Avis n° 230 (2015-2016) de M. Jean-Claude LENOIR , fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 9 décembre 2015

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N° 230

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2015-2016

Enregistré à la Présidence du Sénat le 9 décembre 2015

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des affaires économiques (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE , de finances rectificative pour 2015 ,

Par M. Jean-Claude LENOIR,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Claude Lenoir , président ; Mmes Élisabeth Lamure, Delphine Bataille, MM. Alain Bertrand, Martial Bourquin, Gérard César, Alain Chatillon, Daniel Dubois, Joël Labbé, Michel Le Scouarnec, Yannick Vaugrenard , vice-présidents ; M. Marc Daunis, Mme Valérie Létard, M. Bruno Sido , secrétaires ; MM. Gérard Bailly, Jean-Pierre Bosino, Henri Cabanel, François Calvet, Roland Courteau, Alain Duran, Mmes Frédérique Espagnac, Dominique Estrosi Sassone, M. Daniel Gremillet, Mme Annie Guillemot, MM. Michel Houel, Serge Larcher, Jean-Jacques Lasserre, Daniel Laurent, Philippe Leroy, Mmes Marie-Noëlle Lienemann, Anne-Catherine Loisier, MM. Michel Magras, Franck Montaugé, Robert Navarro, Jackie Pierre, Ladislas Poniatowski, Mme Sophie Primas, MM. Yves Rome, Henri Tandonnet .

Voir le(s) numéro(s) :

Assemblée nationale ( 14 ème législ.) :

3217 , 3247 , 3252 , 3282 et T.A. 623

Sénat :

227 et 229 (2015-2016)

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Le présent projet de loi de finances rectificative pour 2015 procède à une vaste réforme de la fiscalité énergétique qui justifie la saisine pour avis de votre commission.

Au premier rang des dispositions relatives à l'énergie qu'il nous appartient d'examiner figure la réforme , attendue à l'origine dans le projet de loi de finances pour 2016, de la contribution au service public de l'électricité (CSPE) (articles 3 et 11).

Les nombreux défauts de la CSPE sont désormais bien connus : absence de contrôle démocratique d'une imposition dont le produit excède celui de l'impôt de solidarité sur la fortune, poids croissant sur la facture d'électricité des consommateurs et malgré cela défaut de couverture des charges ayant conduit à la constitution d'une dette à l'égard d'EDF, manque de lisibilité liée au financement de charges disparates dont la liste n'a cessé de s'allonger au fil des lois, dynamisme de certains postes de dépenses et même risque important de contentieux au regard du droit européen .

La réforme proposée, complexe dans sa mise en oeuvre, tient pour l'essentiel en trois points - budgétisation , sécurisation juridique et élargissement de l'assiette - et en deux temps - 2016 puis à partir de 2017 .

Premier point, dès 2016 , les charges et les recettes de la CSPE sont rapatriées, à périmètre inchangé, dans le budget de l'État ; les charges de service public et les dépenses de soutien aux énergies renouvelables restent financées exclusivement par le consommateur final d'électricité mais son taux et ses emplois font désormais l'objet d'un vote explicite du Parlement .

Il reste que la budgétisation ne garantit pas, par elle-même, un meilleur contrôle des charges par le Parlement qui n'aura à connaître, chaque année, que de la « tranche annuelle » d'engagements pluriannuels et aura in fine peu de leviers pour agir sur des dépenses soit contraintes, soit à guichet ouvert, soit sur lesquelles il n'a plus la main une fois les objectifs de la politique énergétique fixés.

Deuxième point, toujours en 2016 : la CSPE est sécurisée sur le plan juridique par un basculement sur la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité , la TICFE, dont la conformité au droit européen est mieux assurée.

Si ces deux premiers points valident rétrospectivement l'analyse faite par le Sénat lors de l'examen de la loi « Transition énergétique », on regrettera d'abord, sur la forme , qu'une réforme aussi structurante (8 milliards d'euros en année pleine) soit examinée dans les délais toujours contraints d'un « collectif » de fin d'année.

Sur le fond surtout, et même si le droit communautaire permettait difficilement d'en assurer la parfaite neutralité, le dispositif proposé laisse subsister un coût résiduel (de l'ordre de 43 millions d'euros) pour certaines entreprises grandes consommatrices faiblement exposées à la concurrence internationale .

Troisième et dernier point , à partir de 2017 , la fiscalité sur l'électricité est stabilisée et l'assiette du financement des énergies renouvelables est élargie aux énergies fossiles par l'affectation d'une part du produit de la hausse de la « composante carbone ».

De ce point de vue, bien que la participation des énergies carbonées au financement de la transition énergétique , aux côtés d'une électricité déjà très largement décarbonée grâce au nucléaire et à l'hydraulique, soit légitime , et que la hausse annoncée soit conforme à la trajectoire introduite par le Sénat dans la loi « Transition énergétique », aucune mesure de compensation du surcroît de recettes , évaluée par votre commission à 755 millions d'euros en 2017 et près d'1,6 milliard en 2018 , n'est aujourd'hui prévue, en méconnaissance de l'exigence posée par le législateur .

Par ailleurs, après une première mesure inscrite dans le projet de loi de finances pour 2016, plusieurs dispositions modifient à nouveau la fiscalité sur les carburants , parfois de façon concurrente sur une même année, ce qui les rend particulièrement peu lisibles .

Dans la perspective d'un rapprochement des fiscalités de l'essence et du diesel en cinq ans , la modulation tarifaire « plus un centime sur le diesel, moins un centime sur l'essence », déjà prévue pour 2016, est reconduite en 2017 (article 11).

Afin d' encourager l'incorporation de biocarburants , une autre modulation tarifaire , « moins un centime sur l'essence E10 contenant jusqu'à 10 % d'éthanol, plus un centime sur les autres essences », s'appliquera également en 2016, revenant en partie sur les effets de la première pour stabiliser les taxes sur l'essence hors E10 et les réduire de deux centimes sur l'E10 (article 12).

Enfin, un amendement adopté à l'Assemblée nationale contre l'avis du Gouvernement a prévu d' aligner en deux ans la déductibilité pour les entreprises de la TVA sur l'essence sur celle du diesel , ce qui déstabiliserait un marché fragilisé par la désaffection croissante des particuliers pour le diesel et pénaliserait fortement les constructeurs français alors que le rapprochement des fiscalités engagé constitue déjà un signal fort en faveur d'un rééquilibrage du marché (article 30 ter ).

Au cours de sa réunion du 9 décembre 2015, la commission des affaires économiques a adopté huit amendements au projet de loi de finances rectificative pour 2015 :

- à l'article 3, un amendement relevant la part des taxes intérieures de consommation sur les énergies fossiles affectée, en 2017, au financement de la transition énergétique à la hauteur du besoin de financement prévisionnel ;

- au même article, un amendement prévoyant que le Parlement fixe chaque année, en loi de finances, le plafond global des dépenses de soutien aux énergies renouvelables ainsi qu'un plafond, par filière, du volume des nouvelles capacités de production ;

- à l'article 11, un amendement renommant la nouvelle contribution en « contribution au financement de la transition énergétique » (CFTE) pour acter la part prépondérante prise par les énergies renouvelables dans les charges couvertes ;

- au même article, un amendement abaissant le tarif de cette nouvelle contribution à 20,25 euros par MWh en 2017 pour compenser intégralement le relèvement de la « composante carbone » ;

- toujours à l'article 11, trois amendements pour clarifier les sanctions applicables aux fournisseurs d'électricité en cas de minoration des paiements de la nouvelle contribution, exonérer les fournisseurs de toute sanction durant la première année de mise en oeuvre de la réforme et simplifier et harmoniser les obligations déclaratives et de paiement de ces opérateurs ;

- à l'article 30 ter , un amendement de suppression de l'alignement des régimes de déductibilité de la TVA sur l'essence et sur le diesel.

Votre commission a ensuite émis un avis favorable à l'adoption des articles 3, 11, 11 ter , 12 et 30 ter ainsi modifiés.

Source : commission des affaires économiques

I. LE RAPATRIEMENT DES CHARGES ET DES RECETTES DANS LE BUDGET DE L'ÉTAT : UN MEILLEUR CONTRÔLE DU PARLEMENT ET UNE TRANSPARENCE ACCRUE

A. UN CONTRÔLE DU PARLEMENT RENFORCÉ MAIS À COMPLÉTER

1. La situation actuelle : un financement extrabudgétaire contestable sur le plan démocratique

Les charges de service public de l'électricité et du gaz sont aujourd'hui financées par des dispositifs extrabudgétaires - contribution au service public de l'électricité (CSPE), contribution au tarif spécial de solidarité du gaz (CTSSG) et contribution biométhane - dont les coûts sont imputés in fine sur les factures des consommateurs finaux au prorata de leur consommation 1 ( * ) .

Ces mécanismes échappent, par nature, au contrôle du Parlement alors même que les sommes en cause, surtout s'agissant de l'électricité, sont pourtant considérables.

Créée par la loi du 3 janvier 2003 2 ( * ) , la contribution au service public de l'électricité (CSPE) finance, sans aucune lisibilité, des charges très disparates 3 ( * ) dont le périmètre comme le poids financier n'ont cessé de croître au fil des ans :

- le soutien aux énergies renouvelables : tarifs d'achat garantis, complément de rémunération et appels d'offres ;

- le soutien à la cogénération : obligation d'achat et prime transitoire à la capacité ;

- la péréquation tarifaire dans les zones non interconnectées (ZNI) au réseau électrique métropolitain continental ;

- les dispositions sociales : tarif social de l'électricité dit « tarif de première nécessité » (TPN), chèque énergie qui a vocation à se substituer aux tarifs sociaux de l'électricité et du gaz, participation des fournisseurs d'électricité au fonds de solidarité pour le logement et fourniture aux bénéficiaires de la tarification spéciale d'un dispositif d'affichage déporté en temps réel de leur consommation ;

- le soutien à l'effacement de consommation électrique : prime versée aux opérateurs d'effacement, supprimée par la loi « Transition énergétique » 4 ( * ) et remplacée par des appels d'offres ;

- la « compensation carbone » introduite dans le projet de loi de finances pour 2016 au profit des industriels exposés à un risque significatif de fuite de carbone ;

- les frais financiers supportés par les fournisseurs d'électricité en cas de défaut de compensation des charges de service public qu'ils assument - la dette contractée à leur égard 5 ( * ) portant intérêt au taux de 1,72 % ;

- les frais de gestion de la Caisse des dépôts et consignations, par qui transitent les sommes collectées, et de l'Agence de services et de paiement, pour la mise en oeuvre du chèque énergie ;

- enfin, le budget du Médiateur national de l'énergie , pour moitié.

