B. NE PAS CONSIDÉRER LA SITUATION FINANCIÈRE DES ORGANISMES DE RECHERCHE COMME ACQUISE

1. La dynamique toujours négative du glissement vieillesse technicité

Le glissement vieillesse technicité (GVT) positif est un solde qui traduit l'augmentation de la masse salariale du fait de la progression des agents dans leurs grilles indiciaires (changements d'échelon, de grade ou de corps). Le GVT est en revanche négatif (ou « effet noria ») lorsque les nouveaux recrutés ont un indice plus bas que les agents qui quittent l'organisme. Dans les faits, il est le plus souvent positif, il augmente en conséquence mécaniquement les dépenses.

Le GVT n'est pas financé pour les organismes de recherche, qui doivent appliquer un principe « d'auto-assurance », c'est-à-dire dégager par eux-mêmes des marges de manoeuvre budgétaires permettant sa prise en charge. À titre d'exemple, le GVT représente un coût supplémentaire estimé à environ 25 millions d'euros pour le CNRS en 2019.

Estimation du GVT des établissements publics
à caractère scientifique et technique

Source : réponse au questionnaire budgétaire

Le rapporteur déplore que la non-compensation du GVT des organismes de recherche se traduise par un ajustement contraint à la baisse des effectifs : - 3531 ETPT entre 2012 et 2018 sur le périmètre des EPST 40 ( * ) . Il sera donc vigilant quant à la promesse de la ministre d'évoquer ce sujet dans le cadre de la loi de programmation de la recherche 41 ( * ) .

2. Le cas de l'IFP-Énergies nouvelles

La situation financière des établissements de recherche reste fragile. L'IFP-EN a notamment alerté le rapporteur sur sa situation. L'organisme de recherche et de formation est en effet le seul du programme 190 à voir sa subvention décroître à nouveau (de 2 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2019, à 123,3 millions d'euros) alors que l'établissement tablait sur une stabilisation. En 10 ans, l'IFP-EN a perdu près de 50 millions d'euros de ressources publiques (- 29 %).

Le Gouvernement doit s'assurer de la stabilité de ses crédits afin que l'établissement puisse monter en compétence sur la transition énergétique et les énergies nouvelles . L'établissement est en effet en train de réaliser une transition des hydrocarbures vers les énergies nouvelles et la mobilité. Contrairement à l'activité de recherche en hydrocarbures, qui est largement financée par des ressources propres, les autres activités nécessitent un soutien de l'État dans une logique d'amorçage, qui permettra ensuite à l'établissement de financer ses activités sur ses ressources propres.

3. Donner aux organismes davantage de marges de manoeuvre : l'exemple du fonds de roulement du CNRS.

Les organismes de recherche sont enserrés dans des règles de gestion probablement trop contraignantes. L'exemple du fonds de roulement du CNRS est particulièrement éclairant. Après un audit de son fonds de roulement, le CNRS a identifié 90 millions d'euros comme étant libres d'engagement. À ce jour, il n'a pu en utiliser que 48. Autrement dit, 42 millions d'euros restent inutilisés car le ministère de de l'action et des comptes publics s'y oppose alors même que l'organisme souhaite les utiliser pour financer des dépenses de pré-maturation, des recherches interdisciplinaires et des doctorats, on le lui refuse. Le rapporteur s'interroge donc sur la capacité du Gouvernement à bien gérer les deniers publics.


* 40 Ce qui se traduit par une sous-exécution récurrente des plafonds d'emplois.

* 41 Devant la commission de la culture, de l'éducation et de la communication du Sénat, la ministre avait tenu les propos suivants (le 5 novembre dernier) : « Cette question sera abordée dans le cadre de la LPPR. Je ne suis pas favorable à la compensation systématique du GVT car les besoins en masse salariale sont calculés de manière très différente selon les universités ; je préfère que la question soit abordée, établissement par établissement, dans le cadre du dialogue stratégique et de gestion . »

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