RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE L'ARTICLE 45
DE LA
CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS
DU RÈGLEMENT DU
SÉNAT (« CAVALIERS »)
Si le premier alinéa de l'article 45 de la Constitution, depuis la révision du 23 juillet 2008, dispose que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis », le Conseil constitutionnel estime que cette mention a eu pour effet de consolider, dans la Constitution, sa jurisprudence antérieure, reposant en particulier sur « la nécessité pour un amendement de ne pas être dépourvu de tout lien avec l'objet du texte déposé sur le bureau de la première assemblée saisie » 43 ( * ) .
De jurisprudence constante et en dépit de la mention du texte « transmis » dans la Constitution, le Conseil constitutionnel apprécie ainsi l'existence du lien par rapport au contenu précis des dispositions du texte initial, déposé sur le bureau de la première assemblée saisie 44 ( * ) .
Pour les lois ordinaires, le seul critère d'analyse est le lien matériel entre le texte initial et l'amendement, la modification de l'intitulé au cours de la navette restant sans effet sur la présence de « cavaliers » dans le texte 45 ( * ) .
Pour les lois organiques, le Conseil constitutionnel ajoute un second critère : il considère comme un « cavalier » toute disposition organique prise sur un fondement constitutionnel différent de celui sur lequel a été pris le texte initial 46 ( * ) .
En application des articles 17 bis et 44 bis du Règlement du Sénat, il revient à la commission saisie au fond de se prononcer sur les irrecevabilités résultant de l'article 45 de la Constitution, étant précisé que le Conseil constitutionnel les soulève d'office lorsqu'il est saisi d'un texte de loi avant sa promulgation.
En application du vademecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des Présidents, la commission des lois, compétente au fond, a arrêté , lors de sa réunion du mercredi 30 juin 2021, le périmètre indicatif du projet de loi n° 588 relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, déposé sur le Bureau du Sénat le 12 mai 2021 .
Elle a considéré que ce périmètre incluait des dispositions relatives :
- à la définition et à la portée du principe de différenciation des règles applicables à l'attribution des compétences et à l'exercice de celles-ci par une catégorie de collectivités territoriales ;
- aux conditions d'exercice par les collectivités territoriales de leur pouvoir réglementaire dans leurs domaines de compétences ;
- aux modalités de délégation de compétences aux collectivités territoriales et à leurs groupements ;
- aux transferts de compétences vers les collectivités territoriales et aux modalités de leur compensation en moyens humains et financiers ;
- à la participation des citoyens aux décisions prises par les collectivités territoriales et leurs groupements ;
- aux régimes des biens en état manifeste d'abandon et des biens sans maître ;
- aux modalités d'élaboration des programmes locaux de l'habitat par les établissements publics de coopération à fiscalité propre ;
- aux conditions de mise à disposition des fonctionnaires aux associations ;
- aux pouvoirs exercés par les présidents de conseils départementaux et régionaux sur les agents gestionnaires de collèges et lycées ;
- au transfert d'agents d'un versant à l'autre de la fonction publique ;
- aux modalités d'attribution par les collectivités territoriales d'aides et de subventions à certains acteurs économiques ;
- à la mise à disposition par l'État d'infrastructures de mobilités aux collectivités territoriales et à leurs groupements ;
- à la faculté ouverte aux collectivités territoriales d'installer des appareils de contrôle de la vitesse ;
- aux sanctions relatives à l'occupation, la protection et la conservation du domaine public fluvial ;
- aux pouvoirs de police du maire et du président d'un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre ;
- à l'octroi du statut de délégué territorial au représentant de l'État pour les démembrements territoriaux d'agences nationales ;
- aux modalités d'attribution d'aides et subventions au profit des ou par les collectivités territoriales et leurs groupements ;
- aux modalités de contractualisation entre l'État et les collectivités territoriales ;
- à la gouvernance, au statut et aux missions de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement et de la Monnaie de Paris ;
- à la mutualisation des moyens des établissements publics de l'État ;
- aux maisons France Services ;
- aux modalités d'échanges de données entre administrations ;
- aux cessions, à titre gratuit, de biens meubles par les collectivités territoriales, leurs groupements et leurs établissements publics ;
- au régime de la publicité foncière ;
- aux procédures visant à corriger ou sanctionner des manquements au droit de la protection des données à caractère personnel devant la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) ;
- aux compétences du maire et du conseil municipal en matière de dénomination des voies et de numérotation des maisons et immeubles, aux modalités de mise à disposition de ces données au public et aux administrations intéressées, ainsi qu'au format de leur transmission ;
- aux relations entre l'État et les conseils départementaux pour l'accueil, l'évaluation de la minorité et la prise en charge des personnes se déclarant mineurs non accompagnés ;
- aux délégations consenties par les organes délibérants aux exécutifs des collectivités territoriales et à leurs groupements pour l'exercice de leurs attributions ;
- aux compétences attribuées à la métropole d'Aix-Marseille-Provence ;
- à la coopération des collectivités territoriales françaises avec les collectivités territoriales étrangères ;
