Avis n° 168 (2021-2022) de Mme Laure DARCOS , fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, déposé le 18 novembre 2021

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N° 168

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2021-2022

Enregistré à la Présidence du Sénat le 18 novembre 2021

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (1) sur le projet de loi de finances , adopté par l'Assemblée nationale, pour 2022 ,

TOME V

Fascicule 1

RECHERCHE ET ENSEIGNEMENT SUPERIEUR

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Par Mme Laure DARCOS,

Sénatrice

(1) Cette commission est composée de : M. Laurent Lafon, président ; M. Max Brisson, Mme Laure Darcos, MM. Stéphane Piednoir, Michel Savin, Mme Sylvie Robert, MM. David Assouline, Julien Bargeton, Pierre Ouzoulias, Bernard Fialaire, Jean-Pierre Decool, Mme Monique de Marco, vice-présidents ; Mmes Céline Boulay-Espéronnier, Else Joseph, Marie-Pierre Monier, Sonia de La Provôté, secrétaires ; MM. Maurice Antiste, Jérémy Bacchi, Mmes Annick Billon, Alexandra Borchio Fontimp, Toine Bourrat, Céline Brulin, Samantha Cazebonne, M. Yan Chantrel, Mme Nathalie Delattre, M. Thomas Dossus, Mmes Sabine Drexler, Béatrice Gosselin, MM. Jacques Grosperrin, Jean Hingray, Jean-Raymond Hugonet, Claude Kern, Mikaele Kulimoetoke, Michel Laugier, Pierre-Antoine Levi, Jean-Jacques Lozach, Jacques-Bernard Magner, Jean Louis Masson, Mme Catherine Morin-Desailly, MM. Philippe Nachbar, Olivier Paccaud, Damien Regnard, Bruno Retailleau, Mme Elsa Schalck, M. Lucien Stanzione, Mmes Sabine Van Heghe, Anne Ventalon, M. Cédric Vial, Mme Mélanie Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 4482 , 4502 , 4524 , 4525, 4526 , 4527 , 4597 , 4598 , 4601 , 4614 et T.A. 687

Sénat : 162 et 163 à 169 (2021-2022)

AVANT-PROPOS

Près d'un an après l'entrée en vigueur de la loi de programmation de la recherche (LPR), dont il a été en charge au nom de la commission, le rapporteur a souhaité que l'examen du projet de loi de finances (PLF) pour 2022 soit l'occasion de vérifier si les engagements financiers, que le Sénat a permis d'accroître sur les premières années de la programmation, ont été tenus en 2021 et s'ils le seront en 2022 . Il a choisi de se concentrer plus particulièrement sur l'Agence nationale de la recherche (ANR) , devenue l'acteur clef du système de recherche français. L'analyse de l'exécution budgétaire 2021 et des prévisions de crédits pour 2022 montre que la trajectoire financière de l'Agence est conforme à la programmation. Celle-ci a d'ailleurs obtenu de premiers résultats très encourageants en termes d'augmentation du taux de sélection des appels à projets et de revalorisation du préciput. Le rapporteur s'en félicite et les juge très prometteurs pour la suite du déploiement de la LPR , auquel il sera très attentif dans le cadre du contrôle de l'application de la loi.

Dans un contexte marqué par une défiance de plus en plus forte vis-à-vis de la parole scientifique et de ceux qui font la science, le rapporteur a également tenu à faire un gros plan sur la culture scientifique, dont l'enjeu de promotion et de développement lui paraît fondamental . De ses échanges avec deux des grands diffuseurs publics de la culture scientifique, Universcience et le Muséum national d'Histoire naturelle , il dresse le constat de l'enclenchement d'une récente dynamique, favorisée par la LPR, qu'il convient toutefois de faire vivre et d'accompagner financièrement.

I. I. L'AGENCE NATIONALE DE LA RECHERCHE : UNE MONTÉE EN PUISSANCE FINANCIÈRE AUX PREMIERS EFFETS PROMETTEURS

A. EN 2021, UNE AUGMENTATION DU BUDGET D'INTERVENTION DE L'AGENCE, CONFORME À LA LPR, QUI PERMET DE CONCRÉTISER PLUSIEURS OBJECTIFS SIGNIFICATIFS

La LPR fait de l'ANR l'acteur pivot de l'écosystème de recherche en confortant ses missions et en renforçant ses moyens d'intervention. Sur les 5 milliards d'euros d'augmentation progressive du budget de la recherche publique entre 2021 et 2030 (article 2 de la LPR), 1 milliard d'euros est en effet destiné à l'Agence afin d'accroître son niveau d'intervention.

En 2021 et en 2022, le projet de loi de programmation prévoyait initialement une hausse cumulée de 442 millions d'euros du budget de l'ANR : 149 millions en 2021, puis 293 millions en 2022. Le Sénat ayant jugé cet effort sur les premières années largement insuffisant , le Gouvernement s'est engagé, dans le cadre du plan de relance, à doubler ce montant d'ici la fin du quinquennat, soit une progression de la trajectoire budgétaire de l'Agence de 428 millions d'euros supplémentaires, dont 286 millions en 2021 et 142 millions en 2022. La programmation inscrite à l'article 2 de la LPR qui, à la demande du Sénat, intègre les compléments du plan de relance, prévoit ainsi un apport de 403 millions d'euros en 2021 (dont 117 millions au titre de la LPR stricto sensu et 286 millions au titre du plan de relance) par rapport aux crédits inscrits en loi de finances pour 2020. S'y ajoute une enveloppe de 100 millions d'euros au titre de « la préservation de l'emploi de R&D » qui correspond à une mesure spécifique du plan de relance dont le financement transite par l'ANR et dont le Sénat, par souci de transparence, a également obtenu l'inscription dans la programmation.

L'augmentation du niveau d'engagement de l'ANR par rapport à 2020 (M€)

Source : Loi de programmation de la recherche (LPR)

Le rapporteur constate avec satisfaction que la programmation budgétaire prévue pour 2021 a bien été respectée . En effet, le budget d'intervention de l'Agence est passé de 746 millions à 1,19 milliard d'euros 1 ( * ) en autorisations d'engagement (dont + 117 millions au titre de la LPR et + 286 millions au titre du plan de relance), soit un niveau inédit depuis la création de l'établissement en 2005. Cette augmentation de moyens rend possible, dès 2021, l'atteinte de plusieurs des objectifs assignés à l'ANR.

1. Le relèvement du taux de succès aux appels à projets

Élément central du financement de la recherche sur projets, le niveau du taux de succès aux appels à projets - descendu à 10 % en 2014, puis remonté progressivement jusqu'à atteindre 17 % en 2020 - constitue l'une des explications au décrochage de la recherche française dans les comparaisons internationales. Pour amplifier la dynamique positive des dernières années, la LPR fixe un objectif de progression en deux phases : un premier palier significatif en 2021 afin d'atteindre un taux de sélection de 23 %, puis un deuxième palier à partir de 2024 pour atteindre progressivement la cible de 30 % en 2027.

Les premiers résultats de l'appel à projets générique de l'ANR pour 2021 font état, au 30 septembre, de 1 589 projets sélectionnés, soit un taux de succès de 22,9 %. Pour cette première année de mise en oeuvre de la LPR, l'objectif prioritaire de relèvement du taux de sélection à 23 % est donc quasiment atteint, ce dont le rapporteur se félicite .

Les projets retenus, qui seront soutenus à hauteur de 699,5 millions d'euros 2 ( * ) , se répartissent de la manière suivante selon les disciplines :

Appel à projets générique (AAPG) 2021 (septembre)

Source : Agence nationale de la recherche

Les sciences de la vie et de la santé représentent à elles seules près de 30 % des projets sélectionnés, suivies par les « domaines transverses » (21 %) et les sciences de l'énergie et des matériaux (16 %). La place des sciences humaines et sociales (7 %) restant encore trop faible, le plan d'action 2022 de l'ANR prévoit une profonde refonte des axes scientifiques qui leur sont dédiés afin d'accroître la participation de ces disciplines aux appels à projets. L'objectif est d'assurer une meilleure couverture de tous les domaines qu'elles représentent, en particulier les humanités qui pouvaient avoir des difficultés à s'identifier dans la précédente programmation.

Si ces premiers résultats sont très encourageants, une incertitude subsiste toutefois quant à l'évolution du nombre de projets déposés, l'augmentation du taux de sélection étant susceptible de provoquer un afflux de projets supplémentaires. Pour prévenir ce risque, l'Agence a mis en place, comme le font la quasi-totalité de ses homologues dans le monde, des mécanismes de régulation 3 ( * ) .

2. L'augmentation du taux de préciput

Défini pour la première fois dans la loi (article 21 de la LPR), le préciput, qui doit permettre de couvrir les coûts indirects des projets de recherche, fait l'objet d'une nouvelle répartition entre les différentes parties prenantes (établissements gestionnaires et hébergeurs, laboratoires, sites). Son relèvement de 19 % à 40 % à l'horizon 2027 fait également partie des objectifs définis dans le rapport annexé afin de rapprocher la recherche française des grands standards internationaux.

Le rapporteur se réjouit de l'enclenchement dès 2021 d'une bonne dynamique, le préciput atteignant 25 % avec la ventilation suivante : 10 % pour la part « gestionnaire » (contre 8 % en 2020) rapportant 75 millions d'euros (contre un peu plus de 40 millions en 2020), 13 % pour la part « hébergeur » (contre 11 % en 2020) rapportant 80 millions d'euros (contre 57 millions en 2020) et 2 % pour la part « laboratoires » nouvellement introduite, rapportant 15 millions d'euros, soit un montant total de préciput de 170 millions d'euros (contre 100 millions en 2020). Ces progressions sont conformes aux projections de l'ANR. Dans la continuité de la position qu'il a défendue lors de l'examen de la loi de programmation, le rapporteur sera très attentif à la progression des crédits alloués directement aux laboratoires via le préciput , le financement de la recherche française devant, selon lui, impérativement continuer à reposer sur le double pilier crédits sur projets/crédits de base.

3. Des interrogations sur l'effectivité de l'enveloppe dédiée à la préservation de l'emploi de R&D

L'enveloppe spécifique de 100 millions d'euros ajoutée à la programmation budgétaire 2021 vise à préserver ou créer plus de 2 000 emplois en R&D en renforçant les collaborations entre des entreprises et des laboratoires de recherche publique. Selon l'ANR, qui s'est vu confier la gestion de ce dispositif 4 ( * ) , les premiers financements alloués ont été notifiés en avril et atteignent à ce jour 54 millions d'euros. Ils concernent près de 90 structures de recherche, plus de 500 personnels de R&D et plus de 300 entreprises (dont 60 % de PME). Si le dispositif a connu un bon démarrage, il semble que la trajectoire de dépenses connaisse un ralentissement, laissant présager que les 100 millions d'euros ne seront pas utilisés d'ici la fin de l'année. N'ayant pas obtenu de précisions sur les raisons d'une telle décélération et sur la probabilité d'une non-consommation de l'enveloppe, le rapporteur interrogera la ministre en séance publique sur ce sujet .

B. EN 2022, UNE DEUXIÈME MARCHE BUDGÉTAIRE RESPECTUEUSE DE LA PROGRAMMATION BUDGÉTAIRE DE LA LPR, MAIS DIFFICILEMENT LISIBLE

Conformément à la programmation de la LPR qui prévoit de maintenir, jusqu'en 2023 inclus, son budget d'intervention au niveau atteint en 2021, l'ANR bénéficie, dans le PLF pour 2022, d'un apport de 158 millions d'euros en autorisations d'engagement sur le programme 172 et de 142 millions d'euros au titre du plan de relance. Ces financements supplémentaires, d'ampleur comparable à la première marche de 2021, doivent lui permettre de déployer son plan d'action 2022 (cf. infra ) et de poursuivre l'atteinte des objectifs fixés en termes d'amélioration du taux de sélection et d'augmentation du préciput.

Si le rapporteur se félicite du respect de la trajectoire financière fixée par la LPR, il regrette que la coexistence de plusieurs supports budgétaires - crédits du programme 172, crédits du plan de relance - rende peu lisible la ventilation des apports de crédits .

Le plan d'action 2022 de l'ANR

Le plan d'action 2022 décrit les actions et les appels à projets proposés par l'ANR dans le cadre de l'exercice budgétaire 2022, le but étant de donner une visibilité générale de son offre de financement à tous les acteurs publics et privés impliqués dans la recherche française.

Pour cette édition, une attention particulière est portée au continuum entre disciplines (approche dite en « disciplinarité » : mono-, multi-, inter- et transdisciplinarité), à travers notamment la définition de sept domaines transversaux de recherche : la science de la durabilité, une seule santé, la transition écologique et environnementale, la transition énergétique, les transitions technologiques, la transformation numérique, les transformations des systèmes sociotechniques.

Le plan d'action 2022 intègre également des priorités stratégiques définies par l'État , parmi lesquelles l'intelligence artificielle, les sciences humaines et sociales, les technologies quantiques, l'autisme au sein des troubles du neuro-développement, la recherche translationnelle sur les maladies rares, la production de biomédicaments. Ces priorités stratégiques seront articulées avec les « Programmes et équipements prioritaires de recherche » (PEPR) qui s'inscrivent dans le volet dirigé du 4 ème programme d'investissements d'avenir (PIA 4).

Le plan d'action 2022 de l'ANR vise enfin à conforter la participation de la France au nouveau programme-cadre de recherche et d'innovation de l'Union européenne, « Horizon Europe » , et à intensifier les collaborations stratégiques multilatérales, dans le cadre de l'Espace européen de la recherche (EER), ainsi que bilatérales, en particulier la coopération franco-allemande.

C. LA MOBILISATION DE L'ANR EN FAVEUR DE LA CULTURE SCIENTIFIQUE

L'article 21 de la LPR prévoit qu' au moins 1 % du budget d'intervention de l'Agence est fléché sur le partage de la culture scientifique , le rapport annexé précisant que cette part de financement doit donner lieu à des appels à projets dédiés ou à l'introduction d'un volet « culture scientifique » dans le cadre des projets de recherche volontaires. Une autre action pouvant être menée par l'Agence grâce à ce budget est le soutien aux programmes de médiation scientifique et aux initiatives de la société civile liées à des projets de recherche qu'elle finance.

