D. ASSURER LA PÉRENNITÉ DES MOYENS DE PROJECTION DU GIGN

1. L'adaptation du Groupe d'intervention de la gendarmerie nationale (GIGN) à l'évolution de la menace terroriste

Le GIGN s'est trouvé en première ligne face à l'évolution de la menace terroriste au cours des dernières années. En particulier, à la suite des attentats de 2015, les crédits accordés dans le cadre des plans de lutte contre le terrorisme ont permis de renforcer la capacité de projection de l'unité et de maintenir l'effort en matière de renouvellement capacitaire. Le GIGN comprenait 387 ETP à la fin de 2017 7 ( * ) .

Par ailleurs, les pelotons d'intervention interrégionaux de gendarmerie (PI2G) ont été transformés en « antennes GIGN (AGIGN) » avec des équipements renforcés en matière d'armement et de protection. Trois nouvelles antennes GIGN ont ainsi été créées à Nantes, Reims et Tours, portant leur nombre à six en métropole. Ces antennes métropolitaines sont placées sous le commandement opérationnel du GIGN mais demeurent rattachées organiquement à leur région de gendarmerie zonale. Pour chaque incident pour lequel les antennes GIGN sont sollicités, l'information remonte vers le GIGN qui décide du bon niveau d'intervention (national, local, autres forces) le plus approprié. Le GIGN (central) est joue assure toutefois pour l'essentiel le recrutement, la formation, l'évaluation et le recyclage du personnel des unités des antennes GIGN. Cette évolution des antennes du GIGN est ainsi un élément important du dispositif opérationnel d'intervention. Notons que cette organisation est différente de celle du RAID de la police nationale, les 7 antennes régionales du RAID étant partie intégrante du RAID et non pas rattachées aux services territoriaux de la PN.

Pour l'outre-mer, les 7 GPIOM ont également été transformés en antennes du GIGN. Ces sept antennes demeurent sous le commandement opérationnel de chaque commandement d'Outre-mer (COMGEND), les liens avec le GIGN (central) étant plus réduits que dans le cas des antennes métropolitaines.

Le GIGN s'est vu logiquement attribuer un rôle essentiel au sein du nouveau schéma national d'intervention (SNI) créé en juin 2016. Au sein de ce SNI, les unités d'intervention spécialisée recensées pour la gendarmerie nationale sont ainsi le GIGN, les six Antennes GIGN de métropole et les sept Antennes GIGN outre-mer.

Le Schéma national d'intervention (SNI)

Le ministre de l'Intérieur a précisé les modalités de fonctionnement du SNI devant votre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées lors de son audition du 22 juin 2016.

La création du SNI vise à adapter nos dispositifs de riposte à la menace terroriste et à optimiser les moyens et les modalités d'intervention de nos forces.

L'objectif est d'être capable, à tout moment et en tout point du territoire national, en métropole comme outre-mer, dès lors qu'une attaque est perpétrée sur notre sol, de réagir avec une efficacité maximale, et ce dans les plus brefs délais.

En cas d'attaque terroriste ou de tuerie de masse, l'objectif est de pouvoir projeter les forces spécialisées les mieux à même de neutraliser les individus déterminés à tuer, dans les meilleurs délais. En cas de tuerie de masse, c'est en effet durant les premières minutes que les terroristes font le plus grand nombre de victimes.

Deux types de modes opératoires, encore inédits à une période récente, coexistent sur notre sol : d'une part, des assassinats ciblés par arme de poing, arme blanche ou véhicule bélier, perpétrés par des individus radicalisés qui passent à l'acte de façon isolée, d'autre part, des tueries de masse et des attentats multisites commis à l'arme de guerre et au moyen d'explosifs - notamment de ceintures d'explosifs - par des terroristes entraînés, selon des plans minutieusement préparés et mis en oeuvre depuis l'étranger.

