2. La mise sous pression de l'Etat
L'entrée en vigueur progressive du droit au logement opposable au cours de l'année 2008 va profondément réformer l'exercice de la politique du logement. Cette modification du cadre juridique devrait avoir pour conséquence directe de mettre l'Etat « sous pression » dans la mesure où sa responsabilité pourra être mise en cause par les personnes qui n'ont pas reçu de proposition de logement adaptée à leurs besoins et à leur situation ou d'accueil dans une structure d'hébergement. Cette perspective a ainsi conduit le législateur à réviser à la hausse les objectifs d'offre locative sociale nouvelle prévus par le plan de cohésion sociale, faute de quoi les procédures ouvertes par la loi demeureraient incantatoires.
En effet, dans l'état actuel du marché du logement français, les besoins à satisfaire sont immenses, compte tenu du nombre encore très important de ménages souffrant de mauvaises conditions de logement. A ce titre, la mise en oeuvre du DALO suppose, au préalable, d'évaluer le nombre de ménages qui pourront se prévaloir des dispositions de la loi du 5 mars 2007 et qui seront en mesure d'exercer un recours s'ils ne sont toujours pas logés au 1 er décembre 2008. Interrogé par votre rapporteur pour avis chargé des programmes « logement » sur ce point, le ministère du logement et de la ville a précisé que cette évaluation n'avait pas encore été réalisée. Tout en soulignant que certaines estimations laissaient à penser qu'entre 400.000 et 600.000 ménages demandeurs pourraient voir leur demande reconnue prioritaire par les commissions de médiation, le ministère estime que ce chiffre doit être considéré avec précaution dans la mesure où le projet de décret d'application sur les commissions de médiation 44 ( * ) , qui apportera des précisions sur la qualification des demandeurs prioritaires, n'a pas encore été publié.
Le ministère précise cependant que, dans la perspective du projet de loi de finances pour 2009, une enquête devrait être lancée prochainement afin d'identifier les besoins en personnels supplémentaires. Dans le cadre de cette enquête, les directions départementales de l'habitat auront pour mission d'évaluer le nombre de ménages auxquels les dispositifs existants du plan départemental d'action pour le logement des personnes défavorisées (accord collectif avec les bailleurs, droits de réservation du préfet, production d'offre de logements conventionnés dans le parc privé) n'auront pu apporter une solution satisfaisante de logement et qui pourraient en conséquence se tourner vers la commission de médiation pour voir aboutir leur demande.
Le comité de suivi de la mise en oeuvre du droit au logement opposable chiffre quant à lui, dans son premier rapport 45 ( * ) , le nombre de ménages susceptibles d'être en situation de demandeur prioritaire dès le 1 er décembre 2008 à 600.000 , ce qui représente 1,7 million de personnes , dont 40 % pour la région Ile-de-France. Pour mémoire, en 2006, 1.753.582 demandes de logement social étaient enregistrées (373.000 pour l'Ile-de-France), avec néanmoins 556.074 demandeurs déjà logés dans le parc social.
A titre personnel, votre rapporteur pour avis chargé des programmes « logement » s'étonne du fait que le ministère envisage de conduire cette évaluation du nombre de requérants potentiels aussi tardivement au regard de l'échéance du 1 er décembre 2008. Il considère que la mise en oeuvre du DALO passe nécessairement par une évaluation fine du nombre de demandeurs et des besoins en offre nouvelle.
* 44 Actuellement en cours d'examen par le Conseil d'Etat.
* 45 Premier rapport annuel du Comité de suivi de la mise en oeuvre du droit au logement opposable : Franchir les étapes pour rendre effectif le droit au logement opposable - 1 er octobre 2007.