Le rapporteur constate avec satisfaction que l'ANR, qui voit sa mission en matière de culture scientifique affirmée par la LPR, a engagé, dès 2021, plusieurs actions . Au mois de mars, elle a ainsi lancé un appel à manifestation d'intérêt qui a donné lieu à 382 propositions. Dans la continuité de cette initiative, plusieurs appels à projets spécifiques ont été organisés en 2021 et d'autres le seront au cours de l'année 2022 dans le cadre du plan national « Science avec et pour la Société » afin, d'une part, de soutenir la recherche en médiation et communication scientifiques, d'autre part, de favoriser le développement de la culture scientifique au sein des établissements de recherche et de promouvoir la diffusion des connaissances. Lors de son audition par la commission le 27 octobre dernier, la ministre a précisé que les lauréats du label « Science avec et pour la société », doté de 2,6 millions d'euros et octroyé pour trois ans, seront bientôt rendus publics et que l'appel à projets « Médiation et communication scientifiques » s'est clôturé il y a quelques semaines.

L'ANR encourage également les bénéficiaires de ses financements à mener et/ou à participer à des activités de transfert de connaissances vers les citoyens et les décideurs publics : publication d'articles dans la presse, intervention dans les médias, aide à la décision publique, participation à des festivals de la science, organisation de débat grand public, action de vulgarisation, rédaction d'articles dans une encyclopédie libre en ligne...

L'Agence a par ailleurs noué des partenariats avec des acteurs de l'audiovisuel public, en particulier Arte et France Culture, dans le cadre de l'évènement « Et maintenant ? Le festival international des idées de demain », qui s'adresse aux 18-30 ans.

Signe que l'ANR s'est emparée de cette problématique, bien qu'il ne s'agisse pas de son coeur de métier, la promotion de la culture scientifique fait partie des cinq valeurs et engagements de son plan d'action 20225 ( * ), démarche que le rapporteur salue et encourage pleinement .

Les liens unissant l'ANR, Universcience et le Muséum national d'Histoire naturelle

Dans le cadre d'un appel à manifestation d'intérêt de l'ANR, Universcience (cf. infra ) a entrepris la création d'un groupement d'intérêt scientifique pour faire naître un réseau de recherche sur la médiation scientifique . L'objectif de cette initiative est de favoriser les actions de recherche sur la médiation scientifique entre acteurs académiques et professionnels. Le réseau compte parmi ses membres Universcience, l'Association des musées et centres pour le développement de la culture scientifique, technique et industrielle (AMCSTI), le Conservatoire national des arts et métiers (CNAM), le Muséum national d'Histoire naturelle (MNHN), Sorbonne Université et les universités de Montpellier et de Lorraine. Restant ouvert à tout autre partenaire, le réseau ambitionne de participer à certains appels à projets de l'ANR.

Il est par ailleurs à noter que le président d'Universcience a fait son entrée au conseil d'administration de l'ANR.

II. FACE À UNE DÉFIANCE CROISSANTE VIS-À-VIS DE LA SCIENCE, LA NÉCESSITÉ D'INTENSIFIER LE DÉVELOPPEMENT DE LA CULTURE SCIENTIFIQUE ET DE SOUTENIR PLUS FORTEMENT SES DIFFUSEURS

A. LA CULTURE SCIENTIFIQUE, UN ENJEU MAJEUR QUI OBLIGE À UN SURSAUT DE LA PART DES POUVOIRS PUBLICS

1. La LPR porteuse d'une dynamique qu'il convient de déployer

À l'heure où les fausses informations et les théories du complot circulent abondamment et font de plus en plus d'adeptes dans une société en perte de confiance, le rapporteur estime urgent d'enrayer la perte de crédit de la parole scientifique, de refonder le rapport des citoyens à la rationalité scientifique et de développer la culture scientifique chez les jeunes générations . Celle-ci est en effet un élément fondamental de la culture générale pour comprendre le monde, appréhender ses évolutions, se forger un esprit critique et, plus globalement, pour être un citoyen éclairé au sens des Lumières.

Comme le rapporteur a eu l'occasion de le rappeler lors des débats sur la LPR, le renforcement de la place de la science dans la société et le développement de la culture scientifique sont des objectifs qui ont régulièrement été fixés par les politiques publiques, mais sans jamais vraiment constituer des priorités. Il se félicite que la LPR entende inverser cette tendance au moyen d'un socle de mesures de nature à créer une impulsion : attribution d'une part du budget d'intervention de l'ANR à la diffusion de la culture scientifique (cf. supra ), dispositions favorisant une plus grande participation des chercheurs et des enseignants-chercheurs à la science ouverte, création de plusieurs manifestations ou évènements en faveur du rayonnement de la science.

La première année de mise en oeuvre de la LPR a déjà donné lieu à plusieurs concrétisations en matière de culture scientifique , comme l'a indiqué la ministre lors de son audition devant la commission : actions menées par l'ANR dans le cadre de sa politique d'appels à projets (cf. supra ), attribution de la médaille du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et des prix de l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae) et de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) - ces récompenses ayant pour but de mettre en avant la médiation scientifique -, augmentation du budget consacré à la fête de la science. Le MESRI a également lancé, en lien avec le ministère de la culture et France Télévisions, un appel à projets pour des courts métrages valorisant les femmes dans les métiers scientifiques. Le rapporteur, très soucieux de faire avancer la place des femmes dans les sciences, notamment celles dites fondamentales, se réjouit particulièrement de cette initiative qui constitue un moyen pertinent de toucher un public jeune.

Si ces premières réalisations témoignent d'une dynamique nouvelle et prometteuse, il regrette, en revanche, que le rapport prévu à l'article 48 de la LPR, visant à faire « un état des lieux exhaustif des politiques menées en faveur de la culture scientifique, technique et industrielle », n'ait pas été remis au Parlement, alors qu'il devait l'être dans les six mois suivant la promulgation de la loi . La transmission de ce rapport dans les délais impartis aurait permis, dès cette année, de dresser le bilan des actions menées depuis plusieurs décennies et de servir de base pour refonder la politique de développement et de diffusion de la culture scientifique à l'aune de ses nouveaux enjeux.

2. La nécessité de mettre les moyens financiers en cohérence avec les ambitions de la LPR

Le PLF pour 2022 consacre un peu plus de 20 millions d'euros à l'ouverture de la science vers la société, dans le cadre du programme 172. Ces financements doivent permettre d'amplifier la diffusion de la culture scientifique et les transferts des résultats de la recherche vers le monde de l'entreprise.

Le rapporteur rappelle toutefois que la culture scientifique est régulièrement le parent pauvre du budget de la mission « Recherche et Enseignement supérieur » . Il s'est ainsi souvent ému, lors de l'examen des précédents projets de loi de finances, du trop faible soutien de l'État aux établissements publics de diffusion de la culture scientifique dont il exerce la tutelle, alors que ceux-ci mènent des politiques très volontaristes et connaissent un grand succès public. Dans le cadre du suivi de la mise en oeuvre de la LPR, il sera donc très vigilant à l'évolution des crédits dédiés à cette politique.

B. COUP DE PROJECTEUR SUR DEUX GRANDS ACTEURS PUBLICS DE DIFFUSION DE LA CULTURE SCIENTIFIQUE : UNIVERSCIENCE ET LE MUSÉUM NATIONAL D'HISTOIRE NATURELLE

1. Des établissements aux projets scientifiques et culturels en prise directe avec les problématiques soulevées par la crise sanitaire

Universcience, établissement public à caractère industriel et commercial qui regroupe depuis 2009 le Palais de la Découverte (créé en 1937) et la Cité des sciences et de l'industrie (créée en 1986), et le Muséum national d'Histoire naturelle (MNHN), établissement d'enseignement, de recherche et de diffusion de la culture scientifique dont la création remonte au XVII e siècle 6 ( * ) , ont en commun d'être des acteurs clés du partage des savoirs scientifiques au plus grand nombre, reconnus pour leur histoire, l'exigence de leur démarche et leur rayonnement.

Alors que la crise sanitaire a soulevé de nombreuses questions sur les relations entre sciences et société et mis à mal la confiance accordée à la parole scientifique, ces établissements, dont le rapporteur a rencontré les équipes dirigeantes, sont plus que jamais convaincus de leurs missions : expliquer la démarche scientifique, susciter le goût des sciences, développer l'esprit critique, tisser des liens entre scientifiques et non scientifiques, susciter des vocations, donner des outils de compréhension du monde actuel.

Ainsi, dans le cadre du projet de nouveau Palais de la Découverte qui verra le jour en 2025, l'objectif est de conserver les fondamentaux qui ont fait le succès de « l'ancien » (multiplicité des disciplines scientifiques, place essentielle accordée à la médiation scientifique, présentations spectaculaires), tout en les adaptant aux problématiques contemporaines. De son côté, le MNHN travaille depuis plusieurs années sur la manière de répondre au mieux à la question suivante : comment parler de science à un public qui y est de moins en moins acculturé ? Pour ce faire, le musée diversifie ses supports de communication (diffusion de podcasts , organisation de conférences) et cherche à accroître son audience via des opérations « hors les murs » en direction de publics-cibles (les enfants et les jeunes, les personnes incarcérées, les personnes hospitalisées...).

2. Des établissements confrontés à une équation financière délicate

Sur les dernières années (hors période de crise sanitaire), les subventions de l'État à Universcience et au MNHN se sont globalement caractérisées au mieux par une stabilisation (c'est le cas, depuis 2017, de la subvention de fonctionnement à Universcience), au pire par une diminution (- 3 millions d'euros en dix ans, soit - 12 % pour le MNHN ; forte baisse, en 2017 et 2018, de la subvention d'investissement à Universcience), les obligeant à compter sur leurs ressources propres (billetterie, location d'espaces, mécénat...) pour faire face à leurs besoins d'investissement qui sont très conséquents (pour Universcience, rénovation du site historique du Palais de la Découverte dans le cadre de celle du Grand Palais ; pour le MNHN, projets immobiliers stratégiques et remise à niveau des systèmes d'information).

Grâce à une gestion à la fois rigoureuse sur le plan financier et ambitieuse sur le plan du projet culturel et scientifique de leurs directeurs respectifs (Bruno Maquart pour Universcience et Bruno David pour le MNHN), que le rapporteur tient à féliciter, les deux établissements publics sont parvenus à se maintenir à flot, mais leur soutenabilité financière reste précaire, d'autant plus depuis la survenue de la crise sanitaire.

Chiffres clés 2019
(dernière année hors crise sanitaire)

Universcience
(établissement public sous la double tutelle du ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation et du ministère de la culture)

Muséum national d'Histoire naturelle
(établissement public sous la double tutelle du ministère de l'enseignement, de la recherche et de l'innovation et du ministère de la transition écologique)

Subventions de l'État : de l'ordre de 100 millions d'euros, dont près de 95 millions d'euros au titre de la subvention pour charges de service public et un peu plus de 3 millions d'euros au titre de la subvention d'investissement (à laquelle s'est ajoutée une subvention d'investissement fléchée sur le projet de rénovation du Grand Palais à hauteur de 795 000 euros).

• Subventions de l'État : 53,3 millions d'euros.

• Ressources propres : 29 millions d'euros, dont 15,8 millions d'euros de recettes de billetterie.

• Ressources propres : 41,7 millions d'euros, dont 26,1 millions de recettes de diffusion (billetterie, concessions, locations d'espace, mécénat, etc...) et 15,6 millions d'autres recettes (notamment provenant des conventions de recherche).

Nombre de visiteurs : 2,9 millions.

• Nombre de visiteurs : 6 millions, dont 3,3 millions de visiteurs payants (le différentiel étant constitué de visiteurs libres dont principalement le Jardin des Plantes, ouvert gratuitement au public).

Sources : Universcience et Muséum national d'Histoire naturelle

3. ...rendue encore plus difficile par les conséquences de la crise sanitaire

La crise sanitaire a eu une incidence très lourde sur les recettes commerciales des deux établissements :

- pour Universcience : - 4,46 millions d'euros en 2020 et, en prévisionnel, de l'ordre de - 5 millions d'euros en 2021 (sachant qu'à compter de 2021, le Palais de la Découverte étant fermé au public, il ne génère plus de recettes de billetterie), soit une perte totale envisagée de près de 10 millions d'euros ;

- pour le MNHN : - 18 millions d'euros en 2020 et - 24 millions d'euros en 2021 (en prévisionnel), soit une perte totale de 42 millions d'euros.

Dans ce contexte, Universcience a bénéficié d'un début de remise à niveau de sa subvention d'investissement, qui avait accusé une très forte baisse en 2017 et 2018 7 ( * ) , à hauteur de 2 millions d'euros en LFI pour 2021 et d'une dotation exceptionnelle du plan relance de 13,75 millions d'euros en 2021. Ce soutien se poursuit puisque sont prévus, dans le cadre de la fin de gestion de l'exercice 2021, le versement d'une enveloppe exceptionnelle en investissement de 23 millions d'euros et, dans le PLF pour 2022, une nouvelle augmentation de la subvention d'investissement de 0,5 million d'euros. Si ces aides de l'État, que le rapporteur salue, permettent à Universcience de ne pas courir de risque de rupture de trésorerie en 2021 ou en 2022, sa situation à moyen terme demeure fragile étant donné l'ampleur de ses besoins d'investissement (de l'ordre de 30 millions d'euros par an en moyenne entre 2022 et 2024), liés à d'importantes opérations de maintenance de ses bâtiments. À ce titre, la poursuite de la remise à niveau de sa subvention d'investissement à hauteur de son niveau historique de 2016 8 ( * ) reste un enjeu majeur pour les années à venir.

Les aides de l'État au Muséum se sont, quant à elles, élevées à 4 millions d'euros, soit moins de 10 % des pertes envisagées, plaçant l'établissement dans une situation très difficile : la trésorerie qu'il a su reconstituer ces dernières années (d'un montant de 60 millions d'euros fin 2020), au prix d'importants efforts, ne peut en effet servir à la fois à compenser les moindres recettes de billetterie et à financer les investissements stratégiques. Le rapporteur ne manquera pas d'interpeller la ministre de l'enseignement supérieur sur ce faible niveau de soutien de l'État, notamment en comparaison des aides perçues par les musées placés sous la tutelle du ministère de la culture.