Sous l'effet, pour l'essentiel, de la montée en puissance du poste « énergies renouvelables » qui représente désormais plus de 60 % des coûts 6 ( * ) , les charges annuelles couvertes par la CSPE ont explosé depuis sa création, passant d'1,4 milliard d'euros en 2003 à 7 milliards d'euros attendus en 2016 .

Dans le même temps, les recettes encaissées n'ont pas permis de couvrir l'ensemble des charges , ce déséquilibre générant une dette cumulée à l'égard d'EDF ayant atteint, au plus haut, près de 5,5 milliards d'euros fin 2014 (hors coût financier de la dette) 7 ( * ) .

À défaut de publication de l'arrêté ministériel en révisant le tarif annuel pour l'adapter à l'évolution des charges, le tarif de la CSPE est d'abord resté inchangé entre 2004 et 2010, à 4,5 euros par MWh - alors que les charges doublaient sur la période -, avant que la loi de finances pour 2011 ne prévoit qu'en l'absence de décision ministérielle, la proposition de tarif de la Commission de régulation de l'énergie (CRE) s'applique chaque année dans la limite d'une hausse annuelle de 3 euros par MWh . La CSPE est alors passée, par paliers de 3 euros par an, de 4,5 euros par MWh à 22,5 euros par MWh prévus pour 2016 , soit environ 16 % de la facture annuelle moyenne TTC d'un client résidentiel , sans pour autant suffire à financer les charges annuelles et à apurer la dette 8 ( * ) .

Selon les calculs de la CRE, les charges devraient continuer à croître régulièrement dans les années à venir pour atteindre un montant cumulé de près de 100 milliards d'euros entre 2014 et 2025 , date à laquelle la CSPE nécessaire à la couverture des charges annuelles, estimée à 10,9 milliards d'euros - dont 8 milliards d'euros pour les seules énergies renouvelables -, devrait atteindre environ 30 euros par MWh, soit près du quart de la facture d'un consommateur moyen .

Les consommations de gaz sont également soumises à deux contributions comparables à la CSPE dans leur objet et dans leurs modalités de recouvrement même si les enjeux budgétaires sont moindres :

- la contribution au tarif spécial de solidarité du gaz (CTSSG) (99 millions d'euros attendus en 2015), qui finance le tarif social du gaz , le futur chèque énergie , les frais de gestion associés et l'autre moitié du budget du Médiateur national de l'énergie ;

- la contribution biométhane (23 millions d'euros prévus pour 2016), qui couvre l'obligation d'achat du biométhane injecté dans les réseaux de gaz naturel.

Enfin, alors que la nature juridique de la CSPE était longtemps restée incertaine 9 ( * ) , le Conseil constitutionnel l'a clairement classée parmi les « impositions de toutes natures » 10 ( * ) dont l'article 34 de la Constitution prévoit que « la loi fixe les règles concernant [...] l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement ». Or, cette règle n'est aujourd'hui pas respectée s'agissant du taux de la CSPE qui est fixé en pratique, comme indiqué plus haut, par une autorité administrative indépendante, la CRE, dans la seule limite du plafonnement législatif de sa hausse annuelle à 3 euros par MWh.

2. Un rapatriement des charges et des recettes dans le budget qui permettra une approbation explicite par le Parlement mais qui n'assure pas en soi un meilleur contrôle des charges

Pour toutes ces raisons - absence de contrôle par le Parlement , poids croissant sur la facture d'électricité , défaut de couverture des charges , manque de lisibilité, importance et dynamisme des dépenses et même risque majeur de contentieux au regard du droit européen 11 ( * ) -, le Sénat avait proposé, lors de l'examen de la loi « Transition énergétique », une véritable remise à plat de la CSPE assise sur deux principes :

- un vote annuel du Parlement en loi de finances , sur son taux et sur le plafond des charges couvertes, décliné par filière de production, pour en Renforcer la maîtrise et le contrôle démocratique ;

- un recentrage sur le seul soutien aux énergies renouvelables pour en améliorer la lisibilité et assurer sa conformité avec le droit européen, les autres charges devant être financées, conformément à leur finalité, par des ressources budgétaires.

Cette réforme n'avait cependant pas été conservée par dans le texte définitif, le Gouvernement indiquant qu'une mission avait été confiée sur le sujet à plusieurs corps d'inspections et prenant l'engagement de réformer la CSPE , sur la base de ces travaux, « dans la prochaine loi de finances ».

Les arbitrages n'ayant manifestement pas été rendus à temps , la réforme promise ne figurait pas dans le texte initial du projet de loi de finances pour 2016 mais a été intégrée dans le projet de loi de finances rectificative pour 2015 déposé le 13 novembre dernier à l'Assemblée nationale.

Sur la forme , votre rapporteur pour avis déplore que :

- ce faisant, le Gouvernement détourne de nouveau le « collectif » de fin d'année de son objet initial - l'ajustement des dépenses et des recettes de l'année - pour introduire une réforme qui ne produira ses effets qu'en 2016, d'où la nécessité d'adopter, en cours d'examen, des mesures de coordination dans la loi de finances initiale, ce qui nuit à la clarté et à la sincérité du débat parlementaire ;

- une réforme aussi structurante , ne serait-ce que par l'importance des mouvements budgétaires proposés - 6 milliards en 2016 et 8 milliards d'euros en année pleine - aurait mérité d'autres conditions de discussion que celles d'un « collectif » de fin d'année , dont le calendrier est toujours peu favorable à un examen parlementaire approfondi ;

- enfin, le fait de n'introduire les indispensables mesures de coordination dans le projet de loi de finances qu'en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale fait assez peu de cas du Parlement dans son ensemble et du Sénat en particulier ; à cet égard, on notera que le Gouvernement présumait, par avance, d'un échec de la commission mixte paritaire.

Sur le fond cependant, votre rapporteur pour avis se félicite de la budgétisation proposée en ce qu'elle valide rétrospectivement l'analyse du Sénat et vient corriger une anomalie démocratique , ce que reconnaît désormais le Gouvernement lui-même dans la description du problème à résoudre : « Gérée en dehors du budget de l'État, la CSPE ne suit pas aujourd'hui les règles budgétaires et comptables qui encadrent les recettes et les dépenses publiques , alors même que les compensations versées sont des dépenses publiques et que les recettes sont des impositions de [toutes natures] » 12 ( * ) . Ainsi la réintégration des produits et des dépenses financées par la CSPE dans le budget de l'État doit-elle désormais permettre « d'assurer un meilleur contrôle des charges et une plus grande transparence sur l'emploi de ces crédits » 13 ( * ) .

Il reste que la budgétisation de la CSPE ne garantit pas, par elle-même, un meilleur contrôle des charges par le Parlement . Si le processus sera indéniablement plus transparent, au moins deux écueils demeurent :

- chaque année, le Parlement ne sera amené à approuver, ou à rejeter, que la « tranche annuelle » des engagements pluriannuels pris, dans le cas du soutien aux énergies renouvelables et selon les filières, sur des durées comprises entre dix à vingt ans 14 ( * ) ; à cet égard, il importera que l'information du Parlement sur les engagements passés ou futurs déjà pris, sur la base des projections établies par la CRE, soit parfaitement assurée ;

- le Parlement aura in fine peu de leviers pour agir sur des dépenses soit contraintes - péréquation tarifaire, tarifs sociaux, notamment - soit à guichet ouvert - tarifs d'achat et complément de rémunération hors appel d'offres - soit sur lesquelles il n'a plus la main une fois les objectifs de la politique énergétique fixés - énergies renouvelables, effacement. À cet écueil présumé, on peut cependant objecter, d'une part, que les objectifs ont été votés par le Parlement et que les dépenses induites n'en sont que la mise en oeuvre et, d'autre part, qu'en application des lignes directrices européennes qui obligent à recourir aux appels d'offres à partir d'1 MW, les dépenses à guichet ouvert ont vocation à diminuer au profit d'appels d'offres pilotables par la puissance publique (mais en l'occurrence par le Gouvernement).

B. UNE CLARIFICATION BIENVENUE ENTRE CHARGES DE SERVICE PUBLIC ET DÉPENSES LIÉES À LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE

Dans la nouvelle maquette budgétaire proposée 15 ( * ) , les charges aujourd'hui financées par la CSPE sont réparties selon leur finalité entre :

- un compte d'affectation spéciale « Transition énergétique » retraçant, en dépenses, les charges liées à la transition énergétique et alimenté, en recettes, par des produits issus de la fiscalité énergétique ;

- un programme budgétaire « Service public de l'énergie » au sein duquel sont inscrites les dépenses ne relevant pas directement de la transition énergétique , à commencer par la péréquation tarifaire et les dispositions sociales.

La distinction ainsi opérée entre, d'une part, des charges relativement stables à caractère essentiellement « budgétaire » et, d'autre part, des dépenses dynamiques individualisées au sein d'un compte d'affectation spéciale a d'abord le mérite d'apporter de la clarté .

Sur le plan budgétaire, la création d'un compte d'affectation spéciale présente aussi l'avantage, pour le Gouvernement, d'exclure les dépenses de soutien aux énergies renouvelables du périmètre de la norme de progression des dépenses budgétaires - « zéro volume » et « « zéro valeur » - prévue dans la loi de programmation des finances publiques. À défaut, compte tenu du dynamisme des dépenses de soutien aux énergies renouvelables, il aurait en effet fallu, pour respecter cette norme budgétaire, compenser l'augmentation structurelle et récurrente des charges par une réduction accrue des autres dépenses.

