C. LES MESURES À ADOPTER PAR PRIORITÉ
Votre commission estime que les sommes considérables absorbées par ces niches fiscales et sociales pourrait être mieux employée et elle en donne deux exemples.
1. La suppression des exonérations sur les heures supplémentaires
Lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, votre commission des affaires sociales a déjà proposé, par voie d'amendement, la suppression des exonérations applicables aux heures supplémentaires (et aux heures complémentaires accomplies par les salariés à temps partiel). Le Sénat a approuvé cette mesure, qui ne devrait cependant pas être retenue dans le texte définitif du fait de l'opposition de l'Assemblée nationale.
Il s'agit pourtant d'une mesure qui aurait un rendement important, de l'ordre de 4,5 milliards d'euros. En admettant que la somme correspondant à l'exonération de cotisations sociales soit affectée à la sécurité sociale pour l'aider à réduire son déficit, le solde (1,4 milliard) serait suffisant pour ramener les crédits de la mission à leur niveau de 2011.
Cette mesure n'aurait vraisemblablement pas de retombées négatives sur l'emploi. L'exonération a, au mieux, un « effet ambigu sur l'emploi », pour reprendre une expression des députés Jean-Pierre Gorges et Jean Mallot 18 ( * ) . Ils indiquent que « le dispositif aurait des effets variables suivant le cycle économique. En phase haute de cycle, il faciliterait la réalisation d'heures de travail, mais en réduisant encore davantage l'appétence des employeurs pour des embauches supplémentaires ; en cas de récession, il pourrait conduire à une réduction plus forte du nombre d'emplois par un recours accru ou maintenu aux heures supplémentaires subventionnées ».
De son côté, le conseil des prélèvements obligatoires (CPO) a publié, en octobre 2010, un rapport, intitulé « Entreprises et ` niches' fiscales et sociales : des dispositifs dérogatoires nombreux », dans lequel il est indiqué que le dispositif présente « une efficacité limitée pour un coût élevé » et que « le gain en PIB [est] en tout état de cause inférieur au coût de la mesure ». La suppression pure et simple du dispositif faisait partie des scénarios envisagés.
La suppression de l'exonération aurait certes un effet négatif sur le pouvoir d'achat des salariés qui effectuent des heures supplémentaires. Votre commission rappelle cependant qu' il existe d'autres moyens de soutenir le pouvoir d'achat des plus modestes , la revalorisation de la prime pour l'emploi par exemple, et que la priorité devrait être le retour à l'emploi de ceux qui en sont aujourd'hui privés.
2. Une incitation à embaucher des jeunes et des seniors
Les jeunes et les seniors rencontrent des difficultés particulières d'accès à l'emploi qui justifient un effort supplémentaire en leur faveur.
Votre commission préconise donc un meilleur ciblage des allègements de cotisations sociales afin d'inciter les employeurs à recruter des salariés appartenant à ces classes d'âge. Une telle mesure serait un puissant facteur de cohésion entre les générations , alors que l'on a trop souvent tendance à considérer qu'un senior au travail prive un jeune de son emploi. Elle favoriserait la transmission des savoir-faire et de la culture d'entreprise. Elle pourrait être mise en oeuvre à coût constant pour les finances publiques en redéployant les dispositifs existants, sans augmenter les prélèvements sur les entreprises.
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Le projet de budget pour le travail et l'emploi n'est, à l'évidence, pas à la hauteur des enjeux : il ne permettra pas de lutter efficacement contre la remontée du chômage ni d'en atténuer les conséquences sur le plan social. En outre, le sous-financement de plusieurs dispositifs conduit à douter de sa sincérité.
Votre commission a donc émis un avis défavorable à l'adoption des crédits du travail et de l'emploi pour 2012. Elle a en revanche émis un avis favorable à l'adoption des articles rattachés 62 à 63 quater , sous réserve de l'adoption des deux amendements de suppression qu'elle vous présente .
* 18 Cf. le rapport d'information Assemblée nationale n° 3615 (XIII e législature), « Evaluer le `travailler plus pour gagner plus'», fait par Jean-Pierre Gorges et Jean Mallot, députés, au nom du comité d'évaluation et de contrôle de l'Assemblée nationale.