EXAMEN EN COMMISSION
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Audition de M. Jean-Marc Todeschini, secrétaire d'Etat auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants et de la mémoire
(mercredi 4 novembre 2015)
M. Gérard Dériot, président . - Je suis très heureux d'avoir l'honneur d'accueillir un ancien collègue devant notre commission pour nous présenter le projet de budget 2016 de son ministère. Les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » ont été adoptés sans modification par l'Assemblée nationale la semaine dernière, de même que les trois articles rattachés, auxquels les députés ont ajouté un article additionnel. Notre rapporteur pour avis, Jean-Baptiste Lemoyne, puis le rapporteur spécial de la commission des finances, Marc Laménie, vous interrogeront avant que les autres membres de la commission prennent à leur tour la parole.
M. Jean-Marc Todeschini, secrétaire d'Etat auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants et de la mémoire . - Je n'avais pas eu l'occasion de venir devant votre commission l'an passé, l'une de mes premières tâches à mon arrivée au ministère ayant été de défendre, dans l'hémicycle du Sénat, l'excellent budget préparé par mon prédécesseur, et dont le monde combattant s'était montré satisfait. J'avais à cette occasion pris des engagements fermes : axer prioritairement mon action sur les anciens combattants les plus démunis, maintenir le groupe de travail sur les conjoints survivants des grands invalides et installer un autre groupe de travail sur l'extension de la campagne double.
Le budget que je vous présente en est la traduction, et s'inscrit dans un dialogue constructif permanent avec les associations d'anciens combattants. Il est également le reflet de choix politiques qui sont conformes à mes convictions, dans un contexte budgétaire contraint. Les crédits de la mission s'élèvent pour 2016 à 2,51 milliards d'euros, soit une diminution de 4,9 % par rapport à 2015, strictement liée à la baisse du nombre de bénéficiaires. En tenant compte de la progression de la dépense fiscale, la baisse n'est que de 1,5 %.
Ce budget est construit autour d'un principe : préserver les droits des anciens combattants. Il intègre quatre mesures nouvelles, qui consolident le droit à réparation, dans un souci de justice sociale et d'équité.
Il s'agit tout d'abord de l'extension du bénéfice de la campagne double pour les anciens combattants d'Afrique du Nord, militaires d'active ou appelés agents publics dont les droits à pension ont été liquidés avant 1999, année durant laquelle les événements d'Algérie ont été qualifiés de guerre. Environ 5 500 personnes pourraient bénéficier de cette mesure, même si certains regrettent que le droit à la campagne double n'ait pas été élargi en se référant à la durée de présence sur le théâtre d'opération, comme cela a été proposé à l'Assemblée nationale. Outre le coût très élevé d'un tel scénario, il se serait agi d'une remise en cause profonde du système actuel des bonifications de pension, bien au-delà de la guerre d'Algérie. J'ai fait le choix de proposer une mesure de stricte équité, qui répond à une revendication légitime vieille de plus de quinze ans.
J'ai tenu à ce qu'un effort financier conséquent soit fait en faveur des plus démunis. La politique sociale de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (Onac-VG) sera abondée de deux millions d'euros supplémentaires, ce qui porte à 26 % l'augmentation de ses moyens depuis 2012. Cet effort financier accompagne la refonte nécessaire de la politique d'action sociale de l'Onac. Elle a été adoptée par son conseil d'administration le 27 mars dernier, afin d'améliorer la situation des plus démunis, des plus fragiles et des plus isolés. Cette ressource supplémentaire permettra de mettre en place un dispositif élargi, adapté à la situation de chacun et fondé non plus sur les seuls revenus mais sur des critères de vulnérabilité, en substitution à l'aide différentielle au conjoint survivant (ADCS), qui n'avait pas de base légale. Contrairement à ce qu'affirment certains, il ne s'agit pas de la suppression de l'action sociale de l'Onac, encore moins de celle des moyens alloués. En 2014, 3 730 conjoints survivants ont perçu l'ADCS, tandis que sur les six premiers mois de 2015 3 125 l'ont touchée. Un courrier leur a été envoyé pour les informer des modalités d'attribution du nouveau dispositif, et ce alors qu'en 2016 le nombre de bénéficiaires de l'aide sociale ne devrait pas diminuer.
La politique sociale de l'Onac est sanctuarisée et renforcée. Des inquiétudes sont toutefois apparues, et il m'avait semblé opportun qu'un premier bilan soit réalisé au bout d'un an de mise en oeuvre de cette réforme, ainsi que je l'avais annoncé au conseil d'administration de l'Onac. Les députés à l'unanimité, malgré un risque d'inconstitutionnalité, ont inséré dans ce projet de loi un article additionnel demandant au Gouvernement de réaliser un rapport sur ce sujet. Je m'engage à l'établir et à le transmettre au Parlement.
Une seconde mesure concerne les conjoints survivants des harkis, qui sont touchés depuis 2014 par la forclusion des demandes d'allocation de reconnaissance. Ils bénéficieront d'un nouveau dispositif pour corriger cette injustice. C'est le témoignage de la poursuite de l'approfondissement de la reconnaissance de la Nation envers les harkis et leurs familles, qui tient à coeur au Président de la République et au Premier ministre, qui avait présenté il y a un an un plan de dix mesures dont j'ai dressé un premier bilan en conseil des ministres le 7 octobre. L'ensemble de ce plan a été mis en place et des pistes d'amélioration, notamment concernant l'accès au logement ou aux emplois réservés, ont été identifiées.
J'ai tenu à ce que le travail engagé pour améliorer la situation des conjoints survivants des grands invalides ne s'achève pas. Je me souviens que votre assemblée avait été particulièrement sensible à cette problématique en adoptant l'an dernier plusieurs amendements avec lesquels j'étais en désaccord. La majoration spéciale prévue à l'article L. 52-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre (CPMIVG) a été revalorisée de 50 points au 1 er janvier dernier par la loi de finances pour 2015 et le sera à nouveau le 1 er janvier prochain, soit une augmentation totale de 116 euros par mois. 892 conjoints survivants en ont bénéficié. Le groupe de travail sur cette question, autour duquel une dynamique s'était créée, a continué ses travaux à ma demande. En conséquence, le projet de loi de finances pour 2016 prévoit d'élargir au plus grand nombre de bénéficiaires cette majoration spéciale, qui vient compenser la perte de revenu liée à l'abandon de l'activité professionnelle pour prodiguer des soins à un grand invalide. Elle sera désormais attribuée dès cinq ans de soins, avec un lissage des effets de seuil jusqu'à dix ans. Selon nos estimations, jusqu'à 40 % des conjoints survivants des plus grands invalides de guerre seraient éligibles.
Les services du ministère de la défense, en lien avec ceux de Bercy, estiment à 1 400 le nombre de bénéficiaires potentiels. C'est sur cette base, qui est pour moi la meilleure disponible à ce jour et qui est assise sur une méthodologie solide et partagée en interministériel, que la mesure présentée a été chiffrée. Certains promeuvent une autre approche : j'ai privilégié le plus grand nombre et la plus grande justice, dans un contexte budgétaire difficile. L'an dernier, le Sénat avait défendu un système forfaitaire, par paliers, qui aurait varié en fonction du niveau de pension de l'invalide. Je renouvelle mon opposition à cette mesure qui, outre son coût élevé, soulève une difficulté de principe : elle aboutirait en effet à ce que de nombreux conjoints survivants perçoivent une pension d'un montant supérieur à celle d'un grand invalide. Telle n'est pas ma conception de la justice et de l'équité. Ce serait au contraire profondément injuste, puisqu'une pension militaire d'invalidité a pour objet de réparer un préjudice et non d'assurer un revenu de substitution non imposable et cumulable avec toutes les autres ressources.