4. Une inquiétude sur le non-retour des groupes scolaires qui doit inciter à une action interministérielle pour ré-encourager aux sorties culturelles scientifiques

Si les deux établissements se réjouissent du retour progressif à des flux de fréquentation et de billetterie d'avant crise, en particulier en période de vacances scolaires, ils se disent très inquiets pour les groupes, scolaires ou associatifs, qui demeurent les grands absents. La conjonction de plusieurs facteurs semble expliquer ce phénomène : l'application des mesures sanitaires, en particulier l'obligation de passe sanitaire pour visiter les musées, les contraintes sécuritaires liées au plan Vigipirate, la difficulté à trouver des accompagnants pour les sorties scolaires.

Interrogée sur ce sujet par le rapporteur lors de son audition devant la commission, la ministre a expliqué que toute la difficulté résidait dans le fait que les visites de musées sont conditionnées à la présentation du passe sanitaire, alors que la fréquentation de l'école ne l'exige pas. Le rapporteur appelle donc le ministère de l'enseignement supérieur, le ministère de l'éducation nationale et le ministère de la culture à travailler de concert pour trouver rapidement une solution : il y a urgence à éviter que toute une génération d'élèves ne soit privée de sorties culturelles scientifiques, que l'école est parfois seule à assurer.

Quelle place pour le mécénat scientifique ?

La problématique du financement des établissements publics de diffusion de la culture scientifique a conduit le rapporteur à s'interroger sur la place du mécénat scientifique, question qui concerne aussi certains grands organismes de recherche. De ses entretiens avec les équipes d'Universcience et avec le directeur scientifique de l'Institut Pasteur, il dresse les trois constats suivants :

un contexte peu porteur : la réforme, en loi de finances pour 2020, des modalités de réduction d'impôt pour mécénat, puis la crise sanitaire ont rendu les entreprises plus fragiles et moins enclines à engager des budgets importants en faveur du mécénat ;

une tendance de fond : les mécènes souhaitent de plus en plus s'engager sur des projets, culturels ou scientifiques, et non sur le financement global d'un établissement ;

une conclusion : le mécénat ne peut pas être une ressource pérenne, mais constitue un complément de ressources particulièrement précieux en cas d'attrition des financements publics.

La commission de la culture, de l'éducation et de la communication a émis, lors de sa réunion plénière du 3 novembre 2021, un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés à la recherche dans le projet de loi de finances pour 2022.

EXAMEN EN COMMISSION

MERCREDI 3 NOVEMBRE 2021

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M. Laurent Lafon , président . - Nous examinons ce matin les crédits du projet de loi de finances pour 2022 relatifs à la recherche, à l'enseignement supérieur et au sport. Nous débutons par l'avis budgétaire consacré à la recherche.

Mme Laure Darcos , rapporteur pour avis des crédits de la recherche au sein de la mission « Recherche et enseignement supérieur » . - Le projet de loi de finances (PLF) pour 2022 constitue la deuxième marche budgétaire de la loi de programmation de la recherche (LPR), entrée en vigueur il y a près d'un an. Mon intention, dans cet avis, n'est toutefois pas de dresser un état des lieux de sa mise en oeuvre ; cela relève de la mission de contrôle que le président nous a confiée, à Stéphane Piednoir et à moi-même.

Je souhaite plutôt concentrer mon analyse sur l'Agence nationale de la recherche (ANR), devenue l'acteur clé de notre système de recherche, pour savoir si sa trajectoire financière exécutée en 2021 et prévue en 2022 correspond bien à celle que nous avions votée l'année dernière. Ainsi, sur les 5 milliards d'euros d'augmentation progressive du budget de la recherche publique entre 2021 et 2030, 1 milliard d'euros est destiné à l'Agence, dans l'objectif d'accroître son niveau d'intervention.

Jugeant la programmation proposée par le Gouvernement dans le cadre de la LPR à la fois trop longue - dix ans - et insuffisante sur les premières années, nous avions voté une programmation plus courte - sept ans - et plus ambitieuse. Bien que nous ayons dû accepter de la faire repasser à dix ans, afin de parvenir à un accord en commission mixte paritaire, nous avons obtenu du Gouvernement qu'il augmente son effort sur les deux dernières années du quinquennat, en intégrant à la programmation les crédits supplémentaires prévus dans le cadre du plan de relance.

La programmation inscrite à l'article 2 de la LPR prévoit ainsi un apport de plus de 400 millions d'euros à l'ANR en 2021. S'y ajoute une enveloppe de 100 millions d'euros pour la préservation de l'emploi de recherche et développement. L'exécution budgétaire pour 2021 montre le respect de la trajectoire programmée, puisque le budget d'intervention de l'ANR a progressé cette année de plus de 400 millions d'euros pour atteindre 1,19 milliard d'euros, soit un niveau inédit depuis la création de l'établissement en 2005.

Cette augmentation de moyens rend possible, dès cette année, l'atteinte de deux objectifs fondamentaux fixés par la LPR.

Le premier est le relèvement du taux de succès aux appels à projets. La LPR prévoit ainsi, entre 2021 et 2027, de porter ce taux à 23 %, puis à 30 %. Or, les résultats de l'appel à projets générique de l'ANR pour 2021 font état d'un taux de succès de 22,9 %. La cible de 23 % du premier palier est donc quasiment atteinte, ce dont je me félicite. Pour mémoire, au cours de la dernière décennie, on observait plutôt des taux compris entre 10 et 15 %.

Le second objectif est l'augmentation du taux de préciput, qui sert à couvrir les coûts indirects des projets de recherche. La LPR prévoit une nouvelle répartition du préciput entre les différentes parties prenantes et son relèvement de 19 % à 40 % à l'horizon 2027. Je me réjouis de constater que, dès cette année, la dynamique a été enclenchée, puisque le préciput atteint 25 % avec la ventilation suivante : 10 % pour la part « gestionnaire », contre 8 % en 2020, 13 % pour la part « hébergeur », contre 11 % en 2020, et 2 % pour la part « laboratoires » nouvellement introduite, soit un montant total de préciput de 170 millions d'euros, contre 100 millions en 2020. Je resterai toutefois très vigilante quant à l'évolution des crédits alloués directement aux laboratoires par le biais du préciput, le financement de la recherche française devant impérativement continuer à reposer sur le double pilier des crédits sur projets et des crédits de base.

L'exécution 2021 appelle une dernière remarque sur les 100 millions d'euros prévus pour la préservation de l'emploi en recherche et développement. Selon l'ANR, qui s'est vu confier la gestion de cette mesure, les premiers financements alloués atteignent à ce jour 54 millions d'euros. Le dispositif a connu un bon démarrage, mais la trajectoire de dépenses semble ralentir. Je n'ai malheureusement pas réussi à obtenir d'explications précises sur les raisons de cette décélération. Nous ne manquerons pas d'y revenir dans le cadre de notre travail de contrôle sur la LPR.

J'en viens maintenant à la trajectoire de l'ANR prévue dans le PLF pour 2022. Conformément à la LPR, ses moyens d'intervention continueront à progresser l'année prochaine grâce à un apport de 158 millions d'euros sur le programme 172 et de 142 millions d'euros au titre du plan de relance. . Ces financements supplémentaires doivent permettre à l'Agence de déployer son plan d'action 2022 et de poursuivre l'atteinte des objectifs fixés en termes d'amélioration du taux de sélection et d'augmentation du préciput. Malgré ce respect de la trajectoire, j'émets un bémol : comme l'année dernière, la coexistence de plusieurs supports budgétaires - programme 172, plan de relance - et le manque de précisions du bleu budgétaire rendent peu lisible la ventilation des apports de crédits.

Enfin, la LPR prévoit qu'au moins 1 % du budget d'intervention de l'Agence soit fléché sur le partage de la culture scientifique. Cette part de financement a trouvé, dès cette année, une traduction dans le lancement d'appels à projets spécifiques, l'incitation des bénéficiaires de financements de l'ANR à participer à des activités de transfert de connaissances vers les citoyens et la conclusion de partenariats avec des acteurs de l'audiovisuel public.

Signe que l'ANR s'est emparée de cette problématique, bien qu'il ne s'agisse pas de son coeur de métier, la promotion de la culture scientifique fait partie des objectifs de son plan d'action 2022, démarche que j'encourage pleinement. En effet, à l'heure où les fausses informations et les théories du complot circulent abondamment et font de plus en plus d'adeptes dans une société en perte de confiance, je crois urgent d'enrayer la perte de crédit de la parole scientifique, de refonder le rapport des citoyens à la rationalité scientifique et de développer la culture scientifique chez les plus jeunes.

La LPR peut être porteuse d'une dynamique en ce sens, plusieurs acteurs du secteur me l'ont confirmé. Sa première année de mise en oeuvre a déjà donné lieu à des concrétisations, dont certaines ont été mentionnées par la ministre la semaine dernière, par exemple les actions menées par l'ANR dans le cadre de sa politique d'appels à projets, la création de prix récompensant l'engagement en faveur de la médiation scientifique ou encore le lancement d'un appel à projets pour des courts métrages valorisant les femmes dans les métiers scientifiques.

Je regrette cependant que le rapport prévu par la LPR visant à dresser un état des lieux exhaustif des politiques menées en faveur de la culture scientifique n'ait pas été remis au Parlement, alors qu'il devait l'être dans les six mois suivant la promulgation de la loi. Sa transmission dans les délais aurait permis, dès cette année, de dresser le bilan des actions menées jusqu'alors et de servir de base à une refondation ambitieuse de la politique publique de la culture scientifique.

J'estime aussi indispensable de mettre des moyens à la hauteur des ambitions affichées. Le PLF pour 2022 consacre un peu plus de 20 millions d'euros à l'ouverture de la science vers la société dans le cadre du programme 172. Or je crains que ces financements soient davantage fléchés sur les transferts des résultats de la recherche vers le monde de l'entreprise qui, certes, sont un sujet très important, mais ne relèvent pas à proprement parler de la culture scientifique.

Je rappelle que celle-ci est régulièrement le parent pauvre du budget de la mission « Recherche et enseignement supérieur » (Mires). Depuis que je suis rapporteur pour avis, je pointe le trop faible soutien de l'État aux établissements publics de diffusion de la culture scientifique, alors que ceux-ci mènent des politiques très volontaristes et connaissent un grand succès public.

C'est pourquoi j'ai souhaité, cette année, mettre un coup de projecteur sur deux d'entre eux, Universcience et le Muséum national d'Histoire naturelle, dont j'ai rencontré les équipes. Ces deux établissements, aux statuts et tutelles différents, ont en commun d'être des acteurs clés du partage des savoirs scientifiques au plus grand nombre, reconnus pour leur histoire, l'exigence de leur démarche et leur rayonnement. Alors que la crise sanitaire a soulevé de nombreuses questions sur les relations entre sciences et société, ils sont plus que jamais convaincus de leurs missions, notamment expliquer la démarche scientifique, susciter le goût des sciences, développer l'esprit critique, tisser des liens entre scientifiques et non-scientifiques, susciter des vocations et donner des outils de compréhension du monde contemporain.

Cependant, l'ambition de leurs projets culturels et scientifiques se heurte à une équation financière délicate. Sur la dernière décennie, les subventions de l'État se sont caractérisées au mieux par une stabilisation, au pire par une diminution, les obligeant à compter sur leurs ressources propres de billetterie, de location d'espaces ou de mécénat, pour faire face à leurs besoins d'investissement, qui sont très importants. C'est finalement grâce à une gestion rigoureuse de leurs directeurs respectifs que les deux établissements se sont maintenus à flot, mais leur soutenabilité financière reste précaire, d'autant plus depuis la survenue de la crise sanitaire. Celle-ci a en effet eu une incidence très lourde sur leurs recettes commerciales, avec des pertes de l'ordre de 10 millions d'euros pour Universcience et de 42 millions d'euros pour le Muséum, en 2020 et 2021.

Dans ce contexte, Universcience a bénéficié, en 2021, d'un soutien de l'État sous plusieurs formes : 2 millions d'euros au titre de l'amorçage de la remise à niveau de sa subvention d'investissement, qui avait fortement baissé en 2017 et 2018, 13,7 millions d'euros de dotation exceptionnelle du plan de relance et 23 millions d'euros en investissement dans le cadre de la fin de gestion. Ces aides vont permettre à l'établissement de ne pas courir de risque de rupture de trésorerie à court terme, mais sa situation à moyen terme demeure fragile étant donné l'ampleur de ses besoins d'investissement. Le Muséum a reçu 4 millions d'euros d'aide de l'État, soit moins de 10 % des pertes envisagées, ce qui n'est pas de nature à lui redonner les marges de manoeuvre budgétaires nécessaires.

Si les deux établissements se réjouissent du retour progressif des flux de fréquentation et de billetterie au niveau d'avant crise, en particulier en période de vacances scolaires, ils se disent très inquiets du fait que les groupes scolaires ou associatifs demeurent les grands absents. C'est pourquoi j'appelle le ministère de l'enseignement supérieur, le ministère de l'éducation nationale et le ministère de la culture à travailler de concert pour trouver rapidement une solution : il y a urgence à éviter que toute une génération d'élèves ne soit privée de sorties culturelles scientifiques, que l'école est parfois la seule à assurer.

Compte tenu du respect de la trajectoire budgétaire fixée par la LPR et des hausses de crédits programmées pour 2022, je vous propose d'émettre un avis favorable sur l'adoption des crédits consacrés à la recherche de la mission « Recherche et enseignement supérieur » du PLF pour 2022.

M. Pierre Ouzoulias . - Je salue la qualité de votre rapport, qui montre que le Sénat poursuit son travail de suivi de ce budget. Il sera important de confirmer le respect des engagements du Gouvernement.

