .
Enfin, le rapporteur rappelle que le code de la santé publique ne s'applique pas de plein droit en Polynésie française, ni dans les Îles Wallis et Futuna, ni en Nouvelle-Calédonie ; le domaine de la santé relève en effet, selon les statuts de chaque collectivité, de leurs compétences propres. En conséquence, la disposition proposée à l'article 18 ne pourrait s'appliquer dans ces collectivités-là.
De la même façon que pour l'article 17, la commission met par conséquent en avant la nécessité de prévoir ultérieurement l'application des dispositions de l'article 18 dans les collectivités d'outre-mer où le code de la santé publique ne s'applique pas de plein droit.
La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article ainsi modifié .
Article 25
Actualisation des fondements
juridiques européens des demandes de coopération des
services de l'aide sociale à l'enfance
Cet article vise à assurer la coordination du dernier alinéa de l'article L. 221-3 du code de l'action sociale et des familles (CASF) avec les articles 79 à 82 du règlement (UE) 2019/1111 du Conseil du 25 juin 2019 relatif à la compétence, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale, ainsi qu'à l'enlèvement international d'enfants (dit « Bruxelles II bis refonte »).
Ce règlement est entré en application le 1 er aout 2022 et remplace le règlement (CE) 2201/2003 du 27 novembre 2003 sur la compétence, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale dit « Bruxelles II bis ».
Dans la mesure où le Gouvernement propose une mise à jour de l'article L. 221-3 du CASF à l'aune de la législation européenne nouvellement applicable, la commission a adopté l'article 25 sans modification.
1. Le droit en vigueur : un mécanisme de coopération européenne des services départementaux d'aide sociale à l'enfance fondé sur le règlement « Bruxelles II bis »
1.1. Une disposition législative à l'initiative du Sénat
Le dernier alinéa de l'article L. 221-3 du code de l'action sociale et des familles (CASF) permet la coopération européenne 114 ( * ) ou internationale 115 ( * ) des services de l'aide sociale à l'enfance départementaux par l'intermédiaire du ministère de la justice en sa qualité d'autorité centrale.
Cette disposition a été insérée par l'article 8 de la loi n° 2016-297 du 14 mars 2016 relative à la protection de l'enfance. Il s'agit d'une initiative du Sénat adoptée par amendement en première lecture en séance publique mais dans une rédaction différente. L'amendement a ensuite été supprimé par l'Assemblée nationale en seconde lecture puis par la commission des affaires sociales du Sénat en seconde lecture. Toutefois lors des débats en séance publique du Sénat, lors d'une nouvelle lecture, une version autrement rédigée de l'amendement a finalement été adoptée. La suite de la navette parlementaire n'a apporté aucune modification à la version définitive de l'article 8 de la loi n° 2016-297 du 14 mars 2016 relative à la protection de l'enfance.
Par ailleurs, l'article L. 221-3 du CASF prévoit également la coopération entre les services d'aide sociale à l'enfance des conseils départementaux en cas de changement de domicile d'une famille bénéficiaire d'une prestation sociale à l'enfance (non financière) ou d'une mesure judiciaire de protection de l'enfance.
1.2. Le contenu du règlement « Bruxelles II bis » relatif aux demandes de coopération des services d'aide sociale à l'enfance
Les demandes européennes doivent être fondées sur les articles 55 et 56 du règlement (CE) n° 2201/2003 du 27 novembre 2003 sur la compétence, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale.
Les articles 55 et 56 du règlement « Bruxelles II bis »
Les articles 55 et 56 de ce règlement s'insèrent dans le chapitre IV portant sur la coopération entre les autorités centrales en matière de responsabilité parentale.
L'article 55 vise la coopération dans le cadre d'affaires spécifiques à la responsabilité parentale. Il s'agit d'une coopération entre autorités centrales, à la demande d'une autorité centrale d'un État membre ou du titulaire de l'autorité parentale. Aux termes de cette disposition, les autorités centrales prennent, directement ou par l'intermédiaire des pouvoirs publics ou d'autres organismes, toute mesure appropriée pour :
- recueillir et échanger des informations (sur la situation de l'enfant, sur toute procédure en cours ou sur toute décision rendue concernant l'enfant) ;
- fournir des informations et une assistance aux titulaires de la responsabilité parentale qui demandent la reconnaissance et l'exécution d'une décision sur leur territoire ;
- faciliter la communication entre les juridictions ;
- fournir toute information et aide utiles pour l'application par les juridictions du placement d'un enfant dans un autre État membre ;
- faciliter la médiation parentale.
