IV. L'ACTION DE LA GENDARMERIE HORS MÉTROPOLE
A. L'ACTION INTERNATIONALE ET EUROPÉENNE DE LA GENDARMERIE
La gendarmerie française est impliquée dans de nombreuses actions de coopération en matière de sécurité avec d'autres pays, en particulier dans le cadre européen.
Avec la police nationale, la gendarmerie nationale participe au réseau des attachés de sécurité intérieure au sein des missions diplomatiques françaises à l'étranger. Il y a actuellement une trentaine de gendarmes français positionnés comme attachés de sécurité intérieure ou attachés de sécurité intérieure adjoints.
La gendarmerie conduit également de nombreuses actions de coopération, notamment en Afrique ou en Europe, à travers des programmes de formation ou d'expertise, grâce en particulier à l'excellence des centres de formation technique.
Ainsi, depuis 2005, la gendarmerie a noué une coopération avec le Qatar, dans le but de soutenir la mise en place de la nouvelle force de sécurité intérieure de cet Etat. Elle a participé à un jumelage en 2006 avec le Maroc et la gendarmerie française a été retenue en 2006 pour conduire le jumelage avec la gendarmerie roumaine dans le cadre du programme Phare de l'Union européenne.
La gendarmerie nationale est également fortement impliquée dans la coopération policière européenne, en particulier à travers la coopération Schengen, la coopération transfrontalière et l'office européen de police Europol.
La gendarmerie française est ainsi directement concernée par la coopération policière Schengen, qui s'exerce par le biais d'instances centrales (bureau SIRENE-France) et locales (les points de contact opérationnels Schengen).
La gendarmerie participe aussi à la coopération policière transfrontalière, avec les services de police et de douane.
Des gendarmes sont présents, avec des policiers et des douaniers dans les centres de coopération policière et douanière (CCPD) situés dans les zones frontalières et qui coopèrent avec les services des pays voisins en matière de lutte contre la criminalité ou l'immigration illégale.
La coopération policière transfrontalière a d'ailleurs été renforcée par le traité de Prüm, signé par la France en mai 2005.
Enfin, la gendarmerie nationale est fortement impliquée dans l'ensemble du dispositif EUROPOL.
La gendarmerie est, en effet, présente, tant au sein de l'Office européen de police, situé à La Haye, qu'au sein de l'unité nationale Europol, qui constitue l'interface entre l'office et les services nationaux.
La Force de gendarmerie européenne, créée à l'initiative de la France, mérite un examen particulier.
LA FORCE DE GENDARMERIE EUROPEENNE I. LA NATURE DE LA FORCE DE GENDARMERIE EUROPEENNE A. L'ORIGINE ET LA VOCATION DE LA FORCE La Force de gendarmerie européenne (FGE ou EUROGENDFOR) a été créée à l'automne 2004, à l'initiative de Mme Michèle Alliot-Marie, alors ministre de la Défense. Les cinq pays participants sont l'Espagne (garde civile), la France (gendarmerie nationale), l'Italie (arme des carabiniers), les Pays-Bas (maréchaussée royale) et le Portugal (garde nationale républicaine), rejoints en 2008 par la Roumanie (jandarmeria). En outre, la Pologne (gendarmerie militaire) est partenaire de la FGE depuis mars 2007. Cette force n'est pas un organisme de l'Union européenne, mais une coopération intergouvernementale menée entre des pays membres de l'Union européenne et destinée en priorité à doter celle-ci d'une capacité à conduire toutes les missions d'une force de police lors d'opérations de gestion de crise. La principale « valeur ajoutée » de la Force de gendarmerie européenne tient au fait qu'il s'agit d'une force « robuste », capable d'agir dans un environnement non stabilisé et de faire face aux différentes situations de maintien de l'ordre et de sécurité publique. Le caractère « militaire » de cette force lui permet d'être utilisée dans un très large spectre de missions et dans l'ensemble de l'arc de la crise, depuis la phase militaire, jusqu'à la phase de stabilisation, avec une aptitude particulière pour les situations intermédiaires entre la guerre et la paix. B. L'ORGANISATION ET LE FINANCEMENT La chaîne de commandement est organisée en trois niveaux : - le comité interministériel de haut niveau (CIMIN), composé des représentants des différents ministères des cinq États participants, agit comme un véritable conseil d'administration, chargé de la direction politico-stratégique de la Force. Toutes les décisions se prennent à l'unanimité ; - l'état-major permanent, multinational, modulable et projetable, installé à Vicenza, en