Face aux enjeux qui attendent la planète et l'humanité, certains pays ont investi massivement dans la recherche et la connaissance pour aborder la conversion climatique. C'est par exemple le cas de l'Allemagne, qui va consacrer 3,5 % de son PIB pour la seule recherche publique, alors que la France vise 3 % du PIB pour l'ensemble de sa recherche. De son côté, le Royaume-Uni consacrera plus de 1 % de son PIB à la recherche publique en faveur de la neutralité carbone. La recherche publique a un intérêt réel en matière de planification de la recherche, qui doit être appliquée et impliquée dans la conversion du système productif. Elle est un levier pour les entreprises soumises à la concurrence internationale.

Avec le dernier budget du quinquennat, ce Gouvernement n'aura pas pris la mesure de la nécessité d'un investissement massif dans la recherche. C'est une déception, car la France va prendre du retard dans une conversion dans laquelle d'autres pays se sont engagés. En raison de ce défaut total d'ambition du Gouvernement dans la recherche, le groupe CRCE ne votera pas l'adoption de ces crédits.

M. Max Brisson . - Je remercie à mon tour le rapporteur, dont je partage les conclusions avec les membres du groupe Les Républicains. Nous ne pouvons nier que l'effort est réel et que la trajectoire prévue est respectée. Comme Laure Darcos, je considère qu'il est important d'insister sur le développement de la culture scientifique si l'on pense que la raison doit l'emporter.

Même si nous avons pu progresser, grâce à votre travail, dans le décorticage d'emboîtements budgétaires complexes, l'imbrication de la LPR avec « France Relance » demeure particulièrement difficile à comprendre. Pour citer une ancienne ministre, quand c'est flou, c'est qu'il y a un loup.

S'il faut saluer cette trajectoire, le constat reste que l'Allemagne dépose 15 % des brevets en Europe, contre 6 % pour la France. C'est dire le retard pris.

Je n'ai pas été convaincu par la réponse de la ministre sur l'articulation de la LPR et du plan de relance et, le 12 octobre dernier, le chef de l'État annonçait une nouvelle ambition avec le plan « France 2030 ». Quelle est l'articulation entre ce nouveau plan et le budget de l'État ?

Mme Monique de Marco . - Merci pour la clarté de votre rapport. J'approuve la nécessité de soutenir la culture scientifique.

Ce budget est en phase avec la LPR, contre laquelle nous avions voté. Nous pouvons certes saluer la dynamique initiée et le taux de succès de l'ANR, mais ce budget reste en deçà des besoins et confirme nos inquiétudes. On n'observe que 850 créations d'emplois sous plafond. Pour la majorité des opérateurs relevant du programme 172, comme le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) et l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae), les emplois sous plafond stagnent voire baissent, alors que les emplois hors plafond progressent.

Ensuite, nous sommes réticents s'agissant du renforcement des appels à projets. L'ANR voit son budget augmenter de 17 %, bien plus que les financements de base des laboratoires. Mais ce mode de financement a ses risques : surcharge administrative, manque de visibilité, focalisation sur certains sujets et problèmes de méthodologie.

Par ailleurs, quelle logique conduit au maintien du crédit d'impôt recherche (CIR) ? Cette niche fiscale se monte à plus de 7 milliards d'euros, c'est-à-dire autant que le programme 172, mais son fonctionnement est opaque et son utilité discutée. Ainsi, certaines entreprises en ont bénéficié alors qu'elles ont supprimé des emplois de recherche et développement. Pourriez-vous nous donner des éclaircissements à ce sujet ?

Pour conclure, dans le prolongement de notre vote sur la LPR, le GEST votera contre l'adoption de ces crédits.

M. Bernard Fialaire . - Je salue à mon tour la clarté de l'exposé dans un domaine pourtant complexe.

Ayant voté pour la LPR, et pour une fois que les engagements sont tenus, voire dépassés, avec le plan de relance, nous voterons pour ce budget.

M. Lucien Stanzione . - Félicitations pour ce rapport concis et précis. Le groupe SER relève néanmoins des manques au niveau budgétaire, c'est pourquoi il s'abstiendra.

Mme Laure Darcos , rapporteur pour avis . - Une précision préliminaire : en tant que rapporteur pour avis, mon rôle n'est pas de faire une analyse exhaustive des crédits - c'est la mission de la commission des finances, mais de mettre en lumière des sujets spécifiques, en l'occurrence cette année la situation financière de l'ANR et la culture scientifique.

Dans la continuité de notre travail de rapporteurs au fond et pour avis sur la LPR, nous poursuivons, avec Jean-François Rapin, le suivi scrupuleux de la trajectoire budgétaire programmée.

En écho à ce qu'a dit Pierre Ouzoulias sur l'avancée prise par nos voisins européens, avec l'irruption de la crise sanitaire, j'estime qu'il aurait dû y avoir un sursaut national bien plus puissant. Par exemple, lors d'une réunion de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst), les représentants des académies de médecine et des sciences ont confirmé que l'ARN messager était étudié dans nos laboratoires depuis 1995 ! Cependant, les gouvernements successifs et les laboratoires privés n'ont pas voulu le développer faute de rentabilité. Nous avons d'excellents scientifiques, mais ne pouvons pas les retenir et ne leur donnons pas les moyens de travailler dans de bonnes conditions.

Sur le CIR en revanche, Monique de Marco, nous sommes en désaccord : la recherche publique et privée ne s'opposent pas, bien au contraire, elles se stimulent l'une et l'autre.

Il est vrai que l'ambition nationale en matière de recherche n'est pas au rendez-vous. Mais, il faut reconnaître que cette deuxième année de mise en oeuvre de la LPR est bien conforme à la programmation votée, avec un bémol toutefois : la difficulté à s'y retrouver entre les différents supports budgétaires.

Enfin, on l'a vu lorsque nous avons auditionné la ministre Frédérique Vidal : la publication des décrets d'application a pris beaucoup de retard, empêchant le déploiement de certains nouveaux dispositifs et alimentant les critiques L'effet d'embouteillage du guichet unique de Bercy est à cet égard fort dommageable.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés à la recherche au sein de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Mardi 12 octobre 2021

- Agence nationale de la recherche : M. Thierry DAMERVAL , président-directeur général.

Vendredi 22 octobre 2021

- Universcience Cité des sciences et de l'industrie : Mmes Céline PRÉVOST-MOUTTALIB , directrice générale déléguée, et Pauline SILHOL , chargée de mission.

LISTE DES DÉPLACEMENTS

- Institut Pasteur : MM. Christophe d'ENFERT , directeur scientifique, et Louis MARTY , directeur de cabinet du président.

- Muséum national d'Histoire naturelle (MNHN) : MM. Bruno DAVID , président du Muséum, Jérôme GESTIN , directeur général délégué adjoint, Mme Alice LEMAIRE , directrice des bibliothèques du Muséum, et M. David NAVARO , chef de cabinet du président du Muséum.

ANNEXE

Audition de Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

MERCREDI 27 OCTOBRE 2021

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M. Laurent Lafon , président . - Nous poursuivons cet après-midi notre cycle d'auditions sur le projet de loi de finances pour 2022 en accueillant Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.

Avant de nous présenter le budget de la mission « Recherche et enseignement supérieur » pour 2022 - auquel viennent s'ajouter des crédits de la mission « Relance » - il me semble important que vous nous donniez des informations sur le déroulement de la rentrée dans les établissements d'enseignement supérieur, sur le plan tant sanitaire - avec la reprise des cours en présentiel en métropole et avec des cours restant en mode hybride dans des collectivités d'outre-mer -, que des capacités d'accueil, compte tenu de la poursuite de la hausse des effectifs, liée notamment au taux exceptionnel de réussite au baccalauréat cette année.

Par ailleurs, vous n'êtes pas sans savoir que notre commission a beaucoup travaillé ces derniers mois sur l'enseignement supérieur et la recherche dans le cadre de son programme de contrôle, que ce soit dans le cadre de la mission, confiée au printemps à notre collègue Sonia de La Provôté, sur la mise en oeuvre de la réforme des études de santé ou avec la mission d'information, conduite par Céline Boulay-Espéronnier et Bernard Fialaire sur la contribution de vie étudiante et de campus (CVEC). De nombreux membres de la commission ont également participé activement à la mission d'information sur les conditions de la vie étudiante en France, présidée par Pierre Ouzoulias et dont j'étais le rapporteur. Nous souhaiterions donc vous entendre plus spécifiquement sur ces trois sujets, sur lesquels nous avons émis des propositions.

En matière de recherche, secteur qui nous avait intensément mobilisés en 2020, l'année 2021 est la première année de mise en oeuvre de la loi de programmation pour la recherche (LPR) et le projet de loi de finances (PLF) pour 2022 est la traduction de sa deuxième marche budgétaire. Nous sommes évidemment très intéressés de savoir où vous en êtes de la publication des décrets d'application qui conditionnent l'entrée en vigueur de plusieurs nouveaux dispositifs, et si les engagements budgétaires ambitieux, pour lesquels nous avons oeuvré, sont bien au rendez-vous.

Après votre intervention liminaire, je donnerai la parole successivement à nos rapporteurs budgétaires Stéphane Piednoir, pour l'enseignement supérieur, et Laure Darcos, pour la recherche, puis aux orateurs des groupes et aux membres de la commission qui souhaiteront vous poser des questions.

Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation . - L'exercice 2022 est le cinquième budget que j'ai l'honneur de vous présenter et j'en suis particulièrement fière, car il traduit, poursuit et consacre tout l'engagement de ce gouvernement en faveur de l'enseignement supérieur et de la recherche, ainsi que des étudiants et des personnels, dont je tiens à saluer l'engagement, le courage et la résilience pendant la période de crise sanitaire. Dans l'ensemble des établissements - j'ai pu le constater en me déplaçant sur de nombreux sites, c'est le plaisir de retrouver les cours et la vie étudiante en présentiel qui domine. Je salue aussi l'esprit de responsabilité des étudiants, qui ont massivement répondu à l'appel à la vaccination sans laquelle cette rentrée n'aurait pas été possible. Les 18-24 ans ont un taux de vaccination excellent, et il est encore supérieur pour les étudiants. De nombreux établissements ont ainsi un taux de couverture de 100 % et ont mis en place des dispositifs sur site pour accueillir les étudiants internationaux qui n'avaient pu être pleinement vaccinés dans leur pays d'origine.

Ce cinquième budget est celui de la continuité et de l'aboutissement. Il représente 24,8 milliards d'euros de crédits au sein des 29,2 milliards d'euros de la mission « Recherche et enseignement supérieur », soit une hausse de 717 millions d'euros et de 650 emplois par rapport à la loi de finances initiale pour 2021. Jamais un gouvernement n'avait déployé de tels moyens pour son enseignement supérieur, sa recherche et son innovation.

Ces 717 millions d'euros supplémentaires se décomposent en trois principales briques : la deuxième marche de la LPR, qui représente 472 millions d'euros, la vie étudiante, à hauteur de 179 millions d'euros, et le programme « Enseignement supérieur et recherche universitaire », pour 66 millions d'euros, avec un effort particulier pour l'accompagnement des étudiants.

Avec ces trois briques, nous poursuivons la dynamique enclenchée dès 2017 avec le « Plan Étudiants » puis la loi relative à l'orientation et à la réussite des étudiants (ORE), qui a permis de créer plus de 83 000 places dans l'enseignement supérieur public.

Avec ces trois briques, nous faisons deux fois plus en une seule année que sous l'ensemble du précédent quinquennat. Depuis 2017, ce sont 2,4 milliards d'euros qui ont ainsi été ajoutés au budget de la recherche et l'enseignement supérieur, auxquels il faut ajouter les crédits du plan « France Relance », du programme d'investissements d'avenir (PIA) et du plan « France 2030 ».

Cette trajectoire et cet engagement, nous les avons construits avec la représentation nationale, et je tiens à saluer l'ensemble des travaux menés par le Sénat ces cinq dernières années, qu'il s'agisse des travaux sur la CVEC de Mme Céline Boulay-Espéronnier et de M. Bernard Fialaire, de ceux de Mme Sonia de La Provôté sur la réforme des études de santé, ou encore ceux de M. Pierre-Antoine Levi sur la restauration étudiante. Je pense bien évidemment aussi à votre engagement à tous lors de l'examen de la LPR l'an dernier ou, plus récemment, aux travaux de la mission d'information sur les conditions de la vie étudiante en France.

Concernant la condition étudiante, nos étudiants ont été tout particulièrement affectés par la crise, et ils sont une fois encore l'absolue priorité de mon ministère. C'est ainsi que 179 millions d'euros supplémentaires seront consacrés en 2022 à l'amélioration des conditions de vie étudiante, dont 151 millions d'euros pour les bourses sur critères sociaux. Près de 20 millions d'euros soutiendront les actions à destination des étudiants déployées par les centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires (Crous).

Cet engagement envers nos étudiants se traduit par une revalorisation des bourses sur critères sociaux (BCS) qui représentent 2,4 milliards d'euros d'aides directes. En cette rentrée 2021, les montants des bourses ont été revalorisés pour la troisième année consécutive, de 1 %. Ils avaient déjà été rehaussés de 1,2 % à la rentrée 2020 et de 1,1 % à la rentrée 2019.

L'augmentation prévisionnelle du nombre de boursiers a été prise en compte dans ce budget. La mise en paiement à date fixe des bourses sur critères sociaux le 5 de chaque mois bénéficie à l'ensemble des étudiants et, comme l'année dernière, tous ceux qui avaient un dossier complet ont pu recevoir le versement anticipé de leur première mensualité de bourse.

La lutte contre la précarité alimentaire continue d'occuper une place centrale dans notre action. C'est pourquoi nous poursuivons cette année la mesure du repas à un euro pour les étudiants, boursiers et non-boursiers, précaires. Ce dispositif a permis de servir 14,4 millions de repas entre janvier et juin 2021, et pour le seul mois de septembre, plus de 2 millions de repas à un euro ont été servis par les Crous. Ce dispositif est financé à hauteur de 49 millions d'euros dans le projet de budget pour 2022. Toutefois, ce n'est pas la seule mesure que nous mettons en oeuvre : tous les étudiants bénéficient d'un repas complet, équilibré et de qualité au tarif social de 3,30 euros, et ce grâce à la contribution de l'État et l'impulsion donnée par la proposition de loi de M. Levi, qui a permis de révéler un angle mort de nos politiques publiques. Nous allons ainsi déployer des dispositifs d'accès à la restauration dans les territoires les plus éloignés des métropoles universitaires et de leurs services de restauration.