L'article 56 fixe un régime au placement de l'enfant dans un autre État membre. Dans l'hypothèse où le placement d'un enfant est envisagé dans une famille d'accueil ou un établissement situé dans un autre État membre, la juridiction doit consulter au préalable l'autorité centrale de l'État de destination si l'intervention d'une autorité publique y est prévue pour ce type de placement. La décision de placement ne peut être prise dans l'État membre requérant que si l'autorité compétente de l'État requis a approuvé le placement.
1.3. La mise en oeuvre du mécanisme de coopération internationale par le ministère de la justice, autorité centrale
En pratique, les demandes de coopération des autorités étrangères sont adressées aux autorités centrales françaises compétentes . En l'occurrence, le département de l'entraide, du droit international privé et européen (DEDIPE) de la direction des affaires civiles et du Sceau (DACS) est l'autorité centrale désignée pour la mise en oeuvre du règlement « Bruxelles II bis ». Cependant, concernant les placements transfrontières, c'est la direction de la protection judiciaire de la jeunesse (DPJJ) qui est compétente. Les deux directions précitées transmettent les demandes aux services d'aide sociale à l'enfance départementaux compétents territorialement.
Selon l'étude d'impact du projet de loi et l'audition menée par le rapporteur, en 2021, la DACS a été saisie de 239 demandes de coopération européenne et internationale en matière de responsabilité parentale 116 ( * ) . Il est précisé qu' « une part importante de ces demandes aboutit à la saisine des services de l'aide sociale à l'enfance ».
Les services français de l'aide sociale à l'enfance peuvent notamment être sollicités aux fins d'établir des rapports sur la situation de mineurs se trouvant dans leur département ou encore d'évaluer les capacités d'accueil et d'hébergement des personnes auprès desquelles le placement de mineurs est envisagé par une juridiction ou une autorité compétente étrangère.
La DACS indique qu'au sein de l'Union européenne, les demandes de coopération concernant la protection des mineurs visent principalement les pays suivants : Allemagne, Belgique, Espagne, Portugal, Italie et Roumanie.
2. Le contenu du projet de loi : l'adaptation du droit interne à l'entrée en vigueur du règlement « Bruxelles II bis refonte »
2.1. Une référence aux articles 79 à 82 du règlement « Bruxelles II bis refonte »
L'article 25 du projet de loi vise à insérer, au dernier alinéa de l'article L. 221-3 du code l'action sociale et des familles, une référence aux articles 79 à 82 du règlement (UE) 2019/1111 du Conseil du 25 juin 2019 relatif à la compétence, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale, ainsi qu'à l'enlèvement international d'enfants (refonte).
Le Conseil d'État n'a formulé aucune observation particulière concernant cet article 117 ( * ) .
2.2. Le contenu des articles 79 à 82 du règlement « Bruxelles II bis refonte »
Ces articles s'insèrent dans le chapitre V relatif à la coopération en matière de responsabilité parentale. L'article 79 précise les missions qui incombent aux autorités centrales requises en reprenant la liste énumérée à l'article 55 du règlement « Bruxelles II bis » , en y ajoutant notamment l'aide à localisation d'un enfant situé dans l'État membre requis.
L'article 80 vise la collecte et l'échange d'informations dans le cadre d'une demande de coopération . L'autorité centrale de l'État membre requis fournit ou établit un rapport sur la situation de l'enfant, toute procédure en cours ou décisions prises en matière de responsabilité parentale concernant l'enfant. Elle peut également demander à la juridiction ou l'autorité compétente d'examiner l'opportunité de prendre les mesures visant à protéger la personne de l'enfant ou ses biens. En cas de grave danger, si la résidence de l'enfant a été transférée dans un autre État membre, la juridiction ou l'autorité compétente de l'État membre de départ en informe les autorités de l'État membre d'arrivée de l'enfant.
L'article 81 prévoit une assistance dans la mise en oeuvre des décisions en matière de responsabilité parentale lorsqu'elles ont été rendues dans un autre État membre .
Enfin, l'article 82 traite du placement d'un enfant dans un autre État membre, à l'instar de l'article 56 du règlement « Bruxelles II bis ». C'est un mécanisme différent qui est prévu, puisqu'en lieu et place d'une consultation préalable, il s'agit d'une « approbation préalable » qui doit être obtenue de l'autorité compétente de l'autre État membre.