Il est nécessaire de préserver l'efficacité des structures d'accueil des anciens combattants. Le centenaire en 2016 de la première d'entre elle, l'Onac, sera l'occasion de rappeler son importance et notamment celle de son maillage territorial. Ses services départementaux sont un relai indispensable dans nos territoires pour la politique de reconnaissance et de réparation mais aussi pour la politique de mémoire.
Le contrat d'objectifs et de performance (COP) Etat-Onac traduit cette volonté. Il permet d'accompagner l'Onac dans l'élargissement de ses compétences. Ce dernier accueille de nouveaux publics : les harkis et les rapatriés, dont il est devenu le guichet unique, mais aussi les soldats d'aujourd'hui, qui bénéficient depuis le 1 er octobre dernier de la carte du combattant après 120 jours de présence sur un théâtre d'opération extérieur.
L'institution nationale des Invalides (INI) est également un sujet qui me préoccupe et j'en ai fait un dossier prioritaire. J'ai reçu, dès mon entrée en fonction et à plusieurs reprises depuis, les représentants des salariés, la direction, ainsi que le service de santé des armées (SSA). L'INI est une institution de référence, dont l'avenir doit être garanti. Seul un adossement et une complémentarité avec le SSA permettra d'assurer la continuité du parcours de soin et d'offrir des prestations de qualité aux anciens combattants, aux pensionnaires ainsi qu'aux blessés en opération. Il faut également tenir compte de l'agence régionale de santé (ARS) Ile-de-France, qui est responsable de l'organisation régionale des soins.
En outre, ce budget consolide la politique de mémoire. Elle est ambitieuse et a été édifiée depuis plusieurs années pour faire face aux défis posés par le cycle mémoriel du centenaire de la Première Guerre mondiale et celui du soixante-dixième anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale. L'année mémorielle qui s'annonce sera marquée par deux moments forts : le centenaire de la bataille de Verdun, qui culminera le 29 mai avec une cérémonie à laquelle participera le Président de la République et à laquelle il a invité la chancelière allemande Angela Merkel, et le centenaire de la bataille de la Somme, dont la commémoration a traditionnellement lieu le 1 er juillet. La commémoration de l'anniversaire de Verdun devrait s'étendre sur 300 jours de manifestations culturelles et historiques, tandis que celle de la Somme s'étalera, de la même manière, sur 141 jours.
Les crédits alloués à cette politique s'élèvent à 22,2 millions d'euros, globalement stabilisés par rapport à l'an dernier. Pour la préparation de l'année commémorative 2016, j'ai mis en place deux comités ministériels dont j'assure la présidence, l'un pour Verdun, qui s'est réuni quatre fois, et l'autre pour la Somme, qui a tenu trois réunions. Ils regroupent l'ensemble des partenaires associés à ces commémorations, français comme étrangers. La saison mémorielle sera lancée la semaine prochaine, après une présentation en conseil des ministres. Il faut également noter la publication imminente d'un guide du Routard sur la Grande Guerre.
La mémoire de la Seconde Guerre mondiale continue d'interpeller notre jeunesse. Partout où j'ai pu échanger avec des jeunes, je me suis rendu compte qu'ils s'interrogent beaucoup sur cette période. Face à la montée des nationalismes et au repli sur soi, les commémorations doivent surtout s'adresser à eux : il faut leur parler des causes des conflits mondiaux. Je me dois de consacrer mon temps et les crédits de mon ministère à ces questions.
Il faut valoriser le patrimoine de pierre, surtout lorsqu'il n'y a plus de témoins survivants. Le plan de lutte contre le racisme et l'antisémitisme annoncé par le Premier ministre passe aussi par cette mémoire partagée. J'aurai l'occasion de rendre hommage aux troupes coloniales qui sont venues défendre la France en 1916. J'ai accompagné récemment le président du Mali à Douaumont, et ce fut pour lui un moment de grande émotion. Il faut rappeler à ceux qui parlent de race, qui veulent fermer les frontières, que d'autres sont venus ici défendre notre liberté.
Le lien entre l'armée et la Nation est construit
autour de la Journée défense et citoyenneté (JDC), qui
accueillera près de 800 000 jeunes en 2016. Certains la trouvent
peut être insuffisante, mais tous reconnaissent son importance. Il est
donc regrettable qu'à chaque examen du budget des parlementaires
proposent de la ponctionner pour financer des mesures nouvelles. Elle contribue
au dépistage de l'illettrisme et à l'orientation des jeunes en
difficulté, mais permet aussi d'établir 225 000 fiches de
liaison qui sont transmises aux armées, ce qui démontre l'attrait
des jeunes pour les métiers de la défense, que la JDC
rénovée, centrée sur le volet défense et les
différentes formes d'engagement, a renforcé.
Son budget 2016
est de 15,3 millions d'euros, en baisse par rapport à 2015 en raison du
transfert de crédits destinés au financement du système
d'information PRESAJe vers le programme 212 de la mission
« Défense ». Ce changement de
périmètre budgétaire n'aura aucune conséquence sur
les moyens ou l'organisation de la JDC.
Dans le cadre de l'examen de la première partie du PLF pour 2016, l'Assemblée nationale a inséré une disposition fiscale relative aux anciens combattants qui ne figurait pas dans le texte du Gouvernement. Il s'agit de l'abaissement de 75 à 74 ans de l'âge à partir duquel les titulaires de la carte du combattant bénéficient d'une demi-part fiscale. Je n'étais pas favorable à ouvrir ce dossier, afin de conserver l'équilibre qui avait été trouvé entre dépenses budgétaires et fiscales en période de redressement des finances publiques. Sur ce sujet, je ne mentionnerai qu'en passant le rapport de votre ancien collègue Philippe Marini et les répercussions qu'il a eues auprès du monde combattant.
Le coût de la mesure votée par les députés est estimé à environ 45 millions d'euros, qui viendraient s'ajouter aux 789 millions d'euros que représentent l'ensemble des dispositifs fiscaux existants.
J'ai le sentiment de vous présenter un bon budget. Je comprends la volonté qu'ont certains de vouloir l'améliorer, mais les choix que j'ai faits visaient les plus démunis et le renforcement de l'équité de plusieurs dispositifs. La mesure fiscale introduite à l'Assemblée nationale s'inscrit dans une autre logique, et concerne, par définition, des ménages soumis à l'impôt sur le revenu ; ce n'est pas le cas des plus démunis.
Je tiens enfin à vous informer qu'un amendement a aujourd'hui été déposé par le Gouvernement à l'Assemblée nationale pour permettre le transfert des établissements médico-sociaux actuellement gérés par l'Onac. Il s'agit d'une mesure technique, qui porte sur les aspects patrimoniaux de ce transfert, initié dans le cadre de la modernisation de l'action publique (MAP), inscrit dans le COP et recommandé par la Cour des comptes.