1. Un compte d'affectation spéciale dédié au financement de la transition énergétique

Un compte d'affectation spéciale (CAS) devant, par nature, être équilibré en dépenses et en recettes , le montant des recettes affectées au CAS « Transition énergétique » est destiné à couvrir, à l'euro près, le montant des charges estimées, soit 4,4 milliards d'euros en 2016 .

Ainsi, en recettes , le compte sera alimenté, en 2016 , par :

- une quote-part de la « nouvelle » CSPE issue du basculement opéré par ailleurs 16 ( * ) de l'actuelle CSPE sur la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité (TICFE), elle-même rebaptisée « CSPE ». En 2016, la part affectée au CAS s'élèvera donc à 4,4 milliards d'euros , le solde du produit total attendu - environ 2 milliards d'euros - étant reversé au budget général ;

- une fraction de la taxe intérieure sur la consommation finale de gaz naturel (TICGN), à hauteur de 2,16 %, ce qui correspond au montant attendu de la contribution biométhane désormais intégrée à la TICGN, soit 17 millions d'euros pour 2016 17 ( * ) ;

- le cas échéant, des versements du budget général pour équilibrer le compte, cette ligne étant logiquement appelée à rester nulle.

En 2017 , les mêmes recettes seront reconduites à deux réserves d'importance près :

- compte tenu du rendement supérieur attendu en année pleine de la nouvelle CSPE, évalué à environ 8 milliards d'euros 18 ( * ) , et des charges estimées pour l'année, la part affectée au CAS sera diminuée de 2,5 milliards d'euros reversés au budget de l'État, d'où une recette affectée au CAS de 5,5 milliards d'euros ;

- surtout, à partir de 2017, le Gouvernement a indiqué que les énergies carbonées devraient contribuer au financement du CAS par l'affectation d'une part du produit du relèvement de la composante carbone des taxes intérieures de consommation ( cf. infra ).

En dépenses , seront inscrites dans le CAS en 2016 :

- dans un premier programme « Soutien à la transition énergétique » :

• le soutien aux énergies renouvelables électriques : obligation d'achat, appels d'offres et complément de rémunération, pour 3,6 milliards d'euros . Ce montant correspond à environ 77 % de la charge prévisionnelle estimée par la CRE pour 2016 (4,7 milliards d'euros), le solde devant être couvert, compte tenu du décalage de perception de la nouvelle CSPE sur 2016, par la CSPE résiduelle sur les consommations 2015 ;

• le soutien à l'injection de biométhane , évalué à 17 millions d'euros , soit environ 74 % de l'estimation de la CRE (23 millions d'euros) ;

• le soutien à l'effacement de consommation électrique , pour lequel des crédits ne devraient être inscrits qu'à compter de 2017 pour financer les futurs appels d'offres ayant remplacé la prime versée aux opérateurs d'effacement 19 ( * ) ;

- dans un second programme « Engagements financiers liés à la transition énergétique » , le remboursement progressif de la dette contractée à l'égard d'EDF en raison du défaut de compensation des charges de service public par la CSPE. 744 millions d'euros sont inscrits en 2016 et 1,2 milliard d'euros devraient l'être en 2017, l'État s'étant engagé auprès d'EDF, par un courrier daté du 8 janvier 2013, sur un échéancier prévisionnel indicatif conduisant au remboursement complet à l'horizon 2018 .

2. Un nouveau programme budgétaire retraçant les dépenses ne relevant pas directement de la transition énergétique

Ce nouveau programme budgétaire « Service public de l'énergie » créé au sein de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » regroupera les charges pouvant être rattachées , selon l'analyse du Gouvernement, aux principes du service public de l'électricité et aux obligations de service public du gaz , soit environ 2 milliards d'euros en 2016 :

- la péréquation tarifaire , pour un montant évalué à un peu plus d' 1 milliard d'euros , soit 78 % de la charge prévisionnelle estimée par la CRE (1,375 milliard d'euros) pour tenir compte, là encore, du décalage de perception de la nouvelle CSPE dans l'année, les dépenses restantes devant être couvertes par les circuits résiduels d'ancienne CSPE ;

- les dispositions sociales (tarifs sociaux de l'électricité et du gaz, chèque énergie et contributions des opérateurs au fonds de solidarité logement), pour 316 millions d'euros , soit presque la totalité du montant prévu par la CRE (321 millions d'euros) ;

- le soutien à la cogénération , pour 468 millions d'euros , soit 78 % de l'estimation de la CRE (601 millions d'euros) ;

- le nouveau dispositif de compensation carbone , évalué à 93 millions d'euros pour 2016 au titre des coûts subis en 2015. Compte tenu de l'indexation du montant de l'aide sur la cotation du carbone, son coût devrait augmenter fortement dans les prochaines années . Selon des premières projections 20 ( * ) , il pourrait s'élever à 130 millions d'euros en 2017, 165 millions en 2018, 186 millions en 2019 et 208 millions d'euros en 2020, voire davantage selon le niveau des cours du carbone ;

- les frais de support , pour 94 millions d'euros , correspondant pour l'essentiel aux charges d'intérêts résultant du défaut de compensation aux opérateurs des charges de service public (93 millions d'euros au titre de 2014 selon la CRE) et les frais de gestion de la Caisse des dépôts et consignations ;

- enfin, le budget du Médiateur national de l'énergie , fixé à 5,7 millions d'euros , soit un peu plus que l'estimation faite par la CRE (5,5 millions d'euros inscrits pour moitié dans les charges de CSPE et pour l'autre moitié dans celles de CTSSG).

II. LE BASCULEMENT SUR LES TAXES INTÉRIEURES DE CONSOMMATION : UNE SÉCURISATION JURIDIQUE ATTENDUE QUI N'ASSURE CEPENDANT PAS LA PARFAITE NEUTRALITÉ DE LA RÉFORME POUR LES ENTREPRISES GRANDES CONSOMMATRICES D'ÉLECTRICITÉ

A. UN BASCULEMENT SUR LE RÉGIME DES ACCISES QUI SÉCURISE POUR L'AVENIR LE FINANCEMENT DES CHARGES DU SERVICE PUBLIC DE L'ÉNERGIE

1. La fragilité juridique des contributions actuelles sur l'électricité et sur le gaz

Comme le Gouvernement le reconnaît lui-même, le régime actuel de la CSPE « pose de nombreuses difficultés juridiques tant nationales qu'européennes » 21 ( * ) .

Au plan national , la CSPE fait l'objet d'un contentieux de masse : 54 000 recours préalables ont d'ores et déjà été déposés auprès de la CRE 22 ( * ) , dont près de 14 000 ont été portés devant les tribunaux administratifs. À l'appui de leur demande de remboursement, les requérants contestent non seulement la constitutionnalité de la CSPE au regard, en particulier, du mode de fixation de son taux 23 ( * ) mais aussi sa conformité au droit communautaire en se fondant notamment sur l'absence de notification à la Commission européenne des aides d'État qu'elle finance.

Au plan européen , la fragilité juridique de la CSPE tient aussi à la multiplicité des charges couvertes et au caractère essentiellement « budgétaire » de bon nombre d'entre elles (péréquation tarifaire, tarifs sociaux, etc.) là où le droit communautaire exige, pour ce type de taxe indirecte sur l'électricité qui n'est pas une accise, une finalité spécifique . C'est précisément la raison pour laquelle le Sénat avait, lors de l'examen de la loi « Transition énergétique » et à l'initiative de la commission des finances, recentré la CSPE sur sa seule finalité spécifique incontestable, le soutien des énergies renouvelables , afin d'éliminer un risque de contentieux dont l'effet rétroactif potentiel se chiffrerait en milliards d'euros. Selon des modalités différentes - bascule de la CSPE sur le régime des accises -, la réforme proposée par le Gouvernement répond au même écueil.

En outre, la Commission européenne a ouvert, le 27 mars 2014, une enquête formelle sur les mécanismes de plafonnement de la CSPE au bénéfice des entreprises électro-intensives , au titre de son contrôle des aides d'État.

Enfin, même si aucun contentieux n'est encore ouvert à leur encontre, la CTSSG et la contribution biométhane , bien que mieux « fléchées » dans leur objet, présentent des caractéristiques globalement similaires à la CSPE et partant, la même fragilité juridique .

2. Un basculement opéré sur le régime des accises

Afin de pallier ces difficultés juridiques, le Gouvernement a fait le choix de faire basculer la CSPE sur la TICFE , renommée « CSPE ».

À l'opposé de l'actuelle CSPE, la sécurité juridique de la TICFE paraît en effet d'autant mieux assurée qu'elle correspond à un objet fiscal au périmètre mieux identifié , celui des accises, et qu'elle a été instaurée par la loi du 7 décembre 2010 24 ( * ) dans le cadre de la mise en conformité des taxes sur l'électricité avec le droit communautaire 25 ( * ) .

L'actuelle TICFE est due sur la quantité d'électricité d'une puissance souscrite supérieure à 250 kVA (tarifs verts). Son taux est fixé à 0,5 euro par MWh , soit le taux minimum exigé par le droit communautaire. Les redevables sont les fournisseurs d'électricité 26 ( * ) - qui la répercutent à leurs clients - et les entreprises qui produisent de l'électricité pour leurs propres besoins 27 ( * ) . De nombreux cas d'exemption, d'exonération ou de franchise , autorisés par le droit européen, sont par ailleurs prévus ( cf. infra ). En 2014, le produit de la TICFE s'est élevé à 61,3 millions d'euros .

Pour obtenir un rendement équivalent à celui de l'actuelle CSPE (8 milliards d'euros en année pleine), il a donc été nécessaire, tout en conservant les caractéristiques des taxes intérieures de consommation, de réformer profondément la TICFE en :

- élargissant son assiette à toutes les puissances souscrites , comme c'est aujourd'hui le cas pour la CSPE ;

- portant son taux à 22,5 euros par MWh, soit le tarif prévu pour la CSPE en 2016 ; à partir de 2017, ce taux sera stabilisé , la hausse future des charges devant être financée par le produit du relèvement de la composante carbone des énergies fossiles ( cf. infra ).