2.3. L'application dans le temps du règlement « Bruxelles II bis refonte »
En vertu de l'article 104, le règlement « Bruxelles II bis refonte » est entré en application le 1 er aout 2022 . Il abroge le règlement (CE) n° 2201/2003 du 27 novembre 2003 sur la compétence, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale.
Cependant l'article 100 du règlement « Bruxelles II bis refonte » a prévu des dispositions transitoires . Le règlement (CE) n° 2201/2003 continue de s'appliquer aux décisions, actes et accords antérieurs au 1 er aout 2022 et relevant du domaine de la responsabilité parentale.
La DACS a également fait part au rapporteur de l'importance de conserver la référence aux deux règlements européens précités dans les dispositions de l'article L. 221-3 du CASF dans la mesure où il s'agit d'un texte de référence utilisé régulièrement par les services départementaux d'aide sociale à l'enfance.
Ainsi, si le règlement « Bruxelles II bis refonte » abroge le règlement (CE) n° 2201/2003 du 27 novembre 2003 à compter de son entrée en vigueur le 1 er aout 2022, les deux règlements continuent donc de s'appliquer concomitamment de manière transitoire. L'ajout des articles 79 à 82 du règlement « Bruxelles II bis », en lieu et place d'une suppression, s'en trouve donc justifié.
3. La position de la commission : assurer une coordination avec l'entrée en vigueur du règlement « Bruxelles II bis refonte »
Le rapporteur estime que le texte proposé par le Gouvernement ne pose aucune difficulté quant à son adoption. En effet, l'entrée en vigueur récente du règlement « Bruxelles II bis refonte », l'étude d'impact du projet de loi et l'audition de la DACS ont mis en exergue la nécessité de cette mise à jour du dernier alinéa de l'article L. 221-3 du CASF.
La commission propose à la commission des affaires sociales d'adopter l'article 25 sans modification .
* 18 Catherine Cathiard, « Fusion transfrontalière », Répertoire des sociétés , Dalloz, janvier 2019, n° 22.
* 19 Idem , n° 23.
* 20 Article L. 229-1 alinéa 2 du code de commerce.
* 21 Article L. 229-2 du code de commerce.
* 22 Jennifer Bouffard, « Directive relative à la mobilité des sociétés du 27 novembre 2019 - L'attractivité du statut de la société européenne après l'adoption de la directive de la mobilité des sociétés du 27 novembre 2019 », Droit des sociétés , mars 2019, étude 4, n°5.
* 23 Paragraphe 1 de l'article 4 du règlement (CE) n° 2157/2001 du conseil du 8 octobre 2001 relatif au statut de la société européenne (SE).
* 24 Article 4 du règlement (CE) n° 2157/2001 du conseil du 8 octobre 2001 relatif au statut de la société européenne (SE).
* 25 Memento pratique, Sociétés commerciales 2022, Éditions Francis Lefebvre, n° 82530.
* 26 Article L. 236-6-1 du code de commerce.
* 27 Selon la définition du paragraphe 4) b) de l'article 160 ter de la directive du 27 novembre 2019.
* 28 Paragraphe 3 des articles 86 nonies et 160 nonies de la directive 2019/2121 du 27 novembre 2019.
* 29 Paragraphes 1 b) et 2 de la directive 2017/1132 du 14 juin 2017.
* 30 Pour la SA : article L. 225-9 du code de commerce ; pour la SARL : article L. 223-30 du code de commerce ; pour la SCA : articles L. 225-97 et L. 226-1 alinéa 2 du code de commerce ; pour la SAS : articles L. 225-97 et L. 227-1 alinéa 3) du code de commerce.
* 31 Articles 86 decies , 126 bis et 160 decies .
* 32 Articles R. 229-6 et R. 229-5 du code de commerce.
* 33 La directive 2002/14/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2002 établissant un cadre général relatif à l'information et la consultation des travailleurs dans la Communauté européenne et la directive 2009/14/CE du Parlement européen et du Conseil concernant l'institution d'un comité d'entreprise européen ou d'une procédure dans les entreprises de dimension communautaire et les groupes d'entreprises de dimension communautaire en vue d'informer et de consulter les travailleurs (refonte).
* 34 Paragraphe 1 des articles 86 terdecies 133 et 160 terdecies de la directive (UE) 2017/1132 du Parlement européen et du conseil du 14 juin 2017 issue de la modification de la directive du 27 novembre 2019.
* 35 Articles 86 sexies , 124 et 160 sexies .
* 36 Article 86 quaterdecies , 86 sexdecies , 127, 160 quaterdecies et 160 sexdecies .