Sur la base d'un dialogue permanent avec le monde combattant et les organisations syndicales, ces dix-sept établissements - neuf écoles de reconversion professionnelle (ERP) et huit établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) - seront cédés pour que l'Onac se recentre sur son coeur de métier, c'est-à-dire la défense des intérêts matériels et moraux de ses ressortissants et la solidarité à l'égard de ceux qui ont fait le choix de l'engagement. Des acteurs publics spécialisés assureront la gestion de ces établissements, ce qui permettra de conforter et de développer leur activité. Il faut savoir qu'aujourd'hui les ERP accueillent moins de 1 % d'anciens combattants, tandis que moins de 50 % des personnes accueillies dans les Ehpad sont des ressortissants de l'Onac. Les fonctionnaires concernés seront intégrés dans des corps homologues de la fonction publique, les enseignants des ERP rejoignant l'éducation nationale et les personnels des Ehpad la fonction publique hospitalière.
M. Jean-Baptiste Lemoyne , rapporteur pour avis . - Dans une société marquée par les événements des 7 et 11 janvier derniers, il est essentiel de promouvoir le devoir de mémoire et de rappeler les enjeux de la citoyenneté sur tout le territoire. Je constate avec satisfaction que votre ministère y participe.
S'agissant de l'indemnisation des anciens combattants, pourquoi ne pas avoir fait le choix de donner une base légale pérenne à l'ADCS ?
D'après les informations dont nous disposons, le traitement des demandes de pensions militaires d'invalidité connaît quelques difficultés. L'objectif fixé en 2015 de ramener ce délai à 280 jours sera-t-il tenu ?
Vous avez évoqué un amendement du Gouvernement pour sécuriser juridiquement la cession par l'Onac de ses établissements médico-sociaux. Quel est l'état d'avancement de cette cession ? Quelle est la nature des repreneurs potentiels ? Qu'adviendra-t-il des Ehpad et des écoles de reconversion cédées ?
Nous avons tous constaté dans nos territoires que la saison mémorielle 2014-2015 avait été un vrai succès. Comment maintenir cette dynamique jusqu'en 2018 ? Allez-vous organiser la commémoration de l'anniversaire de Verdun autour du couple franco-allemand ou bien comptez-vous élargir ce format ?
M. Marc Laménie , rapporteur spécial de la commission des finances . - Le 26 octobre dernier, la commission des finances du Sénat a adopté à l'unanimité les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » et des articles rattachés. Au-delà de la question budgétaire, le volet humain de cette mission ne doit pas être occulté. Dans nos départements, nous sommes tous attachés à l'Onac et à l'action des bénévoles des associations patriotiques et de mémoire, dont les missions sont essentielles.
Vous avez évoqué les travaux en cours pour élaborer le nouveau contrat d'objectifs et de performance (COP) de l'INI, en collaboration avec le service de santé des armées et l'agence régionale de santé. Quel délai avez-vous fixé pour conclure ce contrat ?
En outre, comment sont recensés les titulaires de la carte du combattant ? Quelles seront les informations recueillies et comment seront-elles mises à jour ? Il est en effet essentiel d'assurer la prévisibilité des dépenses liées à l'octroi de cette carte, qui ouvre des droits à la retraite du combattant, à la rente mutualiste ou encore une demi-part fiscale, d'autant que 150 000 nouveaux titulaires sont attendus au titre des nouvelles dispositions concernant les OPEX entrées en vigueur le 1 er octobre dernier.
Envisagez-vous d'ajouter la journée nationale du Souvenir français aux dates officielles de commémoration ?
M. Jean-Marc Todeschini, secrétaire d'Etat . - Nous n'avons pas souhaité donner une base légale à l'ADCS pour deux raisons : d'une part, il ne revient pas à l'Onac d'accorder des minima sociaux ; d'autre part, passer par la loi implique des taux uniques qui bénéficieraient aux Français comme aux ressortissants étrangers, ce qui aurait entraîné une explosion du budget. Je suis prêt à travailler avec les parlementaires pour améliorer la situation actuelle. Ce qui choque, c'est la disparition des minima. Mais le ministère de la défense n'est pas le ministère des affaires sociales. Les veuves ne toucheront pas moins, mais en fonction de la réalité de leurs dépenses. L'ADCS était plafonnée à 2 244 euros. Demain, les commissions départementales pourront prendre en compte la facture de chauffage ou le coût d'une mutuelle par exemple, ce qui aboutit à un plafond théorique de 3 140 euros. Bien entendu, ce plafond ne concernera pas tous les conjoints survivants, mais cet exemple montre que le Gouvernement veut sortir l'Onac d'une impasse sans réduire le montant de ses aides. Nous ferons un bilan d'ici un an de cette réforme, que je m'engage à vous communiquer, étant entendu que des parlementaires siègent au conseil d'administration de l'Onac.
Un de vos collègues m'avait interrogé sur les délais de traitement des demandes de pension militaire d'invalidité lors d'un débat dans l'hémicycle. Comme mon prédécesseur Kader Arif, j'ai pu constater que la décristallisation avait ouvert beaucoup de nouveaux droits. Leur examen demande beaucoup de temps pour réaliser les contrôles médicaux nécessaires et vérifier l'état civil des personnes intéressées, car les dossiers sont incomplets : il serait illusoire de croire qu'une augmentation d'effectifs règlerait le problème. Il y a aujourd'hui 12 500 demandes en stock, avec un délai de traitement de 400 jours en moyenne fin septembre, ce qui évidemment ne peut pas me satisfaire. En 2017, le délai pourrait être ramené à 260 jours, mais je ne peux vous donner aucune garantie sur ce chiffre. Nous donnons la priorité aux demandes des blessés graves en Opex, qui sont traitées en moins de 180 jours.
S'agissant des établissements médico-sociaux gérés par l'Onac, l'amendement déposé par le Gouvernement vise à éviter de générer des droits de mutation en transférant les titres de propriété de l'Onac à un autre établissement public national. Le travail continue entre les services concernés, comme l'éducation nationale et la fonction publique hospitalière, pour initier le transfert des établissements médico-sociaux en 2016. Les Ehpad seront transférés à des établissements publics de santé ou médico-sociaux identifiés par les agences régionales de santé. Pour un seul d'entre eux nous n'avons pas pour l'instant de repreneur public, mais nous continuons à chercher, y compris en dehors du département, pour assurer un transfert vers un établissement public et rassurer le personnel. En règle générale, nous interdisons au repreneur de céder la propriété de l'établissement pendant quinze ans et nous l'obligeons à maintenir le personnel transféré sur le site. L'Onac s'engage en contrepartie à faire les travaux dans les locaux avant le transfert, grâce à des crédits dédiés et sanctuarisés.
S'agissant de la politique de mémoire, je constate que la mission du centenaire, bien que financée par des crédits interministériels, est le bras armé de mon ministère qui en a la tutelle. Compte tenu de la qualité du travail fourni, nous avons décidé de prolonger le mandat de la mission jusqu'en 2019, alors qu'il devait s'interrompre en 2015. Les arbitrages du Premier ministre conduisaient à réduire de 11 à 5,5 équivalents temps plein (ETP) ses effectifs, mais j'ai plaidé pour que l'on remonte à 7 ETP. Il faudra aussi régler un problème de logement, car il n'est pas certain que la mission puisse encore occuper les bureaux actuels. Le président et le directeur général de la mission sont maintenus en poste, la coopération avec le ministère de la défense et mon cabinet est de qualité : il n'y a donc aucune crainte à avoir sur la poursuite des activités mémorielles.