Italie, se compose d'une trentaine d'officiers et de sous-officiers supérieurs, issus des cinq pays participant à la force. La répartition des différents postes fait l'objet d'une rotation égalitaire entre les cinq pays tous les deux ans ; - la Force de gendarmerie européenne dispose d'une capacité initiale de réaction rapide de 800 gendarmes pouvant être déployés sur un théâtre extérieur dans un délai inférieur à 30 jours. L'effectif maximal mis à la disposition de la FGE peut atteindre 2 300 hommes et femmes. Les forces mises à la disposition de la force par les pays participants sont regroupées en IPU (« Integrated Police Units »), comprenant chacune environ cent vingt gendarmes. La gendarmerie française est le plus gros contributeur en personnels de la force. La Force de gendarmerie européenne est financée par des contributions des Etats participants, selon une clé de répartition fondée sur le nombre d'officiers de la nationalité de l'Etat concerné. La France, qui compte sept officiers à l'état-major de la force, contribue à hauteur des 7/30 e . Bien que la FGE ne compte aucun pays anglophone, l'anglais est l'unique langue de travail au sein de la force. La devise de la Force est « Lex paciferat » (« Que la loi pacifie »). II. LES PERSPECTIVES D'AVENIR DE LA FORCE DE GENDARMERIE EUROPEENNE A. LES DIFFICULTES D'ORDRE CULTUREL, ADMINISTRATIF ET JURIDIQUE La force de gendarmerie européenne a permis de créer un certain sentiment d'identité commune. Ainsi, les membres de cette force portent un insigne spécifique tout en gardant leurs uniformes nationaux. Il n'en demeure pas moins que, malgré les points communs qui existent entre les cinq forces de police à statut militaire, il subsiste de grandes différences entre les composantes. Ainsi, la gendarmerie nationale française est la seule à ne pas être contrainte par une limite horaire de travail. Une autre difficulté tient au manque d'interopérabilité du fait de la diversité des matériels, notamment dans les transmissions. La force de gendarmerie européenne repose actuellement sur une simple « déclaration d'intention », signée par les cinq gouvernements. Celle-ci devrait être remplacée par un traité international, signé le 18 octobre 2007, qui devrait être soumis prochainement à une procédure de ratification par les parlements nationaux des pays participants. Ce traité devrait permettre de clarifier un certain nombre de questions d'ordre juridique, comme les droits et obligations du personnel de la Force ou encore le droit applicable dans le cadre d'opérations extérieures. B. L'EXTENSION ÉVENTUELLE À D'AUTRES PAYS La Force de gendarmerie européenne n'est pas un « club fermé », mais elle a vocation à s'élargir à d'autres pays désireux de s'y associer. Trois conditions doivent être réunies pour faire partie de la FGE : - être un pays membre de l'Union européenne ; - disposer d'une force de police à statut militaire de type « gendarmerie » ; - cette force doit exercer au quotidien toutes les missions confiées habituellement à une force de police. L'admission de nouveaux pays, comme membre de plein droit, comme partenaire ou observateur, est soumise à l'acceptation unanime des États participants. Plusieurs États membres ou pays candidats (Pologne, Turquie) ont déjà déposé formellement leur candidature en 2006. La Pologne s'est vue reconnaître en 2007 le statut de pays partenaire de la Force. La Lituanie a posé sa candidature en 2007. En revanche, deux « grands » pays, le Royaume-Uni et l'Allemagne, qui ne disposent pas de force de police à statut militaire de type « gendarmerie », restent à l'écart de cette initiative. C. L'EMPLOI DE LA FORCE DANS LES OPÉRATIONS EXTÉRIEURES La Force de gendarmerie européenne a été déclarée opérationnelle en juillet 2006. Deux exercices, avec des troupes déployées sur le terrain, ont été menés en 2005 et en 2006. Elle a été engagée pour la première fois, à partir de la fin 2007, dans le cadre de la mission de police de l'Union européenne « Althéa » en Bosnie Herzégovine, avec une unité de police intégrée de 215 officiers et gendarmes, dont actuellement 9 gendarmes Français. L'emploi éventuel de la force de gendarmerie européenne pour la mission de police de l'Union européenne au Kosovo a également été évoqué, mais cette idée s'est heurtée à certaines difficultés d'ordre politique en raison des divergences entre les pays membres à propos de la reconnaissance de l'indépendance de cette province. En mai 2009, il a été décidé d'autoriser la participation de la FGE à l'opération de l'OTAN en Afghanistan. |