* 37 Alternativement, l'organe de direction peut présenter deux rapports distincts.
* 38 Paragraphes 6 et 7 des articles 86 sexies , 124 et 160 sexies de la directive.
* 39 Articles 86 quaterdecies et 86 sexdecies (pour la transformation transfrontalière) et 160 quaterdecies et 160 sexdecies (pour la scission transfrontalière).
* 40 Article 127 de la directive (UE) 2017/1132 du 14 juin 2017 relative à certains aspects du droit des sociétés modifié par la directive (UE) 2019/2121 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2019.
* 41 Loi n° 2005-842 du 26 juillet 2005 pour la confiance et la modernisation de l'économie.
* 42 Article L. 229-4 du code de commerce.
* 43 Rapport n° 438, tome I (2004-2005) de Philippe Marini sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après la déclaration d'urgence, pour la confiance et la modernisation de l'économie, 29 juin 2005 pp. 73-74.
* 44 Avis sur un projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans les domaines de l'économie, de la santé, du travail, des transport et de l'agriculture, Conseil d'État, séance du 17 novembre 2022, p. 3, n° 9 et 10.
* 45 Rapport sur la transposition de la directive « fusions-scissions », Haut comité juridique de la place financière de Paris, 23 novembre 2020, consultable à cette adresse : https://www.banque-france.fr/sites/default/files/rapport_38_f_0.pdf .
* 46 Le projet de loi dit DDADUE ayant été présenté en conseil des ministres le 23 novembre 2022 et l'examen au fond par la commission des affaires sociales du Sénat est prévu le 7 décembre 2022.
* 47 Paragraphe 1 des articles 86 quaterdecies , 127 et 160 quaterdecies de la directive (UE) 2017/1132 du 14 juin 2017 relative à certains aspects du droit des sociétés modifié par la directive (UE) 2019/2121 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2019.
* 48 Article L. 236-30 du code de commerce.
* 49 Article R. 123-139 du code de commerce.
* 50 Article L. 229-4, alinéa 3 du code de commerce.
* 51 Anne Bougnous, « Dissolution des sociétés - Causes de dissolution propres à chaque type de société. - Sociétés de capitaux (SARL et sociétés par actions) », JurisClasseur Sociétés Traité, LexisNexis, fascicule 30-30, 18 mars 2018, n° 13.
* 52 Étude d'impact relative à l'article 10 du projet de loi.
* 53 Article L. 631-1 du code de commerce définit la cessation de paiement comme la situation dans laquelle le débiteur est « dans l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible ».
* 54 Article L. 226-1 alinéa 2 du code de commerce.
* 55 Article L. 227-1 du code de commerce.
* 56 Article L. 224-2 du code de commerce.
* 57 Article L. 223-2 du code de commerce : « Le montant du capital de la société est fixé par les statuts. Il est divisé en parts sociales égales. »
* 58 Articles L. 227-1 et L. 210-2 du code de commerce.
* 59 Anne Bougnous, « Dissolution des sociétés - Causes de dissolution propres à chaque type de société. - Sociétés de capitaux (SARL et sociétés par actions) », JurisClasseur Sociétés Traité, LexisNexis, fascicule 30-30, 18 mars 2018, n° 58 à 70.
* 60 Cour de cassation, com., 8 septembre 2021, n° 19-23.187, inédit : en l'espèce, les pertes des capitaux propres de la société étaient constatées le 10 aout 2011 et la Cour de cassation estime que la société avait jusqu'à la clôture de l'exercice 2013 pour régulariser la situation.
* 61 Cour d'appel de Paris, 18 fév. 1994, bull. Joly 1994, p. 531.Cour de cassation, com., 31 oct. 2006 n° 05-13.890.
* 62 Cour de cassation, com., 31 oct. 2006 n° 05-13.890.
* 63 Cour d'appel de Paris, 27 mars 2014, n° 13/1404 : en l'espèce il s'agissait d'une action diligentée par une société anonyme à l'encontre d'une SARL, filiale d'une société allemande.
* 64 Article 31 du code de procédure civile : « L'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé. »
* 65 Cour d'appel de Paris, 18 fév. 1994, bull. Joly 1994, p. 531.