Concernant le COP de l'INI, je pense que cela avance vite. Un nouveau directeur a été nommé, il a d'ailleurs fait un bon travail auprès des ARS et du service de santé des armées, et je rencontre régulièrement les différents intervenants dans ce dossier. Le nouveau contrat montrera les complémentarités entre l'INI et les hôpitaux militaires. Le personnel de l'INI veut un avenir et une vision. Si nous n'avions rien entrepris, l'INI serait morte de sa belle mort. De fait, les pensionnaires sont de moins en moins nombreux, notamment parce que les jeunes blessés, une fois soignés, regagnent leurs territoires pour être proches de leurs familles. C'est une chance que le service de santé des armés accepte de travailler avec l'INI, dont les spécificités sont reconnues. Un point d'étape sur l'INI pourra être fait après la réunion de son conseil d'administration.
J'en viens à la carte du combattant. Nous n'avons pas fait le choix d'augmenter le nombre de points d'indice de la retraite du combattant, à cause du coût budgétaire élevé d'une telle mesure. Depuis 2012, nous avons en revanche élargi le champ des bénéficiaires - à travers le dispositif de la carte à cheval (soit environ 10 000 bénéficiaires) et l'assouplissement des critères d'attribution aux anciens des Opex, soit 150 000 personnes.
Je n'ai pas l'intention de rallonger le calendrier des commémorations nationales en y intégrant le Souvenir français, même si l'action de l'association éponyme est reconnue.
M. Georges Labazée . - Votre ministère a-t-il été sollicité pour dénombrer le nombre de veuves de guerre susceptibles de ne pas payer d'impôts locaux ?
M. Jean-Marc Todeschini, secrétaire d'Etat . - Non, ce sujet ne relève pas de la compétence de mes services.
M. Georges Labazée . - Le Gouvernement attache une grande importance au devoir de mémoire, comme le démontre le déplacement du Premier ministre au camp de Rivesaltes. Dans les Pyrénées-Atlantiques se trouve le camp de Gurs, où ont été internés des combattants républicains de la guerre civile espagnole puis des Juifs, notamment d'origine allemande. Nous souhaitons honorer leur mémoire. Des études ont été faites pour la restructuration du camp, dont le coût oscillerait entre 2,5 et 8 millions d'euros. Lorsque je présidais le conseil général, nous avions initialement pensé à mettre en place un groupement européen de coopération transfrontalière, afin d'y associer nos voisins espagnols. Nous avions également réfléchi à la création d'un groupement d'intérêt public (GIP), avec la participation de l'Etat et d'autres collectivités. Quelle est la position de votre ministère sur ce projet ?
M. Jean-Marc Todeschini, secrétaire d'Etat . - C'est un dossier que je connais par coeur. Je me suis engagé à me rendre sur place au printemps. J'attends un vrai projet, mais je ne m'engage pas sur un GIP. Toutefois, l'Etat ne peut pas rester insensible si des investissements sont faits.
J'ai accompagné le Premier ministre au camp de Rivesaltes. Son aménagement est le fruit de la volonté d'une collectivité territoriale et d'un homme, votre ancien collègue Christian Bourquin. Tous les acteurs, dont l'Etat, se sont retrouvés autour de son initiative. Pour la politique de mémoire, rien ne se ferait au niveau de l'Etat si les collectivités territoriales ne s'engageaient pas. Je tiens d'ailleurs à rendre hommage à certaines d'entre elles, qui consacrent des sommes très importantes à l'entretien de ces lieux de mémoire. Dans ces conditions, c'est une obligation pour le ministère de la défense de les accompagner.
M. Georges Labazée . - Gurs, contrairement à Rivesaltes, n'est pas soutenu par une collectivité importante. Nous avons du mal à mobiliser de petites intercommunalités autour de ce projet. Il faut professionnaliser les acteurs, et pour cela le concours de l'Etat est nécessaire.
M. Jean-Marc Todeschini, secrétaire d'Etat . - J'y suis favorable, mais les grandes collectivités territoriales doivent participer au tour de table. Le tourisme de mémoire est un facteur de dynamisme économique dans les territoires, en particulier les plus ruraux d'entre eux.
M. Jean-Marie Morisset . - Vous considérez avoir présenté un bon budget. Il l'est certainement au vu des marges de manoeuvre que vous accorde Bercy et de vos priorités. Il est très positif qu'il comporte des mesures nouvelles, mais les associations d'anciens combattants nous font part de leurs revendications, qui ne sont pas toutes satisfaites, et de leurs craintes.
La première porte sur l'ADCS, qui permettait d'atteindre le seuil de pauvreté, soit 987 euros, avant que l'aide complémentaire qui lui a succédé soit abaissée de 187 euros et qu'on parle maintenant de traitements occasionnels, en fonction des difficultés. Il est à craindre que ces secours traditionnels soient facultatifs dans certains départements et que les critères d'attribution ne soient pas uniformes dans tout le pays.
La seconde concerne l'extension du bénéfice de la campagne double. La révision des pensions liquidées avant 1999 sera-t-elle automatique ou les personnes devront-elles en faire la demande ?
La mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » contient également le programme 158, qui porte sur l'indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale. L'extension de ces dispositifs à l'ensemble des orphelins de guerre, comme le demande le monde combattant, est-il envisagé ? Je suis conscient du coût que représenterait une telle mesure, mais il faut entendre les demandes de ces associations.
Vous avez insisté sur le maintien des services de proximité de l'Onac dans les départements. J'ai lu le COP, et selon l'objectif 4.4 l'Onac doit « poursuivre son effort de rationalisation de l'implantation de proximité ». Quel sens faut-il donner à cette phrase ? Les effectifs ne risquent-ils pas de diminuer ? Pourriez-vous clarifier ce point ?
Enfin, concernant les Ehpad, il est impératif que les personnels intègrent la fonction publique hospitalière. Ne rencontrez-vous toutefois pas des difficultés pour réaliser le transfert de ces structures ? Sur les 625 places, de nombreuses ne semblent pas habilitées à l'aide sociale.
Mme Evelyne Yonnet . - Le Président de la République avait annoncé l'ouverture des archives concernant le 17 octobre 1961. A-t-elle été réalisée ? Peut-on les consulter ? Je vous interroge sur ce point car c'est à Aubervilliers qu'avait été retrouvé, dans le canal Saint-Denis, le corps de la jeune Fatima Bedar, et que nous sommes une des rares communes à commémorer ces événements.
Par ailleurs, la Seine-Saint-Denis accueille de nombreux chibanis, qui logent et vieillissent dans des foyers. Ils ont l'impression d'être laissés pour compte, et leur petite pension ne leur permet pas de prendre en charge leurs frais d'obsèques alors qu'ils souhaiteraient pouvoir reposer sur leur terre natale. Quelle aide pouvez-vous leur apporter ?
