D. LES SOUFFRANCES DES ALSACIENS-MOSELLANS DURANT LA SECONDE GUERRE MONDIALE RESTENT ENCORE TROP LARGEMENT IGNORÉES
Les Français originaires d'Alsace et de Moselle ont vécu des situations spécifiques et particulièrement dramatiques pendant la Seconde Guerre mondiale. La reconnaissance par la Nation de ces souffrances particulières constitue une attente des habitants de ces régions marquées par l'expérience de l'occupation étrangère et de l'annexion. Il s'agit d'une exigence morale qui n'est aujourd'hui, soixante-dix ans après les faits, malheureusement pas encore pleinement satisfaite.
1. Le sort terrible des « malgré-nous »
134 000 personnes ont été incorporées de force dans l'armée allemande et 42 000 d'entre elles sont décédées au combat, en captivité ou ont été portées disparues. Les survivants bénéficient du droit à une pension militaire d'invalidité, en application de l'article L. 231 du code des pensions. Le certificat d'incorporé de force dans l'armée allemande confère à son titulaire le droit à la carte du combattant 1939-1945, à la retraite du combattant ainsi qu'à la rente mutualiste. Au 31 décembre 2010, 85 372 certificats avaient été délivrés pour 93 918 demandes. A la suite de l'accord franco-allemand du 31 mars 1981, une indemnité d'un montant de 1 387,29 euros leur a été accordée par la fondation Entente franco-allemande.
2. La ligne Curzon
De nombreux incorporés de force ont été faits prisonniers par l'armée soviétique et détenus dans des camps, notamment celui de Tambow. Un régime spécial d'imputabilité à la détention dans ce camp de certaines infirmités (asthénie, rhumatismes vertébraux, colite) a été instauré par un décret du 18 janvier 1973, étendu en 1980 à l'ensemble des camps situés sur le territoire de l'URSS au 22 juin 1941, c'est-à-dire à l'Est de la ligne Curzon , matérialisée par le fleuve Bug.
Cependant, plusieurs camps étaient situés à l'Ouest de cette limite géographique arbitraire ; les conditions de détention y étaient tout aussi dures. Il existe donc une inégalité de traitement entre les prisonniers, selon qu'ils étaient détenus d'un côté ou de l'autre de la ligne, qui n'a pas lieu d'être. Après avoir systématiquement attiré l'attention sur ce sujet chaque année lors du débat budgétaire, et s'être entendu répondre que des études complémentaires devaient être menées avant qu'une modification du droit ne puisse être réalisée, votre rapporteure appelle le Gouvernement à agir rapidement sur cette question.
Alors que moins d'une centaine de personnes sont encore concernées par cette situation, ce ne serait que faire justice aux derniers survivants de ces camps de reconnaître les souffrances qu'ils ont endurées. Le coût en serait infime. Votre rapporteure espère donc que l'étude du SHD sur le sujet, attendue depuis des mois, sera bientôt remise au secrétaire d'Etat qui, sensibilisé à cette question lors de son audition par votre commission, semble décidé à agir rapidement et à réparer cette injustice.