Par ailleurs, « afin de reproduire autant que possible les exonérations et plafonnements de la CSPE actuelle » 28 ( * ) , des tarifs réduits sont créés pour les entreprises électro-intensives, hyper-électro-intensives et grandes consommatrices d'électricité fortement exposées à la concurrence internationale ( cf. infra ).

En outre, les modalités de paiement de la taxe doivent être adaptées afin de ne pas peser sur les fonds de roulement des fournisseurs d'électricité. Dans le cadre de l'actuelle CSPE, ces derniers « s'auto-compensaient » en ne reversant que le trop perçu de CSPE par rapport aux charges prévisionnelles. Dans le nouveau dispositif, la taxe, déclarée et acquittée chaque trimestre, fera désormais l'objet de versements mensuels estimatifs (avant régulation trimestrielle) à l'exception de celle due par les fournisseurs alternatifs (moins de 40 TWh par an) qui continuera à être perçue sur une base trimestrielle. Au total, selon les informations fournies à votre rapporteur pour avis, la réforme ne devrait pas avoir d'impact significatif sur le besoin en fonds de roulement des opérateurs , qui étaient particulièrement vigilants sur ce point.

En revanche, le basculement sur le régime des accises implique un changement de traitement des impayés qui n'est pas sans conséquence sur les fournisseurs . Alors que les consommateurs finals étaient jusqu'à présent redevables de la CSPE que les fournisseurs se contentaient de reverser une fois la facture acquittée, ce sont désormais les fournisseurs qui deviennent redevables et doivent en conséquence reverser l'accise sur les quantités fournies, qu'elles aient été payées ou non , conformément à la doctrine fiscale constante appliquée sur toutes les taxes intérieures de consommation et que le Gouvernement n'entend pas remettre en cause. En première analyse, la charge supplémentaire correspondante peut être estimée à moins de 5 millions d'euros cumulés pour l'ensemble des fournisseurs alternatifs , et entre 20 à 25 millions d'euros pour EDF .

Enfin, un basculement similaire de la CTSSG et de la contribution biométhane est opéré sur la TICGN , ce qui conduit à majorer son taux de 0,33 euro par MWh , ce qui portera son taux normal à 4,34 euros par MWh en pouvoir calorifique supérieur en 2016 et à 5,88 euros par MWh en 2017 compte tenu de la trajectoire de relèvement de la composante carbone. Il sera par ailleurs procédé au même relèvement sur les taux réduits de TICGN applicables aux installations grandes consommatrices d'énergie , respectivement gelés à leur niveau de 2013, pour les entreprises soumises au marché européen d'échanges de quotas (1,19 euro par MWh), et de 2014 pour celles dont l'activité est exposée à un risque important de fuite de carbone (1,27 euro par MWh).

Même si ce n'était pas l'objectif premier de la réforme, elle a aussi pour effet de simplifier la fiscalité sur l'électricité et sur le gaz en supprimant trois contributions spécifiques pour les fondre dans deux accises existantes.

Il reste que, par définition, la sécurisation juridique ainsi opérée ne vaut que pour l'avenir et n'éteint pas le risque de contentieux pour le passé tel qu'il existe aujourd'hui pour la CSPE, au plan national comme au plan européen. À cet égard, la question de la notification à la Commission européenne des régimes d'aides passés est posée.

D'ores et déjà, la réforme a été présentée à la Commission européenne , le Gouvernement espérant obtenir, avant la fin de l'examen du « collectif », une « lettre de confort » non engageante par laquelle la Commission ferait état de sa position, avant une déclaration formelle de conformité au droit de l'Union attendue au 1 er janvier 2016.

B. UNE RÉFORME QUI OBLIGE À MODIFIER CERTAINS AVANTAGES TARIFAIRES CONSENTIS AUX ENTREPRISES ÉLECTRO-INTENSIVES OU GRANDES CONSOMMATRICES D'ÉLECTRICITÉ

1. Les différents avantages tarifaires dans le système existant

Le régime actuel de la TICFE prévoit déjà de nombreux cas d'exemption, d'exonération ou de franchise qui sont pour la plupart maintenus dans le cadre de la réforme . Ainsi, l'électricité consommée ne doit pas supporter la TICFE lorsqu'elle est utilisée 29 ( * ) :

- pour des procédés métallurgiques, de réduction chimique et d'électrolyse ;

- par les entreprises électro-intensives , entendues comme celles dont le coût des produits est pour plus de la moitié constitué de la valeur de l'électricité consommée ;

- dans un procédé de fabrication de produits minéraux non métalliques ;

- pour la production d'électricité , jusqu'à 240 GWh par an et par site, ou d'autres produits énergétiques ;

- pour les transports par train, métro, tramway et trolleybus (exonération supprimée par la réforme 30 ( * ) ) ;

- à bord des bateaux , lorsqu'elle est produite par le bateau lui-même ;

- par les gestionnaires de réseaux pour compenser les pertes inhérentes au transport de l'électricité ;

- enfin, par les entreprises grandes consommatrices d'énergie soumises au marché européen d'échanges de quotas, définies comme celles dont les achats d'électricité atteignent 3 % de leur chiffre d'affaires ou pour lesquelles la TICFE due est au moins égale à 0,5 % de la valeur ajoutée (exonération également supprimée par la réforme 31 ( * ) ).

En parallèle, d'autres abattements ou plafonnements sont prévus dans le régime de la CSPE actuelle :

- une exonération des producteurs d'électricité pour l'électricité autoconsommée jusqu'à 240 GWh par an et par site ;

- un plafonnement du montant dû par site à 627 783 euros au 1 er janvier 2015 32 ( * ) ;

- enfin, un plafonnement de la CSPE due pour les sociétés industrielles consommant plus de 7 GWh égal à 0,5 % de leur valeur ajoutée .

Selon la CRE, environ 22 % de la consommation intérieure d'électricité serait aujourd'hui dispensée de CSPE. S'agissant des entreprises, on peut estimer qu'environ 30 % de leur consommation est exonérée, les entreprises grandes consommatrices acquittant en moyenne 4 euros de CSPE par MWh .

2. La mise en place de tarifs réduits n'assure pas la parfaite neutralité de la réforme pour les grands consommateurs d'électricité

Si le basculement sur le régime des accises a pour avantage de sécuriser juridiquement la nouvelle CSPE, il oblige également à revenir sur les deux mécanismes de plafonnement de CSPE au profit des entreprises grandes consommatrices d'électricité, qui ne peuvent être dupliqués dans le nouveau régime en ce qu'ils constitueraient, au regard du droit communautaire, une rupture d'égalité de traitement 33 ( * ) .

Dès lors, pour neutraliser les effets de la réforme liés à la suppression de ces deux plafonnements 34 ( * ) , trois types de tarifs réduits sont prévus :

- des tarifs réduits, et dégressifs selon le rapport entre consommation et valeur ajoutée, pour les industries électro-intensives , entendues comme celles dont la consommation excède 7 GWh par an et pour lesquelles le montant dû hors exonérations et exemptions est au moins égal à 0,5 % de leur valeur ajoutée ; ces tarifs réduits sont de 7,5 euros par MWh (pour une consommation inférieure à 1,5 kWh par euro de valeur ajoutée), 5 euros par MWh (entre 1,5 et 3 kWh par euro de valeur ajoutée) et 2 euros par MWh (au-delà de 3 kWh par euro de valeur ajoutée) ;

- un tarif super-réduit à 0,5 euro par MWh pour les installations hyper-électro-intensives , définies comme celles dont la consommation représente plus de 6 kWh par euro de valeur ajoutée et qui appartiennent à un secteur très ouvert sur le plan international (intensité des échanges avec des pays tiers supérieure à 25 %) ; ce tarif super-réduit est aussi accordé aux transports par rail et assimilés 35 ( * ) ;

- enfin, une seconde catégorie de tarifs réduits et dégressifs introduite par voie d'amendement gouvernemental au profit, parmi les industries électro-intensives, de celles qui sont particulièrement exposées à la concurrence internationale 36 ( * ) ; ces tarifs sont encore plus avantageux que les tarifs réduits « de base » : 5,5 euros par MWh (pour une consommation inférieure à 1,5 kWh par euro de valeur ajoutée), 2,5 euros par MWh (entre 1,5 et 3 kWh par euro de valeur ajoutée) et 1 euro par MWh (au-delà de 3 kWh par euro de valeur ajoutée).

La préservation de la compétitivité de nos entreprises étant essentielle , votre rapporteur pour avis a examiné avec la plus grande attention ces différents mécanismes pour vérifier si, comme indiqué par le Gouvernement, la réforme de la CSPE était globalement neutre pour les entreprises 37 ( * ) .

Au vu des éléments d'information qui lui ont été fournis, il apparaît que :

- le Gouvernement a manifestement cherché à limiter au maximum les effets de transferts en dimensionnant les nouveaux tarifs réduits de sorte qu'ils reproduisent au plus près l'effet des anciens plafonnements, sur la base de projections des impacts de la réforme et en consultant les consommateurs industriels concernés ;

- s'agissant des industries électro-intensives, la réforme de la CSPE doit s'inscrire dans le cadre des mesures adoptées ces derniers mois pour rétablir leur compétitivité : taux réduits de taxes intérieures de consommation votés en lois de finances initiale et rectificative pour 2014 ; pérennisation de la réduction de TURPE, compensation accrue de l'interruptibilité et lancement d'appels d'offres pour développer l'effacement industriel introduits dans la loi « Transition énergétique » ; compensation des coûts indirects du carbone adoptée dans le projet de loi de finances pour 2016. Il serait en conséquence paradoxal qu'un surplus de CSPE prélevée sur ces industriels annule en tout ou partie le bénéfice de ces mesures ;

- dans sa version initiale , le dispositif proposé, limité à deux types de taux réduits, ne traitait pas le cas des entreprises grandes consommatrices exposées à la concurrence internationale, laissant craindre un risque de délocalisations de ces activités. Selon les estimations transmises à votre rapporteur pour avis, le surcoût pour les entreprises grandes consommatrices était de 65 millions d'euros , concentrés en particulier sur le papier-carton (6,5 millions) et le caoutchouc plastique (5,7 millions) ;

- le droit communautaire autorisant la prise en compte de critères relatifs aux secteurs industriels, le Gouvernement a ajouté par voie d'amendement de nouveaux taux réduits plus avantageux au profit des secteurs exposés à un risque important de fuite de carbone pour traiter ces cas particuliers ; au total, si la moyenne des taux réduits pour les grands consommateurs est désormais ramenée à 5 euros par MWh, la réforme laisse cependant subsister un coût résiduel estimé à 43 millions d'euros en 2016 ;

- si ce surcoût pèsera sur des secteurs moins exposés au risque de délocalisation , votre rapporteur pour avis entend interpeller le Gouvernement sur les mesures de compensation qu'il compte mettre en place pour assurer, il est vrai dans un cadre contraint, la parfaite neutralité de la réforme ;

- a contrario , la réforme fait quelques gagnants , en particulier parmi les industries lourdes qui bénéficieront des exemptions de l'actuelle TICFE, et plus généralement doit permettre, avec l'élargissement de l'assiette aux énergies fossiles, de stabiliser la fiscalité sur l'électricité là où la CSPE aurait logiquement dû augmenter de 3 euros par an pendant au moins plusieurs années avant de couvrir la totalité des charges.