M. Jean-Marc Todeschini, secrétaire d'Etat . - Je n'ai pas construit mon budget en fonction des marges de manoeuvre que m'a accordées Bercy. Je suis solidaire du Gouvernement, et je peux vous avouer que mon arbitrage budgétaire s'est déroulé dans de très bonnes conditions et a duré trois minutes. J'ai dû céder, par rapport à mes demandes, un million d'euros sur les 2,5 milliards de la mission. J'ai proposé des mesures nouvelles raisonnables, et elles ont été acceptées. J'ai construit un budget d'équité et de justice, dont les mesures nouvelles corrigent des injustices, comme celles touchant les anciens combattants d'Algérie ayant liquidé leur pension de retraite avant 1999 ou les conjoints survivants ayant sacrifié leur carrière professionnelle.
L'aide sociale de l'Onac ne repose pas sur un traitement occasionnel. Les critères ne seront pas laissés à l'appréciation de chaque département, mais seront établis par la directrice générale de l'Onac et uniformes sur le territoire. Il n'est pas question de faire des économies sur ce point.
L'extension de la campagne double n'est hélas pas automatique. Il va falloir rouvrir les dossiers, à la demande des intéressés. Je fais confiance aux associations, qui ont porté cette demande depuis plusieurs années, pour en informer les anciens combattants d'Algérie.
Le Gouvernement est sensible à la douleur des orphelins. Cette préoccupation s'est traduite par des instructions pour appliquer de manière éclairée les décrets de 2000 et 2004, avec un réexamen au cas par cas des dossiers litigieux afin de garantir une parfaite égalité de traitement. Il faut toutefois préserver le caractère spécifique de cette indemnisation. L'extension à tous les orphelins de guerre n'est pas envisageable : dans ce cas, pourquoi limiter aux seuls orphelins de guerre de la Seconde Guerre mondiale comme certaines associations le demandent ? Pour les victimes de ce conflit, le coût estimé de la mesure est compris entre 0,5 et 1,3 milliard d'euros. Pour les orphelins de tous les conflits, le coût passe à plus de 2 milliards d'euros. Cela correspond à un doublement du budget de la mission. Ce n'est pas envisageable, et il me semble que la précédente majorité parlementaire, malgré des promesses ambigües, était parvenue à la même conclusion.
Concernant l'Onac, il faut savoir que dans certains départements les implantations immobilières peuvent évoluer, dans un souci de rationalisation et d'économie. Ainsi, quand les locaux sont surdimensionnés ou que les charges locatives sont trop élevées, il peut être nécessaire de déménager. Par ailleurs, les effectifs et la charge de travail ne sont pas homogènes selon les départements. Toutefois, la généralisation de la carte du combattant pour les anciens des Opex devrait induire un surcroît de travail. A mes yeux, le maillage territorial de l'Onac est une chance pour la politique de reconnaissance et de réparation mais surtout pour la politique de mémoire.
Les Ehpad devraient être transférés à des établissements publics de santé, ce transfert n'impliquant en lui-même aucun changement dans leur situation, y compris quant à leur habilitation à l'aide sociale.
Je ne connais pas les engagements précis du Président de la République concernant les événements du 17 octobre 1961. Toutes les mémoires, même les plus douloureuses, doivent être honorées et commémorées. Le Président de la République et le Gouvernement l'ont démontré à plusieurs reprises. Sans tomber dans la repentance, on ne peut pas construire de relations d'amitié entre les peuples sans reconnaître les erreurs commises. Je ne suis pas responsable de l'ouverture des archives, mais je pense que ce dossier va avancer. Les décisions du Président de la République sont suivies d'effet par le Gouvernement. Enfin, les chibanis ne sont pas ressortissants de l'Onac mais relèvent du ministère des affaires sociales.
EXAMEN DU RAPPORT
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Réunie le mercredi 25 novembre 2015, sous la présidence de M. Alain Milon, président, la commission procède à l'examen du rapport pour avis de M. Jean-Baptiste Lemoyne sur le projet de loi de finances pour 2016 (mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation »).
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur pour avis. - Je crois que nos points de vue ne divergeront pas sur la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », à laquelle nous sommes tous attachés. Le contexte y incite. Il est bien différent de celui de l'an dernier, ou même de celui dans lequel nous avons auditionné le ministre il y a trois semaines. En une nuit, le 13 novembre, tout a basculé et ces attentats nous ont rappelé que la France est engagée dans un conflit d'un nouveau genre, contre une organisation qui combat nos valeurs par la terreur. Ces événements tragiques montrent combien les politiques publiques portées par cette mission sont encore et toujours essentielles dans la perpétuation du pacte républicain. Ils font mentir ceux qui estiment qu'une telle mission est condamnée à s'éteindre progressivement avec la disparition des générations des conflits de l'armée de conscription.
Le budget de la mission s'élève à 2,61 milliards d'euros. Elle est composée de trois grands programmes. Le premier, intitulé « Liens entre la nation et son armée », traite de sujets importants tels que la Journée défense et citoyenneté (JDC) et la politique mémorielle, malgré un poids budgétaire limité de 37,5 millions d'euros. Le programme « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » comprend l'ensemble des rentes et pensions versées aux anciens combattants. Il regroupe l'essentiel des crédits de la mission, soit 2,4 milliards d'euros. Le troisième programme a pour objet l'indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie commis pendant la deuxième guerre mondiale, pour un montant de 100,75 millions d'euros.
Il ne faut pas nier la diminution du nombre de bénéficiaires des principales prestations servies au titre du droit à réparation. Le nombre de titulaires de la retraite du combattant devrait baisser de 4,1 % entre 2015 et 2016, et celui des personnes touchant une pension militaire d'invalidité (PMI) de 4,8 %. En conséquence, le budget de la mission sera, en 2016, inférieur de 4,7 % au niveau qui était le sien en 2015. Cette baisse est inférieure à celle subie cette année mais bien supérieure à des années précédentes.
Il avait été décidé l'an dernier d'élargir les conditions d'attribution de la carte du combattant aux soldats ayant servi en opération extérieure (Opex). Cette mesure n'a pas encore d'impact budgétaire car une très faible part des 150 000 militaires qui pourraient en bénéficier a atteint l'âge à partir duquel est versée la retraite du combattant (65 ans) ou est attribuée une demi-part fiscale (75 ans). Rappelons également que la reconnaissance de la Nation en faveur du monde combattant a une traduction non seulement budgétaire mais également fiscale. Le montant des dépenses fiscales associées à la mission s'élèvera à 789 millions d'euros en 2016. Leur rythme d'augmentation est assez dynamique et ce d'autant plus que l'Assemblée nationale a adopté un amendement, contre l'avis du Gouvernement, abaissant à 74 ans l'âge à partir duquel la demi-part est accordée, pour un coût de 44 millions d'euros par an. Je suis moi aussi réservé sur cette mesure et je note que les associations sont avant tout désireuses de stabilité et ne souhaitent pas voir s'ouvrir à nouveau un débat sur les enjeux fiscaux.