Les Crous assurent aussi le déploiement de distributeurs de protections périodiques gratuites. Ce dispositif sera amplifié, avec un financement de 8 millions d'euros en 2022.

Parmi les mesures déployées pendant la crise et qu'il m'a semblé impératif de pérenniser, je voudrais mentionner les référents étudiants. Leur apport a été considérable, et ils seront plus de 1 000 cette année, salariés par les Crous au plus près de leurs pairs. Je rappelle également que 20 000 postes de tuteurs étudiants ont été créés à l'automne dernier et qu'ils sont eux aussi reconduits pour cette rentrée. Depuis janvier, plus de 3,6 millions d'heures de tutorat ont été dispensées.

L'accompagnement psychologique des étudiants mis en place en 2021 se poursuivra également en 2022, comme vous le préconisiez d'ailleurs dans les conclusions de la mission d'information. Permettez-moi de rappeler quelques chiffres : 70 000 séances ont été dispensées par plus de 1 700 professionnels, via la plateforme ou par le biais des services de santé universitaires.

Un autre élément majeur de la vie étudiante est le logement. C'est pourquoi le gel de l'indexation des loyers des résidences universitaires est prolongé jusqu'à la rentrée 2022.

Enfin, les étudiants vont bénéficier du bouclier énergie annoncé par le Premier ministre la semaine dernière, et ils seront ainsi concernés par l'indemnité inflation. Les boursiers et, au-delà, tous les étudiants, salariés ou sans activité, en situation d'autonomie, c'est-à-dire disposant de leur propre foyer fiscal, bénéficieront de cette indemnité de 100 euros. En tout, 1,7 million d'étudiants seront concernés, et ce sans démarche particulière à faire.

La CVEC est aussi utilisée par les Crous et les établissements continuent d'accompagner les étudiants les plus fragiles, avec des cartes d'achat, la livraison de matériels informatiques et des abonnements. On va ainsi au-delà des objectifs initiaux de la CVEC, qui étaient l'accompagnement de la santé étudiante et le soutien aux initiatives étudiantes pour la vie de campus.

En outre, 66 millions d'euros supplémentaires seront consacrés en 2022 au programme « Vie étudiante », et permettront d'abonder la subvention pour charges de service public versée aux établissements.

Cela permettra tout d'abord de renforcer les actions en faveur de la réussite étudiante, dans le cadre de la mise en oeuvre de la loi relative à l'orientation et à la réussite des étudiants (ORE) et du plan « Égalité des chances », et avec les moyens complémentaires de « France Relance », pour mieux répondre à la diversité des profils des étudiants et accueillir les nouveaux bacheliers. Le volet financier du « Plan Étudiants », je le rappelle, avait été adopté dans le cadre de la loi de finances pour 2018. Cette programmation, respectée à l'euro près, a été amplifiée par les financements issus du plan de relance.

Il s'agit ensuite de poursuivre la réforme des études de santé, sur laquelle vous êtes tout particulièrement mobilisés. Ainsi, le nombre de places dans les filières de médecine, de maïeutique, d'odontologie et de pharmacie augmente à nouveau cette année ; les enseignements et leurs modalités d'évaluation s'appuieront davantage sur des mises en situation pratiques, notamment dans le second cycle.

Je tiens à le rappeler, grâce à cette réforme, ce sont 17 660 places qui ont été offertes dans les quatre filières que je viens de mentionner pour la rentrée 2021, soit 2 663 de plus que pour la rentrée 2020. Cette augmentation concerne particulièrement la filière médecine avec 11 173 places ouvertes cette année, soit 1 812 nouvelles places. Cette augmentation est inédite depuis cinquante ans.

Ce budget pour 2022 traduit, enfin, l'engagement continu et résolu de mon ministère pour la recherche française. La LPR, que vous avez adoptée il y a maintenant un an, prévoit un réinvestissement massif et progressif de 25 milliards d'euros sur dix ans. En 2021, cette première marche nous avait permis d'abonder de 400 millions d'euros supplémentaires le budget de la recherche, contre 472 millions d'euros cette année.

Dans le détail, 334 millions d'euros seront consacrés au programme 172 « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires » et 138 millions d'euros au programme 150 « Formations supérieures et recherche universitaire ».

Ces crédits permettront d'abord d'améliorer la rémunération des personnels, à hauteur de 114 millions d'euros supplémentaires. Ce montant représente la deuxième marche des mesures prévues par la LPR et l'accord syndical du 12 octobre 2020, après les 92 millions d'euros déjà engagés en 2021. Il s'agit ainsi d'améliorer la rémunération de tous : chercheurs, ingénieurs, techniciens, fonctionnaires et contractuels, dans les organismes comme dans les universités. Outre ces hausses de rémunération, 800 postes de maître de conférences deviendront des postes de professeur d'université.

Pour les personnels bibliothécaires, ingénieurs, administratifs, techniciens, sociaux et de santé (BIATSS), en plus de la revalorisation du point d'indice pour les catégories C, nous allons ouvrir au cours de l'année universitaire 1 046 transformations d'emplois vers la catégorie supérieure. De plus, 17 millions d'euros permettront de revaloriser l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (IFSE) et d'engager la convergence indemnitaire prévue par l'accord syndical précité.

Par ailleurs, 16 millions d'euros supplémentaires permettront de poursuivre les actions déployées en faveur des étudiants qui s'engagent dans une thèse. Il s'agit d'augmenter à la fois le nombre de thèses financées par l'État de 20 % pour qu'une majorité de doctorants bénéficie d'une solution de financement, et le montant minimal réglementaire de la rémunération des doctorants de 30 %, soit 1,5 SMIC, à l'horizon de 2023. C'est la première fois qu'un gouvernement s'engage à ce point pour ses doctorants. Ainsi, 279 contrats doctoraux supplémentaires ont été conclus cette année, avec une première augmentation de 100 euros brut par mois pour les doctorants recrutés en 2021.

Enfin, grâce aux financements prévus dans le cadre de la LPR et du budget 2022, plus aucun chercheur ne sera rémunéré à moins de deux SMIC.

Cette deuxième étape décisive dans la montée en puissance de la LPR se traduit également par une augmentation des moyens dédiés à l'Agence nationale de la recherche (ANR), dont les financements sont revalorisés à hauteur de 131 millions d'euros. Cela permet d'élever le taux de sélection des projets à 23 %, contre 16 % seulement en 2020.

Par ailleurs, je suis convaincue que le financement sur appel à projets et le financement de base ne s'opposent pas. La recherche n'a jamais souffert d'un excès de financement, fût-il compétitif, mais plutôt de décennies de gel budgétaire, ce qui est désormais derrière nous avec l'adoption de la LPR.

D'une part, les nouveaux moyens de l'ANR permettent, par une redéfinition du préciput, de favoriser la solidarité entre les équipes dans les laboratoires et de soutenir les établissements et les politiques de sites : 73 millions d'euros supplémentaires seront mis à la disposition des établissements et des laboratoires en 2022.

D'autre part, les moyens de base des laboratoires seront renforcés, car la recherche ne peut s'appuyer sur la seule logique des appels à projets. Vous aviez insisté sur ce point lors de vos débats. Les financements de base devaient donc être confortés. Ils l'ont été, et le seront à nouveau en 2022, puisque le budget des universités et des organismes de recherche augmente de 127 millions d'euros, ce qui permettra d'accroître les recrutements et d'augmenter de 15 % par rapport à 2020 la dotation de base des laboratoires, pour un objectif de 25 % à l'horizon de 2023.

Le rayonnement de la recherche française dépend aussi de la qualité de ses infrastructures, et c'est pourquoi 54 millions d'euros supplémentaires y seront consacrés.

De plus, 10 millions d'euros viendront financer la nouvelle agence ANRS-maladies infectieuses émergentes (ANRS-MIE), afin d'amplifier son action de coordination et de financement de la recherche sur les maladies infectieuses.

Enfin, plus de 20 millions d'euros seront consacrés à l'ouverture de la science vers la société, sujet auquel vous êtes attachés et qui a désormais toute sa place dans mon ministère. Ces financements permettront d'amplifier la diffusion de la culture scientifique et les transferts des résultats de la recherche vers le monde de l'entreprise.

Ces financements pour l'enseignement supérieur, la recherche et la vie étudiante sont prolongés et renforcés par ceux des plans « France Relance » et « France 2030 ».

« France Relance » consacre 7,8 milliards d'euros supplémentaires, au sein de la mission spéciale « Relance », à l'accueil et à la formation des jeunes aux métiers de demain, à la rénovation énergétique des bâtiments universitaires et à la préservation des compétences professionnelles en recherche et développement.

Dans la continuité de « France Relance », le Président de la République a annoncé l'ambitieux plan d'investissement « France 2030 », doté de 30 milliards d'euros et où la sphère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation occupera un rôle central. Tour d'abord, la formation des talents de demain, tournée vers les filières et les métiers d'avenir, bénéficiera de 2,5 milliards d'euros.

Ensuite, mieux soigner était déjà la priorité du plan « Innovation Santé 2030 », annoncé en juin et qui prévoit 1 milliard d'euros au profit de la recherche en santé. D'ici à 2030, notre objectif est d'avoir au moins 20 biomédicaments contre les cancers, les maladies émergentes et les maladies chroniques et de créer en France les dispositifs médicaux de demain. L'agence d'innovation en santé aura un rôle essentiel à jouer.

Enfin, il faut explorer l'espace et les fonds marins. Le secteur spatial international est en plein bouleversement avec l'émergence du new space et de nouveaux acteurs ; la France doit y prendre toute sa part. Pour cela nous devons faire évoluer notre industrie en y faisant entrer les start-up et l'innovation de rupture. Nos objectifs sont de développer des mini-lanceurs réutilisables, des microsatellites, les constellations de demain et l'ensemble des innovations technologiques et de services au coeur de ce new space . En outre, la France, deuxième puissance maritime du monde, se doit d'investir dans l'exploration des fonds marins.

Ainsi, ce cinquième budget permet de poursuivre le renforcement de l'enseignement supérieur et de la recherche de notre pays. Jusqu'au bout, le soutien de nos étudiants et de nos personnels aura été au centre de nos préoccupations, et le Sénat y a occupé toute sa place par ses missions d'évaluation et de contrôle.

M. Stéphane Piednoir , rapporteur pour avis des crédits de l'enseignement supérieur . - Merci pour cet exposé complet, dans lequel vous avez annoncé des moyens financiers qui illustrent les effets de la LPR. Si les crédits sont bien inscrits et visibles, pourriez-vous nous donner quelques indications sur les décrets d'application, dont certains tardent ?

En outre, on ne peut nier les efforts substantiels consentis depuis quelques années dans le domaine de l'enseignement supérieur et de la recherche, mais l'agrégation de plusieurs plans me laisse dubitatif : les montants sont certes massifs, mais ils sont présentés sur dix ans. Sans parler de manipulation des chiffres, cela invite à les relativiser.

La vie étudiante reprend sur les campus, c'est une bonne chose pour le moral et pour la réussite des étudiants, mais encore faut-il que les campus soient en bon état. Des professeurs dynamiques ne suffisent pas. Or l'on connaît l'état de vétusté du parc immobilier universitaire, qui représente une part importante du patrimoine de l'État. Je suis satisfait par les moyens octroyés pour la rénovation énergétique des bâtiments. Cependant, d'autres leviers pourraient être activés. Une troisième vague de dévolution est-elle envisagée, et selon quel calendrier ? Certaines universités sont-elles déjà volontaires ?

J'ai par ailleurs été alerté, au cours de mes auditions, sur la situation particulièrement tendue de l'activité de restauration des Crous, due à une conjonction de plusieurs facteurs : hausse des effectifs d'étudiants, attractivité du repas à un euro, difficultés à recruter du personnel dans le secteur de la restauration et problèmes d'approvisionnement. Le Centre national des oeuvres universitaires et scolaires (Cnous) se dit désemparé, sans aucun levier d'action à sa portée. Comment comptez-vous répondre à cette situation ?

En novembre 2020, le Premier ministre avait annoncé plusieurs mesures visant à soutenir l'emploi étudiant, fortement affecté par la crise. Parmi celles-ci figurait la sortie des emplois étudiants du plafond d'emplois des Crous. Un an plus tard, il semble que cela ne soit pas effectif. Pourriez-vous nous apporter des précisions sur ce sujet ?

Nous serions aussi intéressés d'avoir des éléments sur les difficultés, récurrentes, d'étudiants titulaires de licences à entrer en master, ainsi que sur les manques de recrutements dans les écoles d'enseignement supérieur.

Enfin, la Cour des comptes a récemment formulé des propositions d'évolution de l'enseignement supérieur. Que pensez-vous de celle consistant à créer des collèges universitaires et des moyens qui pourraient être mis à leur disposition, éventuellement avec d'autres sources de financement ? Ne serait-ce pas le seul levier pour que nos universités s'en sortent par le haut ?

Mme Laure Darcos , rapporteur pour avis des crédits de la recherche . - Sur la mise en oeuvre de la LPR, j'observe moi aussi que les décrets d'application prennent du retard, nous en avons d'ailleurs déjà parlé ensemble. J'ai cru comprendre qu'il y avait « un embouteillage » des décrets au niveau de Bercy... serez-vous en mesure de tous les publier avant la fin du quinquennat ?

Par ailleurs, où en sont les discussions entre les différents acteurs concernés sur la part « site » du préciput ? Tout comme vous, je me félicite bien sûr de cette progression du taux de sélection des projets à 23 % et, plus généralement, de la bonne dynamique observée depuis la prise de fonctions de Thierry Damerval.

Concernant la préservation des emplois de recherche et développement, le processus a certes bien démarré, mais il semble que la cible des 100 millions ne sera pas forcément atteinte... pourriez-vous nous en dire plus ?