* 66 La « surtransposition » peut être définie comme « l'adoption ou le maintien de mesures législatives ou réglementaires allant au-delà des exigences minimales d'une directive ». Cela peut concrètement se traduire par « le fait d'exercer un choix entre plusieurs options ouvertes par la directive ou de décider d'utiliser ou non les possibilités de dérogation qu'elle autorise peut également conduire à une surtransposition, dans la mesure où ces choix peuvent créer des obligations plus strictes pour les destinataires de la norme » (rapport d'information n° 532 sur les moyens de lutter contre la transposition des directives européennes dans le droit français, fait par Alice Thourot et Jean-Luc Warsmann au nom de la commission des lois de l'Assemblée nationale, décembre 2017, p. 5).
* 67 Rapport d'information de la commission des affaires européennes et de la délégation aux entreprises relatif aux sur-transpositions préjudiciables aux entreprises d'actes législatifs européens en droit interne, René Danesi, 28 juin 2018, p. 9.
* 68 L'article 58 de la directive précitée prévoit en effet : « 1. En cas de perte grave du capital souscrit, l'assemblée générale doit être convoquée dans un délai fixé par les législations des États membres afin d'examiner s'il y a lieu de dissoudre la société ou d'adopter toute autre mesure.
2. La législation d'un État membre ne peut pas fixer à plus de la moitié du capital souscrit le montant de la perte considérée comme grave au sens du paragraphe 1. »
* 69 Étude d'impact relative à l'article 10 du projet de loi.
* 70 Cour d'appel de Paris, 27 mars 2014, n° 13/1404 : en l'espèce il s'agissait d'une action diligentée par une société anonyme à l'encontre d'une SARL, filiale d'une société allemande.
* 71 Étude de l'observatoire du financement des entreprises, mai 2021, p.7, consultable à cette adresse : https://mediateur-credit.banque-france.fr/sites/default/files/medias/documents/ofe_fp_book_web.pdf
* 72 Alinéa 7 de l'article 10 du projet de loi : « Lorsqu'en application du quatrième alinéa la société a réduit son capital social mais sans pour autant que ses fonds propres aient été reconstitués, et qu'elle procède par la suite à une augmentation de capital, elle se remet en conformité avec les dispositions de ce quatrième alinéa avant la clôture du deuxième exercice suivant celui où a eu lieu cette opération. »
* 73 Articles L. 2141-1 à L. 2141-6, L. 2341-1 à L. 2341-4 et L. 3121-1 à L. 3123-6 du code de la commande publique.
* 74 Articles L. 2141-7 à L. 2141-11, L. 2341-5 et L. 3123-7 à L. 3123-11 du code de la commande publique.
* 75 « Sauf lorsque la peine d'exclusion des marchés a été prononcée pour une durée différente par une décision de justice définitive », article L. 2141-1 du code de la commande publique.
* 76 Conformément au paragraphe 7 de l'article 38 la directive 2014/23/UE relative aux contrats de concession et au paragraphe 4 de l'article 57 de la directive 2014/24/UE relative aux marchés publics.
* 77 Cf. paragraphe 9 de l'article 38 de la directive 2014/23/UE relative aux contrats de concession et au paragraphe 6 de l'article 57 de la directive 2014/24/UE relative aux marchés publics.
* 78 Idem .
* 79 À l'époque le code des marchés publics. Celui-ci a été remplacé en 2019 par le code de la commande publique.
* 80 Tel que défini à l'article L. 8211-1 du code du travail, c'est-à-dire : le travail dissimulé, le marchandage, le prêt illicite de main-d'oeuvre, l'emploi d'étranger non autorisé à travailler, le cumul irrégulier d'emplois et la fraude ou fausse déclaration en vue d'obtenir des allocations d'aide à l'emploi.
* 81 Tel que présenté par le Gouvernement dans l'étude d'impact du présent projet de loi.
* 82 CJUE, 11 juin 2020, Vert Marine SAS, C-472/19.
* 83 Décision n° 419146 du Conseil d'État du 12 octobre 2020, « Société Vert Marine ».
* 84 L'exclusion des marchés publics peut être prononcée par le juge sous certaines conditions prévues par le code de la commande publique et le code pénal, tandis que les peines d'exclusion de plein droit des procédures de passation des marchés publics s'appliquent automatiquement lors du prononcé de certaines peines, sans que le jugement mentionne cette exclusion.
* 85 Relatifs aux actes réglementaires.
* 86 Article 21 de la directive (UE) 2019/1152.
* 87 Voir le résumé de l'analyse d'impact jointe à la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à des conditions de travail transparentes et prévisibles dans l'Union européenne.
* 88 Étude d'impact du projet de loi.
* 89 CJCE, n° C-66/85, arrêt de la Cour, Deborah Lawrie-Blum.