A mes yeux, l'un des principaux aspects de cette mission est l'entretien et l'affermissement du lien armée-Nation. Ce n'est pas le plus coûteux - 3,5 millions d'euros - mais c'est celui qui, plus encore depuis les attentats de Paris, doit être développé car il contribue à la cohésion de notre société et à la promotion de ses valeurs. Son principal élément, la JDC, est obligatoire, depuis la suspension de la conscription, pour tous les jeunes Français âgés de 16 à 25 ans. Le nombre de participants, en croissance ininterrompue depuis le début des années 2010 en raison de classes d'âge plus nombreuses, atteindra prochainement les 800 000 par an. Seuls 3 % des classes d'âges concernées continuent de ne pas respecter cette obligation, ce qui les prive de certains droits comme celui de passer le permis de conduire ou les concours organisés par l'Etat jusqu'à l'âge de 25 ans. Il s'agit d'ailleurs d'un sujet dont nous pourrions débattre : ce mécanisme de sanction lié au fait de ne pas avoir fait la JDC ne pourrait-il pas être maintenu après l'âge de 25 ans ?
J'ai assisté la semaine dernière à une JDC au centre du service national de Paris, qui se situe au fort de Vincennes. J'ai pu constater que le recentrage de son contenu sur la présentation des armées et des menaces qui pèsent sur notre pays et auxquelles elles doivent répondre permet désormais de sensibiliser pleinement nos jeunes aux problématiques de défense. Le Sénat débat parfois d'amendements visant à étendre le champ des sujets traités lors de la JDC. Cette journée est déjà très chargée, je crois préférable de la centrer sur les sujets directement liés aux questions de défense. En revanche, dans la mesure où la JDC doit permettre de détecter des personnes en situation de décrochage scolaire ou professionnel, il est légitime qu'une information soit fournie sur tous les dispositifs de soutien à l'orientation et à l'insertion (missions locales, Epide, etc.).
Les deux animateurs de la session, des militaires d'active, sont parvenus à établir un dialogue et lancer un débat avec leur auditoire sur les évolutions du monde contemporain, les valeurs de la République, les droits et les devoirs des citoyens ou encore le devoir de mémoire. Les jeunes ont pu échanger avec des soldats servant dans l'opération Vigipirate et ont fait preuve, au vu du nombre de questions posées, d'un grand intérêt pour la condition militaire et le service de leur pays. Sans doute les événements que nous venons de vivre contribuent-ils à renforcer cet intérêt.
La JDC est le seul moment où toute une génération de Français est en contact avec son armée. C'est également la seule journée où, toutes origines sociales confondues, ils sont brassés et extraits de leur milieu social. Dans le contexte actuel, il me semble qu'elle pourrait également être l'occasion de détecter les comportements qui peuvent constituer des signes avant-coureurs de radicalisation. J'en ai moi-même été le témoin, puisque lors de cette session un jeune a cherché, à plusieurs reprises, à mettre en difficulté les animateurs sur les valeurs de la République et les interventions françaises à l'étranger. Vendredi dernier à Nantes, une jeune femme a refusé de retirer son voile pour participer à la JDC. Ces situations sont traitées au cas par cas et conduisent chaque année à réaliser une cinquantaine de signalements auprès de la direction de la protection et de la sécurité de la défense (DPSD). Pour en avoir été témoin et au regard du contexte que nous connaissons, j'insiste sur le fait que ce type de journée est réellement utile pour repérer des fragilités.
Je tiens également à dire un mot d'un nouveau dispositif qui ne relève pas de la mission mais contribue très largement au renforcement du lien armée-Nation : le service militaire volontaire (SMV). La loi du 28 juillet 2015 a prévu son expérimentation pour deux ans, sur le modèle du service militaire adapté (SMA) existant outre-mer. Les deux premiers centres ont ouverts cet automne et accueillent pour l'instant environ 210 volontaires, orientés pour la plupart par les missions locales. Ce dispositif vise à permettre véritablement aux jeunes d'acquérir des compétences, de mener à bien leur projet professionnel et de retrouver, grâce au statut militaire, un cadre qu'ils ont parfois perdu. Au total, 1 000 jeunes devraient prendre part, sur deux ans, à l'expérimentation. Positive pour les jeunes, cette expérimentation permet aussi à l'armée de terre, qui s'y est pleinement investie, de démontrer ses capacités d'encadrement et la pertinence de ses valeurs et de son mode d'organisation pour préparer des jeunes à affronter le monde du travail.
Le second volet du lien armée-Nation repose sur la politique de mémoire. Sans y revenir longuement, puisque le ministre l'a détaillée lors de son audition, elle prend plusieurs formes : valorisation et entretien des hauts lieux de mémoire, soutien à des actions pédagogiques comme le concours national de la Résistance et de la Déportation (CNRD), organisation des cérémonies nationales et des commémorations ponctuelles. Après une année 2014 marquée par le centenaire du déclenchement de la Première Guerre mondiale et le soixante-dixième anniversaire des débarquements alliés en France, puis en 2015 un ralentissement du rythme avec en point d'orgue l'entrée au Panthéon de quatre figures de la Résistance, 2016 verra une nouvelle montée en puissance du cycle commémoratif, avec le centenaire des batailles de Verdun et de la Somme qui devrait s'organiser autour de deux temps forts. Le 29 mai, une cérémonie réunira à Verdun, autour du Président de la République et de la chancelière allemande, 4 000 jeunes venus de France et d'Allemagne. La bataille de la Somme sera célébrée le 1 er juillet, avec une participation active du Royaume-Uni et des pays du Commonwealth. Le budget consacré à cette politique est de 22,2 millions d'euros, en baisse de 5,1 %. Il est toutefois heureux de constater que la Mission du Centenaire, qui joue un rôle clé, est pérennisée. Cette structure très ramassée - 7 ETP - a démontré son efficacité et su mener une politique active de mécénat, même si elle doit parfois composer avec des difficultés bureaucratiques externes.
J'aimerais maintenant insister sur un point qui cristallise les craintes du monde combattant : la modernisation de la politique d'action sociale dont il bénéficie et des opérateurs qui la mettent en oeuvre. Le principal est bien sûr l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (Onac), dont chacun ici connaît le rôle essentiel qu'il joue dans nos départements.
Il a connu depuis cinq ans une profonde évolution de ses missions et de son organisation. Dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP) puis de la modernisation de l'action publique (MAP), de nouvelles compétences lui ont été confiées, comme la délivrance de l'ensemble des cartes et titres, l'entretien des sépultures de guerre ou la gestion des prestations à destination des harkis et des rapatriés, afin d'améliorer l'efficience de cette politique publique. Confronté à de tels bouleversements, l'Onac a connu des difficultés d'adaptation et des erreurs de gestion ont été commises, en particulier en matière de commande publique et de systèmes d'information. Je veux parler du fiasco du logiciel Kapta. Une nouvelle direction, en place depuis maintenant deux ans, a redressé la barre. Si sa tâche est loin d'être terminée, j'ai pu constater la mobilisation des personnels en allant les rencontrer.
L'Onac va être confronté à des bouleversements dans les années à venir puisque ce sont bientôt les anciens des Opex qui constitueront l'essentiel de ses ressortissants. Sa direction se met en ordre de marche pour être en mesure de répondre à des besoins et des attentes qui vont évoluer. Cela est indispensable car la Nation doit montrer à ceux qui ont servi dans son armée qu'elle reste présente une fois qu'ils ont quitté le service actif pour les accompagner dans leurs projets. S'y ajoutent des enjeux informatiques importants. A l'heure actuelle, aucun système d'information de gestion des ressources humaines n'est en place : ce sont toujours cinq gestionnaires qui gèrent à la main les 1 700 personnels de l'Onac, faute de pouvoir utiliser les outils développés par l'Etat en la matière. La modernisation passe également par la cession des établissements médico-sociaux de l'Onac à des acteurs publics dont la formation des travailleurs handicapés ou l'hébergement des personnes âgées constitue le coeur de métier. Elle devrait être effective dès 2016 pour les écoles de reconversion professionnelle et au plus tard le 31 décembre 2017 pour les Ehpad, comme le prévoit l'article 33 septies du PLF.