Sur la culture scientifique, sujet que j'ai choisi d'approfondir cette année parce qu'il me paraît fondamental en ces temps de défiance à l'égard de la parole scientifique, le rapport annexé à la LPR prévoit de nombreuses mesures pour améliorer sa diffusion et renforcer les relations entre la science et la société, dont le fait d'y consacrer 1 % du budget d'intervention de l'ANR. Lesquelles ont été effectivement mises en oeuvre ? Comment comptez-vous enclencher une véritable dynamique ?

Plusieurs acteurs du secteur, que j'ai rencontrés, dont Universcience et le Muséum nationale d'Histoire naturelle, constatent un retour encourageant des visiteurs individuels, mais pas celui des groupes scolaires. Or il va sans dire que l'école joue un rôle fondamental dans l'acculturation des enfants à la science. Comme moi, vous ne vous contentez pas de la seule fête de la science... Une action concertée avec l'Éducation nationale ne serait-elle pas nécessaire pour inciter les équipes pédagogiques et administratives à réorganiser ces sorties scolaires plus régulièrement ? En particulier - et nous pourrions associer le ministre de l'éducation nationale à cette démarche -, il est fondamental d'initier plus de jeunes filles aux sections scientifiques.

Enfin, au-delà de l'acculturation, il faut former les enfants et les jeunes au sens critique, on le voit avec l'influence des réseaux sociaux et la diffusion du complotisme.

Mme Frédérique Vidal, ministre . - Sur les décrets d'application tout d'abord, nous tiendrons l'objectif de 100 % de publication d'ici à la fin de l'année. Je remarque d'ailleurs que ceux qui s'inquiètent aujourd'hui de leur parution sont parfois ceux qui refusaient leur inscription dans la loi...

Vingt-neuf décrets et sept ordonnances étaient prévus pour l'application de la loi, sans compter les arrêtés et les circulaires. Douze décrets et deux ordonnances sont d'ores et déjà publiés au Journal officiel, soit 40 % des textes d'application. La quasi-totalité des arrêtés et des circulaires est elle aussi publiée.

Sur les vingt-neuf décrets prévus, vingt-et-un devaient être examinés par le Conseil d'État dont dix-huit, portant sur des questions de ressources humaines ou statutaires, font l'objet de procédures spécifiques de consultation, particulièrement longues. Toutefois, le processus est enclenché. Restent encore trois décrets simples à publier sur onze : celui qui porte sur l'intégrité scientifique, déjà présenté à la séance d'octobre du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (Cneser), celui qui traite du partage des préciputs, qui le sera à celle de mi-novembre, et le décret relatif à la coordination des évaluations par le Haut Conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (Hcéres), qui pourrait être présenté à l'occasion de la séance du 14 décembre.

Parmi les autres décrets, ceux qui portent sur les chaires de professeur junior et le statut du Hcéres doivent être examinés en Conseil d'État en novembre, les rapporteurs ayant déjà tenu leurs réunions de travail. Trois textes ont déjà fait l'objet d'un retour de la direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP), et sept ont été examinés en octobre. Des sept ordonnances, trois sont programmées en conseil des ministres, et deux sont déjà publiées au Journal officiel . L'arrêté modifiant la rémunération minimale des doctorants a été publié le 17 octobre, c'était une priorité pour nous. Vous le voyez, tout est dans les tuyaux.

Sur l'agrégation des financements associés aux plans, je précise que la durée de dix ans de la LPR donne une visibilité à la recherche, avec 500 millions d'euros supplémentaires par an. Le plan de relance prévoit 7 milliards d'euros sur deux ans, le PIA est échelonné sur sept ans, et « France 2030 », tout comme la LPR, l'est sur dix ans. Cela permet d'accompagner la recherche, si besoin d'accélérer le mouvement, et de mettre en place des formations pour les métiers de demain. Il faut éviter l'inadéquation entre formation et besoins réels : les étudiants doivent certes être formés aux futurs métiers, mais ceux-ci évoluent rapidement. Il faut donc aussi apprendre à apprendre, pour éviter que leurs compétences ne deviennent obsolètes.

On observe des difficultés de recrutement dans tout le secteur de la restauration, et les Crous ne font pas exception. Sur les coûts d'approvisionnement, nous continuons de les accompagner pour assurer des repas de qualité, et nous compensons intégralement le coût du repas à un euro.

Sur l'immobilier universitaire, nous travaillons avec plusieurs établissements pour continuer à aller vers plus de dévolution, mais nous voulons la faire par segments. En effet, les compétences nécessaires en matière de gestion immobilière ne sont pas présentes dans tous les établissements. Nous envisageons plutôt des partenariats avec les collectivités territoriales, qui ont en général des capacités de maîtrise d'ouvrage ou de maîtrise d'oeuvre. Oui, nous prévoyons de poursuivre la dévolution.

La question de l'entrée en master demeure liée à la capacité des établissements à proposer une insertion professionnelle dès le bac +3. Ce n'est pas un problème quantitatif : 150 000 jeunes obtiennent une licence chaque année, pour une capacité d'accueil de 170 000 places en master. Cependant, beaucoup de recrutements en première année du master ne sont pas prolongés en seconde année ; c'est, par exemple, le cas de professions réglementées comme celle de psychologue, ou de sélections au niveau de la maîtrise comme pour le concours des avocats. Pour faire face à ces problématiques d'insertion professionnelle, nous prévoyons d'établir, dans les futurs contrats entre l'État et les établissements, un volet sur l'insertion professionnelle permettant d'impliquer les collectivités territoriales.

J'en viens à la question des collèges universitaires. Je suis opposée à leur création, car l'université se caractérise par une unité de lieu de l'enseignement et de la recherche. On enseigne la connaissance que l'on produit. Un autre modèle n'est pas pertinent. Au contraire, depuis cinq ans, je travaille à ce que tous les établissements restent des universités de plein exercice. Toutefois, il faut se préoccuper de l'insertion professionnelle avant le bac +5 ou le bac +8. On demande à tous les étudiants de réussir leur baccalauréat, puis leurs premier et second cycles où l'accès est de droit, seul le doctorat étant sélectif. Les jeunes veulent-ils vraiment tous poursuivre leurs études ou ne le font-ils que parce que leurs diplômes ne favorisent pas l'insertion professionnelle ? Recruter des titulaires de master au niveau d'un salaire de bac +2 dévalorise les études longues.

Nous avons beaucoup travaillé avec les instituts universitaires de technologie (IUT). Alors qu'ils sont les mieux placés pour accompagner les étudiants dans leur insertion professionnelle après deux ans d'études, la majorité avait, il y a encore cinq ans, pour objectif que leurs étudiants poursuivent leur cursus en école d'ingénieur. Des établissements conçus pour des études courtes accueillaient ainsi les jeunes ayant les meilleurs dossiers, aptes à suivre une filière longue, ce qu'ils faisaient ensuite d'ailleurs, alors que des filières très académiques et conceptuelles accueillaient les étudiants aux moins bons dossiers. Il faut encourager les étudiants à aller là où ils en ont envie et à faire ce dont ils sont capables, sans jugement de valeur. Travailler au niveau des universités, en lien avec les collectivités, à introduire de vrais cursus d'insertion professionnelle me semble nécessaire.

Les Crous ne nous ont pas fait part de la nécessité de rehausser le plafond d'emplois. Nous continuons cependant à évaluer les besoins du réseau et sommes prêts à agir sur ce plafond s'il devient le facteur limitant.

J'en viens aux questions portant sur la recherche.

Tout d'abord, je rappelle notre objectif de préserver 2 000 emplois en recherche et développement. La mise en oeuvre de cette mesure largement demandée rencontre cependant des difficultés de mise en oeuvre. Nous avons notifié les premiers financements dès les mois d'avril et de mai, et 700 personnes sont déjà dans le processus de changement de leur contrat à la mi-octobre. En 2021, il était prévu que nous engagions 128 millions d'euros sur les 300 millions prévus pour ces 2 000 emplois : nous y sommes.

Ensuite, l'ANR a lancé plusieurs programmes visant à favoriser le développement de la culture scientifique. Les lauréats du label « Science avec et pour la société », doté de 2,6 millions d'euros et octroyé pour trois ans, seront bientôt annoncés. L'appel à projets « Médiation et communication scientifiques » a été clos il y a quinze jours. Symboliquement, la médaille du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et les prix de l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae) et de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) permettent une mise en avant de la médiation scientifique. Nous avons aussi augmenté le budget consacré aux associations et à la fête de la science. Enfin, et j'y tiens particulièrement, nous avons lancé, avec la ministre de la culture et France Télévisions, un appel à projets pour des courts métrages valorisant les femmes dans les métiers scientifiques. Les role model sont un moyen de toucher les jeunes, et nous voulons le faire en partenariat avec les associations « Femmes et cinéma », « Femmes et séries », « Femmes et sciences » et « Femmes ingénieurs », pour faire avancer la place des femmes dans les sciences dites fondamentales.

Je partage votre préoccupation sur le retour des groupes scolaires dans les musées, et le fait de ramener les enfants à la découverte et à la manipulation. Cependant, le sujet est complexe, car il faut un passe sanitaire pour les musées, mais pas pour l'école.

Enfin, nous sommes tous convaincus de l'importance du sens critique, et les enseignants utilisent tous les outils possibles pour l'éveiller. Je me souviens par exemple d'enseignants souhaitant utiliser le film Germinal pour intéresser les enfants. La crise sanitaire a mis en exergue l'importance de conserver le sens critique.

M. Yan Chantrel . - Sur le papier, on pourrait se réjouir de la hausse globale du budget que le gouvernement accorde à la recherche. Cependant, dans le détail, la déception pointe. En effet, les augmentations pour 2022 demeurent en deçà de ce que la LPR prévoyait. Je vous avais déjà interpellée à ce sujet lors d'une séance de questions d'actualité au gouvernement. Ainsi, la loi de programmation prévoyait 905 millions d'euros pour 2022. Or, on atteint 472 millions sur les trois programmes concernés. Ainsi, 559 millions d'euros étaient prévus pour le programme 172 « Recherche scientifique et technologique pluridisciplinaire », contre 334 millions d'euros en réalité. On passe de 302 à 138 millions d'euros pour le programme 150 « Formations supérieures et recherche universitaire ». Je n'ai même pas retrouvé les 48 millions d'euros pour la recherche spatiale.

Comment expliquez-vous ces écarts par rapport à ce que votre gouvernement avait lui-même proposé ? En tant que parlementaire représentant les Français établis hors de France, je rencontre des compatriotes qui ne pouvaient plus exercer leur passion en France dans des conditions salariales et d'équipement décentes. Vous devez prendre conscience du retard colossal de la France par rapport aux pays du G7, mais aussi à d'autres. Or, financer la recherche, c'est financer notre avenir. Ce retard a été mis en exergue par les problèmes climatiques et sanitaires que nous rencontrons.

Votre budget n'est donc pas à la hauteur, j'espère que votre gouvernement en prendra conscience et le relèvera a minima au niveau de ce qui était prévu dans la loi de programmation pour la recherche.

Mme Frédérique Vidal, ministre . - Je me dois de vous répondre tout de suite, monsieur Chantrel, pour ne pas laisser un malentendu s'installer. En cumulé, depuis l'entrée en vigueur de la LPR, on atteint bien 905 millions d'euros et la trajectoire est strictement suivie. Je vous rappelle l'engagement, pris en 2000, d'atteindre 3 % du PIB en dépenses de recherches en 2010 : avant le nôtre, aucun gouvernement n'avait fait l'effort de s'en approcher. Je me réjouis cependant que cette préoccupation fasse consensus aujourd'hui.

L'innovation d'aujourd'hui est la recherche d'il y a vingt ans, mais le retard n'est pas la faute de ce gouvernement. C'est pour lutter contre le sous-financement chronique de la recherche que le Président de la République et le Premier ministre y consacrent, en plus de ce que la LPR prévoit, des milliards d'euros dans les plans de relance et d'investissement.

M. Pierre Ouzoulias . - Nous nous sommes rendus, avec Laurent Lafon, à l'Institut national universitaire Champollion d'Albi, où on trouve 69 % d'étudiants venant du Tarn et de l'Aveyron et 53 % de boursiers, avec un taux de réussite en licence de 42,5 %, c'est-à-dire le meilleur score national : 22 % des étudiants y sont titulaires d'un bac technologique et 8 % d'un bac professionnel. Cette réussite est le résultat d'une implication exceptionnelle de l'équipe pédagogique et d'un accompagnement des étudiants qui fonctionne très bien.

Le Hcéres, en mars 2021, a noté la réussite exceptionnelle des étudiants, mais considère que l'Institut Champollion ne mérite pas d'être une université de plein exercice faute d'un investissement suffisamment massif en recherche.

Y a-t-il encore une place dans la politique nationale de l'enseignement supérieur pour des établissements universitaires travaillant à l'émancipation sociale et intellectuelle d'étudiants dans des territoires menacés par de grandes métropoles ? N'y aurait-il pas un moyen terme entre le classement de Shanghai et la relégation d'Albi ? Notre commission a conclu que les collectivités devaient de nouveau pouvoir s'approprier l'université et l'enseignement supérieur, exceptionnels outils d'aménagement du territoire.

M. Jean Hingray . - Pourriez-vous nous donner davantage de précisions sur le plan « France 2030 », en particulier sur l'innovation et la formation dans les filières stratégiques ?

Par ailleurs, qu'en est-il de l'expérimentation, lancée à la suite de l'adoption de la LPR, sur l'autonomie de recrutement de professeurs par les universités ?

M. Bernard Fialaire . - Tout d'abord, la CVEC dépassera-t-elle les 150 millions d'euros en 2021 et l'éventuel surplus de collecte sera-t-il bien affecté à la condition étudiante ?

Ensuite, je vous avais interpellée l'an passé sur les officines par lesquelles les étudiants en santé sont obligés de passer. L'augmentation du numerus clausus n'a pas réglé ce problème. Le fait même que l'autonomie des universités leur permet d'organiser des concours différenciés ne va-t-il pas aggraver les disparités entre ceux qui peuvent payer ces officines et ceux qui ne le peuvent pas ?

Enfin, dans le Rhône, quels sont les résultats de l'appel à projets PIA4 « Excellence sous toutes ses formes » ? Cette belle initiative s'avère fédératrice et mérite un investissement important.