* 90 Le chapitre III de la directive est relatif aux exigences minimales concernant les conditions de travail.
* 91 Il s'agit des dispositions relatives à la communication écrite des informations ; aux délais et moyens d'information ; à la modification de la relation de travail ; aux informations pour les agents exerçant à l'étranger ; aux présomptions légales et au mécanisme de règlement rapide ; et aux dispositions transitoires.
* 92 Qui prévoit que « sauf dispositions contraires, les modalités d'application du présent code sont déterminées par décret en Conseil d'État ».
* 93 Étude d'impact du projet de loi.
* 94 Réponse de la direction générale de l'administration et de la fonction publique au questionnaire du rapporteur ; voir également le commentaire de l'article 18 du projet de loi.
* 95 Conseil d'État, Avis n° 406048, délibéré le 17 novembre 2022, p. 6.
* 96 En vertu duquel les informations visées à l'article 4 de la directive sont fournies individuellement au travailleur sous la forme de documents dans un délai de sept jours ou d'un mois (selon la nature des informations) à compter du premier jour de travail.
* 97 Ce silence de l'administration valant décision implicite de rejet en application de l'article L. 231-4 du code des relations entre le public et l'administration.
* 98 Ce recours est également ouvert aux États membres, mais pas aux particuliers, qui peuvent toutefois déposer plainte auprès de la Commission pour lui signaler un manquement d'un État membre au respect du droit de l'Union.
* 99 En application de l'article 2 du décret n° 2012-148 du 30 janvier 2012 modifié relatif au Conseil commun de la fonction publique. Cette instance est composée de deux collèges : le collège des représentants des organisations syndicales de fonctionnaires (30 membres) et le collège des représentants des employeurs (18 membres, soit 3 par versant de la fonction publique).
* 100 Ont voté pour : GT, CFDT, FO, UNSA, Solidaires, FA-FP ; se sont abstenues : CGC, CFTC, FSU. Aucune organisation professionnelle n'a voté contre.
* 101 En application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales.
* 102 Étude d'impact du projet de loi.
* 103 Étude d'impact du projet de loi.
* 104 Définis à l'article L. 6141-1 du code de la santé publique, les établissements publics de santé correspondent aux centres hospitaliers régionaux et universitaires ainsi qu'aux centres hospitaliers.
* 105 Le premier alinéa de l'article L. 6152-1 renvoie toujours à cette loi statutaire, en dépit de l'abrogation de celle-ci par l'ordonnance n° 2021-1574 du 24 novembre 2021 et de la codification de ses dispositions dans le code général de la fonction publique, entré en vigueur le 1 er mars 2022.
* 106 Conformément aux articles R. 6152-3 et R. 6152-13 du code de la santé publique.
* 107 À l'exception de l'article L. 132-10.
* 108 Voir commentaire de l'article 17.
* 109 Aux termes de l'article L. 6152-1 du code de la santé publique, les praticiens hospitaliers peuvent en effet exercer leurs fonctions « dans les établissements publics de santé mentionnés aux articles L. 6141-1 et L. 6141-2 ainsi que dans les établissements publics mentionnés au I de l'article L. 313-12 du code de l'action sociale et des familles », tandis que les praticiens contractuels et les assistants peuvent également exercer leurs fonctions dans ces établissements, conformément aux articles R. 6152-334 et R. 6152-501 du code de la santé publique.
* 110 Voir commentaire de l'article 17.
* 111 Saisi en application de l'article L. 6156-5 du code de la santé publique.
* 112 La loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ainsi que la loi n°86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ont été abrogées par l'ordonnance n°2021-1574 du 24 novembre 2021 et codifiées dans le code général de la fonction publique, entré en vigueur le 1 er mars 2022.
* 113 L'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi a été reconnu par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 99-421 DC du 16 décembre 1999.
* 114 En vertu des articles 55 et 56 du règlement (CE) n° 2201/2003 du 27 novembre 2003 sur la compétence, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale dit « Bruxelles II bis ».
* 115 En vertu de la Convention de La Haye du 19 octobre 1996 concernant la compétence, la loi applicable, la reconnaissance, l'exécution et la coopération en matière de responsabilité parentale et de mesures de protection de l'enfant. 54 pays appliquent la présente convention.
* 116 Projet de loi DDADUE, étude d'impact relative à l'article 25, p. 243.
* 117 Avis du Conseil d'État sur un projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans les domaines de l'économie, de la santé, du travail, des transports et de l'agriculture, séance du 17 novembre 2022, n° 45, p. 9.