Concernant l'action sociale, j'ai comme vous tous été sensibilisé par les associations aux inquiétudes liées à la disparition de l'aide différentielle au conjoint survivant (ADCS). Cette aide avait été mise en place en 2007 sur la base d'une simple instruction du directeur de l'Onac. De fait, elle ne disposait pas de la base juridique suffisante pour subsister. Le choix a donc été fait, et validé à l'unanimité par le conseil d'administration de l'Onac, où siège le monde combattant, de remettre à plat cette politique d'aide sociale. 2 millions d'euros supplémentaires y seront consacrés en 2016 et l'Onac sera bien évidemment attentif au suivi des personnes qui bénéficiaient de l'ADCS.
La typologie des aides va être simplifiée, et ce nouveau mécanisme d'aide individuelle bénéficiera également aux anciens combattants les plus démunis, qui ne pouvaient pas toucher l'ADCS. Ce sont les services départementaux de l'Onac qui étudieront les demandes et des commissions départementales qui prendront la décision d'attribution. Pour diminuer le risque que des inégalités de traitement entre départements n'apparaissent, des instructions devraient être données pour harmoniser les critères (financiers, sociaux, de logement, de précarité, etc.) à prendre en compte. Une commission nationale devrait examiner les recours formulés contre les décisions de rejet d'octroi d'aides.
L'Onac doit par ailleurs développer sa politique à destination de deux nouveaux publics, les anciens des Opex, les harkis et les rapatriés, pour lesquels l'Onac est devenu le guichet unique. Il est indispensable d'améliorer l'information en direction de cette dernière population, toujours légitimement meurtrie par le traitement que la France lui a réservé.
Un mot enfin sur le programme 158, qui porte sur l'indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale. La Commission d'indemnisation pour les victimes des spoliations (CIVS) a été reconduite pour cinq ans. Aucune forclusion des mécanismes concernés n'est envisagée, et les indemnisations se poursuivent, à un rythme certes moins soutenu que dans les années 2000. Il s'agit d'une structure légère, efficiente et mobilisée. La perspective d'une refonte des décrets pour élargir le champ de ces dispositifs à tous les orphelins de guerre ne se rapproche pas puisqu'une telle mesure aurait un coût d'environ 2 milliards d'euros. Le travail de recherche des victimes de spoliations se poursuit. Il faut toutefois savoir que si les oeuvres d'art concentrent, dans ce domaine, l'attention médiatique, elles ne représentent qu'une très faible part des dossiers traités.
J'en viens maintenant aux trois mesures nouvelles prévues dans le cadre de ce budget, dont le coût s'élève 5,2 millions d'euros, soit un niveau très inférieur à celui de la diminution mécanique des crédits, lié à la démographie, qui s'établit à 135 millions d'euros. La mission participe donc activement à l'objectif de réduction des déficits, alors même que certains besoins ne sont sans doute pas encore tout à fait satisfaits.
La première mesure porte sur l'assouplissement des critères de versement et sur le lissage des effets de seuil liés à la majoration spéciale dont bénéficient les veuves de grands invalides qui ont dû cesser toute activité professionnelle pour s'occuper de leur mari (article 49). Le temps passé auprès du conjoint pour pouvoir prétendre au bénéfice de la majoration, que nous avions déjà ramené de 15 à 10 ans, sera l'année prochaine fixé à 5 ans. La deuxième mesure consiste à étendre le bénéfice de la campagne double aux anciens combattants d'Algérie agents publics qui avaient liquidé leur pension de retraite avant le 19 octobre 1999, qui correspond à la date à laquelle la guerre d'Algérie a officiellement été reconnue en tant que telle (article 50). Enfin, est mise en place une allocation viagère au bénéfice des conjoints survivants de harkis décédés après la date de forclusion des demandes de l'allocation de reconnaissance instituée par la loi du 23 février 2005, c'est-à-dire depuis décembre 2014 (article 51).
L'Assemblée nationale a par ailleurs ajouté un article additionnel demandant au Gouvernement de réaliser un rapport sur les conséquences du remplacement de l'ADCS (article 51 bis). Marc Laménie, rapporteur spécial de la commission des finances, a déposé un amendement de suppression de cet article auquel le Gouvernement n'était en effet, pour des raisons constitutionnelles, pas favorable. Quoi qu'il en soit, le secrétaire d'Etat s'est engagé à le réaliser.
Au total, ce budget 2016 ne rogne pas sur les droits acquis, comporte plusieurs mesures nouvelles dont la portée est plus symbolique que financière et n'appelle pas de critique particulière de la part du monde combattant. Il est toutefois regrettable de constater que l'une des principales revendications de ce dernier, le déclenchement d'un travail de réflexion visant à définir les modalités d'un rattrapage du retard accumulé par la valeur du point des pensions militaires d'invalidité, ne reçoive, à ce stade, aucune réponse.
Il convient enfin d'être vigilant sur l'entretien de l'esprit de défense et du devoir de mémoire, qui sont aujourd'hui plus que jamais d'actualité.
Sous ces réserves, vous comprendrez que je vous invite à émettre un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission et des articles qui y sont rattachés.
M. Jean-Marie Morisset. - Je soutiens l'essentiel des propos de notre rapporteur mais ne partage pas entièrement ses conclusions. Mon expérience personnelle me montre que le monde combattant est très critique. Je pense en particulier à l'ADCS, dont les conditions d'accès se sont progressivement restreintes. Depuis le mois de juin, seuls des secours exceptionnels peuvent être attribués. 2 millions d'euros vont être attribués à l'Onac, ce qui veut dire 20 000 euros par département, ce qui est loin d'être suffisant. Qu'en est-il de l'utilisation des fonds propres de l'Onac ? Vont-ils être mobilisés pour financer les aides qui seront attribuées ? Il est prévu de mettre en place une gestion décentralisée, ce qui n'est pas nécessairement source de simplification.
Le monde combattant est très attentif à la valeur du point des pensions militaires d'invalidité. Il a raison car je crois que celui-ci n'évolue pas au niveau qui devrait être celui traduisant toute notre reconnaissance aux anciens combattants. Le plafond de la rente mutualiste n'a pas non plus été modifié depuis 2007.
Le ministre a tenté de nous rassurer sur la question du maillage territorial assuré par l'Onac. Je crains malgré tout que nous n'allions vers une régionalisation.
M. Dominique Watrin. - Ce budget n'échappe pas au dogme de la réduction des dépenses publiques. La baisse des crédits, moins élevée en 2016 qu'en 2015, est bien évidemment liée à des évolutions démographiques. Il n'en demeure pas moins que le maintien de l'enveloppe de financement actuelle permettrait de répondre à nombre des revendications du monde combattant.
