III. LA REVALORISATION DE LA RETRAITE DU COMBATTANT MAIS L'ABANDON DES AUTRES PROMESSES DE 2007

Le programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » constitue le coeur de la mission budgétaire « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ». C'est en son sein qu'on retrouve les mesures qui symbolisent le droit à réparation dont bénéficient les anciens combattants, selon leur situation personnelle : pensions militaires d'invalidité, soins médicaux gratuits, retraite du combattant, dépenses fiscales, rente mutualiste et actions sociales en faveur du monde combattant 11 ( * ) .

Evolution des crédits de paiement du programme 169

(en millions d'euros)

Action

LFI 2011

PLF 2012

Variation

(en %)

Administration de la dette viagère

2 502,25

2 410,47

- 3,67

Gestion des droits liés aux PMI

198,67

175,23

- 11,8

Solidarité

346,25

345,58

- 0,2

Soutien

13

-

-

Réparation des conséquences sanitaires des essais nucléaires français

10

10

0

Total

3 070,18

2 941,28

- 4,2

Source : projet annuel de performance de la mission annexé au PLF

Représentant près de 93 % des crédits de la mission, ce programme voit son budget baisser de 4,2 % en 2012. C'est la conséquence mécanique du vieillissement et de la disparition progressive des pensionnés, anciens combattants et victimes de guerre bénéficiaires de ce droit à réparation, plus de soixante-dix ans après le début de la Seconde Guerre mondiale et cinquante ans après la fin du conflit algérien. Les nouvelles entrées ne devraient pas compenser ces sorties.

Evolution des effectifs des bénéficiaires des prestations du programme 169

Prestation

2010

2011

2012 1

Variation 2012/2011 (en %)

Pensions militaires d'invalidité

308 940

293 440

278 190

- 5,2

Retraite du combattant

1 339 730

1 291 230

1 235 730

- 4,3

Soins médicaux gratuits

77 026

71 226

67 813

- 4,8

Remboursement des prestations de sécurité sociale

15 894

14 832

13 900

- 6,3

Rente mutualiste

418 164

410 827

404 706

- 1,49

1 Effectifs prévisionnels

Source : projet annuel de performance de la mission annexé au PLF

Malgré une situation budgétaire dégradée, le Gouvernement a pris l'engagement de ne pas porter atteinte aux droits acquis dans la loi de finances pour 2012. Ceux-ci ne se limitent pas seulement aux prestations offertes mais comprennent également d'importantes mesures fiscales, présentées dans le tableau qui suit. Les dépenses sociales liées à la retraite du combattant et à la rente mutualiste sont évaluées par l'inspection générale des finances (IGF) à 140,9 millions d'euros.

Les dépenses fiscales associées à la mission  « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation »

Impôt concerné

Dispositif

Nombre de bénéficiaires 2010 (ménages)

Chiffrage pour 2012 (en millions d'euros)

Impôt sur le revenu

Exonération de la retraite du combattant, des pensions militaires d'invalidité, des retraites mutuelles servies aux anciens combattants et aux victimes de guerre et de l'allocation de reconnaissance servie aux anciens membres des formations supplétives de l'armée française en Algérie (Harkis) et à leurs veuves

Date de création : 1934

2 153 000

200

Demi-part supplémentaire pour les contribuables (et leurs veuves) de plus de 75 ans titulaires de la carte du combattant

Date de création : 1945

468 000

230

Déduction des versements effectués en vue de la retraite mutualiste du combattant

Date de création : 1941

180 000

37

Exonération des indemnités versées aux victimes des essais nucléaires français et à leurs ayants droit

Date de création : 2010

0

å

Droits d'enregistrement et de timbre

Réduction de droits en raison de la qualité du donataire ou de l'héritier (mutilé, etc.)

Date de création : 1959

nd

å

Exonération de droits de mutation pour les successions des victimes d'opérations militaires ou d'actes de terrorisme

Date de création : 1939

nd

nc

Total

2 801 000 1

467 1

1 : approximation compte tenu des données manquantes

å : coût inférieur à 0,5 million d'euros

nd : non déterminé

nc : non chiffrable

Source : projet annuel de performance de la mission annexé au PLF

Le budget prévoit surtout la revalorisation de quatre points de la retraite du combattant au 1 er juillet prochain. C'est une mesure bienvenue qu'il convient de saluer et dont il faudra surveiller la mise en oeuvre car, déjà, les premières coupes budgétaires ont eu lieu : par un amendement déposé lors de l'examen du texte à l'Assemblée nationale, le Gouvernement a amputé les crédits du programme de 14 millions d'euros. Cela ne laisse présager rien de positif pour l'exécution budgétaire.

