B. L'APPUI INDISPENSABLE DES ASSOCIATIONS ET LA NÉCESSITÉ D'UNE POLITIQUE PARTENARIALE

Les auditions conduites par votre rapporteur pour avis confirment le rôle clé joué par les associations partenaires de la justice dans le succès du dispositif judiciaire de prévention des violences conjugales et de protection des femmes qui en sont victimes.

La décision judiciaire n'est qu'une étape d'un processus beaucoup plus long qui doit aider la victime à sortir du silence, le cas échéant porter plainte ou demander à bénéficier d'une mesure de protection, puis être accompagnée ou soutenue tout au long de la séparation avec le conjoint violent.

À chacune de ces étapes, et même devant le juge, pour soutenir la femme victime, l'appui des associations est indispensable. Votre rapporteur pour avis souhaite leur rendre hommage.

L'exemple de la Seine-Saint-Denis montre à cet égard l'efficacité, pour la lutte contre les violences au sein du couple, d'une politique partenariale, conduite sous l'égide du tribunal de grande instance et du conseil général, à travers l'un de ses services spécifiquement dédié à cette problématique, l'observatoire des violences envers les femmes.

La mobilisation qui en résulte garantit non seulement la présence au quotidien auprès des victimes de professionnels formés à cette forme de délinquance, mais aussi l'amélioration, par l'innovation et l'expérimentation, des dispositifs existants.

Il en est ainsi du circuit dédié mis en place au sein du tribunal de grande instance de Bobigny pour le traitement des demandes d'ordonnances de protection.

Ce circuit regroupe tous les acteurs de la chaîne judiciaire : les juges aux affaires familiales qui y tiennent une permanence quotidienne, les associations de victimes, des avocats de permanence deux fois par semaine.

Le bureau d'aide juridictionnelle y est associé ce qui permet un traitement accéléré de la demande d'aide juridictionnelle, accordée, compte tenu des ressources des intéressés, dans plus de 90 % des cas.

Enfin, un partenariat avec la chambre des huissiers de justice a été conclu, qui prévoit la délivrance de l'assignation le jour même.

Un autre exemple de l'intérêt de ces politiques partenariales est donné par l'expérimentation du téléphone grand danger.

Lancée en octobre 2009, en Seine-Saint-Denis, à l'initiative de l'observatoire départemental des violences faites aux femmes, cette expérimentation autorise le procureur de la République à attribuer aux femmes victimes un « téléphone de grand danger » (TGD).

Ce dispositif d'urgence permet aux femmes les plus exposées de disposer d'un téléphone équipé d'un bouton d'appel préprogrammé qui renvoie directement vers des écoutants professionnels. Le téléopérateur dispose de toutes les informations relatives à la personne bénéficiaire du téléphone. Quand le numéro s'affiche, il connaît immédiatement son nom, ses coordonnées, les lieux qu'elle fréquente. En cas de danger avéré, l'opérateur prend contact directement avec les services de police ou de gendarmerie, qui traitent la demande comme urgence prioritaire, ce qui permet une intervention dans de brefs délais. Les services de police et de gendarmerie disposent des informations nécessaires non seulement sur la victime mais aussi sur l'auteur (condamnation, domicile, interdictions auxquelles il est soumis etc. ).

En trois ans, 85 femmes ont bénéficié de ce dispositif. 49 ont restitué leur téléphone portable d'alerte, 30 en disposent toujours, et 6 en ont un réservé en prévision de la sortie de prison de leur agresseur.

Mme Sylvie Moisson, procureur de la République près le TGI de Bobigny et Mme Ernestine Ronai, responsable de l'observatoire départemental des violences faites aux femmes, ont jugé le bilan de l'expérimentation très positif. Le TGD procure un sentiment de sécurité à la victime. La réactivité des forces de police a permis d'éviter, dans plusieurs cas, la commission de violences.

Le succès de ces dispositifs appelle leur généralisation. Interrogée sur les conditions de la diffusion des bonnes pratiques observées dans certains ressorts territoriaux, Mme Ernestine Ronai a jugé nécessaire la mise en place d'un observatoire national chargé d'assurer la formation des professionnels, de conduire un travail de prévention et d'études des situations de violences, et de mettre à disposition des associations, des protocoles de bonnes pratiques.

La mise en place d'un tel observatoire national est en principe prévue pour le courant de l'année 2013, le financement en étant assuré par l'action 14.

Tout en saluant cette création, votre rapporteur pour avis estime utile que les conseils généraux se dotent d'une structure identique à celle de l'observatoire de Seine-Saint-Denis, pour conduire, en coordination avec les services judiciaires et les associations de victimes, des actions de politique publique pour lutter contre les violences faites aux femmes .

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Au bénéfice de ces observations, votre commission des lois a donné un avis favorable à l'adoption des crédits du programme n °137 : « égalité entre les femmes et les hommes » au sein de la mission « solidarité, insertion et égalité des chances » du projet de loi de finances pour 2013.

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