S'agissant du basculement sur la TICGN de la CTSSG et de la contribution biométhane , qui ne présentaient pas les mêmes plafonnements que la CSPE, la neutralité de la réforme devrait être assurée à l'exception, là aussi, de certaines consommations d'industries lourdes mises hors champ.

Enfin, il convient de préciser que ces différents taux réduits n'entreront en vigueur qu'au plus tard dans les trois mois suivant la confirmation , par la Commission européenne, de leur conformité au droit de l'Union européenne en matière d'aides d'État. Si le Gouvernement est confiant sur l'obtention d'une réponse favorable d'ici au début de l'année, tout retard éventuel poserait la question du régime applicable aux entreprises grandes consommatrices dans l'intervalle.

III. À PARTIR DE 2017, L'ÉLARGISSEMENT DE L'ASSIETTE AUX ÉNERGIES CARBONÉES LAISSE PENDANTE LA QUESTION DE LA COMPENSATION PAR LA BAISSE D'AUTRES PRÉLÈVEMENTS

A. LA HAUSSE DE LA COMPOSANTE CARBONE : UNE ÉVOLUTION CONFORME À LA TRAJECTOIRE INTRODUITE PAR LE SÉNAT

1. Une stabilisation de la fiscalité sur l'électricité actée en 2017 mais des besoins futurs de financement à couvrir

Compte tenu du poids croissant de la fiscalité sur la facture électrique - qui représente déjà, toutes taxes et contributions comprises 38 ( * ) , plus du tiers de la facture d'un client résidentiel moyen (les coûts d'acheminement comptant pour moins d'un tiers et le restant correspondant aux consommations) -, la poursuite de la trajectoire actuelle de hausse de la CSPE , même plafonnée à 3 euros par MWh et par an, paraît difficilement soutenable à court et moyen terme.

Aussi le Gouvernement a-t-il décidé que « la fiscalité électrique sera stabilisée pour l'avenir » 39 ( * ) , cet engagement étant matérialisé par le maintien, en 2017, du taux de la nouvelle CSPE à son niveau de 2016, soit 22,5 euros par MWh .

Dans le même temps, les charges à financer resteront cependant particulièrement dynamiques . Selon les projections de la CRE 40 ( * ) , leur montant cumulé sur la période 2014-2025 atteindrait près de 100 milliards d'euros (contre environ 30 milliards d'euros entre 2002 et 2013) parmi lesquels le poids du passé resterait prépondérant , 60 % de ce montant étant dû au parc de production d'électricité renouvelable déjà en service fin 2013 41 ( * ) . La CRE précise par ailleurs que « les charges liées à la construction de nouvelles installations résultent en grande partie de la mise en service des parcs éoliens en mer lauréats des deux derniers appels d'offres, qui devraient représenter 10 milliards d'euros de charges cumulées jusqu'en 2025 » tandis que « la construction de nouveaux moyens de production dans les zones non interconnectées (DOM, Corse, etc.) devrait quant à elle conduire à un montant total de charges de 6,8 milliards d'euros ».

Dès lors, la perspective d'un élargissement de l'assiette du financement des charges de service public et du soutien aux énergies renouvelables, envisagée depuis plusieurs années, ne peut désormais plus être repoussée .

2. La hausse de la composante carbone : une affectation au financement de la décarbonation de l'économie légitime sur le principe et une évolution conforme à la trajectoire votée par le Sénat

Pour couvrir « la dynamique des dépenses de service public de l'électricité », le Gouvernement entend « [mobiliser] pour partie le rendement associé la CCE » 42 ( * ) , c'est-à-dire la « contribution climat-énergie », soit la part variable des taxes intérieures de consommation assise sur le contenu en carbone des énergies fossiles, plus souvent qualifiée de « part carbone » ou de « composante carbone ».

Sur le plan des principes, deux thèses s'affrontent sur la légitimité d'un tel élargissement de l'assiette du financement des énergies renouvelables électriques : la première voudrait que chaque énergie finance ses propres énergies renouvelables , comme c'était le cas jusqu'à présent, quand la seconde objecte qu' au regard du taux de pénétration plus important des énergies renouvelables électriques, il est logique que les autres énergies contribuent à les financer .

Or, au-delà même du fait qu'il semble difficile d'augmenter encore la fiscalité sur l'électricité, votre rapporteur pour avis observe que la situation actuelle fait paradoxalement peser l'essentiel du poids du soutien aux énergies renouvelables sur le vecteur énergétique qui est déjà le moins carboné grâce, avant tout, au nucléaire et à l'hydraulique . Dès lors, il lui apparaît légitime que les énergies carbonées contribuent à la décarbonation de l'économie .

En pratique, le présent projet de loi prévoit une augmentation tarifaire générale des taxes intérieures de consommation sur les énergies fossiles - taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE, l'ancienne taxe intérieure sur les produits pétroliers - la TIPP), TICGN et taxe intérieure de consommation sur le charbon (TICC) - sur la base d'une valeur théorique de la tonne de carbone de 30,5 euros en 2017 .

Ce relèvement est par ailleurs conforme à l'objectif introduit, à l'initiative du Sénat 43 ( * ) , dans la loi « Transition énergétique » 44 ( * ) , d' atteindre , pour le calcul des tarifs des taxes intérieures de consommation, une cible de valeur de la tonne carbone à 56 euros en 2020 et 100 euros en 2030 .

La définition d'une telle trajectoire répond en effet à un double objectif : valoriser le carbone à la hauteur de ses coûts réels pour l'environnement et donner aux acteurs économiques une visibilité suffisante pour guider leurs investissements sur le long terme.

Jusqu'à présent, l'évolution de la CCE n'est fixée par la loi de finances pour 2014 45 ( * ) que jusqu'en 2016 , sur la base de 7 euros la tonne de carbone en 2014, 14,5 euros en 2015 et 22 euros en 2016. Pour atteindre 56 euros la tonne en 2020 puis 100 euros en 2030, une progression linéaire des tarifs suppose donc de relever la valeur de la tonne de 8,5 euros par an jusqu'en 2020, ce à quoi le présent texte procède pour 2017, puis de 4,4 euros par an à partir de 2021. Le rendement attendu en 2017 devrait être d'environ 1,9 milliard d'euros .

Il reste qu'en dépit de l'intention exprimée par le Gouvernement de « flécher » une part de ce produit vers le financement de la transition énergétique, aucune précision sur le montant de cette part ni sur ses modalités d'affectation ne figurait dans le texte initial du projet de loi. Adopté contre l'avis du Gouvernement, qui le jugeait prématuré au vu des incertitudes sur le niveau des charges à couvrir et en tous les cas nettement insuffisant dans son montant, un amendement porté notamment par la rapporteure générale de l'Assemblée nationale prévoit désormais d' affecter au CAS « Transition énergétique », à compter de 2017, la totalité de la TICC et une fraction de 1,2 % de la TICPE, soit environ 160 millions d'euros de recettes supplémentaires .

Afin de s'assurer que les énergies carbonées contribueront bien, dès 2017, au financement du CAS à la hauteur des charges prévisionnelles, votre rapporteur pour avis juge par conséquent nécessaire de relever la part des taxes intérieures de consommation sur les énergies fossiles affectée au CAS .

Enfin, on signalera que l'Assemblée nationale a adopté un amendement 46 ( * ) complétant la trajectoire figurant dans la loi « Transition énergétique » pour préciser les valeurs de la tonne de carbone visées en 2018 et 2019 sur la base d'une progression linéaire (soit respectivement 39 et 47,5 euros) mais qui n'a cependant aucune incidence budgétaire puisque les tarifs devront être fixés en loi de finances.

B. MAIS UNE ABSENCE DE COMPENSATION CONTRAIRE À LA LOI ET DES EFFETS DE TRANSFERTS À PRÉVOIR

Si « l'objectif de prévisibilité » mis en avant par le Gouvernement pour fixer dès à présent les tarifs des taxes intérieures de consommation pour 2017 est louable, aucune mesure de compensation de la hausse par la baisse d'autres prélèvements n'est aujourd'hui prévue, ce qui est contraire tant au principe de compensation intégrale retenu à la création de la CCE qu'aux exigences posées par le législateur .

Ainsi, sur les quatre milliards d'euros de recettes supplémentaires attendues de la composante carbone en 2016, trois milliards d'euros sont « restitués » aux entreprises , au titre du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), et un milliard d'euros aux ménages , au travers des taux réduits de TVA applicables aux travaux de rénovation énergétique des logements et en faveur du logement social et du logement intermédiaire.

