N° 91
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2009-2010
Enregistré à la Présidence du Sénat le 4 novembre 2009 |
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
Par M. Jean-Jacques JÉGOU,
Sénateur
(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis , président ; M. Yann Gaillard, Mme Nicole Bricq, MM. Jean-Jacques Jégou, Thierry Foucaud, Aymeri de Montesquiou, Joël Bourdin, François Marc, Alain Lambert , vice-présidents ; MM. Philippe Adnot, Jean-Claude Frécon, Mme Fabienne Keller, MM. Michel Sergent, François Trucy , secrétaires ; M. Philippe Marini, rapporteur général ; M. Jean-Paul Alduy, Mme Michèle André, MM. Bernard Angels, Bertrand Auban, Denis Badré, Mme Marie-France Beaufils, MM. Claude Belot, Pierre Bernard-Reymond, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Yvon Collin, Philippe Dallier, Serge Dassault, Jean-Pierre Demerliat, Éric Doligé, André Ferrand, Jean-Pierre Fourcade, Christian Gaudin, Adrien Gouteyron, Charles Guené, Claude Haut, Edmond Hervé, Pierre Jarlier, Yves Krattinger, Gérard Longuet, Roland du Luart, Jean-Pierre Masseret, Marc Massion, Gérard Miquel, Albéric de Montgolfier, François Rebsamen, Jean-Marc Todeschini, Bernard Vera. |
Voir les numéros :
Assemblée nationale ( 13 ème législ.) : |
1976 , 1994 , 1995 et T.A. 358 |
Sénat : 82, 83 et 90 (2009-2010)
AVANT-PROPOS
Mesdames, Messieurs,
La crise économique et financière n'a pas fini d'interpeller nos modes de fonctionnement. Si ces derniers mois, les réflexions ont essentiellement concerné la redéfinition du rôle de l'Etat dans une économie mondialisée et financiarisée, l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 souligne l'urgence de certaines décisions à prendre en matière de protection sociale .
La crise a, en effet, deux mérites. D'une part, elle permet à notre système de sécurité sociale de regagner un tant soit peu l'estime de nos concitoyens en soulignant le rôle d'amortisseur social joué par les dispositifs de protection sociale au sens large. D'autre part, elle met en avant les limites de notre système de financement fondé majoritairement sur les revenus d'activité et donc très sensible aux évolutions de la conjoncture. La faiblesse des recettes, alors que la dynamique de croissance des dépenses reste soutenue, pose des questions de fond aux responsables politiques que nous sommes : n'oublions pas en effet que le déficit d'aujourd'hui résulte également de causes structurelles.
Entre 2009 et 2013, les déficits du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) s'aggraveront au minimum de 134,6 milliards d'euros remettant ainsi en cause la soutenabilité financière du système : cette nouvelle dette sociale, qui s'ajoute à celle restant à porter par la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES), n'est pas sans inquiéter votre rapporteur pour avis. Et ce d'autant plus que le montant des dépenses attendu à moyen terme est amené à croître sensiblement compte tenu du vieillissement de la population.
Cette situation appelle par conséquent, dès 2010, des réponses marquées par l'esprit de responsabilité et de lucidité : l'attentisme serait la pire des solutions.
Votre rapporteur pour avis vous propose ainsi une augmentation en 2010 de 0,15 point de la CRDS afin de permettre à la CADES de reprendre 19,5 milliards d'euros de déficits du régime général et du FSV. Reporter cette décision, pourtant inévitable, n'est ni responsable vis-à-vis des générations futures, ni financièrement opportune.
Mais la question de la dette requiert également de s'interroger sur l'avenir afin de limiter autant que faire se peut les nouveaux déficits .
A court-terme, dans un souci de rendement et d'équité, votre rapporteur pour avis propose le principe de l'annualisation du calcul des allègements généraux de cotisations sociales tout comme celui de l'assujettissement de retraites chapeau aux cotisations sociales. En matière de maîtrise des dépenses, il propose de fixer à 2014 l'achèvement de la convergence tarifaire entre les établissements de santé du secteur public et du secteur privé afin que la réforme du financement des hôpitaux se concrétise. Dans un souci de sincérité, et au regard de la nécessité de ne pas relâcher les efforts à accomplir en matière de maîtrise des dépenses, il souhaite enfin la réintégration des dépenses liées à la grippe A/H1N1 dans la procédure d'alerte déclenchée en cas de dépassement de l'ONDAM.
A moyen terme des décisions structurantes pour notre système de protection sociale devront être prises : la réussite du « rendez-vous » retraite en 2010 appartient à chacun d'entre nous. Il est grand temps selon votre rapporteur pour avis de témoigner de notre capacité collective à décider des évolutions futures de notre système de protection sociale, dont il espère la pérennisation .
Les dépenses de la sécurité sociale, un amortisseur de la crise ? Le discours actuel souligne de manière récurrente le rôle d'amortisseur social et économique joué par la sécurité sociale en cette période de forte dégradation économique. Cette référence nécessite d'être explicitée car d'aucuns ont pu souligner la non inclusion des dépenses d'assurance-chômage dans le périmètre des lois de financement de la sécurité sociale et mettre l'accent sur la faible sensibilité des dépenses du régime général à la conjoncture. En effet, l'évolution des dépenses de santé est avant tout le reflet de tendances structurelles et du niveau de prise en charge publique. De même, les dépenses de retraite sont marquées par une forte inertie du fait de la lenteur du renouvellement de la population de retraités et de la déconnexion entre le niveau des pensions et la conjoncture économique. Enfin, force est de constater que les mesures de relance et de soutien au pouvoir d'achat des ménages relèvent du budget de l'Etat. Dès lors peut-on parler d'amortisseur ? Plusieurs arguments étayent cette position. Certaines dépenses du régime général sont sensibles à la conjoncture : il en va ainsi notamment des allocations logement qui réagissent fortement à l'augmentation du chômage compte tenu de la dégressivité du barème des prestations avec le revenu des ménages. Un surcroît de l'ordre de 0,6 milliard d'euros est prévu en 2010. En outre, les prestations familiales étant sous condition de ressources, la population bénéficiaire croît avec l'augmentation du chômage ou la baisse des revenus. Enfin, il convient de noter que l'organisation de notre système de retraite par répartition permet de maintenir le revenu de 20 % de la population active, tout comme ceux des futurs retraités, qui malgré des périodes de chômage, voient leurs cotisations prises en charge par le fonds de solidarité vieillesse (FSV). Dans ces conditions il paraît légitime de parler d'amortisseur en ce qui concerne la sécurité sociale. Toutefois, la crise de financement de la sécurité sociale en 2009-2010 est davantage liée au jeu des stabilisateurs économiques qui limitent les rentrées fiscales et à la dégradation du marché de l'emploi qui impacte les rendements des cotisations sociales. |