- à l'exercice des compétences des collectivités territoriales en matière de transition écologique et d'eau potable et d'assainissement des eaux usées ;
- aux entreprises publiques locales ;
- aux missions des chambres régionales et territoriales des comptes ;
- aux situations de crise outre-mer ;
- à la propriété immobilière et à l'aménagement urbain outre-mer ;
- à la gouvernance et au fonctionnement du conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l'éducation (CESECE) de Guyane et de Martinique ;
- aux mandats financiers confiés par les collectivités territoriales et leurs établissements publics ;
- à la ratification des dispositions prises sur le fondement de l'article 74-1 de la constitution de l'ordonnance n° 2020-1733 ordonnance portant partie législative du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- aux transferts aux régions relatifs aux petites lignes ferroviaires et à leurs installations ;
- aux compétences des collectivités relatives aux zones « Natura 2000 » ;
- à la participation de personnes publiques et privées au financement d'ouvrages et d'aménagements dans le cadre des contrats de concession autoroutière ;
- au régime de protection des alignements d'arbres et à la procédure administrative permettant d'autoriser l'atteinte à une allée d'arbres ;
- à la réforme de l'article 55 de la loi de solidarité et de renouvellement urbain du 13 décembre 2000 ;
- à l'extension de l'objet de l'association foncière logement ;
- aux règles d'attribution des logements locatifs sociaux ;
- aux mesures visant à encadrer les loyers ;
- à la prolongation des délais pour procéder à la mise en conformité des règlements de copropriété au sujet des parties communes spéciales, des parties communes à jouissance privative et des lots transitoires ;
- au renforcement des dispositifs de délégation de compétences de l'État aux intercommunalités en matière de logement social et d'hébergement ;
- aux opérations de revitalisation du territoire ;
- à l'extension des compétences des organismes de foncier solidaire (OFS) et des bénéficiaires des baux réels solidaires (BRS) ;
- aux projets partenariaux d'aménagement (PPA) et aux grandes opérations d'urbanisme (GOU) ;
- à la simplification de la répartition des compétences en matière d'entretien des réseaux de distribution de gaz ;
- à l'expérimentation du transfert de certaines missions au sein du réseau des chambres d'agriculture ;
- au Haras du Pin ;
- à la gouvernance des agences régionales de santé ;
- aux conditions de création de centres de santé par des collectivités territoriales ainsi qu'au statut des professionnels y exerçant ;
- aux facultés pour les collectivités territoriales de concourir au financement des établissements de santé ;
- aux compétences des collectivités territoriales en matière de sécurité sanitaire et d'accès aux soins de proximité ;
- aux dispositifs relatifs au logement des personnes âgées, des personnes handicapées et aux publics reconnus prioritaires ;
- de la répartition entre le département et l'État de compétences relatives à l'attribution, à la gestion et au financement du revenu de solidarité active et du revenu de solidarité en outre-mer ;
- au transfert aux conseils départementaux de la tutelle des pupilles de l'État ;
- aux possibilités de création d'un centre intercommunal d'action sociale et à la répartition des compétences d'action sociale au sein du bloc communal ;
- à la déclinaison d'accords internationaux de coopération sanitaire dans les documents de planification et de programmation en santé au niveau local ;
- à la création d'un établissement public industriel et commercial compétent en matière de formation professionnelle dans les départements et régions d'outre-mer.
En revanche, la commission a estimé que ne présentaient pas de lien, même indirect, avec le projet de loi des amendements relatifs :
- à la politique nationale de santé, à l'organisation générale de l'offre de soins, aux compétences et à l'organisation des professions de santé ;
- aux conditions de conventionnement des professionnels de santé libéraux avec l'assurance maladie ainsi qu'au régime social et fiscal applicable à leur installation ;
- à l'organisation générale des établissements de santé et des établissements médico-sociaux ;
- aux conditions générales de financement ainsi qu'aux charges et produits des établissements de santé ;
- aux prestations servies par les départements aux personnes en perte d'autonomie ;
- aux conditions générales d'attribution, au montant et au service du revenu de solidarité active ;
- aux compétences des collectivités territoriales en matière d'insertion sociale et professionnelle ;
- aux compétences des collectivités territoriales en matière d'adoption ;
- aux conditions de prise en charge au titre de l'aide sociale à l'enfance.
* 43 Cf. commentaire de la décision n° 2010-617 DC du 9 novembre 2010 - Loi portant réforme des retraites.
* 44 Cf. par exemple les décisions n° 2015-719 DC du 13 août 2015 - Loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne et n° 2016-738 DC du 10 novembre 2016 - Loi visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias.
* 45 Décision n° 2007-546 DC du 25 janvier 2007 - Loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-1040 du 26 août 2005 relative à l'organisation de certaines professions de santé et à la répression de l'usurpation de titres et de l'exercice illégal de ces professions et modifiant le code de la santé publique.
* 46 Décision n° 2020-802 DC du 30 juillet 2020 - Loi organique portant report de l'élection de six sénateurs représentant les Français établis hors de France et des élections partielles pour les députés et les sénateurs représentant les Français établis hors de France.