Ce principe de compensation intégrale figure du reste explicitement dans deux lois :

- la loi dite « Grenelle I » 47 ( * ) , qui appelait l'État à étudier la création de la CCE, dispose que cette contribution « sera strictement compensée par une baisse des prélèvements obligatoires de façon à préserver le pouvoir d'achat des ménages et la compétitivité des entreprises » ;

- la loi « Transition énergétique » 48 ( * ) prévoit quant à elle spécifiquement que « l'élargissement progressif de la part carbone [est] compensé, à due concurrence, par un allègement de la fiscalité pesant sur d'autres produits, travaux ou revenus ». Votre commission, à l'initiative de cette disposition, avait précisément ajouté ce garde-fou afin de s'assurer du caractère incitatif et non punitif de la fiscalité écologique , conformément aux engagements alors pris par le Gouvernement.

Ce faisant, il s'agit de mettre en oeuvre le « double dividende » attendu de la fiscalité environnementale 49 ( * ) :

- premier dividende, la réduction de la pollution par les changements de comportements qu'elle induit, ce qui conduit à éroder progressivement son assiette ;

- second dividende, celui lié à l'usage des recettes qu'elle procure, qui peut viser, dans une logique d'équité, à atténuer ses effets anti-redistributifs (cas des taux réduits de TVA), et, dans une logique d'efficacité économique, à diminuer d'autres prélèvements particulièrement distorsifs (cas de la fiscalité sur le travail visée par le CICE).

À en croire l'exposé des motifs de l'article 11 du présent projet de loi, la hausse de la part carbone viserait un unique « objectif de rendement budgétaire », ce qui ne manque pas d'étonner.

Selon l'argumentation développée par le secrétaire d'État chargé du budget lors de l'examen du « collectif » à l'Assemblée nationale, le relèvement de la CCE serait compensé par la stabilisation de la fiscalité sur l'électricité à compter de 2017 , et donc par l'annulation de la hausse annuelle de 3 euros par MWh présentée comme « automatique » 50 ( * ) . Or, même si cette conception extensive de la compensation d'une hausse par l'annulation d'une autre hausse prévisible pouvait être admise, le produit généré par l'augmentation de la CCE - 1,9 milliard d'euros par an - resterait supérieur à celui d'une hausse de CSPE - 1,085 milliard d'euros 51 ( * ) .

Au total, selon les calculs de votre commission, la réforme entendue au sens large - refonte de la CSPE et relèvement de la composante carbone - générerait un surcroît de recettes non compensé de l'ordre de 43 millions d'euros en 2016 (sous le seul effet de la réforme de la CSPE), 755 millions d'euros en 2017 et près d'1,6 milliard en 2018 ( cf. tableau ci-après) 52 ( * ) .

ÉVOLUTION DES PRODUITS DE TICFE, CSPE ET CCE

(en millions d'euros)

2014

2015

dont recouvrés sur 2016

2016

2017

2018

TICFE actuelle

61

15

-

-

-

CSPE actuelle (estimations)

6 188

7 002

1 401

-

-

-

CSPE actuelle sans réforme (estimations du Gouvernement)

-

-

7 756

9 104

10 175

Nouvelle CSPE

-

-

6 398

8 009

8 009

Évolution du rendement annuel de CSPE après réforme (base 2016 sans réforme)

-

-

43

- 1 095

- 2 166

« Contribution climat énergie » (estimations)

340

2 500

4 050

5 900

7 800

Évolution du rendement annuel de CCE (base 2016 sans réforme)

-

-

-

1 850

3 750

Gain net après réforme (base 2016 sans réforme)

-

-

43

755

1 584

Source : commission des affaires économiques à partir des données de la CRE et de l'évaluation préalable de l'article 3 du projet de loi de finances rectificative pour 2015

Outre un surcroît net de recettes pour l'État, l'élargissement de l'assiette aux énergies carbonées peut aussi induire des effets de transferts qui restent cependant difficiles à évaluer avec précision :

- entre ménages , en fonction notamment du type d'énergie utilisée pour le chauffage ou du mode de transport : un tel transfert d'assiette impactera négativement les ménages chauffés au fioul ou au gaz et les « gros rouleurs » au diesel , qui subiront par ailleurs la hausse progressive de la fiscalité sur le gazole ( cf. infra ) ; a contrario , la stabilisation de la fiscalité de l'électricité, seul vecteur énergétique consommé par tous, génère un gain général mais variable selon les ménages ;

- entre ménages et entreprises, les effets de transferts devraient être limités , même si les ménages sont sans doute plus affectés par la hausse des énergies carbonées que les entreprises, les plus sensibles d'entre elles au prix des carburants bénéficiant de taux réduits ou de remboursements de taxes intérieures de consommation (taxis, transporteurs routiers, agriculteurs) ;

- entre entreprises enfin, l'existence de taux réduits protège les professionnels qui en bénéficient des hausses de CCE que doivent acquitter les autres.

S'agissant des ménages, votre rapporteur pour avis rappelle enfin que si le relèvement de la composante carbone opéré depuis 2014 a jusqu'à présent été relativement indolore compte tenu de la chute des cours du pétrole, il pourrait ne pas toujours en être ainsi . Du reste, c'est paradoxalement grâce à l'exploitation des gaz et pétroles de schiste aux États-Unis que les cours du brut ont baissé et qu'une fenêtre d'opportunité s'ouvre, en France, pour financer la transition énergétique en recourant à la fiscalité sur les énergies fossiles.

Enfin, et même s'il est vrai qu'une telle différenciation s'avère difficile à mettre en oeuvre sur le plan technique, votre rapporteur pour avis regrette que les produits issus de la biomasse ne soient pas globalement exclus du relèvement de la part carbone , conformément au principe fixé par la loi « Transition énergétique » 53 ( * ) . On rappellera cependant que les « centrales bagasse-charbon » en outre-mer ou les « centrales biomasse » ne sont pas concernées par la CCE et que l'article 12 du présent texte procède à un rééquilibrage de la fiscalité de l'essence pour favoriser une plus grande incorporation de biocarburants.

IV. L'ÉVOLUTION DES TAXES SUR LES CARBURANTS : RAPPROCHEMENT DES FISCALITÉS DE L'ESSENCE ET DU DIESEL ET SOUTIEN AUX BIOCARBURANTS MAIS UNE ABSENCE DE STRATÉGIE GLOBALE

A. LA RÉDUCTION DES AVANTAGES DU DIESEL DOIT ÊTRE PROGRESSIVE

1. La poursuite du rapprochement des fiscalités du diesel et de l'essence

La fiscalité des carburants est aujourd'hui composée de trois éléments principaux :

- la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), dont le produit s'est élevé à 24,5 milliards d'euros en 2014 ;

- la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), qui représente plus de 11 milliards d'euros ;

- enfin, la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), mécanisme incitatif destiné à favoriser l'incorporation de biocarburants et dont les taux - 7 % pour l'essence et 7,7 % pour le diesel - sont minorés en fonction de la quantité de biocarburants incorporés, d'où un rendement plus faible d'environ 150 millions d'euros par an.

Depuis 2014, la TICPE intègre une composante carbone progressive et proportionnée aux émissions de CO 2 des produits énergétiques, ce qui devrait porter son produit à 26,9 milliards d'euros en 2015 puis 28,2 milliards d'euros en 2016 .

On rappellera aussi qu'afin de compenser le manque à gagner lié à la suppression de l'écotaxe, la loi de finances pour 2015 54 ( * ) a relevé de deux centimes par litre la TICPE sur le gazole pour les particuliers et réduit de 4 centimes le tarif réduit accordé aux transporteurs routiers , le produit de ces taxes supplémentaires étant affecté au financement des infrastructures de transport à hauteur d'1,1 milliard d'euros en 2015.

Dans un contexte marqué par le « scandale Volkswagen », le Gouvernement a annoncé sa volonté d'« entamer un rapprochement en cinq ans entre le prix du gazole et celui de l'essence » en prévoyant, à l'article 8 bis du projet de loi de finances pour 2016, une première hausse d'un centime d'euro par litre de la TICPE sur le gazole assortie d'une baisse de la taxation de l'essence dans la même proportion , applicables au 1 er janvier 2016.

Le parc automobile actuel étant encore massivement diésélisé, cette modification des tarifs devrait produire une recette supplémentaire de l'ordre de 245 millions d'euros que le Gouvernement s'est engagé à compenser en « [allégeant] la fiscalité locale des contribuables modestes, et notamment des retraités 55 ( * ) [et en renforçant] la prime à la conversion » via un élargissement de son assiette à tous les véhicules diesel de plus de 10 ans et un relèvement de son montant de 500 à 1 000 euros.

Comme annoncé par le Gouvernement, une nouvelle modulation d'un centime d'euro par litre aux dépens du gazole et au profit de l'essence est prévue pour 2017 par le présent projet de loi de finances rectificative, ce qui revient à réduire à nouveau l'écart de taxation entre les deux carburants de 2 centimes d'euros (2,4 centimes en incluant l'effet TVA) et devrait générer une recette supplémentaire du même ordre . Votre rapporteur pour avis attend donc que le Gouvernement prévoit, en temps utiles, de nouvelles mesures de compensation de cette hausse.

En parallèle, le projet de loi de finances rectificative pour 2016 prévoit encore, dans son article 12, une troisième modulation tarifaire applicable en 2016 aux seules essences et consistant à augmenter la TICPE d'un centime sur les essences sans plomb 98 et 95 « classique » tout en la baissant d'un centime pour l'essence sans plomb 95 dite « E10 » car incorporant jusqu'à 10 % de biocarburants ( cf. infra ).

En combinant les deux modulations prévues en 2016, la TICPE sur l'essence et le diesel évoluera donc de la façon suivante :

- un centime supplémentaire pour le diesel ;

- une fiscalité inchangée sur l'essence hors E10 , la seconde modulation annulant l'effet de la première ;

- une baisse de deux centimes sur le sans plomb 95-E10 .

En tenant compte de l'évolution de la CCE déjà votée et applicable en 2016, la fiscalité sur le gazole augmentera au total de 3 centimes d'euros (3,6 centimes TVA comprise), celle sur l'essence hors E10 d'1,7 centime tandis que l'essence sans plomb 95-E10 ne baissera que de 0,3 centime .

Comme le rapporteur pour avis de notre commission sur le projet de loi de finances initiale l'avait déjà observé, ces mouvements successifs décidés à quelques jours ou semaines d'intervalle dénotent une absence de stratégie globale du Gouvernement sur la fiscalité des carburants, qui semble « naviguer à vue » au gré de l'actualité .

