TROISIÈME PARTIE - SOUTENIR LES ENTREPRISES, SOUTENIR L'EMPLOI : UNE ÉTAPE DÉCISIVE DANS LA MISE EN oeUVRE DU PACTE DE RESPONSABILITÉ
I. LE RENFORCEMENT DES EXONÉRATIONS DE COTISATIONS PATRONALES DE SÉCURITÉ SOCIALE JUSQU'À 1,6 SMIC
L' article 2 du présent projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale vise à soutenir l'emploi et à renforcer la compétitivité des entreprises françaises en diminuant les cotisations de sécurité sociale acquittées par les employeurs sur les salaires compris entre 1 et 1,6 SMIC - ce qui correspond au champ actuel de la réduction générale de cotisations sociales (dite réduction « Fillon »). Deux mesures complémentaires sont ainsi proposées pour les cotisations dues à partir du 1 er janvier 2015 :
- la mise en place d'un dispositif « zéro cotisation URSSAF » au niveau du SMIC ;
- un taux réduit de cotisation d'allocations familiales pour les rémunérations n'excédant pas 1,6 fois le SMIC (3,45 % au lieu de 5,25 %).
A. UN COÛT DU TRAVAIL QUI DEMEURE RELATIVEMENT ÉLEVÉ EN FRANCE, EN DÉPIT DES EFFETS DU CICE
Les dernières actualisations des résultats de l'enquête européenne sur le coût de la main d'oeuvre (ECMO) 39 ( * ) indiquent que le coût du travail demeure élevé en France, en comparaison avec les autres pays de l'Union européenne. Le coût horaire de la main d'oeuvre dans les secteurs marchands s'y élève à 35,5 euros au troisième trimestre 2013, nettement au-dessus de la moyenne de la zone euro (29,1 euros), même s'il demeure inférieur aux coûts horaires observés dans les pays scandinaves et en Belgique.
À la suite de l'inversion du différentiel de coût du travail entre la France et l'Allemagne observée depuis 1996 et malgré la tendance à une hausse plus rapide des salaires observée en Allemagne depuis 2008, l'écart de coût horaire entre les deux pays reste particulièrement marqué dans les services ( 35,3 euros en France contre 29,9 euros en Allemagne ). À l'inverse, les coûts horaires du travail sont très proches dans l'industrie (environ 37,3 euros).
Graphique n° 6 : Coût horaire de la main d'oeuvre dans les pays européens au troisième trimestre 2013 (ensemble des branches marchandes)
Source : Haut conseil du financement de la protection sociale (2014)
Cette situation peut s'expliquer par le niveau relativement élevé du coût minimum du travail en France. Avec un salaire minimum de 1 430 euros bruts mensuels (1 445 euros bruts mensuels en 2014), la France se situait en 2013 au cinquième rang des pays de l'Union européenne dotés d'un salaire minimum 40 ( * ) et à la quatrième place en termes de coût horaire minimum du travail au sein de l'OCDE 41 ( * ) . Le coût total du travail au niveau du SMIC est contenu par les allègements généraux de cotisations de sécurité sociale. Toutefois, ces derniers demeurent insuffisants pour que le coût minimal du travail se situe dans la moyenne des pays de l'OCDE.
Selon les économistes Pierre Cahuc et Stéphane Carcillo, le coût élevé du travail au niveau du SMIC a un effet négatif sur l'emploi dans l'industrie mais aussi dans le secteur des services qui, bien qu'abrité de la concurrence internationale, utilise beaucoup de main d'oeuvre peu qualifiée et, de ce fait, est très sensible au coût minimal du travail 42 ( * ) . Ainsi, ils préconisent, a minima , de maintenir les allègements généraux de cotisations de sécurité sociale existants, sans les restreindre aux seuls secteurs exposés à la concurrence internationale ou aux petites et moyennes entreprises (PME).
Graphique
n° 7 : Coût horaire minimum pour les salariés
à temps plein
au sein de l'OCDE en 2012
(en dollars US)
Note : le salaire super-brut correspond à la somme du salaire brut et des cotisations sociales patronales
Source : OCDE (2013) in Rapport du groupe d'experts sur le SMIC (novembre 2013)
Le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi ( CICE ) 43 ( * ) , qui consiste en une réduction d'impôt sur les sociétés (ou selon les cas d'impôt sur le revenu) de 4 % en 2013 puis de 6 % des rémunérations brutes annuelles jusqu'à 2,5 SMIC à partir de 2014, a déjà permis d'abaisser le coût réel du travail. Selon l'Insee, l'indice du coût du travail (ICT - salaires et charges comprises) sur l'ensemble des secteurs marchands non agricoles a été inférieur de 1,8 % au niveau qu'il aurait atteint sans le CICE au premier trimestre 2013. En glissement annuel, du premier trimestre 2013 au premier trimestre 2014, le CICE a réduit de 0,9 % la progression de l'indice du coût du travail, ce dernier augmentant tout de même de 1,7 %.
Dans le prolongement du CICE, et afin de maximiser les effets sur l'emploi, le Gouvernement propose de diminuer sensiblement les charges sociales, en priorité sur les salaires proches du SMIC.
* 39 Cf. Haut Conseil du financement de la protection sociale, « Éclairage I : les évolutions récentes des principaux indicateurs économiques, du coût du travail et du financement de la protection sociale », Point d'étape sur les évolutions du financement de la protection sociale , mars 2014.
* 40 Après le Luxembourg, la Belgique, les Pays-Bas et l'Irlande.
* 41 Rapport du groupe d'experts sur le SMIC, novembre 2013, page 21.
* 42 Pierre Cahuc et Stéphane Carcillo, Les conséquences des allègements généraux de cotisations patronales sur les bas salaires , mars 2012, pages 17-20.
* 43 Cf. article 66 de la loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012.