Le Schéma national d'intervention constitue la dernière étape d'une réforme des dispositifs d'intervention entamée auparavant : le Plan BAC-PSIG 2016 visant à renforcer ces unités pour faire face à de telles situations ; l'adaptation de la doctrine d'emploi, des schémas tactiques et opérationnels d'intervention et des équipements des forces d'intervention du « haut du spectre » que sont le RAID, le GIGN et la BRI, ainsi que les 19 unités d'intervention déconcentrées ; l'élaboration d'une doctrine commune du RAID et du GIGN organisant la collaboration de ces deux unités en cas de crise grave 8 ( * ) ; engagement d'une collaboration plus étroite entre le RAID et la BRI dans le cadre de la Force d'intervention de la police nationale, la FIPN 9 ( * ) ; le renforcement des capacités de projection rapide des forces d'intervention, avec la transformation en antennes régionales du RAID capables d'effectuer les mêmes interventions que l'échelon central des sept groupes d'intervention de la police nationale situés à Lille, à Strasbourg, à Lyon, à Nice, à Marseille, à Bordeaux et à Rennes ; élaboration par le GIGN d'un plan d'assaut immédiat reposant sur un départ immédiat des premières équipes mobilisées, capables de quitter la base de Satory entre 15 et 30 minutes, 24 heures sur 24 et 365 jours par an ; mise en place de la capacité pour les antennes régionales du GIGN, comme celles du RAID, d'engager, dans de très brefs délais, une colonne d'assaut d'une dizaine de gendarmes.

S'appuyant sur ces évolutions le Schéma national d'intervention devait permettre d'établir avec précision le rôle respectif joué par les différents échelons d'intervention et les modalités de coopération et le partage des compétences entre les forces. L'Unité de coordination des forces d'intervention (UCOFI) a travaillé à l'élaboration de ce Schéma national d'intervention après les attentats de novembre sur la base d'un mandat commun confié au préfet de police et aux directeurs généraux de la police et de la gendarmerie nationales. Il se caractérise par :

- le renforcement du maillage des forces d'intervention chargées du haut du spectre afin d'assurer une couverture optimale de l'ensemble du territoire national. Trois nouvelles unités du RAID ont ainsi été créées à Toulouse, à Montpellier et à Nancy. La BRI de la préfecture de police a vu, quant à elle, ses effectifs abondés de manière significative ;

- les Pelotons d'intervention interrégionaux de gendarmerie (PI2G) ont été transformés en « antennes GIGN » , dont trois nouvelles entités ont été créées à Nantes, à Reims et à Tours. Une unité supplémentaire des groupes des pelotons d'intervention - l'équivalent ultra-marin des PI2G - est créée à Mayotte ;

- une procédure d'urgence absolue est instaurée : en cas d'attentat, les antennes du GIGN et du RAID doivent pouvoir intervenir dans les meilleurs délais, là où elles sont présentes, sans être entravées par des procédures trop complexes. En cas de crise majeure, il reviendra ainsi aux unités d'intervention spécialisée et aux unités d'intervention intermédiaire qui sont les plus proches du lieu où l'attentat a été commis d'intervenir immédiatement, sans avoir jamais à se préoccuper de la zone de compétence ou du découpage administratif entre police et gendarmerie.

- à Paris, la direction des opérations revient au préfet de police. Toutefois, sous son autorité, le RAID et le GIGN pourront désormais intervenir en appui de la BRI si les circonstances l'exigent ;

- la coopération départementale entre la police et la gendarmerie est étendue aux dispositifs de riposte en cas d'attaque terroriste et de tuerie de masse. Elle sera désormais organisée par les directeurs départementaux de la sécurité publique et les commandants de groupement dans le cadre de la coordination opérationnelle renforcée des agglomérations et des territoires, la CORAT ;

- toutes les forces concernées devront s'efforcer de repérer les cibles potentielles et les édifices les plus sensibles, anticiper la primo-intervention 24 heures sur 24, prévoir l'interopérabilité des différentes unités mobilisées, organiser des exercices conjoints entre les forces locales de police et de gendarmeries. Pour ce faire, le Schéma national d'intervention étend la coordination opérationnelle de l'urgence à l'échelon interdépartemental et entre les différentes zones de défense et de sécurité ;

- afin d'éviter, en cas de crise, la multiplication, et par là même la concurrence, des centres de décision, une articulation plus cohérente du commandement et de la coordination des opérations d'intervention spécialisée est mise en place. Un seul et unique chef des forces d'intervention sera désormais à la manoeuvre sur les lieux d'un attentat : le commandant des opérations d'intervention spécialisée. De même, un seul coordinateur sera nommé en cas d'attaques multiples sur une même zone de compétence : le coordinateur des opérations d'intervention spécialisée ;