Au surplus, la complexité du dispositif résultant de la juxtaposition de ces différentes mesures nuit à la lisibilité de l'action publique , au point que le Gouvernement lui-même a dû déposer, à l'Assemblée nationale, un amendement sur l'article 12 pour « fusionner ces dispositions afin de permettre une lecture directe des tarifs de TICPE applicables à l'essence et gazole à compter du 1 er janvier 2016 ».

Au total, votre rapporteur pour avis déplore que des choix aussi structurants du triple point de vue économique, énergétique et environnemental, fassent l'objet d'arbitrages tardifs 56 ( * ) , sans réflexion sur leur cohérence d'ensemble et sans véritable étude d'impact.

Il rappelle également que la mise en oeuvre de la CCE et les relèvements de tarifs votés fin 2014 ont déjà amorcé le rapprochement de la fiscalité applicable à l'essence et au gazole : entre 2014 et 2016, l'écart de tarif de TICPE entre le gazole et l'essence 57 ( * ) sera réduit de 15,31 centimes par litre, soit 14,2 % dès avant les deux nouvelles modulations prévues en 2016 et 2017.

Enfin, on signalera qu'un amendement a été adopté à l'Assemblée nationale pour préserver l'écart de fiscalité actuel entre l'essence et le GPL .

2. L'alignement des régimes de déductibilité de la TVA applicables à l'essence et au diesel déstabiliserait un marché déjà fragile et pénaliserait les constructeurs français

Les règles applicables en matière de déductibilité de la TVA pour les entreprises sont fixées au niveau européen . Elles disposent, en particulier, que la déductibilité est de droit - les entreprises déduisant la taxe acquittée sur leurs achats de biens et services dès lors que ces dépenses servent à produire des biens et services qui sont eux-mêmes taxés - et que la non-déductibilité est l'exception .

À cet égard, la France bénéficie d'une dérogation lui permettant, en vertu d'une « clause de gel » autorisant le maintien des exclusions au droit à déduction existantes au 1 er janvier 1979, d'interdire la déduction de TVA sur l'essence pour les flottes d'entreprises et, ce faisant, d'accorder un avantage fiscal au diesel.

Sur le plan juridique, si la suppression de l'avantage fiscal conféré au diesel ne peut par conséquent pas être décidée, l'extension du droit à déduction à l'essence est techniquement possible pour autant que la France renonce au bénéfice de la « clause de gel », renonciation qui serait irrévocable .

À l'initiative du groupe écologiste et contre l'avis du Gouvernement 58 ( * ) , l'Assemblée nationale a prévu, à l'article 30 ter , d' autoriser la déductibilité de la TVA sur l'essence, à hauteur de 40 % en 2016 puis de 80 % en 2017, soit un niveau équivalent à celui du diesel . Selon les estimations de l'Observatoire des flottes d'entreprises, le coût de la mesure serait compris entre 15 et 20 millions d'euros .

Le traitement fiscal historiquement favorable du gazole ayant fortement structuré le marché automobile français, votre rapporteur pour avis juge impératif de faire converger les fiscalités de l'essence et du diesel de façon progressive afin, en particulier, de permettre à la filière automobile française d'adapter son offre et son outil de production . A contrario , il est vrai qu'un tel rééquilibrage améliorera à terme la compétitivité des raffineries françaises , contraintes d'exporter 35 % de leur production excédentaire d'essence sur des marchés de plus en plus concurrentiels, ainsi que le solde de la balance commerciale , 40 % de la consommation française de gazole étant importée.

Il reste qu'en l'état, un alignement des régimes de TVA de l'essence et du diesel qui viendrait s'ajouter au rattrapage de TICPE dans les cinq ans déjà décidé risquerait de déstabiliser un marché du diesel fragilisé et de pénaliser, en priorité, les constructeurs français .

Sur le marché français, la part des véhicules diesel est d'ores et déjà passée de 72 % des immatriculations en 2012 à 54 % en octobre dernier . La baisse est encore plus marquée sur le marché des particuliers puisque les flottes d'entreprises , qui représentent environ la moitié du marché total, sont encore diéselisées à 90 % grâce au régime fiscal actuel , jouant ainsi le rôle d'amortisseur de la désaffection prononcée des clients particuliers pour le diesel.

Dans le même temps, les constructeurs français, dont les positions concurrentielles sont historiquement plus solides en diesel qu'en essence, ont perdu 1,5 point de parts de marché .

Au-delà de cette perte de part de marché, un basculement trop brutal se chiffrerait pour les constructeurs hexagonaux en centaines de millions d'euros de pertes par an sous l'effet, notamment, de l'obligation d'investir dans de nouvelles capacités de production, d'une moindre rentabilité des véhicules essence, de volumes réduits pour amortir le coût de la dépollution du diesel ou encore d'une difficulté accrue pour respecter l'objectif européen d'une gamme émettant au plus en moyenne 95 grammes de CO 2 par km en 2020 sous peine de pénalités financières.

Sur le plan environnemental en effet, on rappellera que bien que la combustion d'un litre de diesel émette plus de CO 2 qu'un litre d'essence, le moteur diesel, par son rendement thermique supérieur, consomme au total moins de carburant et émet moins de CO 2 qu'un moteur essence sans hybridation 59 ( * ) tandis que sur le plan sanitaire, l'adoption des normes Euro 5 et Euro 6 a très fortement réduit les émissions d'oxyde d'azote (NOx) et de particules nocives pour la santé.

Pour toutes ces raisons, votre rapporteur pour avis considère que le rapprochement des fiscalités engagé par le Gouvernement constitue déjà un signal fort en faveur d'un rééquilibrage du marché et est par conséquent favorable à la suppression de cet article.

B. UN ENCOURAGEMENT À L'INCORPORATION DE BIOCARBURANTS

Jusqu'à présent, l'essence sans plomb 95 « classique » , également dite « E5 » car pouvant contenir jusqu'à 5 % d'éthanol, et l'essence sans plomb 95-E10 , qui en incorpore jusqu'à 10 %, sont soumises à un tarif identique de TICPE . En outre, si la TGAP incite les opérateurs à incorporer des biocarburants dans les produits pétroliers qu'ils mettent à la consommation, elle n'a pas d'effet direct sur le consommateur.

Afin de favoriser la consommation de biocarburants conformément aux objectifs fixés par la loi « Transition énergétique » - soit 10 % d'énergies renouvelables dans les transports en 2020 et 15 % en 2030 - l'article 12 du projet de loi de finances rectificative pour 2016 prévoit de moduler le taux de TICPE au profit de l'essence sans plomb E10 , en minorant d'un centime d'euro par litre le tarif qui lui est applicable et en relevant d'un centime d'euro par litre le tarif des essences « classiques » sans plomb 98 et 95.

En pratique, cette modulation revient à annuler, pour les essences « classiques », la baisse d'un centime prévue dans le cadre du rattrapage des fiscalités de l'essence et du diesel ( cf. supra ).

Au-delà des bénéfices environnementaux de la hausse attendue de la consommation d'une énergie renouvelable, cette mesure, annoncée dans le cadre du plan d'urgence pour l'agriculture, devrait offrir de nouveaux débouchés aux agriculteurs français .

Selon les estimations fournies par le Gouvernement, cette disposition devrait générer, compte tenu de la consommation aujourd'hui plus faible d'E10 que d'essences « classiques », un surcroît de recettes de 46 millions d'euros l'an prochain, sans qu'aucune mesure de compensation ne soit prévue .

*

Enfin, on signalera qu'à l'article 5 du présent projet de loi, le Gouvernement a prévu, par voie d'amendement, d' abonder les crédits du programme 174 « Énergie, climat et après-mines » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », dont votre commission se saisit pour avis chaque année, de 250 millions d'euros pour couvrir les actions financées, en 2015, par « l'enveloppe spéciale transition énergétique ».

Dès lors que les ressources de l'enveloppe doivent être « définies en loi de finances » 60 ( * ) et que les premiers versements ont déjà été effectués, votre rapporteur pour avis s'était étonné qu'aucune disposition ne figure dans le texte initial du projet de loi . Le Gouvernement a indiqué qu'après avoir envisagé une affectation directe à l'enveloppe des dividendes versés par la Caisse des dépôts et consignations (CDC) à l'État, il était apparu plus adapté sur le plan juridique et opérationnel d'intégrer ces sommes au budget de l'État - ce qui a au passage pour effet de majorer de près d'un tiers les crédits du programme 174 - et de les couvrir par l'encaissement des dividendes de la CDC. Selon les informations transmises à votre rapporteur pour avis, il n'est en revanche pas certain, aujourd'hui, que la même solution sera retenue l'an prochain.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Mardi 1 er décembre 2015 :

- Commission de régulation de l'énergie (CRE) : MM. Jean-Yves Ollier , directeur général, Christophe Leininger , directeur du développement des marchés, Mmes Anne Monteil , directrice des relations institutionnelles et de la communication et Olivia Fritzinger , chargée des relations institutionnelles et de la communication.

Jeudi 3 décembre 2015 :

- Cabinet du ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) : MM. Antoine Pellion , conseiller énergie au cabinet du ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, Julien Tognola , sous-directeur des marchés de l'énergie et des affaires sociales, et Thibaut Leinekugel Le Cocq , chef du bureau des marchés de l'électricité à la direction générale de l'énergie et du climat.


* 1 Sauf abattement de CSPE pour les producteurs d'électricité ou plafonnements pour certaines entreprises, cf. infra II.B.1. Les cas d'exonération de CTSSG sont plus limités (pertes et exportations et consommations dans les installations de cogénération) tandis que la contribution biométhane est acquittée uniformément sur toutes les consommations.

* 2 Loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie, art. 37.

* 3 Ce qui pose clairement la question de sa compatibilité avec le droit communautaire, cf. infra II.A.1.

* 4 Loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, art. 168.

* 5 En pratique, seule EDF est concernée, les autres fournisseurs - entreprises locales de distribution et fournisseurs alternatifs - étant compensés par priorité.

