C. PRÉSERVER LES MOYENS DE BPIFRANCE POUR QU'ELLE PUISSE PALLIER AUX FAILLES DE MARCHÉ DU FINANCEMENT DES PME
Tout d'abord, budgétairement, l'action n° 20 du programme 134 retrace les dotations de garantie versées à Bpifrance, pour un montant de 30 millions d'euros, tandis que les dotations d'intervention figurent au programme 192, pour 175 millions d'euros.
La plupart des grands pays consacrent des montants bien plus importants pour la politique industrielle, c'est pourquoi, votre rapporteure pour avis estime nécessaire de veiller à ce que les 30 millions d'euros prévus pour garantir les prêts aux entreprises viennent bien en supplément des reports de crédits de 2014. Cette cause mérite d'autant plus d'être défendue que l'effet de levier de ces crédits est considérable, un euro de dotation générant 10 euros de prêts, en particulier parce que Bpifrance intervient en co-financement avec des banques privées.
Les entretiens avec les représentants de la BPI ont confirmé le faible dynamisme général des projets d'investissement, la principale inquiétude la plus forte concernant le secteur des travaux publics.
Dans ce contexte, l'activité de Bpifrance progresse puisque sa stratégie en matière de crédit est de se concentrer sur les principales failles du marché. Par exemple, le préfinancement du CICE a doublé en 2014 et représente aujourd'hui plus de 2 milliards d'encours. Un certain nombre de TPE ont parfois recours à ce préfinancement pour des montants très faibles, ce qui témoigne de leur extrême fragilité. Bpifrance finance également les investissements immatériels, alors que les banques hésitent à s'engager dans ce domaine.
Points de repère sur l'activité de Bpifrance Bpifrance a sept métiers : - la garantie, avec environ 60 000 crédits privés garantis par an ; - le prêt, en cofinancement avec d'autres banques; - l'innovation, par des subventions, des avances remboursables, des prêts à taux zéro, mais aussi des injections de capitaux propres dans les fonds de capital-risque qu'elle gère ; - les investissements dans un peu plus de 100 PME par an; - l'investissement dans quelques grandes entreprises via le fonds stratégique d'investissement (FSI) ; - l'activité de fonds de fonds, dans lequel Bpifrance injecte des capitaux dans des fonds privés. - et le financement de l'exportation. Pour assurer ces fonctions en matière de crédit et d'apport de capitaux propres Bpifrance est scindée en deux filiales : l'établissement de crédit Bpifrance Financement et le pôle constitué de la société de portefeuille Bpifrance Participations ainsi que de la société de gestion Bpifrance Investissement. Bpifrance Financement bénéficie d'une couverture de ses risques grâce à des dispositifs de garantie bénéficiant d'abondements de l'État, des collectivités territoriales, de la Caisse des dépôts et consignations et de l'Union européenne. |
ÉVOLUTION DE L'ACTIVITÉ « FINANCEMENT » DE BPIFRANCE
Encours fin d'année (M€) |
2009 |
2010 |
2011 |
2012 |
2013 |
Total crédits MLT |
8 334 |
9 949 |
12 225 |
14 920 |
17 290 |
Crédits à moyen et long terme |
3 890 |
4 419 |
5 608 |
6 871 |
7 823 |
Crédit-bail |
3 493 |
3 982 |
4 356 |
4 834 |
5 291 |
Financements mezzanine ( se situant entre les crédits et les capitaux propres pour l'investissement « immatériel ») /prêts de développement |
951 |
1 548 |
2 261 |
3 216 |
4 176 |
Source : ministère de l'Économie et des finances.
Par ailleurs, la BPI s'attache à analyser les stratégies de rebond à succès des PME et ETI. Tout récemment, une étude 5 ( * ) concernant les filières industrielles dites « de l'ombre » - parce que les médias en parlent peu - témoigne de l'arrivée d'une nouvelle génération de dirigeants plus axés sur les réseaux ou les alliances et plus ouverts sur l'international. Cela confirme que la mutualisation qui suppose une meilleure coopération entre grandes entreprises et donneurs d'ordres est une des pistes d'avenir fondamentales pour l'éclosion d'un nouveau tissu industriel.