- les forces d'intervention ayant développé des compétences hautement spécialisées dans des domaines précis, le partage et la mutualisation de ces capacités et de ces compétences rares sont indispensables afin d'optimiser une réponse globale et commune. Dans le cadre du Schéma national sont donc recensés l'ensemble des savoir-faire et des moyens propres à chaque unité d'intervention spécialisée . Des évaluations auront lieu régulièrement pour s'assurer en permanence de la détention effective de ces compétences critiques par chaque unité afin de garantir, à tout moment, une capacité de riposte et d'intervention maximale. Le Schéma national définit et encadre avec précision la mise en oeuvre de la procédure dite du « concours capacitaire » qui doit pouvoir être proposée et appliquée immédiatement , sans le moindre blocage d'aucune sorte, selon deux modalités possibles : par modularité, avec la mise à disposition d'une capacité spécifique d'une unité au profit d'une autre ; ou bien par complémentarité, avec le renforcement d'une unité par une autre selon le principe « force menante, force concourante ». Des officiers de liaison seront échangés, comme ce fut le cas en janvier 2015, entre les forces d'intervention pour garantir une réactivité maximale dans l'engagement d'une unité au profit d'une autre ;

- le positionnement de l'Unité de coordination des forces d'intervention, l'UCOFI, laquelle intervient sous les instructions conjointes des directeurs généraux, est renforcé. Elle sera désormais l'instance centrale de la mise en oeuvre du Schéma national d'intervention. Sa mission consiste à faciliter la coordination opérationnelle des unités d'intervention spécialisée grâce à la mise en place de procédures destinées à fluidifier la prise de décision commune. En lien avec les unités nationales et les directions d'emploi, elle organisera régulièrement des exercices conjoints interforces et sera chargée de l'inspection des capacités propres à chaque unité, de manière à organiser la montée en puissance globale et continue de notre système de riposte et d'intervention.

Si l'organisation et l'activité du GIGN a ainsi évolué en ligne avec la menace terroriste, les autres activités du GIGN ont également évolué au cours des dernières années, comme l'a indiqué le Colonel Laurent Phélip, commandant du GIGN, lors de son audition par vos rapporteurs.

L'unité est ainsi amenée à coopérer avec d'autres services, y compris extérieurs à la gendarmerie nationale, comme la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) ou la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières (DNRED), entrant ainsi dans une logique d' « agence » en charge de missions judiciaires ou administratives. Le GIGN est ainsi, selon l'expression du Colonel Phélip, à la fois ultima ratio et couteau suisse de la gendarmerie nationale.

2. Un renouvellement et une modernisation des moyens du GIH ?

Organisme à vocation interarmées, le GIH, créé en 2006, relève du commandement des opérations spéciales (COS) pour l'emploi mais reçoit des personnels et des matériels de l'armée de terre et de l'armée de l'air, dans une logique de mutualisation et d'interopérabilité. Il a pour mission le soutien et l'appui des opérations des forces d'intervention du ministère de l'intérieur, et d'abord du GIGN puis, depuis 2008, du RAID. Le GIH permet ainsi au GIGN de se projeter pour toutes les interventions à plus de 400 km. Il est implanté sur la base Aérienne 107 de Villacoublay.

Le GIH joue ainsi un rôle essentiel en matière d'intervention contre-terroriste, en assurant une astreinte permanente avec un minimum de deux hélicoptères disponibles 24h sur 24. Dans ce cadre, la première mission du GIH est d'assurer la sécurité des centres nucléaires de production d'électricité (CNPE). Le GIH a également été engagé sur la traque des terroristes à la suite de l'attentat de Charlie Hebdo.

L'unité dispose actuellement de 7 hélicoptères Puma (5 de l'armée de Terre et 2 de celle de l'Air), dont deux en alerte immédiate, très vieillissants, dont la question du remplacement se pose donc avec acuité.

Leur remplacement par 4 hélicoptères de transport « moyen », de type « CARACAL », coûterait environ 125 millions d'euros pour l'acquisition, puis 10 millions d'euros par an pour leur MCO. Vos rapporteurs estiment nécessaire d'envisager ce renouvellement dans le cadre de la future loi de programmation militaire qui sera examinée en 2018 .


* 7 IL y a environ 200 candidats et 20 à 25 recrutements par an.

* 8 Ce dispositif a été mis en place pour la première fois en janvier 2015, permettant l'engagement simultané du GIGN et du RAID à Dammartin-en-Goële et à la porte de Vincennes.

* 9 Déclenchée pour la première fois le 9 janvier 2015.

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