Mme Monique de Marco . - En dix ans, les établissements d'enseignement supérieur ont absorbé 500 000 étudiants, avec 34 000 de plus cette année. Les difficultés de logement s'aggravent, le sujet a d'ailleurs été abordé par la mission d'information sur les conditions de la vie étudiante en France. Avez-vous la volonté d'y répondre dans le cadre de ce projet de loi de finances ?

M. Max Brisson . - Une remarque tout d'abord : nous avons voté la LPR, après de longs débats. Je ne vous ferai pas le procès du rattrapage du retard passé, pour lequel les responsabilités sont partagées.

Si j'ai bien compris le chef de l'État, « France 2030 » porte sur l'avenir industriel du pays. Mais quand je vous ai écoutée, vous parlez de l'espace : pourriez-vous insister davantage sur la dimension industrielle de la recherche s'agissant de ce nouveau plan ?

Deuxième question, depuis la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises (Pacte), un enseignant-chercheur peut consacrer 50 % de son temps au travail en entreprise au lieu de 20 % auparavant, et détenir jusqu'à 32 % du capital d'une société. Quels sont le bilan et l'utilisation effective de cette possibilité par les chercheurs ?

Enfin, je me dois d'aborder Parcoursup, dont le bilan reste mitigé... Combien d'étudiants restent sans affectation à ce jour et combien ont été réaffectés dans une filière non souhaitée ? Quelles sont les perspectives pour la rentrée de 2022 ?

M. Jacques Grosperrin . - Je rejoins ce que vient de dire Max Brisson : la critique est facile, mais nous partons d'une situation difficile.

Stéphane Piednoir a évoqué la problématique du patrimoine immobilier, sur laquelle notre collègue Vanina Paoli-Gagin a présenté, au nom de la commission des finances, un récent rapport de contrôle budgétaire. L'immobilier représente 20 % du patrimoine de l'État. Je reviens sur la belle loi de 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités. Un obstacle à la dévolution est peut-être le manque d'esprit d'entreprise des présidents d'université. Ainsi, trois universités ont connu la dévolution en 2011 et quatre en 2016. Cependant, l'État est majoritairement propriétaire du bâti et passe des conventions d'utilisation avec les universités. Pourquoi assiste-t-on à une certaine crainte de la part des universités, alors que l'immobilier est leur deuxième poste de dépenses après la masse salariale, qu'il s'agit d'une dimension stratégique pour la réussite des étudiants, et que la question de la transition énergétique se pose de manière de plus en plus prégnante ?

De plus, selon le rapport de notre collègue de la commission des finances, 31 % du bâti est dans un état insatisfaisant en matière de rénovation thermique. Quels sont les efforts financiers de votre ministère, correspondant à l'action 14 du programme 150 « Formations supérieures et recherche universitaire » ?

Vous aviez aussi annoncé une nouvelle vague de dévolution courant jusqu'à 2022. Où en est-on ?

Pour conclure, à l'occasion de ce cinquième budget que vous défendez, et même si nous ne sommes pas toujours d'accord, je tenais à rendre hommage à votre sérieux, à votre disponibilité, à votre expertise et à votre écoute.

Mme Céline Brulin . - Concernant la réforme des études de santé, on a manqué de places l'an dernier pour les redoublants de l'ancien système et pour les nouveaux entrants des filières du parcours spécifique santé (PASS) et de la licence option accès santé (L.AS). Leur nombre est toujours insuffisant cette année même si l'on observe des progrès. En particulier, le Conseil d'État, saisi par des familles d'étudiants, a enjoint à une quinzaine d'universités d'augmenter leur capacité d'accueil de 20 %, ce qui n'est pas sans soulever des problèmes concrets sur les aspects immobiliers soulevés par Stéphane Piednoir et Jacques Grosperrin.

Cette question concerne l'enseignement supérieur, mais aussi tous nos territoires où la désertification médicale s'accentue. Alors que de plus en plus d'étudiants s'orientent vers les professions de santé et qu'on a enfin levé le numerus clausus , on n'arrive pas à en former davantage.

Ainsi, des contrats de plan État-région permettraient de lancer des opérations d'immobilier. Il y a quelques difficultés à ce sujet en Normandie...

Si l'on veut former davantage de médecins, il faut aussi plus de chefs de clinique à même de les encadrer, pas seulement dans les centres hospitaliers universitaires (CHU), mais aussi dans tous les hôpitaux, y compris de proximité, ce qui permettrait à des jeunes de faire des stages plus éloignés des métropoles. Que comptez-vous faire pour augmenter ces capacités ?

Par ailleurs, je m'associe à Bernard Fialaire lorsqu'il vous interroge sur les officines qui surenchérissent le coût des formations en santé. Elles mettent en lumière l'enjeu de la démocratisation des études de santé.

Enfin, de plus en plus de jeunes vont étudier en Belgique, voire en Roumanie. Que pouvez-vous nous dire de ce phénomène qui trahit un affaiblissement de nos universités ?

M. Pierre-Antoine Levi . - Les deux années écoulées se sont avérées éprouvantes pour les étudiants, en révélant une précarité à la fois financière et psychologique. Nous nous réjouissons donc tous du retour en présentiel. Votre ministère a certes agi, mais pas au niveau des attentes ni à la mesure des problèmes. Ma proposition de loi visant à créer un ticket restaurant étudiant a été adoptée en première lecture par l'Assemblée nationale, mais c'est une victoire en trompe-l'oeil, car elle a été dénaturée. Nous verrons ce que le Sénat fait en deuxième lecture, alors qu'il s'agit de compléter le travail des Crous et non de les concurrencer.

Vous aviez généralisé le repas à un euro, ce qui était bienvenu, mais il a été suspendu pour les non-boursiers, alors que la précarité alimentaire n'a pas disparu pour les étudiants issus des classes moyennes.

Ensuite, le projet de loi de finances pour 2022 prévoit certes une augmentation des moyens, mais les attentes étaient beaucoup plus importantes. C'est une occasion manquée alors que, avec le retour à une vie normale que nous espérons tous, des pans entiers de la précarité étudiante n'ont pas été résorbés et retourneront dans l'oubli.

Enfin, avec Parcoursup, de nombreux bacheliers sont restés sans réponse à quelques jours de la rentrée ou se sont retrouvés avec un choix par défaut ne correspondant pas à leurs souhaits, en tout cas pour les non-boursiers. En voulant réduire les inégalités avec les quotas de boursiers - le bleu budgétaire précise en effet que 120 000 lycéens boursiers ont pu intégrer la formation de leur choix - n'en avez-vous pas créé de nouvelles ?

Mme Sonia de La Provôté . - Quelles sont vos prévisions d'effectifs pour la rentrée universitaire de 2022 ? La hausse a été forte cette année. Il en va de même pour les inscriptions en master. Votre budget en tient-il compte ?

Dans le projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, dit « 3DS », il n'est pas prévu d'autoriser la création d'entreprises publiques locales (EPL) universitaires. Cet outil est pourtant très demandé. Les collectivités territoriales ont un rôle à jouer dans la remise à niveau du parc immobilier. Qu'en pensez-vous ?

Dans Parcoursup, certaines spécialités, comme les sciences et techniques des activités physiques et sportives (Staps), sont plus demandées que d'autres. Constatez-vous une évolution à cet égard avec la réforme du baccalauréat ? Observe-t-on une meilleure adéquation entre les parcours des lycéens et leurs demandes ? Avez-vous étudié spécifiquement la situation des redoublants ou de ceux qui font une nouvelle demande pour obtenir une réponse plus conforme à leurs voeux ?

Nos interrogations sur la réforme des études de santé ou l'entrée en master, les filières de licence en tension illustrent la difficulté à articuler cadrage ministériel et autonomie des universités. Quelle doit être l'action du ministère pour garantir l'égalité entre tous les étudiants sur le territoire, tout en respectant l'autonomie des établissements ?

Mme Sylvie Robert . - Les budgets des universités augmentent mais, avec la croissance de la démographie étudiante, la dépense par étudiant baisse. Il convient d'anticiper. La rentrée dans certaines filières en tension a été chaotique.

La Cour des comptes souligne les difficultés des bibliothèques universitaires et regrette l'absence de politique publique en faveur de l'information et de la documentation scientifique. Si des efforts ont eu lieu, elle estime qu'ils n'ont pas permis aux bibliothèques universitaires de devenir des centres de services répondant pleinement aux besoins des étudiants, alors qu'elles constituent un facteur déterminant d'égalité des chances et de réussite. La Cour pointe le manque de moyens.

M. Yan Chantrel . - Le rapport de M. Gattolin, intitulé Mieux protéger notre patrimoine scientifique et nos libertés académiques, au nom de la mission d'information du Sénat sur les influences étatiques extra-européennes, nous alerte sur la nécessité de nous protéger face aux tentatives d'influences étrangères dans le domaine de la recherche et de l'enseignement supérieur. Il souligne le manque de moyens de la communauté académique face à l'émergence de ces nouvelles menaces. Il propose de consacrer des crédits dans les budgets des universités à leur détection. Qu'en pensez-vous ?

M. Laurent Lafon , président . - Avez-vous déjà reçu des demandes pour la création de chaires de professeur junior, même si le décret n'a pas encore été publié ?

Mme Frédérique Vidal, ministre . - L'institut universitaire d'Albi accueille 4 000 étudiants et est rattaché à la communauté d'universités et d'établissements de Toulouse. Par sa taille, l'établissement se rapproche d'une petite université. La réussite peut s'expliquer par la proximité avec les étudiants, qui facilite leur accompagnement. Le taux d'encadrement n'est pas considérable : un pour trente. L'établissement joue un rôle considérable pour l'accueil des étudiants de premier cycle.

La question sous-jacente est celle du caractère monolithique de l'évaluation dans notre pays : on ne peut pas, en effet, évaluer tous les établissements et tous les étudiants de la même manière. C'est pour cela que l'on a développé la procédure de dialogue de gestion : il s'agit de demander aux établissements sur quels points ils souhaitent être reconnus et évalués, en fonction de leur stratégie - c'est ce que j'appelle la « signature » des établissements.

Vous m'interrogez aussi sur la formation dans les filières stratégiques inscrites dans le plan « France 2030 ». Nous sommes en train de réfléchir à la manière dont nous allons accompagner ces filières. Une partie de la formation sera délivrée par l'enseignement supérieur, mais pas seulement. Certaines compétences requises sont transversales, à l'image de celles du domaine numérique. Ces filières, comme le spatial ou l'agroalimentaire, recrutent à tous les niveaux : elles ont besoin d'ouvriers, de techniciens, d'ingénieurs comme de docteurs.

L'apparition de nouveaux métiers entraînera aussi la disparition d'autres. La formation continue aura un rôle crucial à jouer. Notre système doit donc s'adapter pour répondre aux attentes des métiers de demain. Mais il est difficile de construire un système purement « adéquationniste », et on sait que cela ne fonctionne pas ainsi en matière de formation. Certaines compétences seront transversales, d'autres spécifiques à certaines filières. Il ne s'agit pas de recruter des permanents statutaires pour créer des filières de formation qui auraient vocation à perdurer pendant les trente prochaines années, mais de former rapidement et massivement des personnes pour accomplir cette mutation industrielle. Je voudrais que les universités s'emparent de la question de la formation tout au long de la vie, pour devenir le lieu où l'on se forme et où l'on vient se reformer pendant sa carrière. Le niveau du diplôme initial ne fera pas tout. Quand les métiers évoluent, il faut se reformer.

Une personne qui a exercé la fonction de maître de conférences pendant plusieurs années est apte à postuler à un poste de professeur d'université, même si des particularités persistent dans certaines disciplines, comme les disciplines médicales. Un groupe de travail concernant le recrutement des maîtres de conférences a été créé et les premières expérimentations auront bientôt lieu. Plus généralement, il faut être vigilant pour éviter le risque du localisme. La mobilité est importante. Elle témoigne de la capacité à s'emparer d'un sujet, sans la proximité de son directeur de thèse. Mais la mobilité est-elle toujours possible ? Une femme de quarante ans, mère de famille, a-t-elle vraiment la capacité de demander à sa famille de déménager de plusieurs centaines de kilomètres pour devenir professeur ? Des personnes brillantes peuvent vouloir rester dans leur établissement. Il faut donc trouver le bon équilibre. Là encore, il faut faire confiance aux établissements. Dans la mesure où il s'agit d'un recrutement par les pairs, il est peu probable qu'ils décident de recruter les plus mauvais, à moins d'être masochistes...

Les chaires de professeur junior correspondent à des postes statutaires. Nous avons reçu 180 demandes, pour environ 90 places dans les universités et les organismes de recherche. Les demandes proviennent de toutes les disciplines et de tous les types d'établissements.

J'en viens à la question des études de santé. S'agissant des préparations privées, il est beaucoup plus facile de préparer des étudiants à des QCM que de leur apprendre à s'exprimer à l'oral sur des sujets divers qui peuvent surprendre. On réussit beaucoup mieux, c'est factuel, en suivant le tutorat gratuit assuré par les étudiants en santé qu'en s'inscrivant dans une prépa privée.

Le nombre de places en deuxième année de médecine a augmenté de 19,4 %. Ceux qui obtiennent la moyenne aux partiels ne peuvent plus redoubler l'année de PASS. Cela ne signifie pas qu'ils ne peuvent pas repasser le concours d'accès aux études de médecine : il reste, en effet, toujours possible de le retenter une seconde fois, en fin de deuxième année de la L.AS.

Alors pourquoi conserver un concours ? Parce qu'on ne peut augmenter le nombre d'élèves que si l'on dispose de suffisamment de médecins formateurs. Grâce à notre réforme des deuxième et troisième cycles, on a accru le nombre de chefs de cliniques, qui sont désormais répartis dans tous les hôpitaux, et pas seulement dans les CHU ; on a délivré des agréments pour encadrer des étudiants, en internat comme en externat, à des médecins exerçant en ambulatoire dans des centres de santé pluriprofessionnels ou dans tous types d'hôpitaux. Les jeunes peuvent donc démarrer leurs études à proximité de chez eux, et pas uniquement dans des villes dotées d'un CHU. Cette réforme permet ainsi d'augmenter le nombre de jeunes en formation partout sur le territoire. Je précise que, parallèlement, les maîtres de stage pourront se voir retirer leur agrément en cas de violence ou de harcèlement.

