B. MOBILISER LES ACTEURS DE L'ORIENTATION
1. L'action encore modeste du Délégué à l'information et à l'orientation
Le maquis de l'orientation est de l'aveu général particulièrement touffu avec un nombre considérable de portails Internet et environ 8 000 sites d'accueil qui dépendent de l'État ou des collectivités territoriales. Les partenaires sociaux qui financent largement la formation professionnelle, notamment l'apprentissage, interviennent également dans ce domaine. Chacun convient qu'il faut clarifier le paysage. Votre rapporteure est cependant réservée sur le service public territorialisé de l'orientation qui est censé voir le jour depuis la promulgation de la loi du 24 novembre 2009 sur l'orientation te la formation professionnelle. Pour les mêmes raisons qui lui font repousser toute régionalisation de l'éducation nationale, elle est hostile à une décentralisation du système d'orientation qui aggraverait les inégalités sociales et territoriales.
La loi précitée devait apporter une clarification du secteur de l'information et de l'orientation. Elle a modifié le statut et les missions de délégué interministériel à l'orientation dans le but de l'ériger en authentique instance de coordination entre quatre ministères : l'éducation nationale, l'enseignement supérieur, l'emploi et la jeunesse. Le renforcement du délégué à l'orientation visait à lever des barrières administratives paralysantes et à assurer un pilotage transversal des outils et des organismes dont l'État dispose. Désormais placé auprès du Premier ministre, le nouveau délégué à l'information et à l'orientation (DIO) est chargé d'une mission stratégique d'évaluation et d'aide à la définition des priorités des politiques d'orientation. Il a également pour tâche d'établir des normes de qualité pour le secteur, ainsi que la mise en place du service dématérialisé d'information et d'orientation sous sa responsabilité.
Il était demandé au DIO de présenter avant le 1 er juillet 2010 un plan de coordination au niveau national et régional de l'action des opérateurs nationaux sous tutelle de l'État en matière d'information et d'orientation. Il devait concrètement examiner les conditions de réalisation du rapprochement, sous la tutelle du Premier ministre, de l'Onisep, du Centre pour le développement de l'information sur la formation permanente (Centre Inffo) et du centre d'information et de documentation jeunesse (CIDJ). Force est de constater à l'automne qu'aucun plan de coordination n'a été préparé, la seule certitude étant que la piste de la fusion entre les trois organismes est écartée.
Auditionné par la commission de la culture et de l'éducation, le 13 octobre 2010, M. Jean-Robert Pitte a rappelé que sa nomination au poste de DIO n'était intervenue que le 23 juin dernier et que sa lettre de mission ne datait que de l'été. Votre rapporteure regrette le délai qui a couru entre la promulgation de la loi et la nomination du DIO, autant de temps perdu alors que l'orientation demeure un point noir du système éducatif. Elle s'inquiète également de la faiblesse des moyens humains et financiers qui lui sont alloués, cinq millions d'euros devant même être prélevés sur le fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) pour financer le service dématérialisé.
La marge de manoeuvre du DIO est donc extrêmement restreinte alors qu'il dépend essentiellement de la bonne volonté des ministères dont il est chargé de coordonner l'action. À vrai dire, ses efforts semblent avoir porté essentiellement sur la seule mise en place d'un service dématérialisé dont on attend qu'il améliore par tous les canaux possibles l'information dont disposent les familles sur les filières de formation et les métiers. Doit être mise en place une adresse unique pour tous quel que soit leur âge, quel que soit leur statut, afin qu'ils trouvent tous les renseignements nécessaires pour éclairer leur choix d'une formation initiale et continue. Certes, résorber ce déficit de connaissance du système éducatif dans les milieux populaires est important. Mais, la question de l'orientation, qui doit être traitée le plus en amont possible, dès le collège, ne se résume pas à un simple manque d'information. Votre rapporteure estime qu'il faut agir beaucoup plus ne profondeur pour modifier des comportements ancrés dans notre pays, qui favorisent la reproduction sociale des inégalités liées aux milieux socioculturels.
En ce qui concerne la labellisation des structures d'information et d'orientation , il reviendra au DIO d'en définir le cahier des charges, mais ses travaux sont suspendus à la publication d'un décret, prévu par la loi de 2009, qui doit en définir le cadre. L'idée centrale serait toutefois de promouvoir le modèle offert par la Cité des métiers de La Villette à Paris où travaillent en concertation une mission locale, Pôle Emploi, le Centre d'information et de documentation pour la jeunesse (CIDJ) pour accueillir tous les publics et les guider dans leur choix de formation. Selon les précisions communiquées à la commission, les labels devraient être délivrés pour trois ans par les comités de coordination régionaux de l'emploi et de la formation professionnelle (CCREFP), sous l'autorité du préfet et du président de région.
Si une meilleure coordination des différents réseaux d'information et d'orientation s'adressant aux jeunes est certainement souhaitable, l'intérêt du recours à une labellisation n'apparaît pas évident de prime abord. Il paraît très difficile d'estimer a priori le potentiel d'attractivité du label pour les organismes d'orientation sur lesquels ne pèsent aucune obligation et qui ne bénéficient d'aucune incitation à solliciter cette reconnaissance. Leur décision d'entrer dans la logique de labellisation dépendra des exigences de qualité de service imposées, du degré de complexité de la procédure d'obtention et de la visibilité du dispositif dans le public. Fondamentalement, cette démarche n'aura de sens que si tout est fait pour que le label soit connu, reconnu et recherché par le public. On peut toutefois légitimement s'interroger sur la capacité de la seule labellisation à rationaliser, simplifier et clarifier le système d'orientation professionnelle au bénéfice des usagers .
Votre rapporteure sera attentive à ce que soient maintenues des normes de qualité identiques sur l'ensemble du territoire. Elle estime également souhaitable une clarification de la place consentie à l'éducation nationale et aux universités dans le dispositif de labellisation. La loi du 24 novembre 2009 ne précise pas en effet comment pourront se coordonner les actions des organismes labellisés et celles des services scolaires et universitaires. Il serait regrettable que le dispositif laisse de côté les responsabilités particulières tant de l'éducation nationale que des universités, auxquelles la loi du 10 août 2007 a confié une nouvelle mission de service public d'orientation et d'insertion professionnelle.