Extrait de l'étude de Bpifrance : « PME et ETI manufacturières : Stratégies de rebond face à la crise » - 28 octobre 2014. Au-delà de la diversité des comportements stratégiques et de trajectoires d'entreprises, quatre constats émergent avec force. C'est un choc, interne ou externe à l'entreprise, qui a été l'initiateur du changement. Pour la plupart, la crise de 2008-2009 a été le choc qui a poussé l'entreprise à basculer d'une logique « business as usual», opportuniste et ancrée dans un éternel présent, vers une démarche stratégique plus structurée et intégrant le moyen terme. Un autre facteur a été déterminant dans cette évolution : le renouvellement des dirigeants à la tête des PME et ETI manufacturières. Plus que dans toute autre entreprise, ce sont ces dirigeants qui donnent l'impulsion. Ils ont des référentiels managériaux, une culture de l'international et du business renouvelés par rapport à leurs aînés. La stratégie n'est pas, pour eux, un grand et vain mot, mais un réel instrument de pilotage de l'entreprise. Ils sont très ouverts, appartiennent à des réseaux, et partagent leur vision avec l'ensemble de leurs parties prenantes. Il n'existe pas de recette unique, ou magique, mais 3 ingrédients indispensables. - L'internationalisation arrive en tête des leviers actionnés par les PME et ETI manufacturières du panel. C'est à la fois une tendance lourde et qui s'accélère depuis la crise de 2008/2009. Derrière ce mouvement de fond, il y a tout un continuum de positions et de motivations. Certaines entreprises cherchent, par ce moyen, à réduire leurs coûts de production, d'autres sont en quête de croissance et aspirent à devenir des leaders mondiaux de niche, d'autres encore, désirent accompagner les déplacements des unités de production de leurs grands clients... ; - L'innovation est l'autre grand pilier stratégique des PME et ETI manufacturières consultées. À travers l'innovation de process ou de produits, les entreprises n'ont pas toujours les mêmes objectifs - croissance, différenciation, diversification des débouchés clients, gains de réactivité et de productivité. L'innovation s'impose à toutes comme un levier incontournable d'amélioration de leur compétitivité. Sans innovation, point de salut... ; - Les alliances sont très présentes dans les stratégies des PME manufacturières. Prenant au pied de la lettre l'adage selon lequel « l'union fait la force », beaucoup de PME rencontrées ont noué une ou plusieurs alliances en vue de : répondre à des appels d'offres, notamment à l'international ; construire une offre globale clé en main et mutualiser des programmes de recherche développement ou des achats. La multiplication des alliances stratégiques est à la fois dictée par la nécessité et encouragée par les acteurs de l'écosystème industriel, des donneurs d'ordre, aux syndicats professionnels, en passant par les collectivités territoriales. Dans certains cas, ces alliances constituent une étape de préparation à des opérations de fusions-acquisitions ultérieures. Les PME et ETI manufacturières font face à des enjeux multiples. Les premiers, communs à toutes les industries, sont la pénurie structurelle de compétences et de personnels formés, et la relation aux donneurs d'ordre qui reste, en France, trop asymétrique et fondée sur la domination. À l'échelle individuelle, les entreprises sont confrontées à un enjeu de transformation de leur organisation et de leur modèle de management pour faire face au contexte de perturbations permanentes. Elles doivent saisir les opportunités de l'information et du numérique, et pour beaucoup d'entre elles, préparer la transmission. Il est temps que ces PME et ETI manufacturières, exemplaires dans la démarche de réflexion stratégique qu'elles ont mené et continuent de mener, prennent le pas sur les chiffres macro-économiques et le discours ambiant de déclin de l'industrie française. Qu'elles ouvrent la voie à toutes les PME et ETI manufacturières qui sont encore dans l'attente de signes positifs extérieurs pour repenser leur modèle. |
* 5 Etude Bpifrance Le Lab/Cetim « PME et ETI manufacturières : stratégies de rebond face à la crise » - 28 octobre 2014.