Le ministre est un très bon communiquant. Les trois avancées annoncées sont symboliques. S'agissant des veuves de grands invalides, il est difficile de connaître l'impact exact de la mesure proposée. Nous savons par ailleurs que les mesures relatives à la campagne double ne toucheront qu'un petit nombre de personnes et nécessiteront des démarches auprès de la sous-direction des pensions, qui est particulièrement encombrée. Le ministre a beaucoup moins communiqué sur l'abandon regrettable de l'ADCS, qui avait le mérite de garantir à ses bénéficiaires un revenu au niveau du seuil de pauvreté. Depuis le mois de juin, seules des aides exceptionnelles peuvent être attribuées. Il s'agit d'un retour en arrière d'autant plus surprenant que le ministre affirmait encore, il y a peu, que l'aide était nécessaire et qu'elle pourrait être étendue aux anciens combattants eux-mêmes.
Je m'exprimerai en séance publique sur le lien entre l'armée et la nation, très important, en particulier dans le contexte exceptionnel que nous vivons.
Notre groupe ne suivra pas l'avis favorable du rapporteur à l'adoption des crédits de la mission.
M. Olivier Cadic . - Je suis étonné par le contraste qui existe entre la France et le Royaume-Uni s'agissant du soutien manifesté à nos anciens combattants. Disposez-vous d'éléments de comparaison entre les deux pays s'agissant des budgets consacrés au devoir de mémoire et au soutien aux anciens combattants ? Au Royaume-Uni, la mobilisation nationale en faveur de la vente et du port des coquelicots, dès le premier novembre, est impressionnante et bien plus importante que celle que nous connaissons ici autour du Bleuet de France. Vendredi dernier à Londres, j'ai écouté un militaire ayant été blessé en Irak raconter son expérience. Nous avons besoin de ce type de témoignages, qu'ils viennent d'anciens combattants de la guerre d'Algérie ou de conflits plus récents. La communauté nationale doit être mobilisée sur le sujet.
M. Jean Desessard . - Existe-t-il une durée minimale d'engagement dans une Opex pour recevoir la carte du combattant ?
M. Olivier Cigolotti . - Le rapporteur a bien illustré le rôle de la JDC. Elle est un outil intéressant de détection de l'illettrisme et de difficultés sociales majeures.
Le monde combattant est très attaché à la présence dans chaque département d'un service de l'Onac. Quelles sont les perspectives d'évolution de la présence de l'Onac sur nos territoires ?
M. Bruno Gilles . - L'article 51 corrige la loi de programmation militaire adoptée en juillet dernier et revient partiellement sur l'article 52 de la loi de programmation militaire du 18 décembre 2013 en levant la forclusion qui s'appliquait aux demandes d'allocations de reconnaissance. Cet article reprenait un article déjà déclaré inconstitutionnel par le Conseil constitutionnel en 2011 et qui définissait de façon injuste les modalités d'attribution de l'allocation de reconnaissance aux rapatriés membres des forces supplétives de l'armée française pendant la guerre d'Algérie. L'introduction de cette disposition m'avait d'ailleurs conduit, avec de nombreux collègues, à déposer une proposition de loi sur le sujet en 2014. Deux types de statut peuvent s'appliquer aux membres des formations supplétives : le statut civil de droit local - les arabo-berbères - et le statut civil de droit commun - de souche européenne. Ce sont ces derniers qui étaient exclus par la loi de programmation militaire, alors même que seules 500 personnes seraient concernées pour un budget d'environ 15 millions d'euros.
M. Jean-Baptiste Lemoyne . - Pour répondre à Jean-Marie Morisset, j'ai simplement voulu indiquer que les réactions à ce budget demeuraient relativement modérées dans le monde combattant. Mais les regrets sont effectivement partagés s'agissant de l'absence de revalorisation du point des pensions militaires d'invalidité. Je crois qu'il nous faut engager une réflexion sur la question, comme cela a été fait cette année s'agissant des veuves de grands invalides. On peut par ailleurs noter que certaines revendications du monde combattant ont disparu.
L'aide sociale de l'Onac bénéficiera en effet de 2 millions d'euros de crédits supplémentaires en 2016. Les sommes jusqu'à présent consacrées à l'ADCS sont maintenues, ce qui devrait permettre à l'Onac de disposer d'une marge de manoeuvre notable, notamment pour certains anciens combattants qui pouvaient jusqu'à présent vivre en dessous du seuil de pauvreté sans avoir droit à l'ADCS. Les demandes seront effectivement traitées au cas par cas dans le cadre de commissions départementales et, si on peut craindre un certain manque d'homogénéité, des mesures seront prises pour garantir l'équité sur tout le territoire. Depuis 2010, les crédits consacrés à l'aide sociale ont augmenté de 30 %.
Il existe bien sûr d'autres revendications, par exemple pour permettre aux militaires ayant servi en Algérie entre 1962 et 1964 de bénéficier de la carte du combattant au titre des Opex.
S'agissant du maillage territorial de l'Onac, on observe aujourd'hui une activité parfois intense dans des services départementaux qui disposent pourtant de peu de personnels. Pour autant, s'il faut rester attentif à ce que le maillage départemental soit maintenu tant que la troisième génération du feu est encore en vie, il ne sera plus forcément le plus pertinent à l'avenir. D'ici une dizaine d'années, l'Onac devra nécessairement s'être réorganisé car les publics dont il aura la charge auront eux-mêmes changé.
En ce qui concerne les veuves des grands invalides, les appréciations peuvent en effet être différentes. L'article 49 trace un chemin de crête qui résulte des réflexions engagées par le groupe de travail en 2015. Effectivement, Dominique Watrin a raison de souligner le faible poids des mesures nouvelles.
Nous n'avons pas effectué de comparaisons avec le Royaume-Uni mais je retiens la suggestion d'Olivier Cadic. Ce pays a en effet su développer une fibre très particulière vis-à-vis de ses anciens soldats.
En réponse à la question de Jean Dessessard, je peux vous indiquer qu'il faut avoir passé quatre mois en Opex pour recevoir la carte du combattant.
Olivier Cigolotti a souligné le rôle que peut jouer la JDC pour détecter certains comportements. Je ne peux que souscrire à son propos, ayant eu moi-même l'occasion d'observer une situation de ce type.
Bruno Gilles nous a alertés sur les supplétifs au statut civil de droit commun. Je ne peux que l'encourager à déposer un amendement sur la question afin d'engager le débat avec le ministre.
On peut effectivement avoir quelques regrets d'un point de vue budgétaire. Nos collègues de l'Assemblée nationale ont adopté un amendement abaissant de 75 à 74 ans l'âge auquel est attribuée une demi-part fiscale aux titulaires de la carte du combattant, qui représentera une dépense fiscale de 44 millions d'euros. Peut-être une telle somme aurait-elle pu être mieux utilisée autrement. Quoi qu'il en soit, ne considérons pas ce PLF comme un point d'arrivée mais comme le point de départ d'une réflexion pour l'année 2017.
Mme Nicole Bricq . - Le groupe socialiste soutient la conclusion du rapporteur de donner un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission. La remise à plat des aides sociales est un sujet important qu'il faudra suivre de près. Même d'ampleur limitée, les mesures nouvelles ont une importance symbolique, en particulier s'agissant des harkis que nous avons trop longtemps négligés.
La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » et des articles 49, 50, 51 et 51 bis rattachés du projet de loi de finances pour 2016.