Vous m'interrogez sur la place de l'oral au concours de médecine : cela relève de la liberté pédagogique des établissements ; dans la mesure où il ne s'agit pas d'un concours national, les épreuves sont différentes selon les lieux. Mais il en allait de même pour les QCM ! Chacun sait depuis longtemps que la pression n'est pas équivalente partout, et qu'elle varie en fonction du nombre de places proposé.

Le niveau de réussite de ceux qui étaient en L.AS est environ de 50 % - c'est un niveau jamais atteint. Nous avons tenu compte des différents rapports pour apporter les améliorations attendues, notamment sur la possibilité de voir son dossier réexaminé. Mais, il faut le reconnaître, l'année fut compliquée : les médecins étaient très pris, l'enseignement n'était pas en présentiel, etc. Toutefois, nous avons pu augmenter le nombre de places et la réforme fonctionne.

L'aide au logement dépend du ministère de ma collègue Emmanuelle Wargon. Nous avons construit 32 000 logements à tarif social et 30 000 logements à tarif libre pour les étudiants. La difficulté était de trouver du foncier disponible. Nous avons cherché à identifier à proximité des sites universitaires tous les terrains d'État libres, car il est parfois difficile de travailler avec les mairies : nous avons ainsi identifié 70 terrains sur lesquels on pourra construire 13 000 logements supplémentaires à tarif social, tandis que 95 % des logements des Crous seront rénovés grâce au plan de relance, en faisant en sorte de construire d'abord de nouvelles places afin qu'il n'y ait pas de déficit lorsque les travaux de réhabilitation seront effectués.

J'ai mentionné le spatial et l'exploration des fonds marins, car ces thématiques donnent lieu à une recherche nourrie, mais l'enjeu, plus largement, est de réindustrialiser. Nos industriels ont besoin que l'État accompagne le « dérisquage », à savoir le passage du concept de laboratoire au prototype qui permet d'envisager une industrialisation. C'est sur cette dimension que nous devons concentrer nos efforts, car nous sommes un petit peu en retard à cet égard. Il convient de développer des lieux où chercheurs en recherche fondamentale et recherche appliquée puissent travailler ensemble, en amont d'une éventuelle industrialisation. Il ne faut pas d'ailleurs séparer l'amont et l'aval : dans les entreprises, on constate que l'innovation procède de manière circulaire. Le développement industriel et la mise en production sont l'occasion de remettre en question la recherche et de la faire avancer. C'est plutôt un cercle vertueux.

Il ne faut pas résumer Parcoursup à un algorithme : c'est, avant toute chose, des milliers de personnes qui, durant tout l'été, étudient les dossiers des étudiants un par un et regardent ce que l'on peut leur proposer. À la fin de la procédure, plus de 500 000 jeunes reçoivent une proposition, qui correspond à un de leur choix, même si ce n'est peut-être pas le premier. Ils ont le droit de changer d'avis, auquel cas leur dossier est réexaminé par la commission d'accès. Ils ont donc en face d'eux des personnes qui peuvent les aider.

Au moment où la procédure s'est achevée, à peu près 200 jeunes continuaient à être accompagnés. Tous étaient titulaires d'un baccalauréat professionnel et tous avaient reçu un avis négatif à la poursuite d'études de la part de leurs professeurs. Au reste, si cet avis négatif ne lie pas la commission, c'est tout de même à ces jeunes que l'on a le plus de difficultés à proposer une filière d'enseignement supérieur dans laquelle ils ont une chance de réussir.

Je veux insister sur ce côté extrêmement humain de Parcoursup. Vous allez dire que je vois toujours le verre à moitié plein, mais je veux souligner que, sans abandonner ces 200 jeunes, le système a permis à l'immense majorité - 500 000 jeunes - de trouver une formation qui les satisfait.

Que des jeunes décident de faire leurs études ailleurs a toujours existé, et je ne pense pas que leur nombre ait augmenté ces dernières années. On me parle souvent de la Suisse. De jeunes Français qui y étudient m'ont expliqué avoir fait ce choix parce que les professeurs sont des chercheurs. Quand je leur ai appris qu'il en allait de même dans les universités françaises, ils sont tombés des nues...

Il faut porter très fort la fierté de nos universités. Tous les enseignants ont suivi des études très longues, ont passé des filtres de sélection très exigeants, ont passé des concours extrêmement difficiles... Ils devraient autant faire briller les yeux des lycéens que les enseignants de Suisse !

Je tiens à préciser que nous avons beaucoup progressé sur la prise en compte des zones dans lesquelles il n'existait pas de restauration à tarif social pour les étudiants. C'est un vrai sujet. Il faut reconnaître que le tarif n'est pas le même dans tous les établissements car ce n'est pas l'État qui le fixe. Mais, si vous êtes en BTS dans un lycée à Paris, le repas coûte, en réalité, moins d'un euro. Pour les étudiants en BTS et en classes préparatoires, dans un certain nombre de villes où il n'y a pas de résidence universitaire, pas de Crous, pas de restauration universitaire, les repas peuvent être très fortement subventionnés. On peut passer des conventions avec des lycées, mais, honnêtement, je crois que le travail est fait. Un effort reste, en revanche, à accomplir pour les instituts de formation en soins infirmiers (IFSI), certains IUT et certaines écoles. Les conventions que nous passons au travers des Crous fonctionnent bien ; il faut continuer à utiliser ce levier. Au demeurant, on a toujours la capacité de proposer des cartes repas préremplies ; cela fonctionne bien.

Le bâti universitaire est un sujet essentiel. Effectivement, il existe un service immobilier au ministère, mais celui-ci gère essentiellement la mise en sécurité et l'accessibilité des bâtiments. En réalité, tout l'immobilier universitaire est géré par le Domaine, donc par Bercy.

Dans le cadre du plan de relance, nous avons doublé les crédits dédiés au patrimoine immobilier universitaire du contrat de plan État-région sur les deux prochaines années, avec 1,3 milliard d'euros supplémentaires. Il s'agit essentiellement de rénovation thermique : les établissements vont pouvoir réaliser jusqu'à 30 % d'économies sur leur facture énergétique.

Il m'est arrivé, dans une autre vie - c'était lors d'une audition devant le Sénat -, de hurler à l'évocation de la dévolution du patrimoine immobilier des universités. Je n'ai pas changé d'avis.

Premièrement, il n'est pas dans la mission première d'une université que de s'occuper d'immeubles. Deuxièmement, le principe suivant lequel le prix de la vente revient au domaine pour moitié si la vente est conclue la première année, l'autre moitié revenant au ministère de tutelle des bâtiments, qui peut ou non décider de le reverser à l'établissement, est d'une complexité extrême. Au reste, il conduit à ce que plus la vente est longue, plus la part qui revient au ministère de tutelle, donc potentiellement à l'établissement, est faible. En gros, tout est fait pour que les bâtiments tombent en ruine... Troisièmement, la dévolution nécessite de gérer son patrimoine en propriétaire. Or nous sommes « en dessous de la maille » en termes de gestion du patrimoine immobilier de l'État. De mémoire, le Sénat avait estimé qu'il faudrait entre 12 et 14 euros pour entretenir chaque mètre carré - actuellement, on ne leur consacre qu'entre 2 et 3 euros...

On peut comprendre les hésitations des présidents d'université : il ne faudrait pas qu'ils y engloutissent toutes leurs marges de manoeuvre... Nous devons travailler non seulement à la dévolution morceau par morceau, pour monter en compétence, mais surtout à la mise en place de sociétés publiques locales universitaires. Ne vous inquiétez pas : si l'article 40 empêche de procéder par voie d'amendement, je n'ai pas renoncé à avancer sur ce dossier. Je crois que c'est la seule solution si l'on veut travailler correctement sur la question du patrimoine universitaire.

Il est difficile de répondre à la question du cadrage des universités. Celles-ci étant des établissements publics, elles doivent mettre en place les lois votées par le Parlement et appliquer les politiques publiques décidées par le Gouvernement. Leur autonomie consiste à pouvoir choisir le chemin qu'elles souhaitent prendre pour les mettre en oeuvre. Par définition, si l'on cadre l'autonomie, on la supprime. D'ailleurs, il est intéressant de voir que les universités prennent des chemins différents, d'où l'importance d'avoir des présidents d'université élus sur un programme et des majorités qui les soutiennent. La vie politique des universités ressemble un peu à la vie politique tout court... Cependant, il faut veiller à ce que le point d'arrivée soit bien identique. C'est le rôle de l'État que de le garantir, dans l'ensemble des établissements publics qui dépendent de lui.

On entend beaucoup parler de la baisse de la dépense par étudiant. Or diviser la subvention pour charges de service public (SCSP) d'un établissement par le nombre d'étudiants n'a pas de sens. On ne peut pas appliquer le même régime à un établissement qui a 14 sites et de nombreuses antennes dispersées et à un établissement qui se compose d'un seul bâtiment. De même, on ne saurait appliquer la même règle aux campus neufs et vieux et aux établissements qui font des sciences appliquées et à ceux qui n'en font pas. La méthode de calcul que je dénonce est extrêmement dangereuse. Je rappelle qu'il y a eu 1 milliard d'euros supplémentaires sur le programme 150, pour 83 000 étudiants en plus dans les universités... Je pense que personne n'a envie de jouer à cela !

Mme Sylvie Robert . - Ce n'est pas une question de jeu, madame la ministre ! Je me fonde sur des rapports, notamment celui de la Cour des comptes.

Mme Frédérique Vidal, ministre . - Je ne dis pas que c'est un jeu : je dis que ce n'est pas ainsi qu'il faut penser le budget consacré aux établissements. Il convient de tenir compte de leur disparité.

Longtemps a été utilisé un modèle d'allocation des moyens qui faisait la part entre les moyens dédiés à l'immobilier, ceux dédiés à la recherche, ceux dédiés à la formation et qui tenait compte du nombre de mètres carrés, de laboratoires et d'étudiants. Ce système a été totalement abandonné ; nous sommes passés à des règles de trois. Faisons attention, car nous sommes en train de passer une bosse : je ne souhaite pas, dans cinq ou dix ans, entendre des ministres annoncer une baisse de budget pour une université qui compterait 150 000 étudiants de moins.

La question des bibliothèques universitaires est un vrai sujet. En réalité, plusieurs questions se posent : celle des fonds, celle de la science ouverte, celle de l'égalité des chances - de fait, ce sont des lieux où l'on peut travailler quand le logement est petit, comme l'ont fait de nombreux étudiants durant la pandémie. Plus généralement, nous devons avancer sur la question des lieux où l'on trouve à la fois de la ressource documentaire et des espaces de travail ouverts et surveillés. D'ailleurs, dans le plan de relance, les établissements demandent de plus en plus souvent des salles modulables où l'on peut faire de la recherche documentaire, plutôt que la construction de gros amphithéâtres.

Le sujet des influences étrangères est un sujet de préoccupation majeure, non seulement dans notre pays, mais, au-delà, dans l'ensemble de l'Union européenne - il a été abordé lors d'une réunion des ministres de l'Union à laquelle j'ai participé hier.

Nous sommes convaincus que c'est vraiment au travers du nouvel espace européen de la recherche que nous pouvons nous protéger de ces ingérences, en réaffirmant deux éléments qui semblent simples, mais qui, en réalité, sont extrêmement difficiles à mettre en oeuvre : la nécessité de valeurs communes et la réciprocité. On voit trop souvent actuellement des États qui s'approprient des connaissances, mais qui n'ouvrent pas leurs bases de données en échange. Il importe que nous soyons un peu moins naïfs, capables de nommer les choses et d'armer davantage nos chercheurs. Nous avons besoin de garder la liberté de collaborer avec qui l'on veut dans le monde entier, mais cette collaboration doit être assortie aux valeurs et aux principes que porte la recherche. C'est de cette manière que nous pouvons essayer d'avancer. Au reste, le problème se pose avec la même acuité dans les sciences humaines et sociales que dans les sciences et technologies.

- Présidence de M. Max Brisson, vice-président -

M. Max Brisson , président . - Madame la ministre, le président Laurent Lafon a dû quitter notre commission et m'a chargé de clore la réunion. Je veux vous remercier très sincèrement de vos réponses extrêmement circonstanciées aux questions de l'ensemble de nos collègues et du temps que vous nous avez consacré.


* 1 Selon l'ANR, ce montant total se comprend après l'application du taux de mise en réserve et l'intégration de cofinancements.

* 2 Par comparaison, en 2020, le taux de succès était de 17 % avec 1 229 projets retenus pour une aide totale de 499,8 millions d'euros.

* 3 Par exemple, un coordonnateur de projets ne peut coordonner qu'un seul projet, un chercheur ne peut participer à plus de trois projets.

* 4 Cette mesure permet la prise en charge de la rémunération des personnels R&D, entre 50 et 80 % maximum, engagés dans le cadre d'une collaboration de recherche entre une entreprise et un établissement de recherche. Le dispositif est décliné en quatre actions visant des situations différentes : action 1 : salarié de R&D de l'entreprise mis à disposition partiellement de l'établissement de recherche ; action 2 : salarié de R&D de l'entreprise mis à disposition partiellement de l'établissement de recherche s'engageant dans une formation doctorale, et justifiant d'un diplôme d'ingénieur ou de master ; action 3 : salarié jeune diplômé de niveau master d'un établissement de recherche mis à disposition partiellement de l'entreprise ; action 4 : salarié jeune docteur d'un établissement de recherche mis à disposition partiellement de l'entreprise.

* 5 Les quatre autres sont : la déontologie et l'intégrité scientifique, l'égalité entre les genres, les publications scientifiques et les données de la recherche, l'accès aux ressources génétiques et aux connaissances traditionnelles associées.

* 6 Le Jardin royal des plantes médicinales, ancêtre du Muséum, a été créé en 1636.

* 7 De 10,7 millions d'euros en 2016, celle-ci est passée à 7,5 millions d'euros en 2017, puis à 0,8 million d'euros en 2016.

* 8 10,7 millions d'euros.

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