* 6 67,1 % des charges prévisionnelles au titre de 2016 (dont 39 % pour le photovoltaïque et 17 % pour l'éolien), contre 19,5 % pour la péréquation tarifaire, 8,8 % pour le soutien à la cogénération et 4,6 % pour les dispositions sociales. Source : délibération de la Commission de régulation de l'énergie du 15 octobre 2015.

* 7 À partir de 2015, la dynamique de la CSPE permet de commencer à résorber la dette, à 4,9 milliards fin 2015 et 3,4 milliards fin 2016.

* 8 Pour 2016, la CRE estime que la contribution devrait être de 27,05 euros par MWh pour couvrir les charges totales prévisionnelles pour 2016 évaluées à 9,8 milliards d'euros si l'on ajoute le défaut de compensation à l'égard d'EDF pour 2014 (2,8 milliards d'euros).

* 9 Le Conseil d'État la qualifiant d'« imposition innommée » selon les termes du rapport public Verot dans son arrêt du 13 mars 2006, Société Eurodif.

* 10 Conseil constitutionnel, décision n° 2014-419 QPC du 8 octobre 2014, Société Praxair SAS [Contribution au service public de l'électricité] .

* 11 Cf. infra II.A.1.

* 12 Évaluations préalables des articles du projet de loi de finances rectificative pour 2015.

* 13 Exposé général des motifs du projet de loi de finances rectificative pour 2015.

* 14 Ce temps long explique du reste que les erreurs du passé, notamment en matière de tarifs d'achat photovoltaïques, pèsent aujourd'hui encore sur les comptes.

* 15 Art. 3 du projet de loi de finances rectificative pour 2015 et annexe explicative des modalités de financement en 2016 des charges budgétaires relatives au service public de fourniture d'électricité et de gaz ainsi qu'à la transition énergétique.

* 16 Art. 11 du projet de loi de finances rectificative pour 2015, cf. infra II.A.

* 17 Et 23 millions d'euros en 2017.

* 18 Le produit 2016 étant minoré par un décalage de perception lié aux modalités de recouvrement de la TICFE. Seules les consommations de l'année 2016 donnant lieu à facturation ou acompte jusqu'au 30 novembre 2016 pourront, en pratique, donner lieu à versement de TICFE au budget de l'État, d'où un rendement de 11/12 e d'année pleine. Combiné à deux autres facteurs - saisonnalité des consommations et modalités de facturation -, cette estimation a été affinée à 79,7 % du produit attendu en année pleine.

* 19 Les appels d'offres actuels étant encore financés par le tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité (TURPE).

* 20 Qui restent cependant spéculatives en raison de l'incertitude sur le niveau des prix prévisionnels.

* 21 Évaluations préalables des articles du projet de loi de finances rectificative pour 2015.

* 22 L'arrivée massive de ces dossiers ayant, avant même qu'il ne soit question de leur traitement, désorganisé matériellement le fonctionnement de la CRE qui a dû recruter trois intérimaires pour les réceptionner.

* 23 Dans sa décision n° 2014-419 QPC du 8 octobre 2014, Société Praxair SAS [Contribution au service public de l'électricité] , le Conseil constitutionnel a certes rejeté le grief fondé sur l'incompétence négative du législateur mais pour un motif d'irrecevabilité propre aux questions prioritaires de constitutionnalité. Dans le cadre d'un contrôle a priori de la loi, un tel mode de fixation serait sans doute jugé contraire à la Constitution.

* 24 Loi n° 2010-1488 du 7 décembre 2010 portant nouvelle organisation du marché de l'électricité dite loi « Nome ».

* 25 Directive 2003/96/CE du 27 octobre 2003 restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l'électricité.

* 26 Auprès desquelles la taxe est recouvrée trimestriellement par l'administration des douanes.

* 27 Lorsque leur production dépasse 240 GWh par an et par site.

* 28 Évaluation préalable de l'article 11 du projet de loi de finances rectificative pour 2015.

* 29 En application de l'art. 266 quinquies C du code des douanes.

* 30 Les transports par rail et assimilés étaient jusqu'à présent soumis à la CSPE à hauteur du plafonnement par site mais exonérés de TICFE. La suppression de l'exonération de TICFE dans le nouveau régime vise à maintenir une contribution de ces secteurs d'activité au financement des charges de service public de l'énergie, au taux de 0,5 euro par MWh. Les opérateurs consommant moins d'1,3 TWh seront gagnants tandis que SNCF Mobilités verrait sa contribution portée à environ 3,6 millions d'euros (soit moins d'1 % de sa facture d'électricité).

* 31 Car contraire au droit européen qui impose d'appliquer à tous les consommateurs un taux minimal de 0,5 euro par MWh.

* 32 Ce montant étant révisé chaque année en proportion de l'évolution de la CSPE et dans la limite d'une augmentation de 5 %.

* 33 Ainsi, le plafonnement par site reviendrait à appliquer à certains consommateurs des taux extrêmement faibles de CSPE.

* 34 L'exonération pour l'électricité autoconsommée demeure puisqu'elle existait déjà dans le cadre de la TICFE actuelle, cf. supra .

* 35 L'Assemblée nationale a ajouté à la liste des transports visés les transports par câble de type téléskis.

* 36 Et donc au risque de fuites de carbone consistant à délocaliser la production ou à perdre des parts de marché au profit d'entreprises qui n'auraient pas à subir les effets d'une tarification du carbone sur les prix de l'électricité. Les secteurs et sous-secteurs visés sont ceux énumérés à l'annexe II de la communication de la Commission européenne n° 2012/C 158/04 du 5 juin 2012 relative aux lignes directrices concernant certaines aides d'État dans le contexte du système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre après 2012.

* 37 La neutralité pour les ménages de la réforme de la CSPE entendue au sens strict, c'est-à-dire hors élargissement de l'assiette, étant assurée. À compter de 2017 en revanche, la hausse de la part carbone engendrera des transferts entre les ménages selon leur profil de consommation énergétique, cf. infra .

* 38 Soit outre la CSPE, les taxes locales - départementale et communale - sur la consommation finale d'électricité, la contribution au tarif d'acheminement (CTA) qui finance le régime de retraite des industries électriques et gazières (IEG) et enfin la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), au taux réduit sur la partie abonnement et au taux plein sur les consommations et les autres taxes.

* 39 Exposé général des motifs du projet de loi de finances rectificative pour 2015.

* 40 Rapport sur la contribution au service public de l'électricité (CSPE) : mécanisme, historique et prospective, Commission de régulation de l'énergie, octobre 2014.

* 41 Dont 25 milliards d'euros pour le seul parc photovoltaïque.

* 42 Exposé général des motifs du projet de loi de finances rectificative pour 2015.

* 43 Amendements présentés par les groupes UDI-UC et écologiste en première et en nouvelle lecture ayant reçu, sur proposition du rapporteur, un avis favorable de la commission des affaires économiques.

* 44 Art. 1 er , VIII de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 précitée.

* 45 Art. 32 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.

* 46 Art. 11 ter du projet de loi de finances rectificative pour 2015.

* 47 Art. 2 de la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement.

* 48 Art. 1 er , VIII de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 précitée, codifié à l'art. L. 100-2 du code de l'énergie.

* 49 Voir notamment le rapport d'information n° 543 (2008-2009) de Mme Fabienne Keller, fait au nom de la commission des finances, déposé le 8 juillet 1999 : « En attendant la taxe carbone... Enjeux et outils de la réduction des émissions de CO 2 ».

* 50 En l'espèce, si l'augmentation des charges a conduit, depuis 2010, à relever chaque année le taux de CSPE à la hauteur du plafond de 3 euros par MWh, son produit permet déjà, à partir de 2015, de commencer à rembourser la dette contractée à l'égard d'EDF et d'envisager son apurement à l'horizon 2018 ou 2019. En outre, d'autres facteurs pèseront à la baisse sur l'évolution des charges : fin progressive des contrats de soutien les plus rémunérateurs ou baisse des coûts unitaires liée aux progrès technologiques qui viendra compenser la croissance du parc installé (à titre d'exemple, dans le cadre du dernier appel d'offres sur les centrales solaires de grande puissance, le tarif moyen pour les installations au sol est passé de 107 à 82 euros par MWh, soit une baisse de 23 % en vingt mois).

* 51 Soit 3 euros par MWh x 361,8 TWh de consommation intérieure soumise à CSPE en 2016.

* 52 De son côté, le Gouvernement évalue l'impact global de l'article 11 du projet de loi à 30 millions d'euros en 2016 et 720 millions d'euros de recettes supplémentaires en 2017, soit des chiffres voisins mais qui, contrairement à ceux de votre commission, intégreraient la poursuite, en 2017, du rapprochement des tarifs de l'essence et du gazole (qui génère à elle seule environ 250 millions d'euros de recettes).

* 53 À l'initiative de votre commission, il a en effet été précisé, à l'article L. 100-2 du code de l'énergie précité, que la composante carbone doit être « assise sur le contenu en carbone fossile », ce qui exclut de fait la biomasse.

* 54 Art. 36 de la loi de finances n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015.

* 55 Seraient concernés, en particulier, les retraités aux revenus modestes assujettis cette année au paiement de la taxe d'habitation ou de la taxe foncière en raison, notamment, du plein effet de la suppression de la demi-part fiscale supplémentaire accordée aux veufs et de la fiscalisation de la majoration de pension pour enfants.

* 56 L'amendement gouvernemental introduisant la première modulation a été déposé la veille de l'examen en séance publique à l'Assemblée nationale.

* 57 Calculé sur la base du tarif de TICPE applicable à l'essence sans plomb 95.

* 58 Le secrétaire d'État chargé du budget déclarant que « le Gouvernement considère que le signal qui a été envoyé [par les modulations tarifaires de TICPE] est suffisamment important et oriente de façon très forte la fiscalité sur les carburants. Aller plus vite et plus loin serait déstabilisant au regards de certains facteurs sociaux et économiques ».

* 59 En outre, le moteur électrique des modèles hybrides ne joue à plein que dans le cadre d'une utilisation urbaine.

* 60 Art. 20 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte.

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