D. UN SECTEUR ASSOCIATIF HABILITÉ À LA PEINE
L'an passé, votre rapporteur pour avis attirait l'attention sur la diminution du volume des prises en charge (investigations, mesures de milieu ouvert, placements) confiées au secteur associatif et le risque de fragilisation, de ce fait, d'un certain nombre de services disposant pourtant d'un savoir-faire établi.
En effet, les crédits alloués au secteur associatif habilité pour rémunérer les prestations réalisées à la demande de l'autorité judiciaire sont retracés en crédits de fonctionnement (titre 3), et sont donc concernés par la décision du quatrième conseil de modernisation des politiques publiques imposant une baisse des dépenses de fonctionnement de l'Etat de 10 % sur trois ans. Or l'essentiel des coûts du secteur associatif est constitué des salaires versés aux personnels : les diminutions de crédits affectent donc directement l'emploi dans ce secteur.
A l'exception des mesures de placement en centre éducatif fermé ou en centre éducatif renforcé et des mesures d'activité de jour, le volume des prises en charge confiées au secteur associatif a significativement diminué en 2011 par rapport au niveau d'activité exécuté en 2010 : -5 % s'agissant des placements (centre de placement immédiat et autres hébergements), -0,5 % s'agissant des mesures de réparation pénale, -5,2 % s'agissant des mesures d'investigation 21 ( * ) .
En outre, la sous-budgétisation, au regard du nombre de décisions judiciaires effectivement prescrites, des crédits alloués au secteur associatif habilité conduit à l'existence d'un report de charge. D'après le ministère de la Justice, celui-ci s'est élevé en 2011 à 34 millions d'euros . D'après les fédérations d'associations entendues par votre rapporteur pour avis, il s'élèvera à plus de 40 millions d'euros en 2012 , soit deux mois de crédits de paiement.
Une telle situation ne peut manquer de déstabiliser un nombre important de services, dont l'activité repose parfois exclusivement sur l'exécution des mesures prescrites par l'autorité judiciaire.
La DPJJ elle-même admet qu'un minimum de 250 emplois auraient été supprimés dans les services associatifs au cours des années récentes, du fait de ces diminutions de crédits.
Mme Catherine Sultan, présidente de l'Association française des magistrats de la jeunesse et de la famille, a quant à elle déploré la fermeture de plusieurs services associatifs et l'appauvrissement corrélatif de la gamme de solutions ouvertes aux juges des enfants. En matière d'investigation, elle a relevé que de telles fermetures aboutissaient au paradoxe suivant : dans certains départements, les seuls services susceptibles de réaliser des mesures d'investigation prescrites par le juge en matière civil (protection de l'enfance en danger) sont les services relevant du secteur public de la PJJ, qui, à l'exception des mesures d'investigation, ont pourtant abandonné toute compétence en matière de protection de l'enfance en danger...
Le Gouvernement indique avoir pris la mesure de cette difficulté. Ainsi, un projet de décret est actuellement examiné par le Conseil d'Etat afin de permettre à la DPJJ d'assurer le financement de services par dotation globale de financement (le budget déterminé en début d'année est financé indépendamment du niveau d'activité). Rappelons qu'à l'heure actuelle, le paiement intervient mensuellement soit à service fait, avec des délais de paiement de moins d'un mois, soit de manière anticipée lorsqu'une convention de financement par douzième mensuel existe entre l'association concernée et la PJJ. D'après le Gouvernement, ce nouveau mode de tarification devrait permettre de sécuriser tant la programmation des dépenses que les ressources des associations. Ce changement très important de logique de financement sera préparé en concertation avec les fédérations associatives en 2012 et mis en oeuvre à l'occasion de la campagne de tarification 2013 (automne 2012).
En attendant, le projet de loi de finances pour 2012 prévoit une très légère progression des crédits (titre 3) alloués au secteur associatif habilité par rapport à ceux ouverts en loi de finances pour 2011 (+2,44 % s'agissant de l'investigation, +0,18 % s'agissant des autres mesures de milieu ouvert et des placements). Ces montants demeurent en tout état de cause inférieurs à l'activité effectivement exécutée en 2010 .
* 21 Données extraites du PAP « Justice », pages 178 et 186.