Néanmoins, des zones d'ombre subsistent et de nombreuses promesses faites en 2007 n'ont pas été tenues : le mécanisme d'indemnisation des essais nucléaires français repose sur des critères tellement stricts qu'il est inopérant, à croire que telle en était l'intention de ses créateurs. Toutes ces observations incitent à porter un regard critique sur le quinquennat qui vient de s'écouler : le traitement des anciens combattants et des victimes de guerre se doit d'être exemplaire ; tel n'est pas entièrement le cas alors même que la déflation démographique aurait pu donner des marges suffisantes pour le faire.

A. LA REVALORISATION DE LA RETRAITE DU COMBATTANT, UN GESTE ATTENDU PAR LES ANCIENS COMBATTANTS

Expression de la reconnaissance de la Nation, la retraite du combattant est versée annuellement aux titulaires de la carte du combattant qui en font la demande, en règle générale à partir de soixante-cinq ans. Non imposable et non réversible, son montant est fixé par rapport à un indice, le point de PMI (pensions militaires d'invalidité), dont la valeur a été portée par un arrêté du 5 septembre dernier de 13,85 à 13,86 euros. Fixée à quarante-quatre points, la retraite du combattant est donc actuellement de 609,4 euros. Elle a connu une revalorisation régulière depuis 2006, date à laquelle elle était à trente-trois points. Avec un nombre de bénéficiaires en baisse de 4,3 % entre 2011 et 2012, la dépense estimée est de 793 millions d'euros en 2011 et 802,5 millions en 2012, en lien avec sa hausse programmée.

Evolution de la retraite du combattant depuis 2005

Date

Nombre de points

Valeur du point

Montant de la retraite du combattant

Effectif concerné (au 1 er janvier de chaque année)

1 er novembre 2005

33

13,13

433,29

1 469 754

1 er juillet 2006

35

13,21

462,35

1 499 211

1 er novembre 2006

13,24

463,40

1 er janvier 2007

37

13,24

489,88

1 487 095

1 er février 2007

13,35

493,95

1 er juillet 2007

13,38

495,06

1 er mars 2008

13,45

497,65

1 443 681

1 er mai 2008

13,50

499,50

1 er juillet 2008

39

13,51

526,89

1 er octobre 2008

13,55

528,45

1 er juillet 2009

41

13,68

560,88

1 393 201

1 er octobre 2009

13,72

562,52

1 er juillet 2010

43

13,79

592,97

1 339 730

1 er octobre 2010

43

13,85

595,55

1 er juillet 2011

44

13,86

609,84

1 291 230 1

1 er juillet 2012

48

13,86

665,28

1 235 730 1

Evolution en nombre/montant

15

0,73

231,99

- 234 024

Evolution en %

45,5 %

5,6 %

53,5 %

- 16,0 %

1 Effectifs prévisionnels au 31 décembre de l'année

Source : secrétariat d'Etat à la défense et aux anciens combattants

Dans le cadre du présent projet de loi de finances, cette prestation sera portée à quarante-huit points en juillet prochain, pour un coût supplémentaire estimé à 18,5 millions d'euros en 2012 et 74 millions d'euros en année pleine. Pourquoi un tel écart ? Parce que cette retraite est versée semestriellement, à terme échu, à la date anniversaire de son bénéficiaire. La première échéance est à cette date et la seconde six mois plus tard. Il en résulte qu'en fixant la date de la revalorisation au 1 er juillet l'impact budgétaire de la mesure ne sera pleinement effectif que sur le budget 2013. Bien qu'évidemment appréciée par les associations d'anciens combattants, elle ne sera pas opérationnelle avant un an et, relevant plutôt de l'effet d'annonce, elle n'est pas, à l'heure actuelle, financée.

De plus, en application de la règle du rapport constant, la valeur du point de PMI évolue proportionnellement au traitement des fonctionnaires. Depuis 2010, celle-ci est liée à l'indice de traitement brut - grille indiciaire de la fonction publique de l'Etat tel que calculé par l'Insee et la direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP). On ne peut que regretter le caractère désavantageux de ce mode de calcul qui donne lieu à des modifications fréquentes (quatre fois en 2008, deux fois en 2009, deux fois en 2010) mais d'une ampleur quasi nulle, bien inférieure aux évolutions de l'indice des prix à la consommation. Les représentants du monde combattant dénoncent depuis plusieurs années son caractère caduc par rapport à l'esprit des lois de 1948 et 1951 qui ont instauré cette règle. Le point de PMI serait, selon les calculs de certaines associations, sous-valorisé à hauteur de 42,38 %. Il est nécessaire de programmer d'ores et déjà un calendrier de rattrapage de ce retard.


* 11 Ces dernières sont présentées ci-après p. 37.

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